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 maybe it's time (tommy)

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Message(#) Sujet: maybe it's time (tommy) maybe it's time (tommy) EmptyVen 16 Déc 2016 - 19:53



but maybe it's time to heal, maybe it's time to try, maybe it's time to deal with all the pieces in my life. maybe i'll sober up, maybe before i die. maybe i'll finally deal with all the wreckage in my life.

(☆☆☆)


« Que peut-on vous souhaiter pour l'année à venir ? » Cette question, Saul se l'était déjà vu poser à plusieurs reprises depuis qu'il avait investi ce hall en compagnie de sa femme, et elle parvenait chaque fois à le plonger dans un flou artistique dont il avait ensuite le plus grand mal à s'extraire. Parce que cette question, bien plus anodine qu'elle en avait l'air, était suffisamment libre d'interprétation pour que son esprit soit tenté d'évaluer mille et unes possibilités de réponses qui pourtant n'avaient pas toutes leur place dans une conversation échangée entre deux petits fours. Que pouvait-on lui souhaiter ? Assurément beaucoup de choses, si l'on considérait le fait que Saul venait précisément de vivre une année compliquée. Une année partagée entre d'interminables dilemmes, de profondes remises en question et une pression exercée par les autres mais aussi et surtout par lui-même, auxquelles était venu s'ajouter un drame dont il se serait bien passé. Et il en était là aujourd'hui. A hésiter, à se demander s'il y avait seulement la moindre chance pour que la suite soit un peu plus évidente, ou s'il n'avait encore eu qu'un avant-goût de ce qui l'attendait. N'importe qui serait optimiste en ce trente-et-un décembre, et viderait sa coupe de champagne en rêvant à la nouvelle année et à son lot de possibilités. Mais pas Saul. Sans doute parce que l'une des réponses qui lui venaient systématiquement à l'esprit lorsque cette sempiternelle question lui était posée, c'était de se voir offrir le moyen de réparer tout ce qu'il avait entrepris de détruire ces derniers mois. Parce qu'au-delà de la santé et de la protection de ceux qui comptaient le plus à ses yeux, c'était ce qui lui tiendrait le plus à cœur. De se voir doter du courage qui lui avait manqué pendant plus de deux ans, pour enfin briser les liens qui l’enchaînaient désespérément à sa lâcheté et faire ce qu'il aurait sûrement du faire depuis le départ. Voilà ce qu'on pouvait lui souhaiter. D'évoluer en un homme qui n'aurait pas peur d'assumer les conséquences de ses erreurs, mais qui surtout s'emploierait à les réparer. N'était-ce pas finalement ce qu'il aurait déjà répondu l'année dernière ? Sans doute que si. Mais ce soir, plus que jamais, les circonstances lui rappelaient combien de temps il avait pu perdre à jouer cette désolante partition, et probablement le pire rôle qu'il n'ait jamais écrit pour personne. Parce que ce soir serait célébré le début d'une nouvelle année, le tout sur fond d'optimisme alors que la tempête du mois d'octobre restait dans tous les esprits et que chacun contribuerait à rebâtir la Brisbane d'autrefois, et que tout ça n'était pas sans lui rappeler qu'il ne tenait qu'à lui de réagir, enfin. Sur cette pensée, ses yeux retrouvèrent ceux d'Elsie tandis qu'autour d'eux s'était dispersé le petit groupe qui jusqu'ici leur tenait compagnie. Des hommes d'affaires pour la plupart, dont certains avaient bien connu son père, et dont il ne regretterait ni les cravates criardes, ni l'humour au premier degré. Encore légèrement absorbé par ses songes, c'est alors dans un sursaut qu'il accueillit bientôt l'arrivée d'un serveur venu leur proposer des petits-fours. Une frayeur qui lui valut de renverser une partie de sa coupe de champagne sur la veste de son costume, et d'afficher une mine légèrement embêtée. « Je suis navré, Monsieur, voulez-vous que j'emporte votre veste pour la faire nettoyer ? » Le serveur s'inquiéta alors, avec toute l'innocence qui caractérisait les jeunes gens qu'on engageait généralement en tant qu'extras lors de ces grandes occasions, et à qui Saul avait toujours destiné une certaine bienveillance. « Vous n'y êtes pour rien, j'étais perdu dans mes pensées. Ne vous embêtez pas, je vais aller rincer tout ça. » Il reprit, les lèvres étirées en un fin sourire tandis qu'il passa bientôt un bras autour de la taille de sa femme, venant déposer un baiser tout contre sa joue. « Je ne serai pas long. » Et disparaissait bientôt en direction des toilettes, c'est un soupire qu'il poussa au moment d'en pousser la porte. Si ce genre d'escale n'était initialement pas prévue dans son programme, Saul devait bien avouer qu'il ne dépréciait pas d'échapper quelques instants au brouhaha du hall, qui se faisait un peu plus important à mesure que la soirée avançait. S'approchant d'un des lavabos, il retira aussitôt sa veste et récupérera de quoi traiter la tâche. Un mouchoir, qu'il humidifia légèrement avant de l'apposer sur le tissu. A cet instant, toutefois, la porte s'ouvrit et laissa apparaître une silhouette qu'il ne tarderait pas à reconnaître. Relevant les yeux à travers le miroir, c'est en effet le visage de Tommy qu'il distingua. « Eh, bonsoir. » Un large sourire gagna alors à ses lèvres, tandis qu'il se retourna comme pour s'assurer qu'il était bien là. « Ça me fait plaisir de te voir. J'étais pas certain de te croiser ce soir, l'une des dernières fois qu'on s'est vus tu étais rattrapé par le mal du pays et tu envisageais de retourner au canada. » Mais il n'en avait visiblement rien fait, et la seule raison pour laquelle Saul se garda de préciser que cette idée n'était pas pour lui déplaire, c'est parce qu'il était forcé d'envisager le fait que la tempête ait peut être joué un rôle dans cette décision, comme pour beaucoup sans doute. Jugeant alors qu'il valait mieux ne pas prendre le risque d'être maladroit, c'est un nouveau sourire qu'il esquissa par la suite, alors qu'il désigna sa veste. « Regarde un peu ça, on jurerait que je n'ai jamais fait ça de ma vie. » « Ça », à savoir investir des soirées de haut standing, où champagne et autres mousseux plus que familiers coulaient à flot. C'était en réalité une triste habitude, qu'il avait prise à l'époque où son père avait ressenti le besoin d’entraîner son fils dans la plupart de ses réceptions. « J'ai promis à ma femme que je nettoierai cette vilaine tâche en quatrième vitesse, mais j'ai aussi intérêt à m'appliquer s'il lui prend l'envie de m'attendre à la porte pour m'inspecter avant de me laisser rejoindre le hall. » Il émit cette fois un léger rire, dramatisant légèrement sur le coté intransigeant d'Elsie, bien qu'il la soupçonne de déplorer que son mari n'ait rien trouvé de mieux à faire que de s'expatrier aux toilettes quand il y avait tant à faire ce soir. Saul, qui laissa se réinstaller un court silence au moment de reprendre sa tâche, constata toutefois rapidement qu'un léger malaise semblait avoir gagné les lieux. Il jurerait en effet sentir le regard de Tommy sur lui tandis que son interlocuteur n'était pas très loquace, ainsi c'est d'un ton cette fois un peu plus hésitant et après s'être réinstallé face au miroir qu'il reprit. « Tommy ? » Son visage paraissait étonnamment fermé et ses traits plus durs que ce à quoi il l'avait habitué. Que se passait-il alors pour que Tommy semble ce soir si différent ? « Tu ... tu es sûr que ça va ? » Lui n'en était pas certain, et c'était peut être la raison pour laquelle il s'était finalement écarté du lavabo, osant aligner un pas en direction de Tommy, commençant il est vrai à douter d'avoir bien fait de l'ennuyer avec ses problèmes de tâches.


Dernière édition par Saul Masterson le Dim 9 Avr 2017 - 3:37, édité 1 fois
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Abraham Taylor
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maybe it's time (tommy) HSiifW9 Présent
ÂGE : 42 ans (08/12/1981)
SURNOM : il ne répond qu'à Abe, le tester c'est l'adopter
STATUT : eww, commitment
MÉTIER : propriétaire du garage Somerset Hills Motors basé à Kilcoy, capitaine de l'Australian Army à la retraite depuis 2012, employé officieux du ranch familial
LOGEMENT : Kilcoy, banlieue nord de Brisbane, au milieu des chiens, chats, poules, moutons, dindons, sans oublier Hulk Hogan (l'alpaga)
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POSTS : 8224 POINTS : 1620

TW IN RP : exploitation animale, automédication, banalisation de l'alcool, maladie professionnelle, abandon parental, misogynie ordinaire, éducation religieuse (protestantisme)
TW IRL : non-communiqués
GENRE : Je suis un homme
ORIENTATION : J'aime les jolies filles.
PETIT PLUS : troisième des quatre fils Taylor › version humaine du Golden Retriver › toujours débraillé › main d'oeuvre gratos dans le ranch familial › équitation, pêche et boxe comme sainte trinité de la détente › "je sais où je vais, c'est le GPS qui se trompe" › ponctualité approximative › engagé dans l'Australian Army de 2000 à 2012 › père inconnu d'une vingtenaire élevée par un autre › impulsif mais se soigne(ish)
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Message(#) Sujet: Re: maybe it's time (tommy) maybe it's time (tommy) EmptyMar 27 Déc 2016 - 18:55


A aucun moment Tommy ne s'était dit qu'il s'agissait d'une bonne idée ; Le brun avait beau défier fréquemment les lois du raisonnable, il n'en était pas moins conscience du bien et du mal autant que de ce qui pouvait être une bonne ou une mauvaise idée. Et ce qu'il s'apprêtait à faire était assurément une mauvaise idée, en tous points de vue, mais force était de constater que tout cela n'avait jamais arrêté le plus jeune des garçons Warren. Toute cette histoire puait déjà le drame familial à des kilomètres, mais pour la première fois depuis - presque - toujours, le véritable responsable ne s'appellerait ni Tommy, ni Scarlett ... Non, la seule et unique qui risquait de tomber de son piédestal dans les jours à venir était l'une de ces Warren bien sous tous rapports et dont l'on n'entendait habituellement que des louanges. Et quelque part Tommy se retrouvait pris entre deux feux, avide de voir l'une de ses aînées subir la chute qu'elle méritait assurément, et en même temps désireux qu'elle ne soit pas la seule et unique à regretter de s'être levée ce matin-là. Trente-et-un décembre, fin d'année, la conclusion d'un retour aux sources plus contraint et forcé que véritablement souhaité pour Tommy, et l'occasion pour tous les êtres humains dotés de suffisamment de ringardise pour croire encore à la tradition des bonnes résolutions. Tommy n'en avait prévu aucune, autant ne pas se voiler la face, mais tant qu'à trop tirer sur la corde il se disait que mieux valait le faire avant les fatidiques douze coups de minuit ... A minuit pétante, il pourrait toujours prétendre que son ardoise serait effacée.

Il prévoyait d'être déjà loin à minuit, Tommy n'était pas le genre que l'on voyait prendre son pied dans un décor aussi guindé et clinquant que celui de cet hôtel du centre-ville, et qu'on se le dise ses mésaventures personnelles durant la tempête qui servait de toile de fond à cette soirée n'étaient en rien une excuse suffisante pour lui donner envie de rester. Comme si vendre des tableaux aux visuels plus que douteux allait guérir les blessures ou ramener les morts à la vie ... Comme tous les politiques, le maire de cette ville ne savait plus quoi inventer pour se donner l'illusion d'être en maitrise de la situation. Ayant malgré tout payé son dû à l'entrée, l'homme s'étant chargé de récupérer ses cinq dollars probablement pas étonné de la somme dérisoire tandis qu'il détaillait sa tenue vestimentaire des pieds à la tête, Tommy s'était offert le luxe d'attraper au vol un verre de vin sur le plateau qui passait à sa portée. Pas que cela suffise à lui donner le courage dont il pensait devoir se pourvoir, mais cela lui donnait au moins l'illusion de se fondre dans la masse tandis qu'il traversait la foule en jetant furtivement des œillades de gauche à droite. Il cherchait, parmi les silhouettes et les voix hétéroclites qui emplissaient l'espace, presque certain qu'à défaut d'un crâne brun comme il en voyait des dizaines, chercher la crinière rousse de sa victime collatérale serait beaucoup plus efficace pour espérer parvenir à ses fins avant que le carrosse ne redevienne citrouille. Mais il l'avait trouvé finalement. Saul Masterson, le sourire enjôleur vissé au visage, la main délicatement posée sur la taille de sa douce avec autant de certitude que si ses doigts n'allaient pas caresser d'autres courbes une fois la nuit tombée ... Ugh. Tommy n'avait absolument pas envie d'avoir ces images dans la tête.

Ses doigts se resserrant sur son verre de vin, le brun avait cherché à taire son impatience, non sans mal, et attendu le moment propice. Celui qui lui permettrait de faire un maximum de dégâts en prenant un minimum de risque, afin de ne pas découvrir 2017 depuis le fin fond d'une cellule de garde à vue à l'odeur de vomi incrustée dans les murs. Son heure s'était finalement présentée lorsque, bousculé par une convive Saul avait fendu la foule un moment, pour prendre la direction de ce que Tommy supposait être les toilettes pour hommes. Parfait. Abandonnant son verre là où il pouvait le poser, le brun s'était lancé à sa suite, écrasant peut-être un ou deux pieds au passage sans prendre le temps de s'en excuser, et déboulant dans la salle d'eau quelques instants plus tard presque avec impatience. « Eh, bonsoir. » Il n'avait pas répondu, se contentant d'un pas en avant « Ça me fait plaisir de te voir. J'étais pas certain de te croiser ce soir, l'une des dernières fois qu'on s'est vus tu étais rattrapé par le mal du pays et tu envisageais de retourner au Canada. » Un nouveau pas en avant, tandis qu'un rictus agacé passait sur son visage tandis qu'il repensait aux informations que Saul avait obtenu à son sujet à force de conversation, et qui ne le regardaient finalement pas. « Regarde un peu ça, on jurerait que je n'ai jamais fait ça de ma vie. J'ai promis à ma femme que je nettoierai cette vilaine tâche en quatrième vitesse, mais j'ai aussi intérêt à m'appliquer s'il lui prend l'envie de m'attendre à la porte pour m'inspecter avant de me laisser rejoindre le hall. » Malgré lui il avait laissé échapper un rire narquois. Tommy s'était toujours intérieurement un peu moqué de la façon dont Saul parlait de sa femme, et en s'imaginant les défauts qu'il devait lui trouver à voix haute sitôt le masque de l'amant remis bien en place. Imperturbable, calculateur.

Les fourmillements dans ses doigts lui avaient fait serrer les poings, et d'un geste il avait fait comprendre à Saul qu'il pouvait arrêter de parler à tort et à travers comme il semblait ne pas pouvoir s'empêcher de le faire. Tommy avait toujours trouvé Saul bavard, beaucoup trop bavard ... parfois il se demandait comment il parvenait encore à lier ses mensonges, à ne pas déjà s'être trahi tout seul. Il n'avait aucune idée de ce qu'il souhaitait faire, menacer, crier, frapper ... Aucune idée. Mais telle LA goutte qui faisait déborder le vase, le péruvien avait questionné avec naïveté « Tommy ? Tu ... tu es sûr que ça va ? » et l'instant d'après le poing de Tommy s'était abattu sur sa pommette droite, juste assez pour lui faire perdre l'équilibre et terminer de le précipiter sur le carrelage dans un uppercut qui avait endoloris ses phalanges. « Maintenant oui. » En réalité non, mais l'occasion était trop belle pour ne pas faire le malin, et Tommy n'avait jamais su faire preuve de demi-mesure. Profitant du fait que Saul en soit encore à reprendre ses esprits, le brun avait posé un genou à terre tout en massant ses phalanges douloureuses « Très sincèrement, tu méritais ça depuis un moment. » Bien avant que Vidal ne le paye pour quelque chose qu'il ne pensait pas trouver si instructif, Tommy n'avait pas attendu cela pour se dire parfois que ce qu'il manquait à Saul c'était que quelqu'un lui remette les idées en place. « T'as des problèmes au cul, Saul. J'suppose que tu connais Vidal ? » Évidemment qu'il le connaissait. Attrapant Saul par le col et profitant encore quelques instants de l'effet de surprise, il avait repris « Figure-toi qu'il a décidé de s'intéresser à ton entourage, probablement qu'il s'imagine que les pigeons attirent les pigeons. J'te laisse gérer ta femme et ses cornes, mais tu as trois jours pour te débarrasser de Margaret et faire en sorte qu'elle n'ait plus rien à faire avec toi. » Il avait fini par en oublier de préciser ce qui, soudainement, le faisait s'inquiéter du sort de cette pauvre fille dont Saul se servait pour tirer son coup lorsque son officielle n'était pas d'humeur. Peu importe, peut-être n'aurait-il même pas besoin de vendre la mèche à ce sujet.







    - I'm sorry for everything, oh, everything I've done. From the second that I was born it seems I had a loaded gun, and then I shot, shot, shot a hole through everything I loved -

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Message(#) Sujet: Re: maybe it's time (tommy) maybe it's time (tommy) EmptyMar 3 Jan 2017 - 0:01


Si cette tâche n'était pas nécessairement apparue au meilleur moment, l'idée de s'isoler quelques instants de l'agitation qui régnait dans le hall n'était en revanche pas pour déplaire à Saul, qui apprécierait de souffler un petit moment entre deux accolades chaleureuses. Mais bien qu'appréciant la solitude qui lui fut temporairement offerte, l'arrivée pour le moins inattendue de Tommy dans ces toilettes ne fut pas pour lui déplaire, bien au contraire. Il faut dire que les occasions s'étaient faites rares de recroiser le serveur depuis que la tempête était venue redistribuer quelques cartes et que Saul n'avait plus nécessairement eu le temps ni l'opportunité de passer au McTavish. Autrefois, pourtant, il n'était pas rare qu'ils se croisent plusieurs soirs par semaine, Tommy ayant même été son comparse de boisson favoris lorsqu'il pouvait encore se permettre de trinquer à ses cotés. Alors retomber sur lui par le plus grand des hasards, ça ne pouvait que lui faire plaisir et lui rappeler combien le temps de leurs longues conversations autour d'une bière pouvait lui manquer. Un temps qui lui semblait si loin mais qui pourtant ne remontait qu'à quelques mois, et où il lui était encore permis d’espérer, naïvement, que la pile de problèmes sur laquelle il s'était assis ne risquerait pas de s'écrouler un beau jour et d'emporter avec elle tout ce qui comptait le plus à ses yeux. Un temps où il était ce même homme rongé par la culpabilité et les regrets, mais avec un peu plus d'insouciance sans doute. Avouant en tous les cas à Tommy qu'il ne s'attendait pas à le croiser en de pareilles circonstances compte tenu du fait qu'il ait sérieusement envisagé qu'il ait pu se laisser séduire par l'idée de repartir pour le Canada, c'est dans un plus large sourire qu'il évoqua ensuite la tâche qui ornait joyeusement sa veste, s'amusant du fait qu'il ait probablement l'air d'un parfait amateur qui n'avait pas l'habitude de combiner costume et coupe de champagne. Mais alors que son imagination le conduisit à imaginer Elsie l'attendant de pied ferme au pas de la porte pour s'assurer qu'il ne compterait pas regagner le hall tant qu'il n'aurait pas arrangé son état, c'est d'un ton plus hésitant, et légèrement inquiet cette fois, que Saul finit par reprendre la parole. Car face à lui, Tommy demeurait étrangement silencieux. Plus que ça, il se dégageait du brun quelque chose de particulier, d'assez perturbant aussi, qui força Saul à s'approcher de quelques pas. Peut être ne passait-il pas une bonne soirée ? Peut être était-il de ces nostalgiques pour qui passer d'une année à l'autre ne se faisait pas sans fracas ? Pendant un instant, Saul repensa à la femme que le jeune homme avait perdu, et songea que ce genre de choses devaient nous poursuivre sans répit, aussi longtemps que le temps continuerait de s'écouler. Lui, après tout, pouvait-il vraiment prétendre que la mort de son père n'était pas perpétuellement dans un coin de son esprit, et qu'il ne serait pas la première personne à laquelle il penserait lorsque viendrait le moment de trinquer à la nouvelle année ? Ainsi fut-il envahi d'une empathie inévitable, qu'il formula à sa manière. Une empathie qu'il ne tarda cependant pas à regretter, lorsque quelques secondes plus tard, le poing de Tommy s'abattit brusquement sur son visage. Saul, qui perdit aussitôt l'équilibre et vint s'effondrer aux pieds du serveur, resta désorienté quelques instants. Le coup avait été violent, mais c'était surtout le caractère inattendu de ce geste qui le plongeait à présent en pleine incompréhension. Se redressant péniblement et grimaçant lorsqu'il sentit une vive douleur animer sa mâchoire, c'est fébrilement qu'il formula. « … T'es malade ? Qu'est-ce que … » Tout ça lui paraissait si insensé qu'il crut pendant un instant avoir trop bu et avoir fantasmé un coup de poing qui s'avérerait finalement être une chute accidentelle qu'il avait lui-même provoqué. Mais l'écho de la voix de Tommy le tira pour de bon de ses divagations et il comprit, finalement, que tout ça avait bien été intentionnel. Le serveur disait s'être longtemps retenu de lui asséner ce coup de poing, et mêlait à présent Vidal à cette histoire déjà parfaitement incompréhensible. Son esprit, encore embrumé, peinait alors à reconstituer le puzzle que Tommy voulait visiblement lui mettre sous le nez. « Vidal ? Je … toi, comment est-ce que ce tu connais ce nom ? Tu bosses pour lui, c'est ça ? » Il eut alors à peine le temps de terminer sa phrase qu'il sentit les mains du brun se resserrer autour de son col, le soulevant légèrement tandis qu'il eut tout juste la force de se débattre. « Bon sang, je comprends rien. » C'est tout bas qu'il reprit, la respiration saccadée, tandis que les propos de son interlocuteur lui firent cette fois l'effet d'un poignard s'abattant au plus profond de ses entrailles. « J'ai toujours fait ce qu'il m'a dit, je lui ai toujours … donné tout ce qu'il réclamait. » Alors, pourquoi ? Qu'aurait-il du faire de plus pour que Vidal se tienne à leur arrangement ? N'estimait-il pas l'avoir suffisamment humilié en lui extorquant l'équivalent de plusieurs années de salaire ? Ne pensait-il pas que Saul avait largement payé le prix de son secret et de cette tranquillité que Vidal lui avait vendu comme un luxe qu'il lui faudrait monnayer ? Avait-il si peu de scrupules pour enquêter sur ses proches et envoyer des messagers s'assurer qu'il ne perdrait jamais de vue leurs intérêts communs ? Saul, que cette histoire avait déjà ébranlé au plus profond de lui-même, se sentit brusquement envahi d'une rage irrépressible, couplée à une tristesse et à un désespoir qu'il ne put pas non plus réprimer. Mais il y avait pire, et c'est bientôt un détail autrement plus perturbant qui l'interpella. « Margaret ? » Il questionna alors, osant cette fois relever les yeux vers Tommy. Brusquement, tout lui revint très clairement à l'esprit. Les confessions de Tommy au sujet de certains membres de sa famille particulièrement prompts au jugement, celles de Meg lorsque la jeune femme s'était parfois confiée à lui sur ses relations avec ses frères et sœurs, et sur cette nièce qu'il lui arrivait d'accompagner à l'école. Jamais un prénom n'avait été prononcé, jamais le moindre lien n'avait été fait à l'intérieur de son esprit. Mais à présent que tout semblait pointer vers une seule et même direction, Saul réalisait qu'il aurait pu comprendre, qu'il aurait du, et que ça lui aurait peut être évité de se retrouver dans cette situation aujourd'hui. « Tu es … » Son frère ? Il ne pouvait pas encore en être tout à fait certain, mais ça expliquerait un certain nombre de choses, à commencer par le coup de poing que sa joue avait réceptionné quelques instants plus tôt. « J'en savais rien, je te jure que si c'avait été le cas j'aurais ... gardé mes confessions pour moi. » Mais c'était trop tard, n'est-ce pas ? Il avait parlé, il s'était confié sur sa vie sentimentale à celui qui manifestement s'avérait être étroitement lié à cette jeune femme qu'il avait plus d'une fois présentée comme sa « maîtresse », comme cette « autre femme » qu'il rejoignait dès qu'il en avait l'occasion, mais en faveur de qui il n'avait jamais pu se résoudre à trancher. Alors sans doute devait-il s'attendre à ce que Tommy pose sur lui ce regard rempli de dédain, qui en disait plus long sur ce qu'il pouvait penser de lui que tous les mots qu'il aurait pu prononcer. Pour autant, il devait comprendre, c'était trop facile de simplement le juger. « Ne me regarde pas comme ça. Ne me regarde pas comme si tu savais tout alors que tu n'as rien compris. » Il n'avait rien compris, non, sinon il n'aurait pas déboulé dans ces toilettes avec la seule envie de le frapper, sans chercher à se mettre un seul instant à sa place, sans chercher à comprendre que tout puisse ne pas être aussi simple que ça. « Je suis tombé amoureux d'elle. Et elle de moi. Ça n'est pas qu'une histoire de fesses, ça ne l'a jamais été. » Il reprit d'une voix plus calme, refusant cette fois de baisser la tête. Si Tommy estimait qu'il devait avoir honte de ça aussi, qu'il le lui dise. Mais Saul, lui, savait qu'il n'avait jamais été question d'autre chose que d'amour, qu'importe la façon dont cette histoire serait ensuite rapportée, déformée, extrapolée. « Et maintenant ? Tu comptes peut être m'en mettre un autre si je te dis que j'ai pas l'intention de me plier à tes menaces et de la rayer de ma vie ? » Si tel était le cas, qu'il se fasse plaisir. Aimer Margaret était déjà une souffrance en soi, parce que cet amour serait toujours considéré comme l'erreur de parcours d'un homme jusqu'ici sans histoire, et qu'aucun triangle amoureux n'avait par définition jamais rendu qui que ce soit heureux. Saul le savait, et cette fois le jour de payer pour ses erreurs semblait être arrivé.
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Message(#) Sujet: Re: maybe it's time (tommy) maybe it's time (tommy) EmptyDim 29 Jan 2017 - 10:38


C'était presque de la gourmandise, la décision de Tommy de confronter Saul ce soir-là en particulier. Ou presque, car s'il pensait en théorie avoir du temps devant lui, c'était aussi déjà la seconde fois que Vidal utilisait l'un de ses sbires pour venir prendre de ses nouvelles, et plus particulièrement des nouvelles de la mission qu'il lui avait confié ... Tommy se retrouverait bientôt dos au mur, et avec des comptes à rendre, s'il espérer empocher l'argent promis. Encore que tout dépendrait de la façon dont se déroulerait son face à face avec le péruvien, mais qu'on se le dise, si Tommy comptait bien empêcher sa famille de se retrouver dans un quelconque pétrin il espérait aussi beaucoup renflouer son compte en banque. Alors ce serait ce soir, et quelque part cela avait un côté jouissif, de se dire que Saul ne commencerait pas l'année deux mile dix-sept sous les meilleurs hospices. La raison le dissuadant cependant de faire un esclandre publique - principalement parce qu'il ne tenait pas à terminer au poste de police - il avait attendu, tel un chasseur qui guettait sa proie, le moment propice pour coincer Saul et s'occuper de son cas ; Que ce dernier se dirige vers les toilettes était presque trop facile, mais l'occasion était trop belle pour ne pas la saisir. A peine une minute plus tard, et non sans que Saul ne se perde encore en bavardages, ce dernier s'était retrouvé à terre et la main crispée sur sa mâchoire endolorie, Tommy observant avec un brin de satisfaction l'air ahuri sur son visage tandis qu'il bafouillait « … T'es malade ? Qu'est-ce que … Vidal ? Je … toi, comment est-ce que ce tu connais ce nom ? Tu bosses pour lui, c'est ça ? » Attrapant Saul par le col au cas où il douterait encore de son sérieux, il l'avait entendu murmurer « Bon sang, je comprends rien. » et reprendre d'un ton un peu plus sûr de lui « J'ai toujours fait ce qu'il m'a dit, je lui ai toujours … donné tout ce qu'il réclamait. » Une partie du brun avait presque eu pitié de Saul, et de la façon résignée avec laquelle il évoquait le chantage auquel Vidal se livrait avec lui. Tommy se demandait depuis combien de temps ce petit manège durait, et combien le corse avait réussi à lui soutirer au total ... Il ne poserait pas la question, mais l'information le rendait malgré tout curieux. « J'te pensais plus malin que ça ... tu pensais vraiment qu'il finirait par te laisser tranquille ? L'argent appelle l'argent, Saul. » Vidal ne le laisserait jamais tranquille, ou au moins pas tant que sa poule aux œufs d'or aurait encore de l'argent à cracher. Saul n'était simplement pas capable d'admettre que la seule et unique solution pour lui consistait à tout déballer une bonne fois pour toute, et à se débarrasser ainsi du seul moyen de pression que possédait sur lui son maitre chanteur.

Mais Tommy n'avait pas le temps de s'apitoyer sur le sort du quarantenaire, il n'était pas là pour cela, et qu'on se le dise même si cela semblait être l'hôpital se foutant de la charité Tommy se préoccupait du sort des autres Warren bien plus que celui d'un pilier de bar avec lequel il avait échangé quelques verres et des banalités. Et c'était bien des Warren dont il était question, et d'une plus en particulier pour commencer « Margaret ? » Qui d'autre ? Tommy avait du se faire violence de ne pas rétorquer qu'il n'y avait de toute façon bien que Meg, parmi ses sœurs, qui soit assez crédule pour se laisser entraîner dans ce rôle de maitresse à qui on promettait monts et merveilles sans jamais rien en faire ensuite. « Tu es … » Bien, le poing dans la figure lui avait au moins laissé suffisamment de neurones en état de fonctionner pour mettre tout seul les éléments bout à bout. « J'en savais rien, je te jure que si c'avait été le cas j'aurais … gardé mes confessions pour moi. » Pauvre mec, pas une once de remord, pas même une vague tentative pour se justifier ou tenter de lui faire gober que ce n'était pas ce qu'il s'imaginer. Tu es pathétique, Saul. « Ne me regarde pas comme ça. Ne me regarde pas comme si tu savais tout alors que tu n'as rien compris. » Se décidant enfin à lâcher le col de Saul, Tommy s'était remis debout et avait croisé les bras, toisant Saul sans tenir un seul instant compte de sa demande « Je suis tombé amoureux d'elle. Et elle de moi. Ça n'est pas qu'une histoire de fesses, ça ne l'a jamais été. » Cette fois-ci Tommy n'avait pas pu s'empêcher de laisser échapper un rire, narquois, un peu moqueur « Arrête, tu vas me faire pleurer. » Qu'il garde ses salades et ses fausses justifications pour sa sœur, lui n'en avait rien à foutre. « Je me fous totalement de vos histoires, ma sœur pourrait bien choisir de s'envoyer en l'air la moitié de Brisbane ça ne me ferait ni chaud ni froid. Peut-être bien que ça la détendrait un peu. » Il en rajoutait un peu, c'est vrai, les relations entre Tommy et son aînée n'étaient peut-être pas idylliques mais le brun tentait surtout de capter les réactions de Saul , Il se disait amoureux, autant voir s'il en avait véritablement les réactions et s'il tentait de se comporter en homme ... Il y avait un début à tout, après tout.

Retrouvant d'ailleurs un peu d'assurance, malgré sa lèvre enflée et le côté de sa mâchoire qui virait doucement vers une nouvelle gamme de couleurs, Saul lui avait lancé un regard mauvais et sifflé entre ses dents « Et maintenant ? Tu comptes peut être m'en mettre un autre si je te dis que j'ai pas l'intention de me plier à tes menaces et de la rayer de ma vie ? » Comme pour prouver que ce n'était pas l'envie qui lui en manquait, Tommy avait serré à nouveau les poings, et remarqué au passage que la mâchoire de Saul avait endoloris ses phalanges. « Je crois que tu n'as pas bien compris la situation, Saul, je ne te laisse pas le choix. Vidal s'est mis en tête de retrouver Margaret, probablement pour lui soutirer du pognon à elle aussi, et il est hors de question que ma famille se retrouve dans la merde simplement parce que tu réfléchis avec tes couilles. » La situation ne se limitait pas aux déboires de la petite personne de Saul, quoi qu'il en pense, il était temps qu'il se rende compte que ses actes avaient des conséquences sur les autres également. « On va présenter les choses autrement. Soit tu te débarrasses de ma sœur par tes propres moyens, et je te laisse te démerder avec Vidal pour le reste de votre petit arrangement ... soit je me charge d'aller voir ta femme, et je mets fin moi-même à la situation. » Dans les deux cas Saul était perdant, mais Tommy estimait véritablement lui faire une faveur en lui laissant la possibilité de ne perdre que la maitresse, et non pas l'épouse également « Réfléchis bien. Ton mariage, tes enfants ... tu as vraiment envie de mettre tout ça en péril ? Est-ce que tu penses que tu pourras toujours te rabattre sur ma sœur quand je lui raconterais nos petites discussions et qu'elle saura qu'à aucun moment tu n'as envisagé de quitter ta femme ? » Briser le coeur de Margaret au passage, au fond, ce n'était pas ce qui désolait le plus Tommy. Son cœur à lui avait été brisé lorsque Marius et elle avaient tenté de lui subtiliser la prunelle de ses yeux, et de la même façon que Tommy s'était toujours promis que Marius ne l'emporterait pas au paradis il s'était promis de ne pas être le dernier pour se délecter du jour où un malheur tomberait tel un pavé dans une marre sur la petite vie bien rangée de Margaret. « Allez. Dis-toi que c'est comme retirer un pansement, tu tires d'un coup sec et ça ira ... tu conserveras peut-être un semblant de dignité. » Quoi que sa façon de courber l'échine face à Vidal n'avait rien de bien glorieux.







    - I'm sorry for everything, oh, everything I've done. From the second that I was born it seems I had a loaded gun, and then I shot, shot, shot a hole through everything I loved -

:bss::
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Message(#) Sujet: Re: maybe it's time (tommy) maybe it's time (tommy) EmptyDim 12 Fév 2017 - 19:48


Le coup avait été rapide, précis, et suffisamment violent pour l'avoir laissé à terre l'espace de quelques minutes. Les yeux à demi-ouverts, la tête lourde et la mâchoire endolorie, Saul ne comprit pas tout de suite ce qui lui était arrivé. Les deux dernières minutes étaient comme un flou artistique duquel il peinait à s'extirper, et les dernières brides de souvenirs qu'il pouvait se remémorer le ramenaient quelques instants en arrière, alors qu'il rejoignait ces toilettes, sa veste tâchée encore sur le dos. Il revoyait Elsie, et le regard sans équivoque qu'elle lui avait lancé au moment de lui faire comprendre qu'il valait mieux pour lui qu'il aille s'arranger, et ces groupes d'hommes d'affaires amassés tout autour d'eux et dont les rires sans joie l'avaient un instant replongé au cœur des nombreux galas où il avait autrefois si souvent accompagné son père. Il revoyait aussi le moment très précis où il s'était échappé de ce hall bondé et avait soupiré de soulagement à l'idée de pouvoir souffler quelques instants loin de l'agitation qui y régnait. Et puis, peu à peu, d'autres brides lui parvenaient et c'est cette fois le visage de Tommy qui se dessinait sous ses yeux. Un visage fermé, impénétrable, qui laissait deviner un mécontentement loin de ce qu'il lui connaissait habituellement. Un visage qu'il se souvenait avoir longuement observé, l'esprit rempli d'interrogations qu'il avait rêvé de formuler, tout haut, mais qui pour la plupart étaient restées à l'état de pensées. Un visage … qui désormais semblait l'observer à son tour, penché au-dessus de lui tandis que ses yeux commençaient à se réhabituer à la lumière froide des toilettes, et que ses mains tâtaient le carrelage comme par besoin de s'assurer qu'il était bien là, vautré sur ce sol, à se demander ce qui avait pu l'y précipiter. Cette question trouva finalement une réponse quelques instants plus tard, lorsqu'enfin conscient, Saul sentit une vive douleur animer sa mâchoire. Il lui suffit à ce moment-là de faire le lien entre son état, les quelques minutes qu'il avait passé en pleine incompréhension, et la mine toujours contrariée d'un Tommy qui ne semblait pas particulièrement s'inquiéter de le voir s'agiter à même le sol. Là, tout lui revint enfin à l'esprit et Saul crut revivre l'instant très précis où le poing du serveur s'était abattu sur sa joue. Un nouveau flot de questions l'envahit alors. Pourquoi Tommy s'en était-il pris à lui, sans crier garde, alors que leur dernier échange s'était passé sans encombre ? Le problème venait-il de lui, ou bien s'était-il simplement retrouvé au mauvais endroit au mauvais moment, face à un Tommy à bout de nerfs qui avait vu en lui l'exutoire dont il avait eu besoin ? Ce doute demeura présent dans son esprit tandis que Saul reprit suffisamment contenance pour articuler quelques mots, non sans difficulté quand sa mâchoire continuait de le lancer et que face à lui se dressait toujours un mystère qu'il ne parvenait pas à résoudre. Mais Tommy, dans toute sa bonté, éclaira sa lanterne au moment d'évoquer Vidal, un nom que le brun connaissait bien malgré lui et dont la simple pensée suffisait à réveiller ses angoisses. Parce que Vidal n'était pas étranger aux tourments qu'il traversait depuis quelques mois, lui qui demeurait toujours tapis dans l'ombre comme une figure omniprésente, qui menaçait à chaque instant de trahir son secret, de piétiner son existence sous le coup d'un caprice, d'un mauvais jour, ou d'une pulsion. Vidal, c'était ce danger permanent sur lequel il n'avait qu'un maigre contrôle, et qui ne restait jusqu'ici inoffensif que parce que Saul s'était employé à acheter son silence, et non sans concession. Un danger que Saul pensait alors avoir maîtrisé, à grand renfort de détermination … mais en vain. Parce qu'il comprit, brusquement, que mêmes ses plus robustes efforts n'auraient pas pu lui éviter cette fin certainement écrite depuis le départ. Est-ce qu'alors Vidal s'était moqué de lui, quémandant son argent d'une main et préparant son offensive de l'autre ? Est-ce qu'il s'était fait avoir, plus encore que Tommy semblait le laisser entendre ? Tommy, qui l'avait préalablement attrapé par le col et dont la remarque l'amena à froncer doucement les sourcils. « Et t'es bien placé pour le savoir, pas vrai ? » Saul formula, le cœur plus lourd qu'il ne voulait bien se l'avouer à l'idée que le Tommy qu'il avait rencontré autour d'une bière joue aujourd'hui les bourreaux pour le compte d'une crapule. « Combien est-ce qu'il t'a payé pour cette petite visite ? Et le coup de poing ... c'est parce qu'il t'a promis un bonus si tu réussissais une entrée fracassante, c'est ça ? » A cet instant, Saul était plus désemparé qu'il n'était véritablement en colère. Parce qu'il se sentait misérable d'avoir accordé ne serait-ce qu'un peu de sa confiance à Vidal, quand celui-ci devait maintenant probablement rire de lui, son argent encore entre les mains. Mais aussi à Tommy. « Dire que j'ai gobé ton numéro de gentil serveur ... » Il finit par soupirer, doutant brusquement de n'avoir pas été trompé depuis le départ par un Tommy qui peut être avait joué la comédie des mois durant, pour recueillir de quoi s'enrichir sur son dos. Saul ne savait plus si quoi que ce soit avait été vrai, mais ce qu'il savait, en revanche, c'est qu'il n'aurait pas pensé que cet échange pourrait devenir plus perturbant encore. Car à l'évocation de Margaret, il comprit que l'évidence avait été sous ses yeux depuis le départ mais qu'il n'avait rien vu, rien assimilé, rien compris. Pourtant il avait eu des éléments, des indices qui auraient pu l'amener à relier Tommy à la jeune femme, et qui lui auraient peut être évité de faire certaines confessions qu'il regrettait amèrement aujourd'hui. Mais le mal était fait, et à présent il se devait d'affronter ce mur de mépris qui se dressait face à lui. Parce que le regard de Tommy ne trompait pas, il s'était fait sa propre opinion de cette histoire et peu lui importait sans doute que la réalité soit plus complexe qu'en apparences. « Tu la connais si mal. » Saul pesta à la réflexion du grand brun, incapable de rester de marbre quand celui-ci dépeignait Margaret comme ce qu'elle n'était pas. « Margaret est une fille bien. Elle et toi n'avez rien, absolument rien en commun. » Peut être aurait-il tenu un autre discours quelques semaines plus tôt, ou si cette rencontre s'était faite dans d'autres circonstances. Mais face à Tommy qu'il ne reconnaissait pas, il ravalait un dégoût au moins aussi prononcé que celui-ci du serveur à son égard, bien décidé à se rebiffer. Il n'aurait peut être pas l'avantage physiquement, mais il pouvait encore lui tenir tête et laisser entendre qu'il faudrait plus qu'un coup de poing et quelques menaces pour lui faire complètement courber l'échine. Non il ne comptait pas céder à ses tentatives d'intimidation, ou pas sans avoir lutté un minimum. « Ne me fais pas croire que tu te soucies de Margaret, ni de qui que ce soit d'autre que toi-même. Ce n'est pas pour elle que tu es ici, ou parce que tu t'inquiètes qu'on puisse potentiellement lui causer du tort … C'est par cupidité, parce que les mecs comme toi vendraient leur famille pour quelques billets. » Il se fichait d'être injuste. Saul s'était longtemps laissé attendrir par le portrait de ce père célibataire prêt à trimer de longues heures derrière un bar pour s'en sortir, et pour quoi au final ? Constater qu'il n'était rien de plus qu'une fripouille lui aussi. « De nous deux je suis certainement celui qui prend ses intérêts le plus à cœur, et pourtant que je ne suis que le salaud qui la fait miroiter depuis presque trois ans. Toi, tu es son frère. » Ou du moins l'était-il aux yeux de la science ou à ceux de la loi, car Tommy ne lui donnait pas l'impression que le bien-être de Margaret comptait parmi ses priorités. Il voulait qu'il la quitte, qu'il la laisse se défaire de cette relation sans avenir, mais certainement pas parce qu'il lui souhaitait d'être plus heureuse avec un autre, qui lui donnerait enfin la place qu'elle méritait. Tommy se fit alors plus persuasif au moment de lui exposer clairement la situation, et ce qu'il jugeait être sa seule option, et Saul se refusa à le laisser repartir comme il était venu, après avoir récité un texte probablement soufflé de la bouche de Vidal. « Moi, je vois une autre alternative. » Il reprit alors, se redressant du mieux qu'il pouvait comme s'il espérait se donner à son tour un air plus dissuasif. « Je pourrais parler. Du chantage, de ces sommes astronomiques que Vidal m'a convaincu de lui reverser en échange de son silence ... et de cette tentative d'intimidation qui laissera probablement quelques traces. Je pourrais le faire tomber, et toi avec. » C'était à son tour de présenter les choses autrement, et de manière à ce que Tommy ne s'imagine pas que Vidal et lui l'emporteraient au paradis. C'était peut être du bluff, une simple façon de lui laisser craindre des conséquences qui le dissuaderaient de continuer dans cette voie-là … C'était peut être astucieux, ou au contraire l'erreur de trop. « Tu me prends sans doute pour le dernier des crétins, mais je me doute bien que Vidal ne t'a pas choisi par hasard, que s'il t'a approché c'est pour une bonne raison. Alors quoi, t'as un casier ? Est-ce que toi aussi tu gagnes ta croûte en manipulant et en escroquant, les jours où ton boulot de serveur ne paie pas assez ? » Dieu seul savait pourquoi Vidal avait vu en lui la personne la mieux placée pour lui faire passer ce genre de messages, mais Saul connaissait à présent suffisamment le pêcheur pour imaginer le genre d'énergumènes dont il aimait généralement s'entourer. « Tu dis que vous vous êtes renseignés sur mon compte … j'imagine qu'à mon tour je pourrais en apprendre beaucoup sur le tien. Et après ça, peut être qu'on se rendra compte que t'es loin d'être un type irréprochable toi non plus, et que t'aurais peut être mieux fait de balayer devant ta porte. » Si Tommy s'était visiblement fait son opinion sur sa situation, Saul n'était pas décidé à se montrer beaucoup plus tendre sur ce qu'il imaginait maintenant être les dessous de sa petite vie prétendument bien tranquille. Il le trouvait méprisable d'avoir joué sur deux tableaux et d'avoir manipulé son monde pendant des années ? Mais pouvait-il seulement se regarder dans l'un de ces miroirs en se disant qu'il valait beaucoup mieux que lui ? « Je parlerai à ma femme, tout comme je parlerai à Margaret, mais ce ne sera pas parce que Vidal et toi aurez relevé vos manches et cogné comme les deux brutes épaisses que vous êtes. Mais si tu tiens à aller les voir … rapporte-leur donc notre petite discussion. Dis-leur aussi que cette histoire te passait bien au-dessus de la tête avant qu'un escroc te mette la main dessus pour te faire miroiter je ne sais quelle compensation, ou tant que la pauvre fille bêtement menée en bateau n'était qu'une inconnue que tu te fichais bien de défendre ou non. » Il ne l'empêcherait pas de parler si telle était son intention, autant parce qu'il n'en avait pas le pouvoir que parce que cette soirée lui laissait d'ors et déjà craindre des conséquences contre lesquelles il mettrait bien assez d'énergie à lutter. « Moi, je n'irai pas voir ta fille pour lui dire quel homme formidable est son père, et combien il s'avère différent de celui que j'ai pu rencontrer il y a quelques mois et que j'étais prêt à aider. Je n'irai pas lui dire tout ça, parce qu'à agir comme tu le fais elle le découvrira bien assez tôt. » Peut être qu'une partie de lui espérait provoquer quelque chose chez Tommy, quelque chose qui l'inciterait à se remettre lui aussi en question à cet instant très précis où il n'agissait pas non plus avec la raison et l'intelligence qui d'après lui semblaient manquer à Saul. « Je n'ai peut être plus ma dignité pour moi, mais je ne suis pas sûr que ta place soit beaucoup plus enviable que la mienne. » Et tant pis si ça lui donnait envie de lui cogner à nouveau dessus, Saul ne parlait pas seulement pour accabler les autres, même quand ils ne se gênaient pas pour lui marcher dessus.
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Abraham Taylor
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Message(#) Sujet: Re: maybe it's time (tommy) maybe it's time (tommy) EmptyLun 13 Mar 2017 - 0:44



Qu'on se le dise, Tommy ne s'était pas tourné vers Vidal de gaîté de cœur, et avait même parfaitement conscience que si Michael les avait mis en contact ce n'était bien que parce qu'il avait décelé à quel point le brun était désespéré et en quête d'argent. On pouvait vivre seul sur un salaire de barman, mais avec une enfant à charge la tâche était un peu plus difficile, et le devenait encore plus lorsqu'il s'agissait d'une enfant donc on avait été privé pendant deux ans et demi et dont on cherchait maladroitement à négocier le pardon silencieux. Tommy se savait pris dans un cercle vicieux dont il ne savait plus comment se défaire, ayant été privé de Moïra pour s'être sali les mains, mais se salissant à nouveau les mains pour tenter d'arranger les choses avec elle … Au fond les Warren avait probablement raison, leur cadet était irrécupérable. C'était ce qui lui était malgré lui venu à l'esprit tandis que Saul sifflait « Et t'es bien placé pour le savoir, pas vrai ? » entre ses dents meurtries. Sans doute que oui. Mais Tommy ne se faisait pas non plus d'illusion sur la nature humaine et savait que Vidal et lui n'étaient pas les deux seuls hommes à se laisser entraîner par l'appât du gain. « Combien est-ce qu'il t'a payé pour cette petite visite ? Et le coup de poing … c'est parce qu'il t'a promis un bonus si tu réussissais une entrée fracassante, c'est ça ? Dire que j'ai gobé ton numéro de gentil serveur … » Un sourire un brin moqueur s'était dessiné sur le visage de Tommy, tant le dépit de Saul lui inspirait dédain et pitié, presque à égalité. « Ne t'en fais pas, Vidal et moi ça ne remonte pas à aussi loin. Je n'avais aucune autre raison de t'écouter que l'envie d'être diverti et l'espoir d'un pourboire. » Mais on en revenait toujours à l'argent, c'est vrai, Saul n'aurait qu'à lui en tenir rigueur et oublier de balayer devant sa porte concernant le délit d'absence de scrupules. « Vidal ne sait pas que je suis là. J'suppose qu'il avait prévu de s'occuper du cas de ma sœur lui-même, comme du tiens. » Quoi qu'il aurait très vite remarqué que Margaret était bien trop impressionnable pour qu'il n'ait à se fatiguer lui-même, n'importe lequel de ses sbires aurait suffit ensuite. Ce que Tommy soulignait simplement c'était qu'il n'était pas là contre une quelconque somme d'argent, il était là parce que l'envie de mettre son poing dans la figure de Saul de façon totalement gratuite était devenue trop vive pour qu'il continue de s'en retenir.

L'espace d'un instant il s'était presque senti dérouté par la volonté visible de Saul de tenter de justifier ses actes en arborant ses supposés sentiments pour Margaret, non pas qu'il n'y accorde un quelconque crédit mais parce que Tommy ne le pensait pas assez naïf pour s'imaginer que cela puisse être la bonne carte à jouer face à lui. Il se foutait bien de la sincérité ou non de Saul à l'égard de sa sœur, il se foutait bien de ce que sa sœur faisait de sa vie en réalité … Et pourtant le péruvien était encore là, à vociférer des « Tu la connais si mal. » et des « Margaret est une fille bien. Elle et toi n'avez rien, absolument rien en commun. » comme s'il avait véritablement espoir de provoquer dieu sait quel sentiment de honte ou de culpabilité chez Tommy. Au lieu de ça le barbu s'était simplement contenté de hausser vaguement les épaules « Ça, nous sommes bien d'accord. » Car si leur point de vue sur la question était radicalement opposé ils ne pouvaient pas nier en revanche que Margaret et Tommy n'avaient pas d'autres points communs que celui d'avoir eu la malchance de faire partie de la même famille. Pire, de la même fratrie. Perdant patience le barman en étant néanmoins revenu au sujet principal, de la conversation, Saul ne semblant pas réaliser qu'il n'était pas en train de lui demander une faveur mais bien de lui dicter une marche à suivre qu'il n'estimait pas négociable. Qu'un Warren, peu importe lequel, se retrouve victime de chantage mettait en danger tout le reste de la famille ; Tommy avait rencontré Vidal, il en avait suffisamment vu pour savoir que l'argent qu'il ne récolterait pas chez Margaret il pourrait être susceptible de venir le chercher chez Beth, chez Scarlett, peut-être même chez leurs parents. Tant d'endroits où Moïra pourrait un jour se trouver. « Ne me fais pas croire que tu te soucies de Margaret, ni de qui que ce soit d'autre que toi-même. Ce n'est pas pour elle que tu es ici, ou parce que tu t'inquiètes qu'on puisse potentiellement lui causer du tort … C'est par cupidité, parce que les mecs comme toi vendraient leur famille pour quelques billets. De nous deux je suis certainement celui qui prend ses intérêts le plus à cœur, et pourtant je ne suis que le salaud qui la fait miroiter depuis presque trois ans. Toi, tu es son frère. » Certainement pas par choix. C'était sans doute la principale différence entre Saul et lui, Tommy était forcé de faire avec Margaret parce qu'ils partageaient le même sang et appartenaient au même clan, qu'ils le veuillent ou non. Saul fréquentait Margaret par choix, uniquement, mais un choix totalement égoïste malgré le fait qu'il semble l'avoir déjà oublié. « C'est vrai, j'oubliais quel grand seigneur tu étais. J'suis sûr que tu pensais toujours très fort à elle quand tu jouais à la petite famille parfaite au parc le dimanche après-midi, ou alors au lit avec ta femme. Arrête de te raconter des histoires Saul, c'est ni de elle ni de ta femme que tu t'es soucié pendant trois ans, c'est uniquement de toi-même. T'as toujours voulu le beurre et l'argent du beurre, t'es qu'un putain d'égoïste, la seule différence entre toi et moi c'est moi j'ai pas de scrupules à l'admettre. » Bien sûr que Tommy était égoïste, bien sûr qu'il n'agissait jamais autrement que pour servir ses propres intérêts ou ceux des personnes qui avaient de l'importance à ses yeux. Elles n'étaient pas nombreuses, certes, mais là n'était pas le sujet.

La plaisanterie ayant suffisamment duré à son goût et Tommy n'avait pas non plus pour dessein de prendre racine dans ces toilettes ou à cette soirée où les gens comme lui n'étaient probablement pas les bienvenus, il avait tenté un peu excédé de présenter les choses sous un nouvel angle, Saul malheureusement pas décidé à accepter son sort et tentant une nouvelle fois de négocier. Comme s'il était réellement en position de le faire. « Moi je vois une autre alternative. » Tiens donc. « Je pourrais parler. Du chantage, de ces sommes astronomiques que Vidal m'a convaincu de lui verser en échange de son silence … et de cette tentative d'intimidation qui laissera probablement quelques traces. Je pourrais le faire tomber, et toi avec. » Désireux de laisser Saul aller au bout de son raisonnement avant de chercher à l'interrompre, le brun avait gardé le silence et s'était contenté de laisser son interlocuteur continuer à se sentir pousser des ailes en imaginant avoir inventé l'eau chaude et trouvé la solution ultime à ses problèmes. « Tu me prends sans doute pour le dernier des crétins, mais je me doute bien que Vidal ne t'a pas choisi par hasard, que s'il t'a approché c'est pour une bonne raison. Alors quoi, t'as un casier ? Est-ce que toi aussi tu gagnes ta croûte en manipulant et en escroquant, les jours où ton boulot de serveur ne paie pas assez ? » Ils étaient au moins d'accord sur un point, le métier de serveur ne payait assurément pas assez, surtout compte tenu de la fatigue qui incombait d'un boulot qui nécessitait de piétiner toute la journée et de supporter des clients pas toujours aimables, pas toujours polis, pas toujours de bonne foi. « Tu dis que vous vous êtes renseignés sur mon compte … j'imagine qu'à mon tour je pourrais en apprendre beaucoup sur le tien. Et après ça, peut-être qu'on se rendra compte que t'es loin d'être un type irréprochable toi non plus, et que t'aurais peut-être mieux fait de balayer devant ta porte. » Si tenté que Tommy ait eu besoin de preuves supplémentaires des œillères avec lesquelles vivait Saul, il avait désormais une preuve supplémentaire d'à quel point le dramaturge ne se posait pas de questions sur les antécédents ou les intentions des personnes à qui il avait affaire, ou pas avant qu'il ne soit trop tard. Il ne se méfiait pas, ou pas suffisamment, et Tommy en venait presque à se demander comment il était parvenu à entretenir une presque double vie pendant aussi longtemps. « Tu penses peut-être tenir un scoop ? Ta naïveté me désole, Saul. T'as aucun levier avec moi, mon boulot, ma famille, ils savent tous de quoi est fait mon casier judiciaire, t'iras pas bien loin si t'espère me faire chanter là-dessus. » Quelque part Tommy était même surtout surpris que Margaret ne se soit jamais plaint des déboires judiciaires de son frère auprès de Saul, elle qui passait son temps à geindre lorsqu'ils se croisaient dans la maison familiale, il aurait pourtant imaginé que ce soit totalement son style. « Et pour ce qui est de Vidal … Je ne vois absolument pas de quoi tu parles. Pour autant que je sache le hasard a voulu que je vous surprenne toi et ma sœur un jour où tu sortais de chez elle. T'es un habitué de mon bar, n'importe quel collègue pourra le confirmer, et j'ai le sang un peu chaud, n'importe lequel des membres de ma famille pourra le confirmer aussi. » A nouveau Tommy avait haussé les épaules, arborant un air faussement détaché. Autrement dit hors la parole de Saul absolument rien ne liait Vidal à Tommy, et ça ce dernier le savait pertinemment. La parole du frère un peu paumé face à celle du mari infidèle qui claquait son pognon depuis trois ans. Pour sa maîtresse ou pour dieu sait quel maître chanteur, ça, encore une fois Saul n'avait que sa parole et rien d'autre.

Il semblait tarder à se relever, Tommy ne pouvant s'empêcher de se demander si Saul manquait à ce point de fierté ou s'il l'avait véritablement plus étourdi qu'il ne le pensait. Il en doutait malgré tout, les deux coups de poing donnés venaient plus d'une volonté de lui donner une leçon et de le secouer un peu que de véritablement le laisser sur le carreau … Sans quoi inutile de dire que Tommy ne s'en serait pas arrêté à deux coups de poing. « Je parlerai à ma femme, » avait-il finalement repris « tout comme je parlerai à Margaret, mais ce ne sera pas parce que Vidal et toi aurez relevé vos manches et cogné comme deux brutes épaisses que vous êtes. Mais si tu tiens à aller les voir … rapporte-leur donc notre petite discussion. Dis-leur aussi que cette histoire te passait bien au-dessus de la tête avant qu'un escroc te mette la main dessus pour te faire miroiter je ne sais quelle compensation, ou tant que la pauvre fille bêtement menée en bateau n'était qu'une inconnue que tu te fichais bien de défendre ou non. » Malgré lui Tommy avait levé les yeux au ciel, ne sachant pas si faire remarquer à nouveau à Saul qu'il lui prêtait un désir de se faire passer pour respectable bien plus élevé que ne l'était la réalité. Tommy n'était ni respectable ni même un exemple à suivre, chacun des membres de sa famille l'avait suffisamment répété pour que tous soient déjà amplement au courant. « Moi, je n'irai pas voir ta fille pour lui dire quel homme formidable est son père, et combien il s'avère différent de celui que j'ai pu rencontrer il y a quelques mois et que j'étais prêt à aider. Je n'irai pas lui dire tout ça, parce qu'à agir comme tu le fais elle le découvrira bien assez tôt. » Contre toute attente c'était cette fois-ci un rictus mauvais qui s'était dessiné sur les lèvres de Tommy, tandis que faisant de nouveau un pas dans la direction de Saul il se permettait de siffler entre ses dents « Je n'ai pas mêlé tes mômes à cette histoire, alors je te défends d'y mêler ma fille. » Saul s'attaquait là au seul sujet véritablement capable de faire sortir Tommy de ses gonds, et quand bien même il avait lui-même d'innombrables choses à se reprocher dans son rôle de père il refusait formellement que Saul et ses jugements de valeurs totalement biaisés se permettent le moindre commentaire à ce sujet. « Chacun voit midi à sa porte, Saul. J'suis pas du genre à porter la misère des autres sur mes épaules, et si tu avais décidé de sauter n'importe quelle autre fille que ma sœur j'me serais contenté d'avoir vaguement de la peine pour elle … Mais c'est pas le cas, comme tu le sais, c'est bien ma sœur que tu pigeonnes depuis trois ans. » Alors au fond cela ne servait à rien de se demander ce qu'aurait fait Tommy si la situation avait été différente. Elle ne l'était pas, et Tommy n'accordait que peu d'importance au conditionnel et à l'éventuel. « Si tu veux tout savoir, quand Vidal a mis ton nom sur la table j'ai hésité à venir t'en parler directement, pour te mettre en garde. Ça ne se joue pas à grand-chose la vie parfois, tu vois … Si j'avais été moins curieux, si j'avais pas eu cette envie inexplicable de quand même me faire une idée qu'à quoi ressemblait ton autre femme, on aurait eu une discussion totalement différente. » Il avait haussé les épaules, that's life, comme on dit. Au bout du compte si Saul s'en tenait à ce qu'il disait et parlait à Margaret alors Tommy aurait malgré tout eu ce qu'il désirait, et Saul resterait le perdant de cette histoire. Il avait joué pendant trois ans, il fallait bien qu'il perde la main un jour. « Je n'ai peut-être plus ma dignité pour moi, mais je ne suis pas sûr que ta place soit beaucoup plus enviable que la mienne. » Sans doute pas, non. La place de Tommy n'était pas enviable, Tommy lui-même n'était pas satisfait de la tournure qu'avait pris son existence … Mais l'avouer à Saul ? Plutôt avaler sa langue. « Si ça peut t'aider à dormir pour les nuits à venir, crois ce qui te fait plaisir. Mais en ce qui me concerne ma conscience se porte très bien. » Ou en tout cas beaucoup plus que la sienne.







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Message(#) Sujet: Re: maybe it's time (tommy) maybe it's time (tommy) EmptyMar 25 Avr 2017 - 5:20


Ainsi donc, ce semblant de complicité qu'ils avaient vu naître des soirs où ils s'étaient tenus compagnie autour d'une pinte de bière et s'étaient confiés l'un à l'autre comme deux vieux copains, ça n'avait été qu'une illusion. Un leurre. Un levier, finalement, dont Tommy avait pu faire usage au meilleur moment. Une fois enrôlé par Vidal, et fin prêt à se salir les mains pour lui. Saul n'était pas certain que la chronologie des événements ait quoi que ce soit de logique, tout comme il n'était pas certain de vouloir croire Tommy lorsqu'il lui assurait que Vidal et lui ne se connaissaient pas de l'époque où ils étaient encore deux compagnons de boisson, mais il savait néanmoins une chose : le problème Vidal, qu'il pensait avoir réglé à force de patience et de détermination, était loin d'être résolu. Et ce, malgré toute la bonne volonté qu'il avait mise à ployer devant cet homme pourtant méprisable, et les sommes considérables qu'il avait faites passer d'une main à l'autre, pensant qu'à défaut d'avoir pu résister face à l'influence de ce maître-chanteur, il serait au moins parvenu à acheter sa tranquillité, et celle de ses proches. Saul avait beau se remémorer leurs échanges, toutes ces fois où ils s'étaient retrouvés à la dérobée pour discuter de leur petite manège, il ne parvenait pas à s'expliquer qu'il n'ait rien vu venir, rien pressenti. Est-ce qu'il avait à ce point eu envie de croire que cette histoire pourrait un jour se retrouver derrière lui pour s'être convaincu que Vidal s'en tiendrait à leurs arrangements, se faisant gentiment oublier dès lors qu'il aurait obtenu ce qu'il désirait ? Est-ce qu'il était à ce point à coté de la plaque, ou bien est-ce qu'avoir vécu dans un milieu aseptisé où le plus grand danger s'apparentait à décevoir son paternel l'avait rendu si naïf qu'il avait sincèrement cru que cet épisode connaîtrait un dénouement à peu près heureux ? Dans le fond, Tommy était sûrement dans le vrai, sans doute les hommes comme Vidal n'aspiraient-ils à rien d'autre qu'à dépouiller des hommes comme lui, sans intention aucune de les laisser ensuite filer hors de leurs griffes. Et le serveur, qui avait visiblement trouvé en Vidal un précieux collaborateur, n'était sans doute pas le moins bien informé sur son compte, pensa Saul. De quoi écorcher pour de bon l'image que le metteur en scène s'était faite de Tommy, mais pas au point d'affecter le grand brun, il en était certain. « Vu ce que je laissais généralement sur le comptoir avant de partir, ton talent pour l'hypocrisie t'assurera sûrement une jolie reconversion le jour où ton patron décidera de te foutre dehors. » Ce qui arrivera probablement un jour ou l'autre, si Tommy s'entourait d'hommes comme Vidal plutôt que de lui préférer la compagnie de personnes un tant soit peu respectables. « Mais au cas où tu te poserais la question, ça n'est pas une nouvelle proposition de ma part. J'ai déjà fait la bêtise de vouloir te tendre la main une fois, on n'est pas prêts de m'y reprendre. » Il avait été assez idiot pour vouloir s'assurer qu'un homme comme Tommy, avec une enfant à charge, aurait toujours de quoi subvenir à ses besoins et ceux de sa fille, mais son empathie lui revenait aujourd'hui en pleine figure comme un frisbee lancé à toute vitesse. Autant dire qu'à présent, quoi qu'il advienne de Tommy, sa seule désolation serait de savoir que sa fille aurait pâti de ses choix. Son sort à lui, il ne comptait plus s'en soucier. « Dans ce cas, j'essaierai de prendre un air surpris s'il compte aussi m'honorer de sa présence, mais quelque chose me dit que ton petit rapport lui suffira. » Son regard, plein d'un dédain dont il ne comptait plus faire un secret, le détailla un court instant. Oh oui, il imaginait déjà Tommy revenir auprès du corse, un air contenté et une allure fière pour tous indices de la façon dont il avait occupé son réveillon du Nouvel An. Sans doute s'attirerait-il pour de bon la sympathie et la confiance de Vidal quand ce dernier apprendrait qu'il n'avait pas hésité à se remonter les manches. Et pourquoi ? Certainement pas pour défendre l'honneur de sa sœur, ça Saul en était certain. Car cette entrée fracassante, ils ne la devaient certainement pas au fait que Tommy ait voulu agir au nom d'un quelconque amour fraternel. Il n'y avait qu'à l'entendre se méprendre sur le compte de Margaret, confirmant si tant est que ce fut nécessaire que sa sœur et lui n'avaient rien en commun. Non, Saul en était maintenant sûr, il n'y avait bien que ses intérêts personnels qui l'aient véritablement inquiété dans toute cette histoire, ainsi c'était sans doute ce qui lui avait valu de récolter un poing dans la figure, tout à l'heure. Tommy ne s'en défendit même pas, préférant lui rappeler au passage que lui non plus n'avait pas toujours scrupuleusement veillé aux intérêts de Margaret, preuve en était après tout qu'il l'avait délibérément placée dans une situation impossible, en plus d'avoir joué la comédie du bonheur pendant des années. « Égoïste, je sais que je l'ai été. Crois-moi je me le suis suffisamment répété pendant trois ans pour être certain que personne n'en est aujourd'hui plus conscient que moi. Simplement, c'est autrement plus compliqué que ce que tu sembles vouloir comprendre, et tu fais complètement erreur si tu crois que j'ai gagné quoi que ce soit à agir comme je l'ai fait. » La façon dont Tommy imaginait pouvoir dépeindre la vie qu'il avait mené pendant trois ans lui déplaisait, parce que son point de vue était maintenant aussi biaisé que ses interprétations étaient faciles, pour autant Saul devait bien admettre n'avoir songé que bien trop tard aux véritables conséquences de ses actes, lorsqu'il avait choisi de suivre son cœur plutôt que ce que lui hurlait sa raison. Et si tant est que Tommy l'imagine effectivement avoir poursuivi une existence tranquille et dénuée de remords pendant trois ans, alors oui il faisait fausse route. « Et si faire souffrir ta sœur était évidemment inévitable, sache qu'au moins ça n'a jamais été intentionnel. » Mais au fond, à quoi cela rimait-il de s'épuiser à clamer ce qu'un homme comme Tommy, qui avait décidé de ne pas voir plus loin que l’interprétation qu'il s'était faite de toute cette histoire, n'avait sans doute aucune intention d'entendre – et encore moins d'accueillir avec un tant soit peu de compréhension ? Saul était parfaitement résigné à devoir composer avec les jugements du serveur, qui certainement seraient loin d'être les seuls qu'il lui faudrait accepter, et l'un comme l'autre ne semblaient maintenant plus vouloir tourner autour du pot ni perdre leur temps à réécrire une histoire de toute façon bien entamée. Tommy se chargea alors de lui exposer clairement ce qu'il estimait être sa seule alternative dans sa situation, ce que Saul n'entendit pas de cette oreille lorsqu'il se permit de contester ce qu'il interprétait comme un chantage de plus, sinon comme des menaces. Car si Tommy voulait jouer à ce petit jeu, il était prêt à le rejoindre sur le terrain et à lui prouver qu'aussi désespéré soit peut être son cas, il ne se laisserait pas piétiner sans au moins tenter de résister. Car lui aussi détenait en soi quelques informations qu'il imaginait suffisamment délicates pour compromettre Tommy. Des informations qu'il n'envisageait pas d'utiliser avant qu'il ne lui dresse cet avertissement, mais dont il se servirait avec beaucoup moins de scrupules si nécessaire. Mais face aux certitudes du serveur, le metteur en scène fut forcé d'admettre qu'il se mesurait là à un adversaire visiblement habitué à garder l'avantage dans ce genre de situations. « Si ça doit être ma parole contre la tienne, alors ça le sera. Je ne sais pas ce que vaudra encore la mienne lorsque tout le monde connaîtra le pourquoi de notre petite entrevue, mais j'ose penser qu'on accordera toujours plus de crédit à un metteur en scène de bonne famille qui a travaillé dur pour se faire un prénom, même s'il a été infidèle, qu'à une crapule dont les seuls curriculum et casier judiciaire donnent certainement une petite idée d'à quel point il peut être instable. » Soufflant ses mots, Saul se fit la réflexion qu'il se serait probablement maudit de tenir un pareil discours si la situation avait été ne serait-ce qu'un peu différente. Lui, dont la tolérance et la propension à accorder des secondes chances étaient bien connues, ne se reconnaissait pas et déplorait d'avoir à s'abaisser à ce niveau pour espérer contrer les menaces du serveur. « On peut jouer à celui qui fera le plus de tort à l'autre, si vraiment tu y tiens. » Son regard ne quitta pas le sien tandis qu'il chercha à lui faire comprendre, peut être, qu'il n'avait en soi pas plus d'intérêt que lui à se lancer dans cette petite bataille qui ne sacrerait probablement aucun vainqueur, ou du moins pas avant d'avoir causé bien des dégâts. Des dégâts dont Tommy avait sans doute encore moins besoin que lui, Saul en était certain. Une autre chose dont il était également sûr, c'était que les démonstrations de force de Tommy ne seraient pas ce qui le convaincraient de parler à sa femme, pas plus qu'à Meg. Peut être sentait-il un épais nuage prendre place juste au-dessus de sa tête et lui intimer d'agir sans plus tarder, mais il ne comptait pas laisser penser au grand brun qu'il avait ce pouvoir sur lui, celui de lui faire prendre l'une des décisions les plus cruciales de sa vie. Et si Tommy souhaitait le devancer, et bien qu'il le fasse, et en profite pour confier à Meg combien son sort l'aurait certainement indifféré s'il n'avait jamais su qu'elle était la femme avec qui Saul entretenait une liaison, ou s'il n'avait pas été question de Vidal et d'un arrangement dont Saul préférait en soi tout ignorer. Saul qui de son coté se risqua à évoquer la fille de Tommy, peut être parce qu'une partie de lui savait que c'était là le meilleur moyen d'obtenir une réaction de sa part. Pas pour le provoquer, mais plutôt pour déclencher une prise de conscience. La réaction du serveur ne se fit pas attendre, et Saul esquissa un sourire ironique à sa façon de se rapprocher de nouveau de lui, comme si l'intimidation physique était sa seule arme face aux autres. « C'est drôle que tu dises ça, parce que ce sont bien mes mômes que je vais retrouver à peine sorti de cette pièce. Mes mômes qui vont s'inquiéter de me voir avec la joue tuméfiée. Mes mômes que je vais m'efforcer de rassurer, mais qui malgré tous mes efforts finiront sûrement par savoir ce qui s'est exactement passé et pourquoi un type a jugé bon de s'en prendre à leur père. » Parce qu'au même titre qu'il ne pourrait pas cacher à Elsie la raison pour laquelle il se serait éternisé dans ces toilettes, viendrait le jour où ses enfants eux aussi comprendraient, plus ou moins directement, que la tempête qui s'annonçait avait débuté ici, ce soir. « Bien sûr que tu les as impliqués, car bien sûr que ton coup de sang ne sera pas sans conséquences. Alors épargne-moi le couplet du père prêt à mordre, je t'en prie. Je n'irai pas voir ta fille non pas parce que tes simagrées m'intimident, mais parce qu'elle sera un jour en âge de te regarder comme moi je te regarde, et que ça me suffit. » Oui, ça lui suffisait, parce que si Tommy empruntait plus longtemps ce chemin, il y avait fort à parier pour que sa fille ouvre les yeux d'elle-même, un beau jour, tout comme ses enfants seraient un jour en âge de se faire leur propre opinion de sa situation, de la façon dont il avait sacrifié son mariage et des décisions – parfois discutables – qu'il avait prises. C'est parce qu'il savait qu'il lui faudrait un jour les regarder dans les yeux et supporter l'idée d'avoir peut être baissé dans leur estime qu'il savait que pour Tommy, l'issue ne serait guère plus enviable. Finalement, la prochaine remarque du serveur le fit sourire avec un peu plus d'amertume. « C'est vrai, tu m'aurais probablement tapé dans le dos, proposé une bière et on aurait bien ri. Vraiment pas de chance qu'on soit passé à coté de ça, hein. » Tommy semblait presque s'amuser de l'idée que tout se soit peut être joué à pas grand chose, et Saul en aurait sans doute été capable lui aussi si toutefois sa joue ne continuait pas de le lancer, se chargeant de lui rappeler combien cet échange était décidément grotesque, surtout au regard de leurs anciennes discussions. « Quand j'y pense, tu avais mon numéro. Tu aurais simplement pu m'appeler pour mettre tout ça au clair. » Il nota d'ailleurs, repensant un instant au soir où il le lui avait tendu, dans un élan de bonté qu'il regrettait fatalement aujourd'hui. « Mais j'imagine que c'était bien trop tentant de me mettre ton poing dans la figure et de me sortir tes grands discours inspirés. » Qui sait, peut être que les choses ne se seraient pas beaucoup mieux déroulées s'ils avaient d'abord pu se parler, sans coup de poing ni entrée fracassante pour créer cette tension malsaine. Mais sans doute n'aurait-ce pas été plus pathétique qu'à cet instant. « Tu n'effaceras rien, tu sais. A ce qu'on a vécu, elle et moi. La voix de Saul s'éleva finalement de nouveau à travers la petite pièce, tandis qu'il confronta son regard à celui de Tommy. « Peu importe les conséquences de ta petite visite, ou ce qu'il adviendra de mon histoire avec Meg … tout ça, ça a compté et ça comptera toujours. Parce que même rencardé par Vidal et informé sur mon compte, il n'empêche que tout ça, ça arrive trois ans trop tard. » Tout ce qui semblait lui donner l'avantage à cet instant, tout ce qu'il avait soit mûrement préparé soit purement improvisé. Ça avait eu le mérite de remettre certaines choses en perspective, et sans doute que ça l'avait même convaincu pour de bon qu'il ne pouvait plus continuer ainsi. Mais aussi fier sera certainement Tommy de savoir un jour qu'il avait contribué à bouleverser son existence, au moins lui faudrait-il se rappeler que son intervention, même fracassante, n'avait rien changé au fond du problème, ni réécrit quoi que ce soit.
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Abraham Taylor
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Message(#) Sujet: Re: maybe it's time (tommy) maybe it's time (tommy) EmptyJeu 13 Juil 2017 - 21:06


Qu’on ne se méprenne pas, bien que Tommy se soit rendu coupable de juger en partie les choix de vie dont Saul s’était épanché auprès de lui, parce qu’après tout même si le style de vie de Tommy n’était pas sans mériter quelques jugements lui aussi cela ne l’empêchait pas d’avoir certaines valeurs et certaines idées, la compagnie du sud-américain n’en avait pas non plus été une corvée dont le brun s’acquittait uniquement dans l’espoir d’un pourboire et au prétexte que le client avait toujours raison. Saul était un homme intéressant, un peu trop porté par ses émotions et incapable d’agir avec raison, sans quoi il ne se retrouverait pas dans la situation qui était actuellement la sienne, mais intéressant malgré tout. Lorsqu’il avait vociféré « Vu ce que je laissais généralement sur le comptoir avant de partir, ton talent pour l’hypocrisie t’assurera sûrement une jolie reconversion le jour où ton patron décidera de te foutre dehors. » pourtant Tommy s’était contenté de laisser couler, sachant que tenter d’argumenter à ce sujet maintenant que la situation était ce qu’elle était n’aurait plus grand intérêt, outre que de leur faire perdre du temps et de la salive. « Mais au cas où tu te poserais la question, ça n’est pas une nouvelle proposition de ma part. J’ai déjà fait la bêtise de vouloir te tendre la main une fois, on n’est pas prêt de m’y reprendre. » Drôle d’idée que cette impression de tendre la main à quelqu’un en lui laissant un pourboire, même pour quelqu’un d’aussi peu regardant que Tommy. « Je n’ai pas besoin que tu me fasse l’aumône, Saul. » s’était de ce fait contenté de faire remarquer le barman, non sans un brin d’acidité. Qu’il se contente désormais de garder son pognon pour la poche de Vidal, un fait dont il semblait déjà être coutumier et qui ne devrait pas trop chambouler ses habitudes d’homme au portefeuille bien plus garni que ses scrupules. « Dans ce cas, j’essaierai de prendre un air surpris s’il compte aussi m’honorer de sa présence, mais quelque chose me dit que ton petit rapport lui suffira. » Tant de naïveté, encore. Assez pour tirer à Tommy un éclat de rire cynique. « Le bonhomme te considère comme sa poule aux œufs d’or personnelle, il continuera de te presser comme un citron tant que tu le laisseras faire. Te trompes pas de coupable, c’est toi qui t’es mis tout seul dans cette situation. » Et qui y avait également mis ses proches, par la même occasion, Meg parmi les autres, dommages collatéraux des choix de cet homme qui espérait conserver éternellement le beurre et l’argent du beurre et qui un jour se frotterait à bien plus coriace que l’unique poing de Tommy contre son visage apprêté. Il ne pourrait plus dire qu’on ne l’avait pas mis en garde, désormais.

Mais visiblement dérangé à l’idée de passer pour une personne sans scrupules – que Tommy l’estimait pourtant être, que l’idée lui plaise ou non – voilà Saul qui tentait désormais de nuancer la situation et de lui faire croire qu’il était lui aussi victime de cette situation. Mais le rôle de la victime, bien que certainement plus plaisant à assumer, n’allait pas vraiment au teint du concerné malgré ses tentatives pour faire croire le contraire « Égoïste, je sais que je l’ai été. Crois-moi je me le suis suffisamment répété pendant trois ans pour être certain que personne n’en est aujourd’hui plus conscient que moi. Simplement, c’est autrement plus compliqué que ce que tu sembles vouloir comprendre, et tu fais complètement erreur si tu crois que j’ai gagné quoi que ce soit à agir comme je l’ai fait. » Bien sûr, deux femmes à ses pieds pendant trois années entières et de quoi probablement gonfler son égo de mal Alpha, Saul avait absolument tout de l’homme à plaindre. Non. « Et si faire souffrir ta sœur était évidemment inévitable, sache qu’au moins ça n’a jamais été intentionnel. » Il ne manquait vraiment pas de toupet, c’était au moins quelque chose que l’on pouvait sans nul doute lui reconnaître. « C’est devenu intentionnel à la minute où tu as pris conscience que ce serait inévitable. Tu savais très bien ce que tu faisais et tu savais très bien que ça finirait mal, mais tu as préféré penser à tes intérêts plutôt qu’aux siens. Tu peux te raconter toutes les histoires à dormir debout que tu veux, ça ne te rend pas moins coupable. » Mais soit, c’était probablement plus facile pour lui de dormir la nuit en se persuadant que Vidal et Tommy étaient les grands méchants de cette histoire, et lui une pauvre victime à qui on ne pouvait pas reprocher de faire le bonheur de deux femmes à la fois. Il pouvait bien cracher son mépris au visage de Tommy en se persuadant d’être plus respectable que lui, il n’en demeurait pas moins que Saul se voilait la face, et rien d’autre. « Si ça doit être ma parole contre la tienne, alors ça le sera. Je ne sais pas ce que vaudra encore la mienne lorsque tout le monde connaîtra le pourquoi de notre petite entrevue, mais j’ose penser qu’on accordera toujours plus de crédit à un metteur en scène de bonne famille qui a travaillé dur pour se faire un prénom, même s’il a été infidèle, qu’à une crapule dont les seuls curriculum et casier judiciaire donnent certainement une petite idée d’à quel point il peut être instable. On peut jouer à celui qui fera le plus de tort à l’autre, si vraiment tu y tiens. » Se toisant l’un et l’autre avec un dédain assumé, Saul et Tommy offraient à leur posture l’opposition parfaite et reflétant à merveille ce qu’ils s’inspiraient l’un à l’autre désormais. Utilisant l’attaque comme moyen de défense, le péruvien se cachait derrière son masque de bonhomme respectable avec l’apparente persuasion qu’elle le sauverait de tout, y compris de ce qui l’attendait. « Tu feras gaffe à ne pas t’étouffer avec ton ego, surtout. » Le ton volontairement moqueur Tommy avait enfoncé les mains dans les poches de son jean, lui aussi illustration criante du gouffre existant entre lui et Saul et son costume taillé avec soin. « Tu sais ce qu’il y a de bien, avec le bas de l’échelle ? On ne peut pas tomber plus bas. La chute sera beaucoup plus douloureuse pour toi, quand on t’aura fait descendre de ton piédestal … Y’a tout un monde qui vit en dehors de ta petite bulle d’égoïste, tu verras, on s’y fait. » De gré ou de force, mais on s’y faisait.

L’entrevue aurait pu en rester là, Tommy tournant déjà les talons et n’ayant plus rien à dire que Saul ne sache pas déjà. Pourtant plutôt que d’abréger ses propres souffrances voilà l’époux infidèle qui utilisait une nouvelle cartouche et appuyant sur le seul bouton auquel Tommy ne laissait personne toucher : sa fille. Il avait belle allure, le respectable homme de spectacle, maintenant qu’il proférait des menaces sur un sujet que son propre rôle de père aurait dû suffire à lui savoir intouchable. « C’est drôle que tu dises ça, parce que ce sont bien mes mômes que je vais retrouver à peine sorti de cette pièce. Mes mômes qui vont s’inquiéter de me voir avec la joue tuméfiée. Mes mômes que je vais m’efforcer de rassurer, mais qui malgré tous mes efforts finiront sûrement par savoir ce qui s’est exactement passé et pourquoi un type a jugé bon de s’en prendre à leur père. » Le refrain de la victime, à nouveau, usé jusqu’à la et sans que Saul ne semble en avoir le moins du monde honte. « Bien sûr que tu les as impliqués, car bien sûr que ton coup de sang ne sera pas sans conséquences. Alors épargne-moi le couplet du père prêt à mordre, je t’en prie. Je n’irai pas voir ta fille non pas parce que tes simagrées m’intimident, mais parce qu’elle sera un jour en âge de te regarder comme moi je te regarde, et ça me suffit. » Comme l’homme qui avait cassé la figure de celui qui par son égoïsme mettait en danger sa famille, elle y compris ? Tommy pourrait vivre avec cette perspective lui aussi, qu’on se le dise. « Si tu n’as pas les couilles d’assumer tes actes auprès de tes enfants ça te regarde, Saul. N’essaye pas de m’en rendre responsable, c’est toi qui a merdé, c’est toi qui a pris le risque de les décevoir pour une histoire de cul. » Ce n’était pas un bleu sur le visage de leur père qui foutrait en l’air ses enfants, ce serait de découvrir que leur père n’était pas l’homme respectable pour lequel il essayait de se faire passer auprès d’eux. « J’suis certainement pas le père de l’année, mais aucune de mes décisions n’est prise sans faire primer son bien-être à elle avant le mien, alors garde tes conseils pour le jour où tu pourras en dire autant. » Et que Saul essaye de contester s’il le souhaite, il aurait du mal à trouver une justification plausible au rapport entre le bien être de ses mômes et le fait de tromper allègrement leur mère avec la première nana crédule venue.

Presque avec ironie, et cette fois-ci sans intention de perdre son temps plus longtemps avec les simagrées et les états-d’âme de Saul, Tommy s’était contenté de pointer du doigt l’ironie d’une situation qui aurait pu être totalement autre si Saul n’avait pas eu le malheur de s’enticher de Meg plutôt que de n’importe quelle autre greluche de Brisbane. « C’est vrai, tu m’aurais probablement tapé dans le dos, proposé une bière et on aurait bien ri. Vraiment pas de chance qu’on soit passé à côté de ça, hein. Quand j’y pense, tu avais mon numéro. Tu aurais simplement pu m’appeler pour mettre tout ça au clair. Mais j’imagine que c’était bien trop tentant de me mettre ton poing dans la figure et de me sortir tes grands discours inspirés. » Un fin sourire étirant le visage de Tommy d’un air moqueur, il avait secoué la tête presque avec délectation « Tu imagines bien. » L’opportunité était trop tentante, et Tommy n’était pas le genre à s’embarrasser d’utiliser ses poings simplement dans l’espoir de paraître plus gentleman. Il avait des poings, il s’en servait, fin de l’histoire. « Tu n’effaceras rien, tu sais. A ce qu’on a vécu, elle et moi. Peu importe les conséquences de ta petite visite, ou ce qu’il adviendra de mon histoire avec Meg … tout ça, ça a compté et ça comptera toujours. Parce que même rencardé par Vidal et informé sur mon compte, il n’empêche que tout ça, ça arrive trois ans trop tard. » Balayant la pièce du regard comme à la recherche d’un public dont il n’aurait pas remarqué la présence et qui expliquerait la volonté soudaine de Saul d’essayer encore de se faire passer pour un grand seigneur romantique quand tous les deux savaient bien qu’il ne l’était pas, Tommy n’avait trouvé que le silence et la solitude de l’homme à la mâchoire tuméfiée, dont le pathétique de la situation aurait presque eu de quoi lui tirer un brin de pitié. « Ça, mon petit Saul, c’est le cadet de mes soucis. » Et ce qu’il adviendrait du concerné maintenant que Tommy avait passé la porte et définitivement quitté la pièce, ça aussi, c’était le cadet de ses soucis.







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