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 The night we met | Angie

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Message(#) Sujet: The night we met | Angie The night we met | Angie EmptyVen 21 Avr 2017 - 0:11


the night we met
Haunted by the ghost of you
Angelina ✧ Phoenix
Affalé sur le canapé, les yeux fixés sur le plafond bourré de tâches, je fumais clope sur clope pour me donner l’impression d’être méchamment occupé. Je sais pas depuis combien de temps j’avais pas fermé les yeux. Indubitablement je devais avoir une bonne gueule de déterré. Je pensais que ça allait mieux, que je remontais la pente, et en façade c’était probablement le cas. Mais le soir, foutre Dieu, le soir quand je me retrouvais seul avec ma tête, je pouvais pas m’empêcher de penser à Paige et à ce qu’on avait vécu et à ce que j’aurais dû faire pour la sauver. Les souvenirs me bombardaient dans tous les sens ; notre première rencontre, moi devant la porte du bar et elle derrière le comptoir, à servir verres sur verres comme une virtuose de la mixologie et à remettre les pénibles à leur place sans équivoque. Bon sang elle était tellement belle, avec son assurance déroutante, ses longs cheveux bruns, ses yeux clairs qui pétillaient d’esprit, sa bouche incroyablement sexy… et alors je revivais tout, ses baisers dans le cou pendant les balades à moto, sa voix déraillée quand elle chantait sous la douche, les chasses au trésor avec Leila, les fous rires, son odeur, ses crêpes sans aucun gout qu’elle s’acharnait à faire et que j’adorais manger quand même, la douceur de sa peau contre la mienne et alors j’avais une sensation de réconfort à l’intérieur, comme si rien ne s’était passé, comme si elle était toujours là avec moi, et alors c’était un sacré miracle, comme soulagement. C’était comme si tout le poids s’enlevait d’un coup. Et puis alors, soudain, le rêve basculait et je la revoyais allongée sur le sol, ses yeux terrifiés fixés sur moi et sa main appuyée sur son abdomen ensanglanté et sa respiration saccadée quand elle me disait qu’elle avait peur, qu’elle voulait rentrer à la maison et mon incapacité à faire quoi que ce soit d’utile pour la sauver et ça faisait comme une torture incessante et chaque fois je me retrouvais avec des putains de larmes de gosse qui brûlent la gorge et je comprenais pas comment j’étais sensé continuer de vivre après ça.
 
Bon sang qu’est-ce qu’elle me manquait. La vie sans Paige, c’était pas vraiment la vie. J’avais un trop plein d’amour que je pouvais plus extérioriser et la rage j’y arrivais pas non plus et ça me bouffait de l’intérieur. Robin répétait que je devais me laisser le temps, que les rêves aidaient à « exorciser les peurs » et qu’à chaque « reflux de vagues émotionnelles » l’intensité allait baisser pour arriver à « l’acceptation ». Ou une connerie dans le genre. Putain moi c’était pas des vagues c’était des foutus tsunamis et j’avais l’impression de me noyer chaque jour un peu plus. J’acceptais rien du tout. Accepter, tourner la page, ça sonnait méchamment comme une foutue trahison à mes oreilles. Et je voulais pas d’une réalité sans Paige où tout me rappelait à quel point elle était pas là, à quel point elle existe plus. Et elle était tellement pas là qu’elle était partout. J’avais même l’impression de l’entendre. Je devenais complètement fou. La biture aidait pas. Mais c’était la seule chose qui me permettait de déconnecter assez pour continuer de gérer un minimum mes responsabilités de père et d’humain.
                                                                        
J’ai avalé la fin de mon verre de Winston. Je sais plus où j’en étais, j’avais perdu le compte. J’ai regardé autour de moi, je supportais plus cet appartement de merde qui me rappelait chaque jour à la réalité. Il fallait que je me barre d’ici. Alors c’est ce que j’ai fait. J’ai attrapé mon portefeuille, mon hoodie, et je me suis cassé.
 
Je sais pas combien de temps j’ai erré comme ça, les mains dans les poches, les yeux fixés sur le sol, la tête a des milliers d’années lumières d’ici. Des éclats de voix m’ont happé dans la réalité et j’ai tourné la tête. C’était un bar. J’ai pensé ironiquement que Robin y aura surement vu un signe du destin. Je suis rentré dedans. J’ai ouvert mon portefeuille pour voir ce qu’il en était et j’ai réalisé que j’aurais à peine de quoi me faire un shot. J’irais pas loin. Je me suis quand même frayé un chemin jusqu’au bar bondé de monde pour passer commande. J’ai regardé la barmaid jongler habilement avec les verres et les bouteilles et je me suis dis que c’était drôlement classieux, comme talent. Ensuite j’ai relevé les yeux vers elle et alors là ma parole, mon cœur il a fait demi-tour. Parce que ce visage, je le connaissais par cœur.
 
-  Paige ? 
 
J'en croyais pas mes yeux mais pourtant elle était là, juste en face de moi, avec toute son assurance et toute sa beauté. Tout se mélangeait tellement là-dedans que ça me coupait la gorge et les jambes de l’intérieur et j’ai dû appuyer mes paumes contre le comptoir de toute mes forces pour pas perdre l’équilibre. Les émotions et les pensées se bousculaient et j’arrivais pas à en saisir une seule. Je sais pas combien de temps je suis resté à la regarder comme ça, comme un crétin désemparé, mais ensuite un type m’a bousculé et je l’ai perdu du regard. J’ai entendu comme un bruit sourd, et je suis presque sûr qu’il venait de l’intérieur de ma tête. J’ai fermé les yeux et quand je les ai rouverts, Paige avait disparue. A sa place, une inconnue me regardait curieusement. Je me suis passé les mains sur le visage. Putain. Je comprenais plus rien. J’ai regardé autour de moi, comme pour la retrouver. Mais il fallait que je me rende à l’évidence : j’étais en train de devenir complètement taré.
 
Putain. Je suis désolé.  
         
J’ai baragouiné, la gorge vachement serrée et les yeux mouillés comme un foutu paumé. J’ai commencé à reculer et j’ai tourné les talons et puis je suis sortie en trombe. J’étais tellement déchiré, j’ai même pas réalisé que mon portefeuille était resté sur le comptoir avec tous mes papiers à l’intérieur. J’avais l’impression d’avancer dans un brouillard, que le sol arrêtait pas de tourner. C’est un miracle que je me sois pas cassé la gueule en chemin. Alors je me suis laissé glisser le long du mur, j’ai appuyé ma tête contre la pierre et j’ai fermé les yeux pour essayer de me calmer, de reprendre mon souffle, et surtout mes putains d’esprits.


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Message(#) Sujet: Re: The night we met | Angie The night we met | Angie EmptyVen 21 Avr 2017 - 16:12


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Angelina ✧ Phoenix
Mojito après cosmo, cosmo après sex on the beach : il était clair que tous ces noms de cocktails étaient beaucoup plus exotique que la vie que menait actuellement Angelina Gilmore. Son quotidien se résumait au Canvas, à son fils et aux petits pots. Sa vie de croqueuse d’homme délurée était loin derrière elle et il lui semblait que ça faisait une éternité qu’elle ne s’était pas comporté comme une femme. Celle qu’on traite de pute et d’allumeuse au lycée, semblable à une criminelle repentie, s’était rachetée une virginité teintée d’ironie. Alors qu’il y a quelques années encore sa priorité était de ne pas en avoir, le slogan « yolo » qui avait toujours été le sien s’était évaporé du jour au lendemain laissant place à des responsabilités et des couches-culottes. Elle aurait aimé se dire que c’était par choix, qu’elle avait voulu être mère et que son fils était la plus belle chose qui lui soit arrivé. C’était d’ailleurs ce qu’elle se disait dans les bon jours mais la réalité était toute autre : une grossesse trop entamée pour être avortée, une trahison sanglante, une fuite en avant vers l’océan pacifique et les palmiers d’Hawaï. Tout ça n’avait rien d’excitant ni de glorieux d’ailleurs. Puis il y avait eu le retour à Brisbane : d’autres palmiers, les mêmes problèmes. Angelina avait récupéré sa vie d’avant, un gosse sous le bras et les avantages de la vie de jeune célibataire en moins. Bien sûr, elle avait des bisous et des câlins tout doux tous les jours. Elle avait aussi une tache de purée de petits pois sur son t-shirt et un joli bleu sur la pommette car son fils lui avait mis un coup de tête. De manière non intentionnelle évidemment. Enfin elle l’espérait. Elle passait désormais ses journées à essuyer des biberons, et ses nuits à essuyer des verres. Son shift serait bientôt fini. Une vingtaine de minutes supplémentaires à tenir. Elle passait le temps en guettant les clients qui rentraient dans le bar, à l’affut d’un visage familier. Ou au contraire celui de la nouveauté. Elle avait besoin de sentir qu’elle était encore vivante, que la vie lui réservait d’autres aventures. Elle avait besoin d’entendre que sa vie ne s’était pas arrêté le jour où elle avait donné la vie : elle refusait d’être de celles qui vivaient à travers leurs enfants et dont les joies se résumaient à la percée de la première dent ou le premier pipi sur le pot. Angelina n’était pas de ce fer-là.

Lorsqu’il pénétra dans le bar, elle était de dos, occupée à encaisser trois pintes de bières. Néanmoins dès qu’elle se retourna pour rendre la monnaie à son client, elle le vit. Ce n’était peut-être pas le visage de la nouveauté mais il avait effectivement quelque chose de familier. Il s’asseya en face d’elle sans la voir, pendant qu’elle essuyait des verres. « Je vous sers quelque chose ? »  Angelina ne força même pas un sourire, elle savait qu’il ne la regarderait pas. Beaucoup de gens se trainaient jusqu’ici pour oublier. Certains soirs ils étaient d’ailleurs plus nombreux que ceux qui venaient ici pour profiter. On les reconnaissait à leur manière de trainer les pieds, cet affaissement des épaules, signe du poids d’une vie un peu trop lourde et ce regard, vide, abattu. Angelina n’avait jamais eu d’empathie pour ces gens-là. Sans doute parce qu’ils lui rappelaient sa mère, cette épave qui n’avait jamais rien fait pour s’en sortir. Qui se complaisait dans la misère. Mais cette fois-ci c’était différent. Angelina ressentait quelque chose de différent vis-à-vis de ce grand mec barbu. Sans doute un motard d’ailleurs. Ça leur faisait un premier point commun. On aurait dit que sa souffrance était… Légitime ? Est-ce que la souffrance légitime existait ? Il marmonna quelque chose et Angie crut entendre qu’il voulait un shot de vodka. Elle s’empressa de lui servir et c’est au moment où elle lui tendit sa boisson qu’il sembla sortir de sa torpeur et leva enfin les yeux vers elle.

Paige ? Angelina haussa les sourcils. Elle aurait pu prendre ça comme une tentative de drague, genre je-fais-genre-je-te-prends-pour-quelqu’un-d’autre-pour-engager-la-conversation mais ce n’était pas ça. Le ton sur lequel il avait prononcé ce prénom. On aurait dit qu’il venait de voir… Un fantôme. Elle se demanda même un moment si elle n’était pas censée le connaître pour susciter une telle réaction chez lui. Elle s’apprêtait à répondre qu’il se trompait de nana lorsque soudainement il se leva, manquant de renverser son tabouret. Il lui balança des excuses et quitta le bar. « Mais qu’est-ce que ce bordel… » souffla Angelina en jetant un regard autour d’elle. Personne n’avait assisté à la scène, elle baissa les yeux et c’est là qu’elle vit son portefeuille. « Hannah, remplace moi 5 minutes s’il te plait, un client a oublié ça. » Ni une ni deux elle s’empara du porte-feuille et se lança à la poursuite du motard mystérieux. Elle sortit en trombe du Canvas, regardant à droite et à gauche. Personne. Super. Elle n'avait plus qu'à retourner au bar et attendre qu'il s'aperçoive de son oubli. Elle allait rerentrer dans le bar lors qu’instinctivement elle se dirigea vers la ruelle adjacente. Bingo. Il était là. Assis contre le mur. Angelina hésita à s'approcher de lui. Elle avait appris à se méfier de ses clients, parfois mal intentionnés, parfois instables...  Elle s'approcha doucement, restant à une distance raisonnable. Elle lui montra alors son porte-feuille. « Vous avez oublié ça… » Angelina le dévisagea un instant puis tourna les talons, elle avait autre chose à foutre que de s'occuper de ses ivrognes de clients, Carlos allait la tuer si elle se barrait une fois de plus sans prévenir. Et puis franchement ? Paige ? C'était quoi son problème ? Il la prenait pour une meuf qui l'avait déjà baisé ? Elle faillit sortir de la ruelle puis se ravisa. Comment comptait-elle s'attirer de bonnes choses si elle s'évertuait à garder ce genre de comportement d'asociale ? « Vous êtes sûr que ça va ? »



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Message(#) Sujet: Re: The night we met | Angie The night we met | Angie EmptyMar 25 Avr 2017 - 18:44


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Ma parole je savais même pas que c’était possible de se sentir aussi seul, avec même la raison et la conscience qui m’avaient déserté. Et j’étais même pas foutu d’être un taré heureux, non, moi il fallait que je panique comme une fiotte dès que je commençais à perdre le contrôle. Et alors là, pour le coup, je contrôlais plus rien. Je savais plus discerner le rêve et la réalité, j’avais l’impression d’essayer de nager dans un sable mouvant, tout me glissait entre les doigts, j’arrivais pas à me défaire de cette sensation de trop plein qui déborde, de cette sensation de trop vide non plus d’ailleurs, j’avais le cœur qui cognait comme un foutu marteau infernal près à exploser et toujours les mêmes images qui défilaient en boucle et faisaient comme autant de coups de coutelard dans le poitrail. Je captais plus rien. Je contrôlais plus rien. Je voyais aucune foutue issue.

Et puis alors soudain, je sais pas pourquoi mais j’ai pensé à ma première bécane. Celle que j’avais fabriqué de mes mains quand j’avais 17 ans, celle avec laquelle j’avais parcouru des kilomètres, traversé des déserts, longé des lacs et des rivières, franchi des montagnes, avalé des forêts, pourchassé le soleil et la lune, fui les villes pour pas voir les gens… et alors avec tous ces souvenirs en tête, j’étais plus comme un con dans ma ruelle, j’étais sur ma meule, et je sentais presque le vent caresser mes joues, avec le soleil orange devant, l’horizon a perte de vue et le cadre rigide qui tape méchamment le cul. J’ai pas pu m’empêcher de sourire parce que ça ressemblait drôlement à une douce délivrance, comme liberté. Et alors là, tout ce que je voulais, c’était rouler. Partir loin. Et si je pouvais tout oublier aussi ça aurait pas été mal non plus. 
 
Mais même ça j’avais réussi à me l’arracher. Merde alors, fallait quand même être sacrément balaise pour foirer avec une telle expertise tous les trucs beaux et pures qui touchaient ma vie.
 
 « Vous avez oublié ça… ». Désorienté, j’ai tourné la tête vers la voix et je me suis fait exploser la rétine par un lampadaire qui était apparu de nulle part au moment où un truc plat et carré me tombait sur les genoux. J’ai mis un peu trop de temps avant de réaliser que le truc en question, c’était mon portefeuille. Et je me suis senti bien con. J’ai relevé les yeux vers la silhouette pour la remercier, dire quelque chose, mais elle avait déjà tourné les talons. Et je pouvais pas vraiment la blâmer vu la loque humaine sur laquelle elle était tombée. J’ai rangé mon portefeuille dans la poche de mon hoodie, j’ai attrapé un paquet de cigarette qui y traînait et j’en ai glissé une entre mes lèvres.
 
« Vous êtes sûr que ça va ? ». J’ai relevé la tête et j’ai plissé les yeux pour pas me faire avoir une deuxième fois. C’était la barmaid de tout à l’heure. Et en la regardant à nouveau, j’ai compris pourquoi mon cerveau bituré et carencé l’avait confondue avec Paige, et ça m’a pas mal noué les boyaux, toute cette ressemblance. Et puis là, avec la lumière derrière qui lui faisait comme un halo autour d’elle, je me suis dit qu’elle ressemblait quand même méchamment à un ange. J’ai rebaissé les yeux et j’ai pas pu réprimer un ricanement nerveux. J’ai hésité un moment à lui dire la vérité, que j’étais un juste un pauvre fou pitoyable, mais ça faisait pleurnichard et c’était pas vraiment ses affaires, de toute manière. Alors je me suis contenté d’hocher la tête dans le vide et j’espérais qu’avec la nuit elle voyait pas ces foutues larmes qui coulaient sur mes joues. J’aurai pu l‘inviter à foutre le camp, comme je le faisais de façon plus ou moins polis avec tout le monde ces derniers temps, j'aurai pu m’arracher moi-même aussi, mais je sais pas pourquoi, cette fois-ci, j’en avais pas vraiment envie. Ça m’a fait drôle par où ça passe d’ailleurs, comme réalisation. C’était peut-être à cause de la solitude. Ou la ressemblance avec Paige. Ou c’était peut-être parce que je me sentais con de l’avoir dérangé et je voulais me rattraper. J’ai jeté un coup d’œil dans sa direction et comme elle était toujours là, je me suis dit qu’elle avait peut-être envie de faire une pause. J’ai hésité un moment parce que je savais pas trop quoi lui dire et je voulais pas non plus la faire flipper, alors j’ai juste maladroitement tendu mon paquet de cigarette dans sa direction en espérant qu’elle saisirait le message.

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Message(#) Sujet: Re: The night we met | Angie The night we met | Angie EmptyVen 28 Avr 2017 - 12:15


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Un cœur brisé, une mauvaise journée, un licenciement ou tout simplement à mal-être à oublier. Les raisons pour lesquelles les âmes en peine atterrissaient au Canvas se comptait par dizaine et après toutes ces années à travailler derrière ce bar Angelina pouvait vous en citer une bonne quinzaine de tête. Un papa qui avait perdu la garde, une nana larguée à quinze jours de son mariage, un flic terrassé par le chagrin après la mort d’un collègue… Angelina avait dû faire de l’empathie malgré elle plus d’une fois. Si elle aimait les commérages, les malheurs des autres ne la distrayaient pas particulièrement. Cela ne lui permettait même pas de relativiser, Angie avait toujours été très centrée sur elle-même : une fois le client parti, elle avait déjà oublié. Prête à passer à autre chose, c’est comme ça qu’elle fonctionnait. Mais Angelina n’était pas sans savoir que c’était son comportement qui ferait revenir le client, alors en général elle entamait la conversation. « Journée de merde, hein ? » Le client se chargeait du reste. Sans même qu’ils s’en rendent compte, ils se mettaient à déblatérer sur cette vie qu’il ne méritait pas. La thérapie, ils la faisaient eux-mêmes à coup de liqueur et de confessions. Angelina se contentait d’hocher la tête au moment opportun et de sourire. Elle n’avait jamais été douée pour consoler qui que ce soit et les états d’âmes des gens la mettaient mal à l’aise. Son job de barmaid lui avait appris à travailler cet aspect de là de sa personnalité mais ce n’était pas encore parfait.

La preuve en est, elle était là devant cet homme en souffrance et elle ne savait ni quoi dire, ni quoi faire. Mais cette fois-ci elle sentait que c’était différent. Le regard qu’il lui avait lancé lorsqu’il l’avait appelé Paige lui avait glacé le sang. Il se demanda un moment si il ne connaissait pas sa mère mais c’était impossible. Sa mère était une junkie dont le visage portait les stigmates de la meth. Elle ne ressemblait plus en rien à sa fille dont la beauté était réputée dans tout Brisbane, contrastant avec sa personnalité border-line que personne ne parvenait à supporter. Alors elle était là, éclairée par la lumière du lampadaire. Elle sentit une goutte tomber sur son front qu’elle essuya d’un revers de la main, elle espérait qu’il n’allait pas se mettre à pleuvoir. C’est là qu’il lui tendit son paquet de cigarette. Angelina en prit une volontiers, elle cala la cigarette entre ses lèvres et tendit l’autre main pour avoir son briquet. Elle alluma la cigarette et renversa sa tête en arrière pour savourer cette bouffée. « Putain je ne soupçonnais même pas à quel point j’en avais envie. » Elle tira une autre longue taff et risqua la question sans réfléchir. « C’est qui cette Paige ? Ton ex ? C’est la première fois qu’on me fait ce coup-là. »


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Message(#) Sujet: Re: The night we met | Angie The night we met | Angie EmptyMar 23 Mai 2017 - 21:00


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Je l’ai regardé attraper mon paquet de cigarettes, en glisser une entre ses lèvres pleines, l’allumer, aspirer sa fumée et renverser sa tête en arrière. Je pouvais pas m'empêcher de la dévisager, avec toute sa beauté et toute son assurance, toute sa désinvolture et toute sa sensualité qui m’étaient un peu trop familières... Je pouvais pas m’empêcher de la dévisager mais je faisais mine que non, pour pas la faire flipper. N’empêche, je m’en remettais pas. Et ça commençait à me prendre méchamment la tête, toute cette confusion qui me nouait les boyaux. Alors j’ai fait ce que je faisais de mieux ces derniers temps : je me suis voilé la face. J’ai mis ça sur le compte de la biture et c’était pratique parce que ça m’évitait de devoir faire sens de tout ce bordel.

J’ai allumé la cigarette qui pendait toujours bêtement de mes lèvres jusque-là et j’en ai pris une bouffée histoire de me calmer. J’ai regardé la fumée danser devant mes yeux dans l’obscurité de ma ruelle et je sentais que je déconnectais, ce qui était pas plus mal. J’en ai pris une nouvelle pour continuer sur ma lancée sauf que ça a pas marché parce qu’au même moment l'inconnue aux allures d’ange, elle m’a cloué sur place. « C’est qui cette Paige ? qu’elle a lancé à la désinvolture. Ton ex ? C’est la première fois qu’on me fait ce coup-là. » Et moi j'en revenais tellement pas que j’ai bien failli m’étouffer avec la fumée de ma garrot. Tu parles d’un ange, ma parole ! Je lui ai jeté un coup d’œil : elle me regardait impunément, visiblement oublieuse au fait qu’elle venait de me crever le cœur dans les règles de l’art. Non, elle, elle pensait que tout ça c’était une technique de drague douteuse. Putain mais quel connard allait aborder une nana en lui chialant dessus avant de déguerpir comme une fiotte ? J’en revenais pas. J’ai ouvert la bouche pour répondre et j’ai réalisé que je savais tout bonnement pas quoi dire. Parce que cette question, je me l’étais jamais posé. Et j’avais toujours pas envie de me la poser, d’ailleurs. Pour moi, Paige était toujours là. On était toujours ensemble. J’étais toujours marié... On était toujours ensemble…

Et puis alors là je sais pas pourquoi mais j’ai baissé les yeux vers l’anneau qui ornait mon annuaire et la phrase « jusqu’à ce que la mort vous sépare » a raisonné partout dans ma tête et c'était méchamment dégueulasse, comme son. J'ai senti toute la chaleur de mon corps se carapater et surement que les couleurs pareil. Je sais pas trop combien de temps je suis resté silencieux comme ça, comme un con, à fixer le mur en pierre en face de moi. Et puis je sais pas trop comment mais au bout d’un moment, j’ai finalement réussi à articuler un semblant de réponse.

- C’est… c’est ma femme. Elle est… hum, j'ai dégluti et je me suis rageusement passé la main sur le visage pour me reprendre. Elle est décédée.

J’ai pas aimé comment ces mots ont ricoché contre chaque pierre de la ruelle avant de retomber dans le silence. J’aimais pas leur son, j’aimais pas leur signification et j’aimais pas ce poids invisible qui venait de s’écraser partout sur moi. J’ai secoué la tête et je me suis relevé comme je pouvais vu mon état de serpillière déjà bien avancée. J’ai pris une inspiration. J’osais même pas la regarder. Quoi qu’elle puisse afficher comme expression, la pitié, l’incrédulité, l’indifférence, le dégoût,… je voulais pas la voir. Il fallait absolument que je me tire d’ici. Je savais pas où aller, j’avais même pas envie de partir, mais il fallait. Question d’honneur. Le peu qui me restait du moins.

- Merci... de pas avoir appelé les flics.

J’ai marqué une pause. Je sais pas pourquoi mais j'avais envie de la prendre dans mes bras. Comme un foutu taré. Mais comme c’était même pas proche d’être vaguement acceptable et que même dans mon cerveau bituré j'en avais conscience je me suis abstenu et je me suis contenté d’hocher la tête dans le vide. Comme pour la saluer, la remercier, m’excuser platement pour le spectacle lamentable et pour tout le reste aussi. Et puis alors sans demander mon reste, j'ai tourné les talons et je suis parti.

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Message(#) Sujet: Re: The night we met | Angie The night we met | Angie EmptyMer 24 Mai 2017 - 20:50


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Angelina ✧ Phoenix
Angelina était ce qu'on appelle quelqu'un de vraiment fucked up. Aucun doute sur ça, n'importe qui vous le dirait, son ex et ses potes en premier. Ils pourraient vous écrire un livre ayant pour thème "Pourquoi Angelina Gilmore aime foutre sa vie en l'air et vous entraînera avec elle aussi". Angelina c'était le genre de nanas dont on avait marre d'entendre les histoires, le genre de nana à qui il arrivait tellement de merdes que les gens finissaient pas dire qu'elle les cherchait. Parce que ça ne pouvait être que ça n'est-ce pas ? Personne se demandait si Angelina n'était pas simplement une meuf paumée, une âme en peine qui avait juste besoin d'un peu de réconfort. Qu'on lui insuffle un peu d'espoir. Une épaule sur qui se reposer le soir. Mais jusqu'ici c'était le genre de meuf qui était toujours au mauvais endroit, au mauvais moment et qui avait pour passion de dire que rien n'était de sa faute parce que, bordel, elle peut pas contrôler son destin, pas vrai ?

Alors ce soir-là, dans la ruelle qui jouxtait le Canvas, quand elle rencontra cette âme perdue elle sentit cette même vibe que seuls les écrochés vifs ressentent lorsqu'ils sont en présence de leur paire. Angelina pouvait sentir que ce mec là avait vécu un truc moche et qu'il s'en remettait pas. Angelina aussi avait déjà été la nana détruite adossée au mur crasseux d'une ruelle. Elle avait été aussi celle qui s'enfuyait dans la nuit noire. C'est pourquoi lorsqu'elle vit l'inconnu tourner les talons après avoir marmonné que la Paige en question n'était autre que sa femme décédée, elle ne fit pas l'effort de le retenir. Elle aurait pu. Lui courir après, le rassurer, lui dire qu'elle était désolée. Mais chacun portait sa croix et ça faisait belle lurette qu'Angie avait arrêté d'essayer de comprendre les gens qui surgissaient sur son chemin. À chaque fois qu'elle avait essayé d'être comprise, elle avait perdu encore un bout d'âme.
Alors elle regarda cet inconnu s'éloigner jusqu'à ce qu'il ne devienne plus qu'une vague silhouette dans la pénombre de la ruelle. Même pas un prénom, juste ce blouson en cuir et cette gueule d'ange qui n'allait pas manquer de la hanter d'elle. Angie se demanda un instant si elle ne venait pas de louper un train, là, seule dans le noir. N'aurait-elle pas du le retenir ? Et si c'était lui la personne dont elle avait besoin ? Cette pensée folle repartit aussi vite qu'elle ne lui avait traversé l'esprit. Elle était en train de tout mélanger. Parce que le cerveau d'Angelina n'était pas fait comme les autres, le moindre petit événement sortant de l'ordinaire devenait une possible échappatoire à son existence morne et lasse.

La belle australienne écrasa la cigarette avec le talon de sa cuissarde et rentra dans le bar par la porte réservée au personnel pour récupérer ses affaires. Elle pensa à l'inconnu tout le long de son trajet de retour à moto, sillonnant les rues de la ville avec quelque chose en plus dans son âme.

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