Encore sous le choc, je n’arrivais pas à dormir. Je n’arrêtais pas de me tourner et de me retourner, songeant sans arrêt à ce qu’il venait de se passer depuis ces derniers jours. Moi qui m’était tant inquiétée pour lui, qui m’étais rendue compte qu’il comptait bien plus pour moi que le simple père de ma fille, il fallait qu’il me trahisse peu de temps après ça. Et j’en devenais malade. Insomniaque en plus de ça. Je m’étais déjà levée plusieurs fois et Victoria dormait comme un vrai petit ange. Je regrette vraiment le temps où elle avait du mal à faire ses nuits. Même si elle n’en a jamais beaucoup eu au final. Du moins avec moi, parce qu’elle a tout de même eu droit à quelques nuits chez son père, chose que je trouve tout à fait normal. Trouvais. Non, il faut que je mette l’affecte en dehors de cette histoire. Elle mérite de connaître son père, et il mérite de la connaître, malgré la trahison qu’il venait de me faire. Oui, je l’avais vu en très bonne compagnie. Trop bonne compagnie. Isabella, celle que je pensais être une amie, voilà qu’elle tournait depuis bien trop longtemps autour de lui. Et c’était loin de me plaire. Ca aurait été bien plus facile si ça avait été une parfaite inconnue, j’aurais pu la détester au plus haut point, mais là, la seule chose que je ressentais en cet instant, c’est que je me sentais conne, terriblement conne d’y avoir cru, de m’être laissé aller à de tels sentiments. Je savais que c’était une chute mortelle, mais je m’étais laissé avoir. Là, c’est bel et bien terminé, je ne me ferais plus avoir. Mais je n’arrêtais pas de penser à lui, à tout ce qu’on avait pu vivre ensemble, à ces baisés échangés, à ce dernier baisé qui m’avait fait tomber cette barrière si forte que j’avais réussi à me construire. Je me sentais littéralement brisée. J’avais envie de le voir et en même temps je voulais l’éviter à tout prix. Mais j’avais besoin de le voir, quitte à ce que je ne lui adresse pas la parole, mais je n’étais pas sûre de pouvoir me retenir. Je tournais en rond presque le restant de la nuit, me décidant enfin à envoyer un message au petit matin à Gabriel Pourrais-tu venir récupérer Victoria rapidement s’il te plaît ? Sans davantage de formalité, sans explication particulière. Je m’étais tout de même trouvé particulièrement calme, même à travers ce message.

AVENGEDINCHAINS

Moi qui m’étais laissé aller, moi qui avais baissé ma garde et ma carapace infaillible pour lui, je le regrettais amèrement. L’avoir vu dans les bras d’une autre, ça m’avait brisé le cœur. Non, ça m’a fait devenir rouge de colère, une pure trahison que je ne supportais pas. Je ne savais pas d’où il la connaissait, mais il était clair qu’ils étaient proches, bien trop proches et je m’étais imaginé tout un tas de choses qui ne pouvaient être que plausible. Pourquoi l’aurait-il pris dans ses bras de la sorte sinon ?! J’avais pleuré oui, j’avais laissé échapper malgré deux ou trois larmes, mais la colère avait bien vite repris le dessus. Je ne me laisserais plus avoir, faire confiance en eux a toujours été une mauvaise idée, terrible même, et je m’étais laissé avoir. Quelle stupidité de ma part. Je m’en voulais tellement. Surtout que c’était toujours le père de ma fille et que je lui avais promis qu’il n’en serait jamais séparé. Même si j’ai le cœur brisé, je ne veux pas qu’elle grandisse sans son père. Je veux qu’elle ait un modèle paternel. Même s’il ne la touchera jamais comme mon père me l’a fait subir, j’en donne mon âme au diable. Je serais intransigeante sur son éducation. Même si je sais qu’il a bon cœur et que c’est un homme adorable. Ce qui me met encore plus la haine. Comment ai-je avoir pu avoir des sentiments si forts à son égard ? Je n’ai même pas eu le temps de savoir si c’était de l’amour qu’il m’avait déjà trahi dans les bras de mon amie. Il m’avait fallu deux bons jours avant de pouvoir le recontacter, pour éviter de lui faire subir une mort atroce. Je voulais être impassible. Je voulais qu’il se sente aussi mal que je me sentais. Mais quand je vins ouvrir la porte lors de la sonnerie, mon cœur se serra et je n’avais qu’une seule envie c’était de lui mettre une baffe avant de me jeter dans ses bras. Mais il fallait que je me contrôle. Je me crispais de tout mon corps, le sentant bouillir de rage et de folie, serrant les dents, sentant mes larmes monter aux yeux. Je me détournais, filant dans le salon, sans rien lui dire et allais chercher les affaires de Victoria. Notre petit ange était déjà installée dans son siège auto et dormait comme une belle princesse. A sa vue, je me sentais me décoincer un peu et un sourire léger en coin apparaissait.

AVENGEDINCHAINS

Pourquoi je m’étais laissé avoir ? J’étais faible, terriblement faible, et même en croisant son regard à l’entrée de chez moi, je sentais la faiblesse m’envahir. Je préférais lui tourner le dos, filer dans le salon où se trouvait notre fille qui attendait sagement que son père la récupère. Je préférais ne faire aucun commentaire. Ca me démangeait mais je voulais éviter en un sens. Je savais que ça allait me faire plus de mal que je ne le voudrais. Mais je me voilais la face. Evidemment qu’il allait être surpris de mon mutisme et de ma froideur, surtout depuis que je m’étais donné à lui à l’hôpital. Oui, je le regrettais amèrement. J’étais venue bien recouvrir ma fille dans son linceul, histoire d’être sûr qu’elle n’attrape pas froid, et qu’elle soit bien habillée, que rien ne dépasse. Oui, j’étais pointilleuse juste pour éviter le regard et la confrontation avec son père. Mais je ne pouvais pas y échapper bien longtemps, ça me démangeait trop de toute façon. Je me relevais et respirais un bon coup avant de me retourner vers lui Isabelle. Je laissais planer quelques secondes de silence pesant, tout en le regardant durement, plutôt que de laisser transparaitre toute autre émotion qui est en train de me détruire de l’intérieur et rajoutais Je vous ai vu ensemble. C’était clair, c’était direct, et j’espère que ça ferait mal. Oui, aussi mal qu’à moi lorsque je les ai vu. Il ne savait pas qu’on se connaissait. Elle ne savait pas notre histoire. Et j’espérais leur faire du mal. Mais c’était bien trop espérer. Il n’y a que moi dans cette histoire qui souffre, et je ne pouvais ne blâmer que moi. Il n’était même pas l’heure du déjeuner que je filais à l’autre bout du salon à la recherche d’un whisky. Oui, j’en avais absolument besoin pour les nerfs si je ne voulais pas craquer. Et je ne savais pas comment je pouvais craquer avec ce genre de situation. Je ne préférais pas le découvrir. Surtout alors que Victoria s’était assoupie. Non, hors de question que je sois la fautive à la réveiller.

AVENGEDINCHAINS

C’était comme si mon inconscient était tout autant jaloux. Je connaissais assez bien Isabella pour ne pas me tromper sur son prénom. C’est tout du moins ce que je pensais. J’aurais mieux fait de l’appeler la grosse vache, au moins, ça aurait été tout aussi clair que je ne l’aimais plus à présent, et que j’étais terriblement jalouse d’elle. Certes, elle n’avait pas d’enfant avec Gabriel, du moins, pas que je sache, parce que franchement, avec ce genre de femme sait-on jamais. Et comme si ça ne suffisait pas, il avait fallu qu’il rectifie mon erreur. Chose qui me fit bouillir de l’intérieur. Il tenait vraiment à elle, c’était indéniable, sinon pourquoi me reprendre pour une simple lettre. Inutile. Je préférais ne rien répondre. Je lui avais simplement envoyé un regard terriblement accusateur avant de le détourner de nouveau. J’eus alors un court rire moqueur quand il osait me dire qu’il n’avait rien à se reprocher. Cela ne m’étonnait guère, et m’énervais autant que ça me rendait triste. Non, je me sentais mal, encore plus mal. Moi qui lui avait finalement confié mon cœur, il s’amusait avec pour me le déchirer peu à peu. Après tout, peut-être avait-il besoin d’une vengeance par rapport à notre relation passée du lycée. Je pourrais le comprendre. Je préférais déverser ma colère et ma peine dans un verre de whisky. Sauf qu’il arrivait pour m’arrêter en plein mouvement. Instinctivement, je relevais le regard vers lui, chose que je n’aurais pas du faire, parce qu’il me rendait faible, terriblement faible et je n’avais qu’une seule envie, me jeter dans ses bras. Je crispais l’intégralité de mon corps pour m’en empêcher et me concentrer sur ses paroles. C’était peut-être qu’une simple accolade pour lui, mais pour elle ? Je suis persuadée que pour elle, c’était bien plus. J’allais lui raconter ma version des faits quand il me lâcha le poignet pour revenir à notre relation catastrophique. Et tout était de ma faute. J’en ai bien conscience, sauf que je le prenais mal et revenais direct sur sa relation avec Isabella. Je restais là, plantée devant lui, osant affronter son regard pour enchaîner bien rapidement Peut-être que pour toi, ce n’était qu’amical, mais pour elle, qu’est-ce qui te dit que pour elle ce n’est pas plus ? Qu’est-ce qu’il te dit que ce n’était pas un espoir ce geste ? Elle m’a parlé de son premier amour qu’elle n’avait jamais oublié ! Qui me dit que ce n’est pas toi ? Je suis persuadée que c’est toi ! Oui, je m’éloigne, encore une fois, c’est plus fort que moi. Mais c’était ma peine de cœur qui parlait et je sentais mes larmes aux bords des yeux. Pourtant, je restais forte, serrant la mâchoire, pour lui faire face.

AVENGEDINCHAINS

Certes, j’en faisais trop, je me prenais la tête pour un rien, et Gabriel commençait à perdre patience. J’étais perdue, et ressentir de tels sentiments pour un homme alors que j’avais tout fait pour éviter ça, je l’assumais difficilement. Il me suffisait une simple petite embuche pour que je laisse tout tomber. Je me cherchais certainement des problèmes inutilement, mais c’était plus fort que moi, et j’ai toujours été très jalouse et possessive. Alors avoir vu Isabella dans les bras de Gabriel, oui j'avais vite fait des conclusions. Au fond, je sais qu'il a raison, que je ne devrais pas douter, que je devrais lui faire confiance, mais c'est bien quelque chose que je n'arrivais pas à faire, du moins pas avec les hommes. La grande question était qu'est-ce que je voulais exactement. Je le savais, mais je ne savais pas comment y arriver sans m'accrocher à chaque fois avec lui. Je n'étais même pas sûre qu'il veuille vraiment se battre pour moi. Et en même temps, comment l'en blamer ? Je sais que je peux être invivable, et encore, on ne vivait même pas ensemble. L'ultimatum était là, et je ne savais pas quoi faire, je sentais comme un lourd fardeau sur mes épaules. Je ne savais plus rien, le plus simple était que je le laisse partir, et pourtant, rien qu'à cette idée, j'en avais mal au cœur. Comme si j'allais en vomir, comme lorsque j'avais ces nausées alors que Victoria était encore en moi. Je respirais un bon coup et lui disais Je veux vraiment être avec toi. Je veux vraiment essayer, mais le mode d'emploi n'a jamais été évident pour moi. Je n'ai jamais pu compter que sur moi depuis mon enfance. Je n'ai eu personne pour me montrer la bonne voie. Bien sûr il y avait eu ma sœur, mais elle n'était pas au courant de tout ce que je pouvais vivre sous notre toit. Et ce besoin de rendre la vie impossible à tous ces gamins, elle ne le comprenait pas, non, je me suis toujours sentie horriblement seule. Et aujourd'hui, alors que j'avais une nouvelle opportunité de ne plus l'être, j'étais à deux doigts de nouveau tout foutre en l'air.

AVENGEDINCHAINS

Une chose était sûre, je ne voulais pas perdre Gabriel, je tenais bien trop à lui, peut-être un peu trop, et c'est ce qui me faisait péter un plomb dès qu'une femme s'approchait de lui d'un peu trop près. Particulièrement quand je connais la femme en question. Mais oui, je voulais apprendre à lui faire confiance, j'avais besoin de me détendre, de me reposer sur quelqu'un. La fatigue résiduelle se faisait de plus en plus importante, et avoir Gabriel à mes côtés me faisait un bien fou. Mes paroles semblaient l'avoir radouci, et même rassuré. Il aurait pu partir, avec Victoria, et me laissait seule avec mes démons, mais non, il insistait sur le fait que je pouvais vraiment lui faire confiance. Il avait été là pour moi, mais surtout parce que Victoria était arrivée dans notre vie. Mais en même temps, je n'avais pas arrêté de le repousser. Aurait-il fait l'effort de revenir vers moi si notre fille n'avait pas été créé ? Sûrement que non. Je me mordais la langue pour ne pas sortir toutes ces choses qui ne feraient que provoquer encore plus de frustrations et de disputes. J'étais fatiguée de mon comportement et je voulais vraiment faire un effort pour le garder dans ma vie. Mais je répondais tout de même avec une voix pas du tout assurée Oui … J'attendais bien plus, évidemment, mais si je ne lui laissais pas la chance de faire vraiment faire ses preuves et de le laisser me prouver qu'il tenait à moi, je n'aurais jamais ce que je veux. Et surtout ce dont j'ai besoin. Je n'osais tout de même pas bouger, pas faire de pas vers lui, ne sachant pas comment agir, étant totalement paumée. Mais voilà qu'il me proposait un voyage, rien que tous les trois, un week-end improvisé Et si on partait tout de suite ? Je ne voulais pas attendre, il y a bien des années que je n'étais plus patiente, particulièrement quand je voulais absolument quelque chose, et ce voyage avec lui, avec ma fille, était idéal.

AVENGEDINCHAINS