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 benny ▲ two of us on the run

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benny ▲ two of us on the run Empty
Message(#) Sujet: benny ▲ two of us on the run benny ▲ two of us on the run EmptyLun 21 Aoû - 22:03


two of us on the run
Benny



I'm a rebel just for kicks, I’ve been feeling it since 1996, now. We could fight a war for peace, give in to that easy living. Say hi to my hopes and dreams, stop flipping for your enemies.

Le mal de tête qui me trahit, alors que je passe la majorité du voyage entre deux rêves, somnolant, la tête appuyée sur la vitre. J’ai un souvenir un brin embué de la veille, mais surtout, le cœur léger, heureux, soulagé, et la promesse qui restait si tangible. J’allais travailler sur un book, j’allais construire un portfolio, j’allais avancer vers ce rêve que je chérissais tant jadis, et qui prenait un peu plus sa forme concrète au fil des kilomètres qui me séparaient de Southport, et me rapprochaient de Brisbane. Tout ça parce que j’avais eu envie d’oser, tout ça parce que j’avais suivi ce conseil, ces paroles lancées par Joanne, parce que je m’étais reconnue en celle qui reprenait son contrôle, en celle qui avait de la confiance, de la puissance, de la force. Et je me sentais mieux, plus grande, plus authentique, honnête envers moi-même. Physiquement par contre, c’était tout autre chose. La beauté de ma consommation minime d’alcool résidait dans son effet presque instantané de laisser des séquelles. La quantité ingérée paraîtrait ridicule aux yeux de n’importe qui de plus habitué que moi, et je n’arracherais que des rires bien sentis de quiconque apprendrait qu’avec un nombre raisonnable de verres dans le corps, j’avais pu me mettre dans un tel état. Mais voilà, il n’y avait rien qu’une bonne douche, qu’une quantité faramineuse de café, et qu’une salade de fruits de la grosseur de mon visage ne pouvaient contrecarrer. Après avoir maximisé la dernière demie-heure de train d’une sieste des plus confortables – béni soit le passager qui m’avait laissé un siège entier pour m’étendre de tout mon long, me voilà presque fraîche comme une rose pour regagner la gare. Ma ville, mon chez-moi, et ce qui m’y attend. La journée est encore jeune, et lorsque je passe la garde, que je me faufile dans le hall de l’imposant building et que je finis par déboucher sur le parking, c’est forte d’un plan comprenant un passage chez le pâtissier du coin, un autre café pour la route, et un dernier arrêt à la chambre de mon fils que j’ai l’impression de dominer ma vie à nouveau. Les lunettes de soleil qui trouvent leur place au bout de mon nez, le sac à dos sur l’épaule, j’ai le mal de cœur qui s’esquive comme il est venu. Vite, et bien. Le chemin se dessine tranquillement, et mes doigts finissent par se refermer d’un côté sur un gobelet brûlant et de l’autre sur un sac de papier rempli de délices sucrés, avant que je passe les portes battantes de l’hôpital, pour finir à l’étage où Noah se trouve. Activité de bricolage du week-end, tout le monde rassemblé à la salle commune, et cette tête blonde que je ne repère que trop vite, me serrant le cœur au passage, mon fils que je n’avais pas vu depuis 3 jours et qui ne semblait pas s’en porter plus mal. Il rigole avec ses potes, on me pointe la section où je peux aller rejoindre les autres parents, et je ne peux pas le quitter des yeux maintenant qu’il laisse un autre petit bonhomme emprunter ses crayons, et qu’il discute tout bonnement avec une jolie rouquine d’à peine 5 ans. Il allait bien ce garçon, il remontait la pente, peu importe les difficultés que la vie lui envoyait, et il me rendait fière comme ce n’était pas permis. Un léger signe de la main, quelques bisous – cachés – plus tard, et il retourne à son planning, le cœur vaporeux, l’œil brillant, oubliant complètement ma présence, si ce n’est pour le sucre en poudre qui reste collé à son menton. Qu’est-ce que je pouvais bien faire, maintenant que mon fils m’a très gentiment fait savoir que son après-midi était chargé, que ma présence n’était pas nécessaire? Il grandit et il embellit, il prend force et contrôle, confiance, et même si je quitte l’établissement à reculons, je ne pourrais pas être plus satisfaite de ce que j’y ai vu, de comment il s’acclimate à tout ceci comme un chef, depuis toujours.  Mes pas me mèneront sur la rue à gauche, puis celle à droite, tournant au hasard, suivant la foule un temps, passant en mode solo ensuite. Un lazy sunday comme je l’aime, où je me perds dans les rayons d’une libraire en extérieur, farfouillant entre les allées à la recherche de vieux livres, de souvenirs, de pages jaunies, craquantes, pour finalement entrer dans un magasin de vinyles où je passerai probablement une heure, si ce n’est plus. Attendue nulle part, libre pour encore un long moment, je perds la notion du temps lorsque je trouve un thrift shop de l’autre côté de la rue, et que je m’y engouffre l’œil avide, à la recherche de vêtements qui ont vécu un peu, beaucoup, énormément, à la folie. Les bras pleins, ce ne sera pas très difficile de me cacher derrière le rideau faisant office de cabine d’essayage, et qu’une vieille veste de jeans, qu’une salopette, et que même plusieurs t-shirts de bands dont plus personne ne parle passent ma silhouette. J’ai l’impression de me retrouver entre un cast de films des années 80 et un vidéoclip électro des 90’s maintenant que je sors de mon antre pour laisser le matos de côté, pas encore convaincue que mes fripes couvertes de peinture étaient prêtes à laisser leur place à une nouvelle cuvée vestimentaire. Puis il attire mon regard, au fond de la boutique. Tout seul, sans rien autour si ce n’est de grands miroirs difformes qui accentuent sa présence, qui rendent la scène encore plus dramatique. Je m’approche, parce que je ne peux pas faire autrement, le prends entre mes doigts, éclate de rire lorsque le reflet du miroir me confirme à quel point j’ai l’air ridicule avec, sur la tête. Un vieux casque de moto comme il ne s’en fait plus, recouvert d’autocollants des Clash, des Rolling Stones, et de The Police. Il aurait probablement retrouvé sa place sur l’étagère si le son d’une moto n'avait pas invité mes prunelles vers la rue, à travers la grande baie vitrée. Coïncidence ou pas, c’est un Benjamin que je repère là, à peine arrivé au feu rouge, et dans l’impulsion du moment, dans l’idée qu’il s’agit là de la vie qui s’amuse, qui se moque, qui me teste, je file hâtivement un billet à la caissière, pour finir par sortir in extremis de la boutique, et trottiner plus vite qu’à mon habitude vers le Brody et sa bécane qui ronronne en attendant la prochaine accélération. Il sursaute bien évidemment lorsque je grimpe côté passager, et mon vieux casque vintage se cogne sur le sien lorsqu’il se retourne, assez pour voir ma mine plus que fière d'être arrivée à temps. « C’est bien, t’es à l’heure. » je m’exclame, profitant de l’effet de surprise, improvisant avec ce qui me vient à l’esprit. Benjamin dans toute sa splendeur qui se tient là, qui profite de son arrêt pour réaliser ce qui se trame sur le siège arrière. Il fallait savoir qu’hier, ou préférablement très tôt ce matin, j’avais répondu humblement à sa chaîne de snaps, mettant des mots sur une suite possible. Depuis son dernier passage à l’atelier, depuis mon fameux test, depuis cette impulsion que je ne comprenais toujours pas, ou du moins que je ne souhaitais pas comprendre, j’avais mis un frein à un peu tout. Pris mes distances avec Ezra, avec Edward, et maintenant avec Benjamin. Quelques semaines à éviter la moindre proposition, à vouloir me faire une tête, à ne rien brusquer, à ne pas me forcer non plus. Parce que j’avais perdu le Nord, parce que je ne savais plus où je devais être, où je devais aller, et surtout parce que j’étais tombée directement dans le piège, à trop réfléchir, à trop analyser, ce nous deux encore tellement embryonnaire, presque imaginaire. La simplicité s’était imposée d’elle-même quand j’avais eu la brillante idée de lui envoyer un message texte puis un autre et un autre, assumant un peu trop cette nouvelle promesse de lâcher prise, de prendre la vague lorsqu’elle passait, et surtout de ne pas tirer un trait sur ça, peu importe ce que c’était. Pour la simple et unique raison que la relation qu’on avait tous les deux était la chose la plus simple, la plus douce, la plus fun que j’avais connue depuis longtemps, et qu’il était hors de question que je le gâche au même titre que tout ce que j’avais touché récemment. Bien sûr, lorsqu’on pensait à jouer, à oser, à déconner, le nom de Ben s’était imposé, et maintenant il n’était qu’une évidence alors que je dépose mes mains de chaque côté de la moto, attrapant les poignées prévues pour qu’on s’y agrippe fermement. « J’ai bu que du jus d’ananas hier, j'te dis… ils ont dû le laisser trop longtemps à l’air libre, ça a fermenté. » mine de rien, je m’en balançais un peu qu’il ait eu à subir une Ginny alcoolisée, tout simplement parce que je savais bien qu’il avait dû rigoler de voir mes frasques. Les voitures commencent à ralentir de l’autre côté, signe que le rouge passera au vert sous peu, et je finis par rouler des yeux, comme il ne concèdera pas devant mon excuse bidon. « Ok, soit honoré. Tu as assisté à mes premiers drunk texts. Maintenant, va, répand la bonne nouvelle. » à mon souvenir, je n’avais encore jamais été à un stade où j’avais pu écrire ainsi à quiconque, et voilà qu’à y repenser, je ne me voyais pas envoyer mes singeries, et autres selfies dégeulasses à personne d’autre. J’espérais que ça l’avait amusé un peu, à mes dépends bien sûr, mais un peu tout de même. Le moteur bourdonne, et il ne reste que quelques secondes pour qu’il décide si je suis de trop, ou si je peux me joindre à sa prochaine aventure, peu importe ce en quoi elle consiste. J’ose. « Vers l’infini et plus loin encore! » le doigt qui pointe vers l’avant, j’espère tout de même qu’on ne me montrera pas de suite la sortie. Ce serait bête, que mon casque vive son premier trajet en direct du trottoir, et non du bitume.    
 

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benny ▲ two of us on the run Empty
Message(#) Sujet: Re: benny ▲ two of us on the run benny ▲ two of us on the run EmptyMer 30 Aoû - 14:29


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“Gin ?!” je m’exclame, la voix étouffée par le casque sur les joues, les yeux ronds comme des billes derrière la visière, et le pied bien appuyé sur le bitume afin de nous éviter à tous deux de tomber par terre comme des idiots à cause des acrobaties de la cascadeuse improvisée. Je ne me détends que lorsqu'elle est bien installée et que nous sommes stables. La surprise me laisse une impression mitigée qui s'évapore rapidement. Quasiment pas de signe de vie depuis ses baisers dans l'atelier, de rares textos qui hurlent “j’ai besoin d'air”, et hier, le parfait opposé, une foule de selfies laids et d’emojis à double, triple sens. Elle fait la morte, elle revient du néant, à quand la prochaine crise de bipolarité ? Pas que cela me dérange tellement. Disons que c'est pour le principe. Sauf que je ne suis pas spécialement un type de principes ou un grand moralisateur. Alors en soi, une bonne blague est largement suffisante en guise d'excuses, et j'accepte mon passager clandestin sans broncher. “Ouais, les barmen ont tendance à pas faire gaffe à leurs ananas, je connais bien.” je réponds comme je peux à travers l'épaisseur du casque, hurlant presque, tout comme elle. Si nous n'avions pas cette excuse de la sécurité, nous aurions l'air de deux vieux au sonotone mal réglé sur un pédalo. Pas besoin de se justifier, l’alcool et moi avons une grande histoire, j'ai connu des cuites, des petites, des grosses, de toutes les couleurs -et cette phrase hors contexte pourrait vraiment prendre un sens tout autre. C'est d'avoir besoin de boire pour se décider à me contacter qui titillé un peu mon ego, alors je me console en me disant que si elle est là, en selle, aujourd'hui, c'est qu'elle n'utilisera pas ce prétexte pour me balancer des regrets à la figure. Oui, peut-être avait-elle seulement besoin d'air, et ça, je suis quand même capable de le comprendre, de le prendre sans l'en accuser. C'est déjà loin derrière nous, le passé. Bien caché, je souris en l'entendant si enthousiasmée par ce petit tour en moto improvisé. Elle donne la direction, le top départ, et je fais vrombir le moteur en lâchant un dramatique Bruce Willisien ; “Ok, accroche toi poupée.” Et le bolide prend la route à toute allure, sème les voitures ; non, ce ne sont plus des voitures, ce sont des astéroïdes, et la moto, un vaisseau spatial. Le paysage défile, flou, plein de formes étirées et de tâches de couleurs, et ça me plait assez d'avoir une passagère à l'arrière, une copilote qui hurle à chaque virage et m'encourage à écraser les petites mamies qui attendent de traverser sur le trottoir. Ça roule bien jusqu'à l'immeuble auquel je le rendais à l'origine. La béquille calée, j'ôte enfin mon casque et rabat mes cheveux en ordre d'un furtif passage de main dans la crinière. “Vous êtes arrivée à destination.” j'annonce façon GPS, ayant longuement entraîné mon ton monocorde et robotique jusqu'à atteindre la perfection. Ginny descend du bolide, puis c'est à mon tour, et un talon dans le ventre de la jeune femme plus tard ainsi qu'un demi million d'excuses pouffées entre deux éclats de rire, nous arrivons devant les grandes portes vitrées de l'entrée du bâtiment. Les clés de la bécane sautent dans ma main, comme dans celle d'un John Travolta ou d'un Elvis Presley, puis j'entre comme si le monde m'appartenait. Direction l’ascenseur, pas de la dernière nouveauté, mais il y a un grand miroir dans le fond, et ça, c'est un bon point. “Quitte à t’incruster, tu vas pouvoir te rendre utile.” dis-je à Ginny en arrangeant mes cheveux pour la quinzième fois, et offrant un sourire ravageur à mon propre reflet. Direction le troisième étage, que j'appelle affectueusement l'étage de la loose -pas assez haut pour avoir une vue intéressante, et assez bas pour qu le soleil soit caché par les autres immeubles toute la journée. C'est bien pour cette raison que ces locaux sont aussi abordables, en plus d'être un brin excentrés et partagés avec quatre autres start-up qui se partagent la même hôtesse d'accueil à la mâchoire ruminante, Mandy, dont le téléphone ne cesse jamais de sonner. Mais tout cela n'a aucune importance, car il faut bien commencer quelque part, et que je suis déterminé, cette fois, à prendre mon envol, lancer ce business, conquérir le monde -ou juste quelques bons clients. J'ouvre donc une porte qui mène sur un espace de tout à fait convenable, de quoi installer un petit salon, une fontaine à eau, puis, derrière une seconde porte, un bureau, peut-être même deux, avec une fenêtre (détail important). En bref, une chance à prendre, un tremplin pour sauter plus haut, plus loin. Bien plus loin que les placards à balai exigus des commis d'office qui se partagent une trentaine de dossiers par jour à défendre en quatre-vingt-dix secondes max devant un juge qui ne pense qu'à son rendement et ses quotas. “Bienvenue dans les (peut-être) nouveaux et surtout premiers locaux de Brody and associates.” je lance, bras ouverts au milieu du bureau avec le grand sourire de celui qui y croit, celui qui se croit plus grand que la vie, qui pense avoir réussi à craquer le code, et ce, malgré quelques contretemps qui se dressent entre moi et ce si beau projet. “Enfin, si j'arrive à réunir deux mois de loyer d'avance et trouver un cosignataire pour le bail, mais à part ce détail, comment tu trouves ? T’es une femme, t’as naturellement l'oeil pour ce genre de trucs » J'en suis à un loyer et demi, et personne sur qui compter pour se porter garant. Debra n'est pas une option, je ne compte pas retourner demander de l'aide à mes parents, Dean n'apparaît même pas dans les options, quant à Matt, il a bien assez à assumer avec sa propre affaire. Mais je trouverai. Je droguerai quelqu'un et le ferai signer, je tenterai l'hypnose, je me déguiserai, je ferai croire que Adam a vingt-et-un an. Il y a toujours une solution.
 

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benny ▲ two of us on the run Empty
Message(#) Sujet: Re: benny ▲ two of us on the run benny ▲ two of us on the run EmptyMer 30 Aoû - 16:52


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Benny



I'm a rebel just for kicks, I’ve been feeling it since 1996, now. We could fight a war for peace, give in to that easy living. Say hi to my hopes and dreams, stop flipping for your enemies.

Exactement comme je l’imaginais, comme je l’espérais. Le long silence derrière nous, le besoin de refaire le point, ou du moins de calmer ces ardeurs que je ne me reconnaissais pas, et tout malaise est chassé complètement. Il rigole, il sourit, il se pousse un brin pour que j’arrive à m’installer sur sa Yamaha. La facilité avec laquelle on se retrouve comme si je ne l’avais jamais quitté, le naturel aussi. Ça m’a manqué, il m’a manqué, probablement pas comme il aurait fallu, et c’est ce que je range soigneusement dans un coin de ma tête, obéissante maintenant. Il annonce qu’on part, il me conseille de m’agripper, et je connais assez son amour pour Mario Kart et les poursuites de bolides à la Fast and Furious pour ne pas douter une seule seconde qu’il se la jouera yamakasi, passagère ou non. Et Ben me le confirme, en prenant les virages serrés, en provoquant des exclamations de surprise quand il s’arrête brusquement, forçant nos casques à se cogner l’un sur l’autre sous mes éclats de rire. J’avais pas particulièrement peur, je sursautais juste facilement, et là, cette voiture qui arrive par la gauche, qui semble pas trop voir le signal d’arrêt, qui prend la courbe, et c’en est trop pour mon stoïsme, je flanche avant même qu’il ne daigne ralentir. « Ben, Ben, Beeeeeeeen! » suffira à ce que les poignées de la moto ne me conviennent plus et que mes mains accrochent les rebords de sa veste pour l’emmener avec moi dans ma chute s’il tangue trop en évitant le pire. Ce qu’il fait avec brio, s’esclaffant au passage. La partie de GTA prend des dimensions natures lorsqu’un groupe de piétons trop téméraires essaie de nous barrer la route, et je les pointe absolument hilare, les décibels qui doivent crever les tympans du pilote, mais qui seront bien utilisés au compteur de cette promenade qui n’en finit plus « Eux! 10 points chacun! ». Il fonce, ils s’écartent, je tourne la tête pour m’assurer qu’ils ont regagné le trottoir et qu’on ne les y reprendra plus à traverser sans signal l’autorisant, et nous voilà à disparaître au prochain feu vert. La moto se faufile à travers les rues et les ruelles, empruntant les petits passages, avant d’aboutir au pied d’un immeuble comme les autres, qu’on ne remarque plus, qui ne fait pas tâche mais pas non plus intérêt. Ben arrête le moteur et retire son casque, me confirme qu’on est à destination, et j’aurais renchéri avec une voix robotique s’il ne m’avait pas coupé le souffle à sa descente. J’ai le corps plié en deux d’avoir reçu un coup de pied sorti de nulle part, et de voir son grand corps effilé se contorsionner de la sorte est aussi ridicule qu’alarmant. « Et après tu dis que t’es pas capable de toucher tes orteils… » que je finis par blaguer, essuyant les larmes de rire au coin de mes yeux, sa maladresse qui m’aura très certainement refilé un bleu sur l’abdomen qu’on pourra admirer dès demain matin. Passage par l’entrée, il ouvre, je me faufile sous son bras, j’évite même de lui dire que peu importe comment il place ses cheveux, c’est la grande ligne, le pli formé par son casque trop serré qui prend tout l’espace sur son front qu’on voit. Il ne le réalisera que plus tard, en se souriant à travers le miroir, ou du moins, je crois qu’il l'a vu. Bref. « Ça commence dangereusement comme un mauvais film porno ton truc. Pas que j’aie des références, mais… » en suspens. Trop mystérieux pour que je puisse mettre le doigt dessus, si je n’avais pas connu Ben d’avant j’aurais pu croire à un kidnapping, à du trafic de pauvres victimes entre ici et la Thaïlande. Mais à le voir jouer avec ses clés, agiter la jambe, sourire bêtement, j’ai presque l’impression qu’on est passés en mode espion, prêts à s’infiltrer dans le penthouse de son ennemi juré pour y voler un dossier important. Les portes d’acier finissent par s’ouvrir sur ce qui ressemble à un espace de travail si j’en crois le classeur qui traîne par là, et la table tout devant qui sonne comme un accueil peut-être, le QG des standardistes. Il ne faudra qu’une poignée de secondes avant que je tourne la tête vers Ben avec les sourcils froncés, trouvant son scénario particulièrement curieux pour un dimanche après-midi, l’imaginant beaucoup plus profiter des botomless mimosa à l’autre bout de la ville, que de zig zager dans un open space vide. Il a la voix qui chante, le sourire qui ne fait que s’agrandir, et il présente ce qui a la possibilité de devenir son nouveau lieu de travail, à des kilomètres de l’espace qu’il partage actuellement, commis d’office noyé dans la masse où il n’est clairement plus heureux, pas assez accompli à son goût. Son entrain est contagieux, et je sens mon visage passer par toutes les gammes d’émotions, jolie grimace qui joue entre l’incompréhension, la surprise, l’excitation, la curiosité. « Vrai? (Peut-être), vrai? » j’ai un petit trémolo à peine audible qui passe, grande dose de fierté de voir qu’il n’a pas juste lancé ça, un soir entre deux tacos, avec le château des princesses qui sert de lampadaire pour illuminer nos pas. Ce n’était pas un plan qui était tombé à l’eau, qu’il avait mis de côté, qu’il avait laissé aller au profit du confort, de la sécurité de son boulot actuel. Et ça lui allait bien même malgré ce qu’il énonce, à savoir les tracas de la vie et les obligations monétaires qui ne semblaient toutefois pas l’avoir empêché de rêver jusqu’à poser le pied dans ce possible local. « Je pourrais te dire de vendre un de tes reins sur le marché noir pour payer la différence, mais ce serait légèrement ironique. » que je lâche, haussant les épaules, consciente du capital malaise de la blague, qu’il prendra probablement mieux que quiconque. J’avais passé le stade où la simple mention de Noah me brisait le cœur, et il fallait bien qu’on dédramatise le tout un peu. Le pire, c’était que mon fils lui-même aurait ri, c’est pour vous dire à quelle phase on pouvait bien se trouver, désormais. Esquissant un pas maintenant que Ben me demande mon avis, je commence ma petite enquête, mon travail de détective du propriétaire, improvisant une visite guidée de l’espace le temps de me faire une tête. Pas d’agent immobilier dans les pattes, personne pour nous vanter la clim à gestion indépendante, la proximité des services, la rue tranquille après les heures d’ouverture, et le calme, le silence me rappelle à quel point c’était l’inverse, lorsqu’on avait sillonné Londres à la recherche d’un loft pour notre petite famille de l’époque. Elle était loin la Ginny qui hochait doucement de la tête devant le walk-in intégré, ou la véranda avec vue sur la Thames. « Il manque d’amour. » que je finis par lâcher, diagnostic sorti, regagnant la pièce principale où Benjamin m’a attendue sagement. En soit, l’endroit n’a pas mauvaise mine, et il n’y a rien qu’un peu de vie, qu’un peu de temps et de matériaux ne puissent pas faire pour améliorer sa condition. Il y a assez de place pour une autre, deux autres personnes, des espaces de travail, une lumière naturelle pas aveuglante, mais douce. Pas de possibilité pour l’expansion, mais pour ça il aura toujours son manoir de marbre à Bali, je ne m’en fais donc pas pour son cas. Relativement convaincue par la valeur qualité/prix de l’endroit - sans savoir le prix exact, faut dire, j’attrape la main de Ben pour l’attirer vers exhibit A, que je présente solennellement. « Tu pourrais avoir ton bureau ici. Le truc cool avec la chaise spatiale, tu sais, de dos et quand le client arrive tu tournes lentement. Basic Instinct style. » joignant le geste à la parole, je file me tenir en plein centre de la pièce, assise dans les airs et dos à lui, tournant sur moi-même pour finir par lui offrir un visage fermé, mystérieux. D’ici, on passe à l’autre section fermée, de laquelle un vilain craquement du plafond à la moulure attire notre attention. « Un peu de peinture et de plâtre pour masquer les fissures… c'est pas bien problématique. » rien qu’on ne puisse pas couvrir, rien qu’un cadre, même, ne pourrait pas cacher derrière son vinyle. Il y avait un peu de travail à faire certes pour que l’endroit ait un potentiel propre et professionnel, mais pour le moment je ne voyais que des détails. Des détails, et une évidence. « Avec un peu de chance, tu pourras payer le loyer en pariant à savoir si le voisin d’en face porte des pantalons, ou s’il est encore type naturiste. » je pointe du menton, pinçant les lèvres pour ne pas rire trop fort à l’insu du pauvre bonhomme qui ignore que deux intrus ont vue plongeante sur son intimité de l’autre côté de la rue. Ça avait du cachet, de la personnalité, fallait le noter. Quelques pas s’additionnent pour nous ramener dans le hall, ou ce qui aurait la possibilité de le devenir, et je fais un tour sur mes pieds pour revoir l’endroit dans sa totalité une fois de plus. « Y’a 4 murs, un plancher, une serrure, et c’est droit. » l’essentiel pour que ça fonctionne, pour que ça ait un minimum d’allure une fois le temps et les dollars bien investis. « Et j’aime la vue qu’on a, en entrant. Sur le mur ça pourrait être ton nom en grand, en or, avec des paillettes. Ou en mode sérieux, your call. » autant le gagner par les sentiments, maintenant que je pointe le grand vide, blanc, qui fait face à la porte et sur lequel j'imaginerais bien le nom du cabinet prendre toute la place, comme dans n’importe quelle bonne série télé d’avocats. Additionnez à cela de la verdure, une réceptionniste au eyeliner impec, quelques clients qui patientent en soupirant sur des sièges semi-confortables qu’on empilerait en diagonale, et ça pourrait très fortement le faire. Je perce la visualisation minute silencieuse d’un « On va devoir te vouvoyer maintenant. » maligne, amusée. « J’suis fière de vous, Maître Brody. » malgré la question du chèque de loyer à laquelle il devra un jour répondre, malgré le stress de partir seul, sans aucune assurance, malgré la réorientation complète, j’ai cette impression, celle qui me souffle qu’ici, en ce moment, il n’est plus juste un grand gamin avec une idée en tête qu’il cassera de ses neurones dans 2 secondes. Il y tient, et d’assister aux premières bribes du truc me réchauffe le cœur, assez pour savoir déjà quelle plante je lui achèterai, pour habiller ce coin vide, là, juste devant.

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benny ▲ two of us on the run Empty
Message(#) Sujet: Re: benny ▲ two of us on the run benny ▲ two of us on the run EmptyMar 5 Sep - 13:22


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Ce doit être la quinzième fois que je viens ici, toujours aussi sûr de moi en arrivant, toujours rempli de doutes en partant. Ce n’est pas mon genre, mais pour un projet pareil, je peux difficilement sauter les yeux bandés. Cela est non seulement une question d'investissement de mes économies, mais aussi de ma carrière -et c'est sûrement la seule chose que je prenne au sérieux, peut-être même plus que mon rôle de père, c'est dire. Je viens en ne voyant que le potentiel de cet endroit, bourré d'idées, d'envie, de hargne ; puis j'en vois les failles, c'est peut-être un drôle d'endroit pour un cabinet après tout, c'est peut-être trop difficile de se lancer seul. Je viens ici, j'erre dix ou quinze minutes, je pense, je réfléchis, ce qui est tout aussi inhabituel, puis je repars dans être plus avancé. Si cet espace n’est toujours pas loué, c'est qu'il y a une raison, non ? Il est sur le marché depuis des semaines, il n’est pas cher. Où est le vice ? Je tourne en rond. Alors peut-être que l'arrivée impromptue de Ginny à l'arrière de la moto est un signe de la providence. Peut-être qu'elle m'aidera à décider, à comprendre, prendre une décision. “Peut-être carrément vrai de vrai.” je réponds avec un sourire, ravi de deviner au moins autant d'enthousiasme que moi dans le regard de la jeune femme. Cela fait des mois que je songe à lancer mon affaire, à mettre mon nom quelque part, et cesser de quémander toujours plus de dossiers de chiens écrasés au tribunal pour arrondir les fins de mois bien souvent ric-rac. Est-ce que je ne vaux pas mieux que ça après tout ? Hell yes. Et je veux sauter, je veux prendre ce tremplin. J’ai juste besoin qu'on me donne une tape dans le dos. Oui, comme un gosse, j'ai besoin qu'on me rassure, ou qu'on me dégage du nid d'un grand coup de savate. Ginny me décroche un rire nerveux -on ne sait jamais s'il fait vraiment rire aux blagues qui concernent Noah, souvent il est plus facile pour les concernés d'accepter la dérision qu'ils ont font eux-mêmes que celle des autres et déterminer une bonne intensité de rire est terriblement touchy. “Eh bien, ça dépend, tu le prendrais pour combien ?” Car quitte à donner un rein, autant qu'il aille à la bonne personne et qu'il ne termine pas greffé au Moyen-Orient sur je ne sais quel terroriste qui s'est raté, ou sur un étale d'un marché japonais entre les becs de coq grillés et les brochettes de scorpion. Ça serait ma bonne action d'une vie. Suivant les pas que j'ai si souvent effectués dans les bureaux, Ginny se permet une courte visite des lieux. C'est très vide, très blanc et gris, mais très lumineux. Il y a tant à faire ici. Il y a tout à faire à vrai dire. Je me laisse tirer vers la pièce qui serait le bureau et j'achète sans hésiter le petit numéro de la brune qui se la joue Dom Corleone presque mieux que moi -pardon, c'était Sharon Stone. “Oh, j’aime cette idée.” J'approuve d'un signe de tête, un sourcil arqué particulièrement intéressé par toute la dimension dramatique de la scène. Au moins, les clients s'en souviendraient. “Dis-moi que tu ne portes pas de sous-vêtements et je suis tout à toi.” j'ajoute, parce que sans cela, ça ne serait pas du vrai Brody. Dans la pièce suivante, la peinture un peu usée trouve immédiatement une solution pour la peinture en herbe. Et la grande baie vitrée attire l'attention d'une Ginny qui ne manque pas de remarquer le moindre détail, même ceux de l'autre côté de la rue. Mes yeux s'arrondissent face à la vue sur nous avons d'ici. Nous sommes deux à pincer nos lèvres afin de retenir un rire vilain et moqueur. “Acheter des volets, je note.” Ou faire fumer une partie de la fenêtre, c'est une astuce que j'ai déjà vu sur Pinterest -oarce qu'il n’y a pas que les futures mariées qui utilisent ce truc, pas vrai ? De retour dans le hall, le bilan est positif. Ginny s'y voit déjà, moi aussi, depuis longtemps. Alors pourquoi ne pas sauter le pas ? Allez Ben, c'est un sacré pas, c'est un saut d'un bout à l'autre d'une falaise, mais ce n’est pas si effrayant que ça. Ou peut-être que si. Quoi qu'il en soit, la vision de mon amie a quelque chose de rassurant. Elle me fait sentir plus confiant concernant ce projet. “Je pensais à un gros Brody en néons rouge façon vidéoclub dans une cave de Manhatthan, ou sex shop underground spécialisé dans le porno amateur avec des chats. Mais des paillettes ça le fait aussi.” je retorque avec un haussement d'épaules, l'air presque trop sérieux, laissant planer le doute sur la blague. Dans un soupir, je lève un peu de la poussière sur mes vieux rêves qui, pensais-je, se resumeraient seulement à cela. On s'y croirait. Je souris à Ginny et je me dis que, ouais, moi aussi je suis pas peu fier. Ça peut le faire, ça doit le faire. “On dirait ma mère le jour de ma remise de diplôme.” dis-je pour mordre un coup dans ce trop plein de solenellité et balayer le sentimentalisme. J’ai un bon pressentiment. J’ai surtout besoin de remplir toutes les conditions d’acquisition du bail. “Il me faut un partenaire. Il faut que je trouve un pigeon pour se lancer là-dedans avec moi, être cosignataire, et en échange, il aura l’honneur d’avoir son nom à côté du mien -mais après le mien, c’est évident. Brody, Pigeon & Associates. Bordel que ça sonne bien.” C’en est presque bandant. Je me tourne vers une autre grande surface trop blanche, face à là où j'imagine les canapés où mes si nombreux clients s’empileront dans l'espoir de me voir, là ils joueront des coudes pour m'avoir comme avocat. “Et sur ce mur… Sur ce mur, je veux une peinture de toi.” j’annonce en étirant grand les bras -audsi grand que j'imagine le monument en question. “Par toi, je veux dire. Pas que je serais contre une peinture de toi, façon boudoir de préférence, histoire de prendre les clients par les sentiments -si tu vois ce que je veux dire. Mais plutôt un truc que t’as fait.” Je ne me suis toujours pas découvert de passion pour l'art, pas même une sensibilité à ça, mais je sais que ça ferait classe, que d'autres aimeront, qu'ils pourraient vouloir qui l’a fait, et moi je dirai fièrement que c'est Ginny McGrath, une très bonne amie à qui j'inventerai un carnet de commandes overbooké pour les trois prochains mois si cela n'est pas réellement le cas d'ici là. “Quelque chose qui pousse les clients à se pencher sur le sens de leur vie et se poser des questions comme “et si je payais Ben le double de son forfait habituel ?”, et les clientes “est-ce qu’il prend les paiements en blowjobs ?”.” Et la réponse est non, j'aurai du mal à payer mes factures avec ça, mais en dehors des heures de boulot, je prends.

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benny ▲ two of us on the run Empty
Message(#) Sujet: Re: benny ▲ two of us on the run benny ▲ two of us on the run EmptyMer 6 Sep - 9:27


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Benny



I'm a rebel just for kicks, I’ve been feeling it since 1996, now. We could fight a war for peace, give in to that easy living. Say hi to my hopes and dreams, stop flipping for your enemies.

La silhouette tout sauf subtilement dénudée de l’autre côté de la rue m’écarquille les yeux, avant de provoquer un rire étouffé commun, ses quelques mouvements de haut en bas qui en dévoilent beaucoup - trop - pour nos pauvres rétines pas du tout prêtes à subir ce genre de vision. « Ou un tableau blanc pour noter les résultats de vos gages. » je suis tout de même déçue que le voisin ne devienne pas la star de l’endroit, à raison de soirées shots incognito où Ben et ses potes s'installeraient dans le noir à commenter combien de secondes le type prendra cette fois pour mimer des pauses de Monsieur Muscles sans muscles devant la glace. Ma pudeur colore tout de même mes joues d’un rose vif, et je me détache de la baie vitrée pour revenir aux côtés du Brody, et terminer en bonne et dûe forme cette visite qui me laisse un bon présage. Assez, que je m’élance vers le mur face à l’entrée, celui qu’on ne peut pas manquer, celui qui fera de l’ombre à tout le reste, celui où il pourra s’éclater et prouver son trip narcissique en lançant son affaire d’un 5 à 7 bien huppé au pied des lettres qui afficheront son nom en gros caractères flashy. Sa contre-proposition me fait éclater de rire, et toujours prête à aider j’en suis à 2 secondes de sortir mon portable de mon sac pour y chercher le nécessaire pour organiser une séance DIY de fin de week-end. « Faudrait regarder du côté de la face cachée et glauque d’Etsy, mais on devrait être capable de te faire faire du surmesure. » mon envie d’acheter une plante pour orner les locaux passe au second rang, un nouveau cadeau vient de se hisser à la première place côté accueil réussi. Mais trêve de folies - pour le moment. J’inspire, me pose, m’ancre au sol, laisse mes iris caresser du regard encore une fois ce que je peux bien voir, ce pourquoi il m’a laissé le suivre aujourd'hui, à savoir un deuxième avis, un peu de feedback. Je ne doute pas qu’il a remué la chose en tous les sens, rien qu’à voir ses doigts qui s’agitent, ces quelques tics qu’il développe à chaque fois que le silence prime sur nos conneries habituelles. Je comprends le grand saut, je comprends la prise de risques, je comprends surtout l’adrénaline qui coule dans ses veines en ce moment, et contre laquelle il lutte bien malgré lui pour faire les choses bien, pour prendre le temps d’y réfléchir plutôt que de sauter sous l’impulsion comme il aurait tendance à faire. Et mes grands yeux de gamine assistant à ce genre de moment qu’on garde bien ancré, dont on se souvient pour des tas de raisons, mais surtout parce qu’on le sent, qu’on le sait que sur l’instant, ça veut dire plus, ça veut dire grand, se posent sur lui, sur un Ben en réflexion, sur mon ami que je n’estime que plus, sur ce mec qui en a assez de reléguer son rêve de côté, qui a envie d’agir lui aussi, d’oser. Quelques mots d’encouragement, des rires nerveux, des sourires à la dérobé, une p’tite blague bien sentie. Mon vieil âge, ma vieille âme qui ressort lorsqu’il me compare à sa mère, et je roule des yeux faussement outrée. « T’es sûr que c’était pas plutôt “Benjamin, remets-la dans ton pantalon, tu es là pour aller pêcher ton diplôme, pas la nouvelle étudiante au pair!” ? » j’essaie d’imiter l’accent irlandais de maman Brody comme il me vient sans l'avoir même entendu, voyant très clairement le portrait que je me fais de la dame en question, cassant à mon tour le peu de sentimental qui aurait pu s’hisser entre nous. J’ai pas envie de lui tirer une larme non, je souhaite simplement qu’il voit à quel point il peut accomplir de grandes choses, à quel point il a déjà fait un immense pas dans la direction vers laquelle il veut aller. Son cerveau roule à la vitesse grand V, je lui laisse toute la place nécessaire pour ressasser à savoir la seule ombre au tableau. Il a véritablement besoin de quelqu’un, une personne de confiance, un alter ego, un allié pour se lancer, pour confirmer ou infirmer la suite, pour le supporter aussi. Les mains dans les poches, je trouve ça plus que bête et injuste qu’il ait besoin de se mettre quelqu’un d’autre dans les pattes, pour la simple et unique raison que je sais très bien qu’il est capable de tout faire tout seul, qu’il n’est pas de ceux qui doivent se reposer sur d’autres, qui en sont dépendants. La question du fric qui vient tout gâcher, que je capte aussi, qui n’est jamais facile à annoncer et à accepter, mais avec laquelle Ben semble avoir fait la paix. Il est conscient que ça ne sera pas parfait, et il y voit tout de même une belle grande dose de positivisme. Ce nom qui passera en deuxième, qui lui donnera un petit boost de confiance supplémentaire, qui m’arrache un énième rire devant le pauvre associé qui devra avoir les nerfs solides question de ne pas flancher trop vite au lazer tag de fin de journée de boulot, tout comme il sera nécessaire qu’il sache se tenir droit devant les frasques de Ben devant le juge - je l’imaginais bien être le genre d’avocat soit super posé et mystérieux, soit hyper loquace et extraverti au courtroom. À voir - et y'avait rien qu’un billet de 50$ ne m'achèterait pas lorsque le dit pigeon serait là pour rester. Néanmoins, ce blocage de signature me reste en travers de la gorge. « Ça sonne bien, ça sonne parfait. » que je finis par articuler, l’équation du nom du cabinet qui claque dans ce hall sans meubles où l’écho résonne sur le linoléum. C’est au tour de Ben d’y aller de suggestion décoration, et je le vois s’avancer vers le mur à ma droite, l’autre grand pan qui semble englober toute la pièce tellement il est vide et seul ; ce qu’il ne sera pas très longtemps à entendre les mots du Brody. De suite, sa demande me serre le ventre, un mélange de chaud, de froid, de stress et autre anxiété qui se déclenche, qui me confirme que je n’ai plus peint pour personne depuis des années et que j’ignore si je suis la candidate idéale pour lui offrir quelque chose de bien, quelque chose qui lui fera plaisir. Apparemment l’épisode des baisers n’a pas cassé ses allusions et ses remarques de dragueur invétéré, et je suis soulagée que la dynamique entre nous n’ait pas changé, autant je ne suis pas du tout convaincue de savoir que mes pauses lascives barbouillées à l’huile pourraient être utilisées pour s’acheter du client. Pourtant, je ne suis pas en mesure de le lui refuser -  de ne rien lui refuser, au final. Ce regard qu’il me lance, ces gestes qu’il fait pour illustrer le truc, il demande doucement, il est adorable, et malgré toutes mes incertitudes et mon immense syndrome de l’imposteur, je finis par hocher de la tête lentement, sentant tout mon corps se raidir sous la charge que je viens de lui imposer. « Tu joues avec mes sentiments là... mais oui, bien sûr, je t'en ferai une. Une immense, une gigantesque, une colossale. » voix qui tente de cacher la gêne derrière le doux. Ne vous méprenez pas, je suis plus qu’heureuse de pouvoir mettre une touche personnelle à l’endroit, je suis flattée qu’il l’ait demandé sans même y réfléchir à deux fois, mais j’ai peur de le décevoir. Étrangement, j’arrive tout de même à cacher le truc foncièrement bien en laissant doucement l’humour prendre la place, bien qu’à travers mes yeux je laisse tout le reste se sous-entendre. « Et je me doute que tu seras encore plus appréciatif si l’introspection cache des boobs façon illusion d’optique ou un zizi en dégradé qu’on aperçoit juste si on fixe le tableau super longtemps? » la question de comment insérer une partie d’anatomie masculine à travers un camaïeu de bleu et de vert se note d’elle-même dans mon calepin mental, et je rigole toute seule à l’idée de devoir maintenant brainstormer sur ce genre de chose. Il reste tout de même un poil d’inquiétude dans la voix de mon ami, et je me doute bien qu’aucune mise en scène, qu’aucune autre belle phrase pleine de fierté ne pourra lui offrir ce dont il a réellement besoin. J’attrape son regard à la volée, un sourire des plus rassurants, une introduction à plus utile peut-être. « Je vois le truc, Ben. Pas juste parce que c’est cool, mais parce que tu le mérites. » il n’était jamais à l’aise lorsque je lui avançais ce genre de commentaires - à savoir qu’il mérite quelque chose en particulier. Ben n’était pas du style à s’attarder à ça, il prenait trop souvent ce qui passait, il se contentait de ce qu’il y avait sans trop se poser de questions, sans voir pour mieux. Lorsqu’il était débarqué à l’atelier des soirées durant pour relire avec moi les contrats, pour annoter ce qui était trouble dans les failles de mes parents, ce qui m’aiderait à me sortir de tout ce foutoir pour lequel on m’avait forcé à signer, j’avais vu l’avocat qu’il était, le mec professionnel, la carrure solide, le héros qui ne lâche pas l’affaire avant qu’il l’ait lui-même décidé. Et ce n’était pas dit que j’allais le laisser passer à côté de cette opportunité pour une raison aussi banale qu’un autre nom sur son bail. « On fait la liste des potentiels pigeons? Tu as déjà des candidats en tête ou tu pars de rien? » prenons action, donc. Je sors mon carnet de croquis de ma besace, l’invite à s’installer à mes côtés au sol, maintenant que j’ai rejoins ce qui deviendrait ultimement son bureau. Crayon en main, je prête l’oreille, notant les noms qui sortent au fil des minutes. À chaque fois qu’il mentionne un prénom féminin, je me laisse à demander « Et elle est sexy en tailleur au moins? » pour justifier le fait que j’appose sa marque du côté gauche - le bon - de la liste, ou du côté droit - celui auquel on ne portera plus attention dans une poignée de secondes. Pour les mecs, pour m’éviter qu’ils envoient du shade au Brody, je développe un système de rang à savoir combien sur 10 sont aussi ou presqu’aussi drôles que Ben, et quelques smileys grivois s’ajoutent au bout de leur patronyme pour jauger de leur potentiel de sex appeal. Les minutes passent, j’ai une page bien gribouillée, mais rien qui ne semble sauter aux yeux de Ben, le motiver, l'emballer - et ça m’agace. Il ne devrait pas choisir par dépit, il ne devrait pas laisser des courbes moulées par une jupe crayon dicter le nom de sa firme, il ne devrait pas jauger de son associé comme celui qui rira à chaque fois de ses blagues de pets, mais voilà qu’il y est réduit, pour ce qui me semble être la raison la plus injustifiée de l’univers. Tellement, que cette sensation qui brûle, qui gronde, cet inconfort dans lequel je suis depuis qu’on s’est posé pour y réfléchir semble se clarifier, se mettre en mots, se dessiner. Et si? Ce n’est pas pleinement con, ce serait temporaire, ça lui éviterait de sauter doublement, à savoir de changer de carrière et de se coller un choix à la va vite entre les pattes. C'est un entre-deux. Ça vaut la peine d’être énoncé à haute voix, non? Au pire, il en rira, au pire, je ne serai pas restée là sans rien lui donner, sans lui rendre au moins une parcelle de tout ce qu’il a pu faire pour moi depuis janvier. Rapide oui, logique, naturel surtout. « Tu sais, je pourrais... genre pour les premiers mois, le temps que tu te places… ça m’arrangerait et toi aussi et... » ma pensée roule vite, je réfléchis à voix haute, j’essaie de voir comment on pourrait arrimer le tout pour qu’il ne se sente pas envahi, et pour qu’il ne le prenne pas comme un cadeau plein de pitié, pour qu’il voit que pour moi aussi ce serait utile, mais le bruit d’une clé dans la serrure me fait sursauter, et me plaquer direct sur le mur derrière nous de façon à cacher notre présence le temps de savoir si tout est nickel, si tout ceci n’était pas le hoax que j’avais prévu en venant ici, s’il ne s’agit pas en effet de son pire ennemi qu’on surprendra à grand coup de savate une fois qu’il aura le dos tourné. Je pose un index sur mes lèvres, fronce les sourcils, et écoute ce qui se raconte dans la pièce d’à-côté. « Et ils disent que le propriétaire est un vrai sadique. Même si on se plie à ses demandes irréalistes quand tu penses qu’il n’y a pas de clim, et que le chauffage sent le brûlé lorsqu’on l’active. » ah, tiens. How convenient - l'énumération de vices cachés qu’on n’arrivait pas à voir qui commence à se dresser du bout de la langue acide d’un mec qui a l’air bien blasé. « Mais le loyer est plus qu’abordable. » et un autre type qui renchérit, peut-être un agent immobilier, peut-être un pote, peut-être un associé? Je ne bouge pas, respire à peine, Ben m’imite alors qu’on joue aux oreilles fines, aux intrus le temps d'anticiper la suite. « Pour un local sans rangement avec des voisins bruyants et directement près d’une voie ferrée - j’ai vu mieux. Mais comme il n’y a rien d’autre... » oh, oh. Alerte. Évidemment que d’autres candidats potentiels voudraient mettre la main sur l’endroit, évidemment que Ben n’était pas seul. Reconnaissant maintenant un peu mieux cette impulsion qui m'assaille de plus en plus souvent, mon corps se lève d’un trait, comme alimenté d’une mission - celle de ne pas le laisser tomber, celle de tout donner pour que Ben ait ce qu’il mérite, pour qu’il ne passe à côté de cette opportunité, d’un truc qui le rendrait heureux, fier, accompli. Un dernier regard dans sa direction, maligne, surprise, et j’apparais dans l’embrasure de la porte, me dévoilant aux deux nouveaux venus. « Oh, on ne vous a pas dit? » ma voix est un peu enrouée pour l’avoir tenu si longtemps dans l’attente, silencieuse, mais je m’en balance pour laisser la bouffée de confiance faire le reste, me convaincre de tendre la main dans leur direction, d’afficher un sourire de vente, le truc bien Colgate, bien imposant. « Virginia McGrath, de Brody, McGrath and associates. L’emplacement n’est malheureusement plus disponible, il vient tout juste d’être signé. » pas question qu’on s’en prenne à cet endroit - et accessoirement à Benjamin. Il y avait tellement de potentiel, il y avait tellement de possibilités, je ferais tout en mon pouvoir pour qu’il y ait droit. L'expression décontenancée des deux inconnus se clarifie, et mine de rien, j’aurais besoin d’un peu de renfort parce que bien vite, je réalise que je suis en train de jouer avec le feu. Les pas de Ben derrière moi me donnent la confiance de garder les épaules encore droites, et de maintenir le regard des autres. Si on tient, si on ment, assez longtemps, on en sera débarrassés, non?  

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benny ▲ two of us on the run Empty
Message(#) Sujet: Re: benny ▲ two of us on the run benny ▲ two of us on the run EmptyJeu 14 Sep - 18:08


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D'un coup de coude et d'un sourire, je réponds à la taquinerie de Ginny ; peut-être bien que ma chère mère aurait aussi pu dire quelque chose dans ce goût là, mais elle était souvent plus occupée à hurler sur tous les toits son soulagement qu'un tempérament comme le mien ne m’ait pas poussé à complètement rater ma vie. Ils n'ont jamais approuvé mon départ pour l'Australie, surtout pour Dean. J’avais deux soeurs, personne pour véritablement me comprendre dans la famille, et j'avais Dean que je connaissais depuis approximativement le berceau. Il a eu la priorité sur eux. Je comprends que cela les ai touché, au fond ; ils auraient aimé qu'aucun d'entre nous ne quitte le cocon familial et que nous soyons les uns sur les autres sans des appartements autour du pub Brody pour toujours. Il a fallu attendre une j'achève ces études et que je prouve que j'étais heureux, ici, aussi loin de l'Irlande que possible, pour qu'ils acceptent que ma vie ne serait jamais là-bas. Même si, parfois, le pays me manque, comme tout expatrié. “C'était un pur massacre de l'accent irlandais, bravo.” dis-je en appuyant un peu sur le mien, histoire de bien lui montrer comment on s'y prend. Si je faisais pire, si je m’élevais au niveau de certains habitués du pub qui causent dans leur barbe et leur double menton, elle ne comprendrait même pas les sons que j’émets. Il était toujours très amusant d'observer certains spécimens qui venaient réclamer leur pinte quotidienne. Et de leur faire les poches lorsqu'ils étaient un peu trop accoudés à leur table, trop saouls pour remarquer ou en avoir quelque chose à faire, quand je passais pour récupérer les verres vides et nettoyer les tables. Il faudra bien que j'y retourne un jour, afin que mes parents fassent la connaissance d’Adam en personne et non par Skype. Ils hurlent constamment sur l'écran de leur ordinateur, doutant de la sensibilité du micro de leur webcam comme deux vieux schnocks. Et puis, le gamin doit bien connaître au moins une fois dans sa vie ce que c'est un bisou baveux qui pique d'une mamie. Elle déblatérera encore à propos de la fierté que je lui inspire, car chez nous, les parents souhaitent que leurs enfants deviennent avocat, médecin ou astronaute comme on vise les étoiles, sans pour autant croire qu'ils devraient faire autre chose que reprendre l'affaire familiale, schizophrénie du fond de panier d'une classe moyenne traditionnelle. Si j’arrive à signer ce bail, si j'arrive à me lancer ici, si ça marche… Ce sera au-delà de tout ce qu'ils pouvaient croire que j'arriverai à faire, là bas. C’est encore assez irréel à mes yeux, même si la vision de Ginny me permet de me projeter plus concrètement, de me dire que c'est faisable, que ça peut fonctionner. Elle y croit même plus que moi. L'idée d'avoir un tableau de sa part dans l'entrée me vient tout naturellement. J'imagine juste quelque chose de très grand, classe, inspirant -et elle s'égare dans ce qu'elle croit que j'aimerais pour cet endroit, qui ne ressemble absolument pas à un sex-shop underground contrairement à ce que j'ai prétendu un peu plus tôt pour plaisanter. “N'importe quoi ! Quelque chose de joli fera l'affaire.” Il ne manquerait plus que les clients découvrent qu'il y a des bouts d'anatomie cachés dans l'oeuvre qui sera dans leur première impression du cabinet. “Si tu veux déchaîner ta fibre érotique, viens faire une fresque à l’appart.” Mais ici, ce projet est trop important, trop grand, trop sérieux pour ce genre de blagues lourdingues. Cela me rend assez nerveux pour être honnête. Est-ce que je le mérite, vraiment ? Peut-être que je vise trop haut, trop vite. D'habitude, les avocats qui se lancent intègrent un cabinet plutôt que d'en monter un à partir de rien, sans carnet de contacts, sans clients. Je saute dans le vide. D’habitude, on ne reste pas commis d'office aussi longtemps d'ailleurs, alors autant assumer et poursuivre un parcours inconventionnel jusqu'au bout. Le potentiel que je vois ici, c'est l'échange de bons procédés. Il y a des startups à tous les étages de ce bâtiment, et pas un avocat dans le coin pour les guider. Mes premiers clients sont déjà à ma porte. C'est idéal. Ça peut marcher. À condition qu'un autre petit malin ne rafle pas le gros lot avant moi, hypothèse qui s’impose à moi quasiment instantanément lorsque la porte s'ouvre sur un agent et un client blasé. Immédiatement, Ginny et moi sommes cachés, l'oreille tendue. J’ai envie de gueuler à l'autre abruti qui ne fait que se plaindre que si l'endroit ressemble tant au purgatoire à ses yeux alors il peut bien partir et le laisser à ceux qui lui trouvent un véritable intérêt, mais il semble résigné à installer son business ici, et moi, à tirer un trait sur le mien. “Ginny !” j'étouffe entre mes dents alors qu'elle décide de révéler notre position. Qu'est-ce qu'elle fait ?! Mayday ?! Les yeux ronds comme des billes, je l'écoute avec stupéfaction se présenter comme l'associée du cabinet, et je suis bien trop occupé à me demander quel est le fuck que je ne réalise pas à quel point elle me sauve la mise. Elle attend mon soutien, que je renchérisse, que je mette le coup de pied final dans le derrière de l'autre visiteur. Pris de court, je ne sais pas comment soigner mon apparition, alors je me retrouve à ouvrir un peu plus la porte pour me montrer, complètement benet, et faire un signe de la main, l'équivalent réel d'un bon gros kikoo. “Je suis la partie Brody du titre.” Il y a comme un malaise. Je piétine dans mes chaussures, les mains dans le dos. “Eum… Tout comme elle a dit.” j'ajoute en indiquant Ginny d'un signe de tête, la voix qui déraille un brin et que j’éclaircis immédiatement, avant d'avoir l'air plus ridicule que je ne le suis déjà. Trouve quelque chose Brody. J’ai la voix du petit Dean, au loin, qui me dit que je suis le meilleur pour entourlouper tout le monde. Je sais faire. “Et pour une bouchée de pain d'ailleurs, parce que nous avons trouvé des rats gros comme des furets dans le faux plafond, de la moisissure au bord des fenêtres…” j'explique en m’avancant, pointant des défauts ici et là qui n’existent pas mais dont ils n'osent pas douter. Puis je me penche vers eux, prêt à leur dévoiler un petit secret qui mérite autant de discrétion que si les murs avaient des oreilles ; “... Et le voisin du bâtiment d'en face exhibe son service trois pièces toute l'après-midi.” Grimaces dégoutées, regards jetés vers l'autre côté de la rue. L’homme n’y est pas, mais l'imagination des visiteurs fait tout le travail. “Il y a tout à refaire, et vous m’avez l’air de quelqu'un qui aime que tout roule, bien calé, carré, sans contretemps ni contrariétés.” Autrement dit, allez vous en, merci. Je souris, innocent, fiable comme pas deux, et le regard insistant vers la sortie. “Sinon il y a toujours les bureaux que je vous ai montrés deux blocs plus loin…” suggère l’agent d’une voix trop hésitante, et pas assez vendeuse. Alors, magnanime, j’offre un coup de pouce ; “Sûrement une bien meilleure affaire, vous devriez foncer. Et n’oubliez pas, s'il y a quoi que ce soit, Brody, McGrath and Associates. Maintenant vous savez où nous trouver.” Si j’avais une carte, je la lui aurais glissé dans la main. Néanmoins, je pense que cette rencontre fut assez mémorable pour qu’il s’en souvienne aisément. Ils empruntent la porte, puis l'ascenseur, et ce n’est qu’une fois les portes fermées que je pousse un long soupir en roulant des yeux au ciel. La menace est écartée, pour cette fois du moins. Combien de temps encore avant le prochain intéressé qui aura toutes les cartes en main, toutes les conditions requises pour obtenir ces bureaux ? J’ai peut-être gagné un ou deux jours, une semaine, pas beaucoup plus. Pas assez pour réunir le demi-loyer restant et trouver un partenaire fiable -et surtout, solvable. Mais malgré toute la dramatique soulevée par ce moment, ce n’est pas ce qui m’interpelle et me pousse à me tourner vers Ginny avec un air absolument effaré. “Virginia ? C'est ça ton prénom ?” C’est tellement plus formel, sérieux. C’est le genre de nom que donnent des parents qui ne se prennent pas pour n’importe quoi. Le nom d’une grand-mère sûrement. Cela est tellement… moins elle. Virginia prend des scones avec son thé, Ginny, elle, joue à Mario Kart en yoga pants. “Je me sens… comme quand j'ai compris que maman ne s'appelait pas maman.”

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benny ▲ two of us on the run Empty
Message(#) Sujet: Re: benny ▲ two of us on the run benny ▲ two of us on the run EmptyVen 15 Sep - 9:58


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I'm a rebel just for kicks, I’ve been feeling it since 1996, now. We could fight a war for peace, give in to that easy living. Say hi to my hopes and dreams, stop flipping for your enemies.

« Fais comme moi. » J’hésite entre rouler des yeux ou éclater de rire à voir la tête que tire Ben lorsque je me lève dans le but d’aller accueillir les nouveaux venus. Il a l’air tellement en phase contre le mur avec lequel il tente désespérément de fusionner que je ne sais pas ce qui me traverse l’esprit alors que je fais une pause dans mon discours, que je toussote même, espérant qu’il apparaisse. Le plus logique serait de raccompagner les autres, de leur forcer le bras vu le silence du Brody qui doit encore s’en remettre de l’autre côté de la porte. Mais voilà qu’il finit par débarquer comme une fleur, la voix qui se cherche autant que le reste. Il hésite, il répète, et je ne me gêne pas pour lui jeter un regard noir à l’abri des deux intrus - ou sommes-nous les intrus, au final? Come on Ben, c’est pas le temps de plier, sauf si tu ne veux pas autant ce local que tu me l’a fait comprendre plus tôt. J’ignore si notre amitié a passé le cap de la télépathie et qu’il est désormais capable d’entendre mes pensées rien qu’à me regarder dans les yeux, mais il finit par expliquer et démontrer à sa façon d’autres tares de l’endroit, défendre son territoire un peu plus. J’hoche de la tête bien déterminée, avant de reporter mon attention sur le premier, le plus loquace, celui qui râle depuis qu’il a posé le pied chez Brody, McGrath and associates. « Ce matin, tout juste après notre footing. » que je précise, lorsqu’il me demande depuis quand, concrètement, le local est à nous. Je ne saurais dire d’où je tiens ce côté presque théâtral, probablement que tous ces moments à envoyer la réplique à Eli m’ont amené à cette scène que je joue là, et à cette couche que je rajoute pour plus de drame encore. « Oui, on fait tout à deux voyez-vous, on est ce genre de power couple carriériste. Mais pas un couple. Il est gay et je suis la troisième femme de son père. » j’aurais pu me taire, je m’empêtre dans mes mots, je rigole nerveusement, je fais moins la maligne maintenant que je suis dans le vif du sujet et mes résolutions d’oser un peu plus fort me semblent bien stupides le temps que je peuple la conversation et que Ben me sauve in extremis en parlant du voisin, de la moisissure. « Une horreur. Je pense même avoir attrapé des puces de lit à frôler la moquette du couloir. Sans parler de la plomberie qui renvoie tout dans la salle de bain mixte de l’étage, si vous voyez ce que je veux dire. » Tous les deux laissent leur regard dériver sur le local qu’ils voient beaucoup moins comme une opportunité suite à nos paroles. Je reste là, stoïque, immobile, retenant mes doigts de s’agiter un peu trop. Aucun échange de coup d’oeil avec Ben non plus, c’est notre poker face de la dernière chance - jusqu’à ce que d’autres s’immiscent et menacent de louer l’endroit à leur tour. Probablement que la deuxième fois où je mentirai sur notre identité, je serai un peu plus crédible, du moins on l’espère. Ça vient avec la pratique le mensonge, paraît-il. « Et pourquoi vous le prenez si c’est aussi plein de vices cachés? » Ben ravale, je retiens un soupir, et j’y vais all in. Cartes sur table, menton qui se soulève, voix assurée. « Parce qu’on aime voir le potentiel où personne le perçoit. » c’est beau, c’est inspirant, c’est plein de belles valeurs de vie, ma grand-mère serait fière de moi. C’est cliché aussi, juste assez pour leur clouer le bec, et qu’ils ne puissent pas rajouter un mot, sous prétexte de ne pas avoir de temps à perdre sur une bonne cause, sous prétexte qu’ils ne sont que deux mecs en affaires qui ont laissé leur coeur dans la mercedes en bas. J’avais grandi entourée de ce genre de types, je savais que lorsqu’on leur mettait en plein visage un motif le moindrement gnangnan, ils soupiraient avant de laisser l'autre se planter, prévoyant revenir et construire de nouveaux condos par-dessus les dégâts. Et les voilà qui tournent le dos, tirent leur révérence, nous laissent à nouveau seuls dans ces bureaux qui ont doucement pris des allures plus personnelles. Encore sous le choc de ma performance artistique discutable, je remarque à peine Ben qui s’insurge, ou du moins, je ne le réalise que lorsque j’entends Virginia franchir ses lèvres. Woah, ça fait bizarre. « Oh, si seulement. » la vérité, c’était que les parents avaient toujours eu ce côté pincé bien anglais. Papa, le brit des deux, avait infusé son envie de chic, de chiant à tous nos baptistères. Des noms longs comme le monde, qui venaient avec une liste de commandements de la parfaite petite fille, du parfait petit garçon. Et tout en haut, ne pas tomber enceinte avant d’avoir un diplôme solide, avant d’avoir marié un riche fils de politicien ou d’ambassadeur qui me sommera de la plus respectueuse des façons de rester à la maison pour boire des mimosas et discuter prochain garden party avec les autres stepford wives. « La totale c’est Virginia Mary Elisabeth si tu veux rire un coup. J’ai raccourci à Ginny le jour où j’ai réalisé que je prenais 3 lignes sur mes devoirs pour écrire mon nom au complet. » à l’ère où tous les autres élèves jouaient de noms simples, courts, là où les parents avaient géré et leur avait enlevé le fardeau des initiales et du 2e prénom souvent tiré d’une référence culturelle dont on se balance, moi j’avais hérité du nom de la grand-mère, de celui de la tante et même d’un extra biblique pour la peine. Ben s’en remet presque difficilement, et je peux comprendre. Ce n’est pas comme si j’étendais à qui veut l’entendre ce que ma famille représentait, si c’était autre chose qu’une bande de menteurs profiteurs - oupsie. Je parlais rarement d’eux, surtout après avoir passé mes journées à effeuiller des tas de papiers les mettant en tort, alors je n’allais pas renchérir au mieux en mentionnant les écoles privées catholiques où on nous avait inscrits, les dîners du dimanche avec plus de services que de gens à table, la nanny qui avait fait office de mère pour nous tous, les soirées mondaines où on était collés obligatoirement dès nos 10 ans, jolies robes de taffetas et costards de tweed pour faire craquer les nouveaux investisseurs du business familial. C’était barbant, et c’était pas du tout moi, de toute façon. « Ou quand n’importe qui capte que Zelda c’est pas celui avec qui on se bat durant tout le jeu. » non guys, ça c’est Link. Remis de nos émotions, en phase avec le silence rétabli dans le bureau, je commence doucement à rejoindre notre QG, retournant retrouver les quelques suggestions de noms possibles, les papiers, mes affaires qui jonchent le sol. Et ça me revient. Ce que je voulais proposer plus tôt, ce que j’avais commencé à articuler, coupée par le bruit inquiétant de la serrure qui craquait. Comment on amène ça, donc, sans avoir l’air de ce que ça n’est pas? Sans m’immiscer dans ce projet qui lui tient tant à coeur? On explique déjà, on rassure. « Ce que je voulais te dire tout à l’heure avant qu’ils arrivent, c’est que… » Ben me rejoint au sol, je prends une longue inspiration. « Quand le divorce sera signé, je ne garderai pas l’atelier. C’est Edward qui l’a acheté, c’est à lui qu’il revient. » parce qu’il faut voir les faits - même si j’adore l’atelier, même si à force, avec Jamie, avec Rose, avec les workshops, j’ai réussi à en faire mon endroit à moi, mon oasis, ce n’est pas vrai que je vais passer d’un contrat qui gère ma vie à un autre. Je n’étendrai pas mon ingratitude à rester dans ce local payé par les bons soins de mon futur ex-mari. Pour la première fois de ma vie, je ne devrai rien à personne, je ne laisserai personne s’occuper de moi sans que je n’ai une responsabilité à prendre. Même si à l’intérieur j’ai le coeur qui bat la chamade, même si j’ai les mains moites, même si je panique plus qu’il n’y paraît. « Je vais trouver une maison pour Noah et moi, mais pour ce qui est du reste de mes affaires, mon matériel de peinture, mon studio photo, ton futur tableau… ça sera trop encombrant à traîner le temps que je cherche. » je suis optimiste, j’ai appris à l’être de plus en plus au contact de Ben, après un nouvel an qui est parti en catastrophe. Noah allait bien là, tout allait bien, tout était stable, je m’autorisais donc le droit de rêver un peu. D’imaginer cette maison hypothétique, la nôtre, un truc tout minuscule, modeste. Une belle vue, de grandes fenêtres, un sofa confortable. On aurait un jardin aussi, un truc rempli de fleurs et de fruits et de légumes, on y passerait tout notre temps l’été. Et d’avoir l’atelier loin de la maison me permettrait de mieux me concentrer sur mon fils, de passer tout mon temps avec lui, lorsqu’il irait mieux. Parce qu’il irait mieux, parce qu’il verrait l’endroit, un jour, parce qu’il jouerait dans le jardin aussi. Je savais. J’espérais. « Si tu n'as toujours personne, si tu veux, je pourrais assumer la moitié du loyer le temps que je me replace. J’entreposerais mes affaires dans le bureau sans la fenêtre, je te laisserais tout le reste bien sûr. » voilà, voilà ce qui me traîne en tête, depuis que Ben a avancé qu’il ne pouvait rien avoir s’il n’était pas assumé par un partenaire, s’il signait seul. J’ignore comment il le prendra, j’ignore même s’il voudra seulement. On se connaissait un brin, à force, pas assez pour qu’il sache mon prénom complet soit, mais suffisamment pour qu’il puisse me faire confiance ou du moins pour qu’il y ait un potentiel. Je ne suis pas stupide - je sais bien que d'être disparue de la circulation durant plusieurs jours ne fait pas reluire ma candidature, que les quelques baisers échangés l’autre soir ne sont pas pour autant un argument qui devrait le sécuriser. Mais s’il regarde les faits, je peux lui offrir une stabilité matérielle qui lui enlèvera la pression de l’urgence des épaules. Parce que… « Être une McGrath, ça vient avec le nom qui ne finit pas, le mariage arrangé et… le compte en banque. T’auras pas de problème d’endosseur si on associe mon trust fund à ta demande. » j’hausse les épaules, détestant parler d’argent, surtout celui rattaché à mon nom. Mais voilà, j’avais tous les droits sur ces précieux dollars, et je ne me gênerais pas pour aller y piger maintenant que je savais qu’on avait bousillé volontairement 7 années de ma vie. Le retour de l'ascenseur, qu’ils disent. « Honnêtement, je n’ai pas besoin de cet argent-là autant que toi, et surtout pas pour d’aussi bonnes raisons que toi. » j’avais la chance de voir l’état payer pour la totalité des frais médicaux de Noah déjà, et pour le reste, je serais très bien capable de vivre avec mes économies, de mettre la main encore un peu dans ce fameux compte que je n’avais jamais utilisé, ou même de me trouver un petit boulot sans prétention. De faire plus souvent des ateliers, de vendre des tableaux… je n’étais pas à court de ressources. « Considère le comme un remerciement pour tout ce que t’as fait pour moi. » que j’avance, me doutant qu’il n’avait jamais aidé autant par simple besoin d’être remercié un jour. Je savais que lorsque j’avais toqué à sa porte, lorsque j’étais arrivée au bout de mes conclusions, lorsque j’avais eu besoin de lui, il avait été là parce qu'il voulait et pas pour l'appât du gain. Il avait pris le temps, il avait parcouru tous les dossiers, il avait aidé sans porter le moindre jugement, sans critiquer, sans rigoler. Ben prenait son boulot tellement au sérieux qu’il allait devenir un grand avocat, qu’il l’était déjà en fait, mais qu’il n’avait tout simplement pas eu l’occasion de le montrer, de le prouver. J’avais une confiance aveugle en ses capacités, et je m’en serais voulu de ne pas lui offrir mon support comme il avait pu le faire pour moi, si je n’avais pas fait tout en mon pouvoir pour l’aider à y arriver. Silence. Évidemment, l’information doit faire son chemin, transige entre ses neurones, se teste, se rectifie, se projette. C’est un immense engagement là, et ça me fait de suite douter - est-ce que je suis allée trop vite? Certainement. Est-ce que j’ai vu trop de films où tout se règle dans les dernières minutes? Yep, clairement. Je ne regrette pas l’offre, je ne reviens pas sur ma parole. Tout comme je sens que peut-être, juste peut-être, j’ai été utopique. Il ne voudra pas m’avoir dans les pattes, il s’en fichera de mes bons discours pleins de fierté, il rejettera un coup d’oeil à la liste faite à la va-vite, il choisira au hasard, et ça restera la blague du jour, ce qui le fera sourire quand il entrera dans le bureau d’ici quelques mois, et que ses rétines se poseront sur mon canevas à l’entrée. “Ah oui c’est vrai, Ginny c’est la fille qui voulait étaler son bardas dans le bureau de Jack, de June, de Jordan, de l’associé, du pigeon. Elle était drôle, mais elle m’a fait chier à vouloir trop coller ici, à jamais me laisser gagner à Mario Kart.” Qui disait que Ben ne se lasserait pas de moi, comme Heidi l’avait prédit, d’ici un mois, ou deux? Rien, ni personne. Et hop, je reviens sur Terre, un brin troublée par la suite de réflexion qui vient de passer en rafale, qui m’a laissé un goût amer en bouche, désagréable déception. Je me redresse, j’inspire doucement, je me change les idées, pense même à retourner voir ce qu’il advient du voisin d’en face c'est pour dire. « Bref, prends le temps d’y penser. »

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benny ▲ two of us on the run Empty
Message(#) Sujet: Re: benny ▲ two of us on the run benny ▲ two of us on the run EmptyMar 26 Sep - 12:24


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Benny



I'm a rebel just for kicks, I’ve been feeling it since 1996, now. We could fight a war for peace, give in to that easy living. Say hi to my hopes and dreams, stop flipping for your enemies.

Débarrassés. Le promoteur et le futur acheteur déçu passent la porte, et nous avons à nouveau l'espace pour nous seuls. Je ne sais pas si je veux rire ou demander à Ginny ce qui lui est passé par la tête d'avoir bien failli nous ridiculiser devant eux avec ses histoires de faux couple, mais sûrement a-t-elle deviné la tension dans ma mâchoire bien vite car elle n’a pas tardé à rectifier le tir elle-même. Je décide de passer l'éponge sans faire de commentaire. Après tout, l'important n’est pas tant l'impression laissée aux deux hommes désormais persuadés qu'un cabinet d'avocats s'installera ici sous peu, mais bien qu'ils aient abandonné l'idée de nous le rafler sous le nez. En ayant moitié moins enthousiasme que nous a propos de ces locaux, cela aurait été un parfait gâchis, et je ne sais pas s'il aurait existé pareille opportunité ailleurs dans Brisbane dans le temps imparti pour que je ne me décourage pas. Nous avons gagné un délai, impossible d'en savoir la durée, mais cela est toujours mieux que d'être le simple spectateur d'une affaire rondement menée à les dépens. Ça, c'est fait. Je peux alors attaquer un détail d'importance ; Virginia McGrath. Non, Virginia Mary Elizabeth McGrath. Prononcé par l'écho dans mon crâne, toutes voyelles bien rondes, le nom sonne duchesse qui pète plus haut que son cul, et ça ne colle pas, ce n’est pas elle. Je pense bien qu'elle en a eu conscience dès son plus jeune âge, en se trouvant un diminutif plus pratique, plus mignon, plus pétillant qui va avec son caractère et à la prononciation forçant des sourires sur les lèvres de tout le monde. Ça, c'est elle. “T’avais des parents fans de Jane Austen ou quoi ?” je demande, pas que j'ai jamais ouvert un bouquin de cette vieille fille, mais j'ai l'impression de viser juste, parce qu'il y a plus de chances qu'il en soit ainsi plutôt qu'ils aient été fans de Crash bandicoot. C'est le choc, je pourrais m’asseoir pour digérer cette pseudo trahison, l'information la plus basique sur mon amie que je pensais connaître et qui se révèle fausse ; mais l'espace est vide, alors j'attendrai la livraison de mon super fauteuil en cuir, dans mon bureau, pour refaire la scène en lui offrant toute la théâtralité qu'elle mérite. Je me projette bien trop ici pour songer que tout cela pourrait me passer sous le nez, parce que la passion et la motivation n'ont jamais payé le loyer, mais je ne veux pas m’attarder là dessus. Il est toujours plus facile d'occulter les points qui fâchent, ou de croire que la solution tombera du ciel. En l'occurrence, je n'aurais peut-être pas besoin d'attendre que le miracle vienne d'aussi loin. Ginny, au moins aussi nerveuse et gênée que lorsqu'elle souhaitait effectier ses tests dans la cabane en couvertures, propose de m'aider pour le loyer après bien des détours. Je reste silencieux, la scrutant avec bien plus de sérieux que cela n’ait pu être le cas jusqu'à présent. Virginia Mary Elisabeth McGrath. Est-ce que nous en sommes là ? S’engager tous les deux là-dedans, s'engager tout court -elle ne sait pas elle-même qu'elle n’a pas envie de se lancer dans ce pari avec moi à vrai dire, elle ne sait pas dans quoi elle s'embarque, parce que moi non plus. Et ça me paraît trop gros, trop lourd à porter, à partager avec elle ; pas parce que je ne veux pas de son aide, mais parce que l'accepter me laisserait mort de trouille à l'idée de la décevoir, qu'elle comprenne que je lui ai fait perdre du temps et de l'argent. Honnêtement, je ne me le pardonnerais pas. “Donc tu veux payer la moitié de tout ça juste pour emprunter un placard.” je résume grossièrement, histoire de la faire réfléchir à deux fois, lui laisser l'occasion d'en rire et de retirer sa proposition, de ne pas miser sur le mauvais cheval. Mais cela ne change rien, son seul conseil est que j'y réfléchisse au moins, qu'on s'accorde le bénéfice du doute et qu'on se dise que, ouais, c’est une drôle de collaboration, mais ça peut marcher. “Je le ferai.” dis-je avec un petit sourire. Aucune réponse arrêtée, je ne refuse pas, je n’ai pas l'air d'en avoir l'intention, de même il est impossible de déterminer si je finirai par accepter. Je la remercie simplement, tacitement, d'un signe de tête qui suffit à faire comprendre que je lui suis reconnaissant ; je crois bien qu'elle croit plus en moi que moi-même, mais elle saura garder le secret de ces petites failles que je dissimule le reste du temps. Je passe un bras autour de ses épaules et je l'attire vers la sortie. C'est qu'on ne va pas y passer la journée, et je sais ce dont j'ai besoin pour cogiter à propos de tout ceci ; “Allez viens, je connais un bar qui fait des cosmo du feu de dieu pas loin, j'ai prévu d'en faire le QG du cabinet si je m'installe, mais il me faut un second avis là-dessus aussi t’sais.” Un clin d'oeil. Mon gay intérieur ressort comme ça parfois et juste pour elle je peux en jouer la carte un peu plus souvent, parce que ça contrebalance toutes les avances que je lui balance habituellement tous les deux mots, et l’humour lourd, les phrases de beauf, et les regards baladeurs sur toutes les paires de fesses dans des jeans bien moulés qui me font tourner la tête dans la rue.

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benny ▲ two of us on the run Empty
Message(#) Sujet: Re: benny ▲ two of us on the run benny ▲ two of us on the run EmptyJeu 28 Sep - 22:06


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Benny



I'm a rebel just for kicks, I’ve been feeling it since 1996, now. We could fight a war for peace, give in to that easy living. Say hi to my hopes and dreams, stop flipping for your enemies.

C’était trop, c’était impulsif, mais je ne regrettais pas. Même s’il semble sur le point de refuser avant d’articuler sa réflexion, même si je sens la tension qui se dessine le long de sa mâchoire, même si c’est beaucoup plus qu’un simple chèque, qu’un loyer comme un autre. Ça a une drôle de consonance contre mes lèvres, des souvenirs qui lui font écho, des baisers qui me reviennent en tête, qui n'avaient confirmé que ce que je savais déjà au fond, tout au fond. Je n’ai pas besoin d'acquiescer plus, je n’ai pas besoin d’insister. Ben n’a pas opté pour le non, ni pour le oui, et ce n’est pas le genre de conversation, de décision, qui doit être prise au beau milieu d’un bureau vide, les sirènes nous répondant joliment à travers la fenêtre entr'ouverte de la pièce, qu’on a craquée le temps qu’une brise vienne chasser notre stress et les bribes d’humidité. Il propose d’aller prendre un verre, et j’emboîte le pas, la tête ailleurs. Pensive, oui, certainement. C’était une étape beaucoup plus grande que j'avais mise en mots il y avait une poignée de secondes, et plus je laisse mon esprit dériver, plus les questions remontent, plus la possibilité de, minime, se fait une place. J’étais stupide, au fond, d'imaginer ce genre de choses du moment où tout allait bien. Si j’avais habitué mon coeur et ma tête à ne penser à rien d’autre qu’à Noah et à sa survie depuis plus de 5 ans, ces nouveaux réflexes et ces nouvelles envies me semblaient totalement sorties de nulle part, bien loin de la Ginny à laquelle je m’étais toujours identifiée. Presque comme une crise d’adolescence qui flirte avec mon quotidien, qui laisse une impression étrange à l’intérieur, une appréhension de quelques secondes, qui finit par se transformer en affirmation, en envie, en besoin. Et je secoue la tête, sort de mes pensées, suit sagement Ben dans l'ascenseur puis dans le hall, et sur la rue. Doucement le soleil a commencé à rejoindre l’horizon, et même si la journée n’est pas encore terminée, on reconnait de suite mon moment préféré à quelques minutes, presque palpable. J’adorais les couchers de soleil, j’adorais le calme qu’ils entraînaient, j’adorais l’impression qu'ils offraient, le goût qu’on avait de tout arrêter, de poser nos affaires, de juste s’appuyer sur une rambarde, prendre place sur la terrasse, se nicher à la fenêtre pour les observer. Ça ne durait jamais bien longtemps, c’était toujours trop court, trop vif, trop beau, mais chaque jour, ou au moins lorsque la possibilité se faufilait à mon horaire, j’essayais de prendre une pause de la vie, une pause de tout, pour juste profiter, pour juste apprécier. C’est con, et Ben ne le remarquera qu’à peine, mes pas qui ralentissent, mes rétines qui se vissent au loin. L’orange, le jaune, le rose, le parfait dans l'imparfait. Il se racle la gorge, signe que je l’ai fait poireauter trop longtemps à tenir la porte, ce qui ne semble plus trop le déranger lorsqu’une ribambelle de demoiselles passent devant lui, rigolant, lui envoyant des coups d'oeil enflammés, des déhanchés prononcés. Et c’est là que ça me frappe. La lumière qui reflète sur ma joue, la gorge qui se resserre, le contact, la confirmation, la scène que j’ai vue à de nombreuses reprises, que j’ai entendue narrée maintes et maintes fois, que je connais par coeur. Ben ne s’était jamais privé de me décrire dans le détail ses techniques de drague, surtout lorsqu’elles réussissaient. Il n’avait jamais censuré la moindre histoire, la moindre remarque envers une silhouette féminine intéressante qui passait son chemin en ma présence. Et je ne le lui demandais pas non plus, pourquoi l'aurais-je fait?, m’amusant de ses commentaires, en rajoutant parfois, m’essayant comme wing woman au mieux de mes connaissances. C’était drôle de le voir aller, c’était marrant d’assister aux coulisses, de voir comment il s’en sortait lorsqu’il avait faim, lorsqu’il partait à la chasse. C’était amusant, jusqu’à ce petit pincement là, que je ne reconnais pas, que j’avais oublié, que je ne pourrais même pas identifier si je m’en donnais la chance. J’ignore si c’est le week-end et mes décisions, j’ignore si c’est le fait de le retrouver après des semaines de silence, j’ignore si c’est parce que tout semble aller pour le mieux, j’ignore si c’est ce coucher de soleil bien cliché qui me rend émotive, et encore moins si c’est ce regard, celui-là dont il couve une blonde un peu plus loin, qui n’attend que le signal pour lui filer sa culotte… mais il y a une boule qui se forme dans mon ventre. Une boule de chaleur, une boule qui dérange, une boule que je déteste, une boule que j’adore. Pas d’un calibre à éclater des toiles sur les murs, mais d’un potentiel à me demander si un jour, il avait eu ce regard envers moi. Si un jour, il allait l'avoir. Rien d’autre, rien de plus, et c'est bien assez flippant comme ça. Il leur sourit, avant de tourner la tête dans ma direction, piètre petite suiveuse, petit mouton qui se tiendra bientôt docilement à ses côtés, les mains dans les poches, les yeux qui se cherchent. Qui le cherchent. Qui le trouvent, et qui s’y accrochent. C’était facile avec lui, c’était simple, c’était… mon portable dans ma poche vibre, et vibre encore. Et le signal d'alerte, d'arrêt qui ne pourrait pas être aussi évident, qui ne pourrait pas être aussi légitime. Je lui fais signe que je reviens, il s’engouffre dans le commerce, je prends la direction du trottoir non loin. Il y a un tatoueur en face, ça serait drôle si j’allais voir s’ils avaient des disponibilités, si on pouvait passer plus tard après 6 cosmos pour lui et 1 et demi pour mon pauvre cas.

« Oui, c'est moi. » que je réponds au combiné, la voix distraite, ne reconnaissant pas encore l’interlocutrice. L’afficheur me dit qu’il s’agit de l’hôpital, ce que je vois après un bref coup d’oeil à mon écran. Et là, à la seconde, la micro-seconde même, je sens mes jambes qui ramollissent, ma gorge qui se serre. Un pressentiment, un instinct de merde que je ridiculise dans ma tête, que je ne veux pas croire, mais qui provoque un vilain tremblement de ma tête jusqu’à mes orteils. Et je finis par reconnaître Justine, l’infirmière de Noah, celle qu’il adorait tant. Je la reconnais tardivement et à peine, sa voix enjouée d’habitude est maintenant un peu plus cassée, trop sérieuse. « Depuis quand? » que je m’entends répondre, la voix robotisée, alors qu’elle me mentionne sans émotion aucune que Noah a perdu connaissance. Bon. En réalité, ce n’était pas si alarmant, c’était du domaine du banal, il lui arrivait souvent de céder ainsi pour quelques minutes lorsqu’on changeait ses médicaments, lorsqu’il avait mal mangé, mal dormi. Le souvenir de mon fils jouant avec les autres gamins quelques heures plus tôt finit de me rassurer, me force à voir le beau, à croire que ce n’est rien. Jusqu’à ce que Justine toussote, jusqu’à ce qu’elle me réponde qu’il a perdu conscience il y a plus de 30 minutes, jusqu’à ce qu’elle me parle de signes vitaux, de tension, de respiration difficile, de coeur qui lutte, de sang qui bloque. Je prends appui sur le mur derrière, sur le poteau, sur l’arbre, sur je sais pas quoi, je m’en balance, me raccrochant strictement à la voix de l’infirmière, à sa lecture du dossier, à la déshumanisation dont elle fait preuve pour s’assurer que le message passe, et que je comprenne vite et clairement qu’ils ont besoin de moi à l’hôpital. Là, de suite. Au cas où on doive prendre une décision rapide. « J’arrive. » j’articule difficilement, l’air se fait rare, le temps se fige. Il se fige sur une voiture qui passe, sur un coucher de soleil que j’ai entièrement manqué, sur le bruit des verres qui tintent, sur les mêmes klaxons qui tout à l’heure me semblaient être d'une jolie mélodie. Le temps se fige sur la tête de Ben qui passe en travers de la porte, pour s’assurer que j’arrête de traîner et que je vienne enfin goûter au fameux cocktail qu’il m'a vendu précédemment. J’ai la mine basse, blanche, j’ignore ce qu’il a entendu, je ne pourrais pas plus m'en foutre. Si un taxi fait l’affaire, ou si je peux me rendre à l’hôpital plus vite en courant, si ça allait m'aider à faire passer cette sensation d’étouffer, ce serrement dans mes poumons, ces larmes qui se retiennent d’elles-même, ce vide. « C'est... est-ce que tu peux… c'est Noah... » j’ai la voix qui tremble, j’ai la vue qui s'embue, j’ai tout sauf envie d’éclater là, de laisser une faille passer, de lui montrer quoi que ce soit d’autre que la Ginny sympa, la Ginny qui le fait rire, la Ginny qui s’en balance finalement, des larmes ou non, la Ginny qui s’en contre-fiche, qui sent son coeur de mère crier et l’urgence de partir dans la seconde qui s’articule pour seule justification. « Est-ce que tu peux venir avec moi à l’hôpital s’il-te-plaît? » je me reprends, retour à la voix calme, retour au masque, retour à la façade, retour à la panique contrôlée. Je ne me sens plus la force de bouger, je ne me sens plus la force de penser, de chercher un chauffeur, de retrouver même le nom de l’hôpital, de la chambre. Il sait tout ça. Il est meilleur que moi en temps de crise. Il… j’ai besoin de lui, là.

Quelques minutes plus tard, je colmate, je capte, je retrouve mes sens. Le mode survie qui s’est enclenché plus tôt, qui m’a guidée jusqu’ici j’ignore par quel moyen, dans une voiture jaune ou derrière sa moto. Je ne réalise même pas si je suis seule ou accompagnée lorsque je passe les portes de verre. Au fond du couloir, je reconnais Ezra et Edward qui sont arrivés après les appels que j’ai pu leur faire, appels qui n’avaient rien de courtoisie. Ils se tournent au même moment, leurs pupilles attrapant les miennes. La panique, la peur, la rage que j'y décèle. Tout et rien.

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