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 zombenny ▲ devil beneath my feet

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zombenny  ▲ devil beneath my feet Empty
Message(#) Sujet: zombenny ▲ devil beneath my feet zombenny  ▲ devil beneath my feet EmptyMer 11 Oct - 4:58


devil beneath my feet
zombenny

C’était devenu une habitude, vitale, nécessaire. Avec le carnage qui se jouait un peu partout autour, on n'avait pas vraiment pris le temps de penser à autre chose. La loi de la survie, celle qui fait mal, celle qui ne laisse pas de place aux plus faibles, celle qui casse les esprits les plus doux pour en faire des charognards. J’avais pas fait abstraction au lot et pour cause ; quelques semaines seulement après l’alerte rouge et la quarantaine du périmètre, Noah avait poussé son dernier soupir. Et c’est là, très probablement, que tout a changé. Son coeur a arrêté de battre en même temps que le mien, certains vous diront. Des bribes de la Ginny qu'on connaissait ressortaient un peu par ci par là, mais c’était rien si on comparait à l’avant, à l’espoir qui prônait jadis. Et rester ici m’avait horripilé au plus haut point. Trop de souvenirs, trop de bagage, trop de gens, pas assez de latitude. Le besoin d’air, d’être isolée, de bouger, les fourmis dans les jambes. J’avais tranquillement amassé le strict minimum, fermé à clé la porte de l’atelier même si je savais qu’il serait défoncé dans l’heure, et je m’étais barrée. Avec eux. C’était déraisonnable, c’était insensé en temps de guerre de faire une alliance avec qui que ce soit, mais ça m’avait semblé logique. D’abord, parce qu’Adam me rappelait un peu trop mon gamin, ou du moins, qu’il me permettait de ressentir à d'éphémères et trop rares moments un semblant de fibre maternelle. Un peu, à peine. Et ensuite avec Ben, qui venait en paire, qui s’était greffé un peu parce que je savais que l’avoir dans les parages me serait utile un jour ou l’autre, et un peu aussi parce que mine de rien, j’ignorais s’il arriverait à survivre tout seul dans ce foutoir. J’avais en tête les nombreux moments où il avait crié plus aigu que la plus rose des fillettes et sur le coup, ça avait été suffisant comme justification. Même maintenant, 6 mois plus tard. Pas le temps de penser à autre chose qu’à la prochaine ration, qu’au futur véhicule qu’on volera sur le grand chemin avant de le conduire jusqu’à ce qu’il n’ait plus une goutte d’essence au compteur. C’était comme ça qu’on avait survécu, à trois, c’était ce qu’on avait trouvé de mieux pour se sauver de la peste qui s’étiolait à toute l’Australie, la planète. « Arrête de chigner. » et comme chaque fois, monsieur détestait être pris pour acquis dans le rôle de la demoiselle en détresse. Il rouspetait toujours un peu avant de finir par s’y plaire, à jouer d’une voix bien conne, à attirer les pauvres passants dans le piège ficelé avec justesse le temps qu’Adam et moi on sorte des buissons, qu’on vise, qu’on prenne. Tout. Ma main furtive qui ouvre le capot du premier véhicule qu’on avait trouvé en bord de l’autoroute, et à côté duquel on avait décidé de se poster en attendant la victime parfaite. Entre Southport et Brisbane, entre le passé et le présent. Pas de futur, on le voyait pas, on l’espérait plus. « D’accord, d’accord. T’auras le droit de prendre les trucs sucrés s’ils en ont. » que je finis par céder, ce que je fais rarement, mais qui vaut tout de même son pesant d’or. Adam lève les yeux au ciel en rechargeant son fusil, et j’hausse les épaules de bonne guerre. Ben partagera avec son gamin, jamais je peux croire qu’il est aussi avide de chocolat et de guimauve pour être si égoïste. « Viens, on y va. » et j’emboîte le pas au gamin, pointant du menton un bosquet derrière lequel on pourra aller se cacher, le temps que la scène se mette en place, et qu’on arrive juste au bon moment pour la grande finale, shot gun en main. Et merde, j’allais oublier. Je me penche, attrape dans ma paume une poignée de terre que je lance avec toute la douceur et la gentillesse du monde dans la direction de Ben, pour le salir un peu. On avait trouvé un cours d’eau la veille qui avait eu raison des traces ensanglantées de notre dernier combat nocturne, et son air un peu trop propret aurait tôt fait de trahir ses véritables intentions. « Pour plus de réalisme. » et c’est mon sourire narquois qui le saluera, avant que je rejoigne Adam déjà planqué, dans l’attente d’un moteur qu’on entend vrombir au loin.  

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Message(#) Sujet: Re: zombenny ▲ devil beneath my feet zombenny  ▲ devil beneath my feet EmptyLun 16 Oct - 15:32


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zombenny

“Je dis juste que j'apprécie pas que vous insinuez tous les deux que je dois avoir ce rôle parce que je suis une poule mouillée qui sait pas viser !” Je tape du pied, je boude, je pourrais me rouler par terre comme un gosse dans un supermarché. C'est toujours moi l'appât, c'est pas juste. Certes, la dernière fois j’ai failli tirer dans l'oeil de Ginny, et la fois d'avant dans mon propre pied, et celle d'avant j'avais oublié le cran de sécurité, mais quand même. Certes, je suis le plus charmant de nous trois alors ce rôle m’est tout indiqué, sauf que ce n’est pas ce que Adam et Ginny sous-entendent. Et moi, j'ai l'ego fragile qui a régulièrement besoin de pommade. “C'est super difficile d'être crédible pour que les gens s'arrêtent, okay ? Et si quelqu'un doit se faire buter, bah ça sera moi.” Difficile de l'oublier dans la mesure où je me retrouve régulièrement avec un flingue sur la tempe ou un couteau sous la gorge une fois que mes comparses sont apparus de derrière les fourrées. L'appât devient l'otage, demoiselle en détresse jusqu'au bout. “C'est un vrai rôle de composition, alors un peu de respect pour les artistes.” je grogne en croisant les bras. Bien sûr que j'irai, bien sûr que je ferai ma part, comme d'habitude. Mais faut croire qu'un bain dans la rivière a fait ressortir mon côté précieux, et puis je n’ai même pas de gel dans mon sac, mes cheveux ne ressemblent à rien et cette barbe devient de plus en plus insupportable. Fusil sur l'épaule, Adam roule des yeux -mon père, cette chochotte- et jamais je n'aurais cru le voir un jour avec une telle dégaine. Mais cela n'est plus aussi perturbant qu'il y a dix mois. Il faut ce qu'il faut pour survivre. Je ne suis pas peu content que Ginny ait accepté de nous prendre sous le bras ; honnêtement, à nous deux, Adam et moi, nous n'aurions pas fait long feu. Si Heidi avait été là, nous aurions eu une chance, mais seuls, jamais. Ginny s’est imposée en tête pensante du groupe. Elle n’a plus rien à perdre, alors elle n’a pas peur. Pour gagner ma coopération, elle négocie à peine ; j'aurais les friandises comme récompense et j'aurais intérêt à fermer mon clapet. “Ils ont intérêt à avoir des Skittles.” je gromelle dans ma barbe, boudeur à souhait, résigné. Dans un sursaut, je ferme les yeux juste à temps lorsque la jeune femme me jette de la terre sur la troche. Le bain aura été d'une grande utilité, ma foi. “Ha. Ha.” Je grimace puis leur donne le dos alors qu'ils disparaissent plus loin. Y’a plus qu'à espérer que ce coin ne soit pas complétement désert, que quelqu'un s'arrête, et ne fasse pas trop de vagues lorsqu'on le dépouillera. Cette personne, c'est une demoiselle qui se gare sur le bas côté après avoir repéré mon pouce levé bien haut. Elle ne descend pas du véhicule, on est jamais trop prudent. Alors j'approche avec mon plus beau sourire jusqu'à la fenêtre de la portière -côté passager, méfiance toujours. Mon speech est tout préparé et je suis à deux doigts de le lui déblatérer d'une traite histoire de faire ça vite et bien, jusqu'à ce que je note que j'ai affaire à un canon, à la personnification de Barbie survivante de l'Apocalypse. “Ouah… Bonjour.” Je m'appuie sur la voiture pendant que je la détaille encore un peu. Est-ce que je ne pourrais pas négocier une partie de jambes en l'air sur la banquette arrière avant de la lâcher seule dans la nature et sans voiture ? Le gâchis, c'est triste. “Et dire que je ne croyais pas ceux qui disent qu'il reste de la beauté dans ce monde.” dis-je, parfaitement conscient du cliché, des chances de la pousser à appuyer sur l'accélérateur plutôt qu'à couper le moteur, mais elle roule des yeux avec un petit rictus amusé et ça, c'est bon signe. “Je suis en rade.” je reprends en indiquant la voiture, plus loin, d'un signe de tête. Simplement un réservoir à sec, mais Barbie ne peut pas s'empêcher d'aller voir, histoire que je puisse reprendre la route et qu'elle s'épargne un passager. Sûre d'elle, elle quitte son véhicule et s'approche du mien, soulève le capot façon Megan Fox et se penche pour jeter un oeil -pendant que j’inspecte son châssis à elle. “J’ai toujours trouvé qu'une femme qui s'y connaît en mécanique est vraiment très…” sexy. Mais Barbie jette un regard par dessus son épaule et je détourne le regard de son postérieur immédiatement, l'air de rien, innocent, chaste. “...forte et indépendante.” Pour dire vrai, j'imagine qu’elles ont l’air bien stupides, aujourd’hui, toutes les féministes aux aisselles poilues qui pensent qu’elles peuvent s’en sortir en territoire zombie dans un homme pour les aider. Par contre, la pénurie de rasoirs ne risque pas de les perturber. “D’où vous venez ?” je demande histoire d’engager la conversation, paraître gentil, sympathique, inoffensif, et un peu lourd -pas besoin de beaucoup d’efforts, je sais. “Sydney.” C’est pas la porte à côté. Je crois. Où est-ce qu’on est, exactement, ici ? “Qu'est-ce que vous fichez dans le coin ?” “J’ai de la famille à Brisbane, je dois savoir s'ils vont bien.” Qu’elle est mignonne. “Vous faites pas trop d'illusions, ils ont sûrement été transformés en saucisses.” Au regard qu’elle me jette, Barbie aurait préféré que je m’abstienne de faire ce genre de commentaires. Peu de choses peuvent encore susciter de l’espoir aujourd’hui, l’éventail des buts possibles pour avoir une bonne raison de se lever le matin est franchement limité, et si on retire la quête d’un proche de l’équation, alors ce qu’il reste n’est pas très encourageant. “Pardon.” D’un coup sec, elle referme le capot de la voiture ; y’a rien à tirer de ce tas de ferraille, on le savait déjà, du coup la jeune femme va se retrouver dans l’obligation de choisir entre me laisser sur le bas côté ou m’embarquer avec elle. Et, histoire de faire pencher la balance, j’ajoute mon grain de sel à sa réflexion ; “Et sinon… ça vous dit d'avoir de la compagnie pour la route ?” Avec un gros soupir résigné, Barbie accepte et me fait signe de la suivre vers sa voiture. “Vous avez des Skittles ?” “Ouais.” “PARFAIT.”

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Message(#) Sujet: Re: zombenny ▲ devil beneath my feet zombenny  ▲ devil beneath my feet EmptyMer 18 Oct - 21:05


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« Tu vas me faire pleurer. » et il se heurte à mon visage fermé, sans la moindre possibilité de l’en changer. Parce qu’à chaque fois, c’était toujours la même chose, parce que j’aurais bien pu travailler mes techniques de psychologie inversée, parce que j’aurais pu tenter une approche plus sympa, parce que j’aurais pu l'appâter avec quelque chose de plus intéressant, Ben n’aurait pas cédé à la première supplication. Ni même à la deuxième. Même si je lui avais demandé après avoir retiré mes vêtements en mode full frontal, j’aurais rien pu tirer de lui si je n’avais pas joué à la plus forte, à celle qui ne cède pas. « C'est dire à quel point tu es parfait pour le rôle. » Il gémit, il râle, il se plaint, il justifie son boulot et ne vous méprenez pas, je ne lui enlève rien. C’était pas dit qu’il s’en sortirait indemne à chaque fois, qu’il survivrait aux attaques sans heurts pour encore bien longtemps. Mais les faits étant les faits, et il était plus dangereux derrière un fusil que pris en otage par d’autres renégats comme nous qui voulaient simplement le plus d’armes et de nourriture possible avant de passer leur chemin. La voix de Ben qui fait écho dans notre dos alors qu’il n’a probablement même pas remarqué qu’on est déjà partis, je me penche à la hauteur du buisson, Adam m’imite. Certains vous dirons que c’était cruel, crève-coeur de mêler un gamin aussi jeune à la tuerie qui se jouait tout autour de nous depuis des mois. Je répondrais qu’entre ça ou assister à un nouveau décès absolument injuste qui résulterait en éclat de chair et d’organes lancés dans tous les sens, je préférais et de loin lui montrer à se servir d’un shot gun de la bonne façon, si ce n’est mieux que moi. « C’pas vrai, hen, le truc des bonbons? » de tout ce qui pouvait faire paniquer le garçon, c’était ça qui lui revenait à l’esprit. Si j’avais été encore la même, j’aurais sûrement éclaté de rire, je lui aurais ébouriffé les cheveux comme il détestait tant, et je serais passée au supermarché du coin pour lui prendre le plus gros sac de friandises de l’univers. Mais il n’aura droit qu’à un sourire en coin de ma part et déjà, c’est beaucoup. « T’inquiètes pas, il va partager. Sinon je lui pique son coussin orthopédique. » princesse Brody avait trouvé le truc dans une virée qu’on avait fait au rayon couvertures d’un magasin à grandes surfaces complètement en ruines. Les lèvres bleues d’Adam plusieurs nuits d’affilé nous avait alarmé, on avait tenté de trouver de quoi le réchauffer un peu mieux. Depuis, c’était devenu une possession rare, d’une valeur inestimable. Le bruit d’un moteur nous force à nous taire, et je n’ai même pas besoin de dire à Adam de se faire discret qu’il est déjà muet et attentif. J’aurais voulu l’aimer de tout mon coeur, le rassurer même, lui dire qu’un jour tout irait bien. Mais je n’en avais juste plus la force. « Ça m’étonne qu’il soit pas de suite passé à “on va tous mourir, let's kiss” blablabla.  » célèbre pickup line qui fonctionnait particulièrement bien en période apocalyptique apparemment. Adam essaie de toutes ses forces de ne pas faire trop de bruit quand il se met à mimer dans le vide un gros baiser dégoûtant, gluant, avec la langue, et je lui rends la pareille en exagérant le geste, le rire qui monte presque devant la stupidité du truc. On en manque un bout, du dialogue, on n’est pas autant au taquet que d’habitude, et les conneries terminées, je lève doucement la tête pour apercevoir la scène entre les feuillages. Ben qui se rapproche de la voiture, qui sous-entend du covoiturage, qui se laisse clairement dicter son comportement par ce qui serre son pantalon sur la seconde. On n’avait jamais été sympas, on n'avait jamais été du genre à ajouter des joueurs au compteur, et on ne prendrait certainement pas le risque aujourd’hui. Adam derrière, toujours caché, je sors de mon repère l’arme bien en vue, les yeux braqués sur Blondie. « Salut. » elle n'aime pas du tout, elle échange même un regard avec le Brody, avant de reposer ses prunelles sur moi, et plus particulièrement sur le canon de mon fusil. « On va pas, vers Brisbane. Dommage. » en clair, on a juste besoin de ta bagnole, et tout peut s’arranger vite fait si tu nous files tes clés et que tu continues ton chemin sans passer par la case Go.  Elle ne me semble pas comprendre à la première allusion, la deuxième, un peu plus ferme, risque de passer mieux. « Et on a beaucoup de bagages. » Air mitigé, confiance fuyante, Blondie me ferait presque pitié s’il n’y avait pas un type qui finit lui aussi par dévoiler sa position, s’exhibant de derrière la bagnole, m’imitant en tous points, autant dans la posture que dans l’artillerie. Sauf que son revolver est pointé en direction de Benjamin. Bien fait. « Toujours surveiller le siège arrière, Ben. » et pas que le coffre avant, poudoumtish.

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Message(#) Sujet: Re: zombenny ▲ devil beneath my feet zombenny  ▲ devil beneath my feet EmptyLun 23 Oct - 19:42


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« C’est l’embuscade. Ginny qui sort des fourrées, Adam qui reste planqué en joker. J’ai presque de la peine pour la belle blonde qui se retrouve à la pointe du fusil comme une biche. Pourtant, il n’y a pas de peur dans son regard, elle ne prend pas même la peine de faire semblant en levant les mains -alors je sais que quelque chose cloche, que tout ceci ne va pas tourner comme prévu. Ma compassion pour notre proie s'arrête au moment où son mec sort de l'arrière de la bagnole et que je deviens sa cible. Moi, je lève les mains bien haut. Je peux me mettre à genoux et pleurer sur commande si on me demande, chacun ses skills de survie. "gnagnagna siège arrière Ben..." que je gromelle dans ma barbe en grimaçant. Elle a qu'à le faire, la prochaine fois. Tout est plus facile quand on a le gun, hein. Celui qui aime qu'on le surnomme “la botte secrète”, Adam, se dévoile à son tour, sûrement en pensant qu'un troisième fusil déboucherait ma situation. Personnellement, je ne suis pas très fan de ma position au milieu des feux croisés, mais je n’ai pas l'impression que cette bande de cowboys en ait quoi que ce soit à faire. "C'mon père que tu vises, gros naze." crache mon fils comme une vraie caricature de John Wayne. Je baisse la tête et ferme les yeux comme toutes ces fois où j'ai espéré me réveiller d'un mauvais rêve depuis ces six derniers mois. "Oh seigneur, c'est embarrassant." Être sauvé par mon mini-moi et une brunette de vingt-cinq kilos toute mouillée, je crois qu'on ne fait pas pire comme coup dans les bourses. "Alors c'est ta gonzesse et ton gosse qui se salissent les mains, princesse ?" se moque le grand baraqué qui me braque. On pourrait mettre deux Brody dans chacun de ses biceps. Honnêtement, il ne manquerait que ma mère armée d'une machette en guest star pour parfaire le tableau. "Pas besoin d'en rajouter. Et c'est pas ma gonzesse." Voilà que ma vie sentimentale a soudainement l'air de beaucoup plus intéresser le malabar que la scène qui se déroule impliquant des fusils, un vol de pockup, des zombies et la fin du monde. "Mais c'est pas ton gosse ?" "Si, c'est mon gosse, mais elle c'est... C'est compliqué, ok ?" Pourquoi je lui cause, au juste ? Au moins, le canon de son arme s'est baissé, et ses sourcils ne se froncent plus pour me vider mais pour essayer de comprendre, montant dans sa tête tous les scénarios de soap possibles pour expliquer pourquoi je me balade avec mon gosse et pas sa mère. "Compliqué genre elle sort d'une relation tumultueuse qui l’a blessée et dont elle essaye de se remettre avant de songer à autre chose et d'assumer ses sentiments, ou compliqué genre tu peux pas t'empêcher de mater les autres nanas parce que t’as la capacité d'engagement d'un ado de seize ans et que tu te sens déjà pas à la hauteur pour être père et tu dois d'abord gérer ça avant d'envisager la moindre relation même si elle te plaît ?” Mes yeux écarquillés dévisagent le buffle au grand coeur d'artichaut qui attend véritablement une réponse. Non seulement c'est pas ses oignons, mais bordel, d'où il sort tout ça et qu'est-ce que ça vient foutre là maintenant ? Un silence malaisant s'installe avant que tout n'aille soudainement bien plus vite. Un coup de feu, un cri de douleur, un autre de surprise, et la tension, palpable, qui grimpe d'un cran. Le malabar est au sol, un de ses pieds ressemble à un clafoutis, il braille des jurons d'une obscénité jamais atteinte. Le canon du fusil d'Adam fume. “Tu parles trop.” lâche Clint Eastwood avant de pointer vers Barbie qui se précipite vers son homme. J'approche alors pour récupérer les clés de la voiture, désormais tachées de sang. “Genre compliqué, abruti.” Mais pas sûr que ma vie sentimentale soit plus importante que le moignon que lui a imposé le fiston et l'infection dont il risque de crever. Sans plus traîner là, Ginny et moi approchons du pickup et inspectons tous les recoins avec soin. C'est la caverne d'Ali baba. Si le réservoir est ne serait-ce qu'à moitié plein, nous pourrons simplement rouler pendant quelques temps sans avoir à jouer des flingues pour tenir. “Où sont les bonbecs ?” demande le petit en insistant du bout du fusil. “ADAM.” Je l’entends soupirer avant de laisser tomber et nous rejoindre, lâchant un “T’as d’la chance.” au type qui pleure son pied inutilisable. “Je conduis.” je précise sans laisser le choix à qui que ce soit, les clés dans la main et prêt à ouvrir la portière. Une fois tout le monde à bord, nous démarrons et laissons là, en plan, Barbie et Rambo.

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Message(#) Sujet: Re: zombenny ▲ devil beneath my feet zombenny  ▲ devil beneath my feet EmptyMar 24 Oct - 14:49


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Et j’hausse le sourcil, alors qu’il argumente dans sa barbe. Il a un fusil pointé sur la tempe, et il trouve le moyen de grommeler sans grande conviction? Come on. Après tout ce temps, j’avais appris à communiquer avec Ben d’un simple coup d’œil, suffisamment utile pour nous entendre sur le plan à suivre lors d'urgences, assez efficace pour lui clore le clapet d’un battement de cil quand il gémit comme un bébé. Mais il n’aura pas à babiller bien longtemps avant qu’Adam ne décide de reprendre en main la situation. Il tire, on gémit, l’autre Rambo s’écroule au sol et je siffle de satisfaction devant le petit soldat qui a presque surpassé le maître. « Damn, ce visou. » il est fier Adam, il bombe le torse, mais il garde tout de même son sérieux, faisant un pas puis un autre en direction de sa cible pour lui montrer que malgré sa petite taille, il n’avait pas du tout peur des répercussions de son geste. Je garde quand même un œil sur les deux inconnus, pas encore tout à fait satisfaite de leur position tant qu’on n’a pas les clés en main. Ce que Ben finit par faire tiquer entre ses doigts, et qui motive le geste de baisser ma garde. Bien serré, et prête à réagir si besoin. On n’est pas des animaux non plus. Barbie est au chevet de son pauvre albâtre qui fixe sa blessure en pleurnichant, et je farfouille dans mon sac à la recherche d'un vieux t-shirt déchiré, et d’un reste de bouteille d’alcool pour leur filer sur notre lancée. Les Brody grimpent à bord du véhicule, je couve du coin de l’œil le couple qui s’affaire à panser et laver la plaie, et c’est forte de notre petit succès du jour que je prends place côté siège du co-pilote, le moteur qui sonne notre future liberté. Une semaine presque qu’on marchait, qu’on n’avait accès à rien d’autre qu’à nos godasses et nos jambes épuisées pour nous déplacer à proximité des artères principales. J’allonge mes jambes, recule mon siège, cambre un peu le dossier et un léger soupir s'échappe de mes lèvres. Même si Ben conduisait comme une grand-mère, les prochaines heures auguraient mieux – parce que oui, on compte en heures maintenant. Pas en jours. « Faudra réfléchir à ça, la backstory. » je laisse aller dans sa direction, les prunelles qui glissent sur la route qui s’allonge devant nous. Je parle bien sûr de son petit échange avec Rambo qui a suffi à ce qu’Adam prenne le relai de la chose. « Inventer un truc compliqué, limite cheesy. Parce que ça l’a bien distrait quand même. » autant creuser là où on pourrait améliorer nos techniques pas toujours justes. La loi de la jungle. « Pas besoin d'inventer. » la petite voix d’Adam et sa nuque qui s’étire entre nous deux me fait froncer des sourcils. Dans un autre monde, peut-être que ce genre de remarque m’aurait fait réfléchir, peut-être même espérer. Pas ici, pas maintenant. « Tu fouilles derrière, voir si y’a des bonbons? » et je gagne quelques minutes alors que le garçon se souvient de son craving et s’active à chercher son dû sous les bancs et dans les pans des portes. Un silence confortable nous accompagne une fois qu’Adam a mis la main sur un sac qui grince, et il fait même l’effort de filer quelques skittles à Ben dans une manœuvre épique alors qu’il évite au même moment une pile de cadavres en bord de chemin. « On tourne là, ça a l’air cool. » qu’il ajoutera quelques minutes plus tard, pointant la route de terre qui borde l’autoroute. Ça ferait changement oui, mais ça serait un peu plus risqué probablement. Moins de visibilité, plus de chance de tomber sur d’autres voleurs de grand chemin, des rapaces, des charognards. J'allais m'opposer, mais c'était avant de voir, de scruter le gamin, visage tâché de terre, vêtements sales de sang séché, bruit de la détonation qui me revient, regard vide qu’il me retourne dans le rétroviseur. C’était injuste, cette enfance. Il l’avait pas mérité. Me penchant dans la direction de Ben, je lui confie, l’air plus amusé qu’à mon habitude. « Tu sais comment il réagit quand on chigne trop... » on pouvait bien faire ça pour Adam. C’était pas grand-chose après tout, et probablement que le chemin reviendrait sur la vraie route quelques kilomètres tout au plus loin. Imitant le gamin qui n’a pas arrêté de chercher au cas où d’autres surprises se cachent dans la voiture, j’ouvre le coffre à gant pour y dénicher un vieux CD sans pochette, sur lequel une dédicace dégoulinante d’amour fait office de présentation. Je lis d’une voix langoureuse, détendue par la sensation de sécurité qui nous englobe depuis qu’on s’est barrés en trio. « À toi bébé, t’es ma poupée rien qu’à moi l’oublie pas toujours à toi xoxo ». J’éclate de rire devant le côté ridicule de la chose, avant de brandir le précieux sous les yeux de Ben. « Tu conduis, je choisis la musique. » et c’est le mix bébé poupée volume un qui empli l’habitacle de la voiture à plein volume. La première track s’enflamme, Michael Jackson s’ajoutant à notre petit groupe.
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Message(#) Sujet: Re: zombenny ▲ devil beneath my feet zombenny  ▲ devil beneath my feet EmptyJeu 26 Oct - 19:41


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Débutent des kilomètres et des kilomètres de désert, des heures du même paysage qui défile à tragers les fenêtres de la voiture. Nous n’empruntons que les grands axes, évitant les villes, villages, bourgades, fermes isolées ; là où les humains étaient chez eux, les morts-vivants ont élu domicile à leur tour. Le plus sûr reste le désert, la route, d'où nous pouvons les voir venir de loin, et s'ils sont en groupe, par chance, se faire une petite partie de bowling bien dégueue. Les routes sont bordées de voitures abandonnées, et bien souvent, de cadavres et de piles d'os et de chair qui en étaient autrefois les propriétaires. Il suffit d'une panne, d'un pneu crevé, pour se retrouver dans une sacré panade. Là, au milieu de nulle part, où personne ne peut vous aider, ni vous entendre hurler. Là où on vous retrouvera en lambeaux d'ici deux semaines, ou deux mois. L'idée, c'est de ne pas finir comme eux. C'est de garder le regard rivé sur l'horizon, et aller de ce côté là, qu'importe ce qu'il y a au bout, s'il y a un bout. Bouger, tout le temps. Nous sommes déjà loin de Barbie et son Apollon qui pisse le sang. Adam fouille la banquette arrière et Ginny s'installe confortablement. Alors que ça jacte au sujet de nos victimes laissées derrière, moi je songe aux propos, au comportement de mon fils, tout ce que ne devrait pas dire et faire un enfant de son âge. Confession de moi à moi, j'ai peur pour lui, et de lui ; de ce que tout ça va faire de lui, de qui il sera en grandissant dans ces conditions, s'il vivra assez longtemps pour connaître un semblant de retour à la civilisation. Et je devrais faire mieux pour lui, je ne devrais pas être celui qui lève les mains en l'air et se fait secourir comme une demoiselle en détresse. Mais je ne sais pas si je le peux. Certains se découvrent d'incroyables capacités pour leurs enfants en temps de crise, moi non. Et c'est à lui, encore une fois, de veiller sur moi. “Y’a que lui que c'était susceptible d’intéresser je pense.” je réponds à propos de cette idée de monter tout un bobard à notre sujet à raconter aux gens qu'on embobine, écoutant d'une oreille distraite. Du reste, les survivants se fichent bien des histoires de coeur et de famille ; beaucoup n'ont plus ni l'un, ni l'autre. Et pendant que je revois en boucle le pied de ce type exploser comme une tomate trop mûre pas si loin du mien, je fais mine d'être encore intéressé par les bombecs qu'Adam finit par dégotter à l'arrière. Quelques Skittles ne peuvent pas me faire de mal, et peut-être même que je trouverais un peu de réconfort dans des billes acidulées. Je les attrape malgré le coup sec que je donne dans le volant pour éviter quelques corps amoncelés sur la route. “Ces zombies, franchement, pas foutus de mettre leur bouffe sur le bas côté.” que je grommelle, comme si le savoir vivre était encore une qualité dans ce monde. Ginny met la main sur un CD, je pouffe un peu en l'écoutant réciter la dédicace -et d'un autre côté, ça me fait un peu mal, parce qu'ils sont paumés à des kilomètres de nous, seuls, et peut-être déjà morts. Sans m'opposer, je laisse la jeune femme lancer la musique. Mon regard traîne une seconde sur elle, sur son visage, ce qu'elle dégage, tout ce qui n'est plus tout à fait pareil. Plus depuis la mort de Noah. Et l'époque des châteaux en couvertures me manque de plus en plus. “C’est quoi ça ? C'est nul.” proteste Adam en découvrant Billie Jean. “Comment ça “c'est nul” ? Tu connais pas MJ ? Comment je t'ai élevé, moi ?” J'ai raté quelque chose visiblement, l'éducation musicale. Entre autres. Ouais. Histoire de lui faire les pieds, et qu'il comprenne qu'il subira cette musique pour laquelle il a intérêt à se découvrir un intérêt quoi qu'il dise, j'augmente le volume jusqu'à la limite de la décence. “Écoute et apprécie, jeune padawan.”

Il s'est assoupi sur la banquette, avant que le soleil ne soit complètement tombé. Nous roulons désormais en direction d'un soleil rouge qui transforme le désert en grande plaine sanglante. Malgré les heures qui passent, je ne ressens pas de fatigue particulière, toujours alerte. D'un coup d'oeil dans le rétroviseur, je m'assure qu'il ne prend pas le fusil pour un doudou à câliner dans son sommeil. Non, il est paisible, aussi bien installé qu'on peut l'être à l'arrière d'un pickup. “J’ai l'impression qu'il n’y a que quand il dort qu'il ressemble à nouveau à un gamin.” dis-je tout bas afin qu'il ne se réveille pas. J'imagine que je dois m'estimer chanceux d'avoir un fils capable de se débrouiller, se défendre et survivre, non pas un petit pleurnichard braillard sur qui il faudrait hurler en permanence pour qu'il se bouge, pour qu'il agisse, pour son propre bien. Je soupire, tente de capter le regard de Ginny, d'échanger un sourire, une grimace, une vanne, mais elle n'est plus vraiment aussi réceptive qu'avant. Parfois j'ai du mal à reconnaître ceux avec qui je fais route. Parfois j'aimerais presque que nous cessions de courir, que nous laissions les monstres nous avoir, et que nous allions faire des trucs funs de l'autre côté comme pourchasser des humains, faire des sorbets avec des cervelles, et jouer à qui grogne le plus fort sans se déboiter la mâchoire. Parfois ça semble enviable. “C'était vraiment n'importe quoi ce que l'autre abruti racontait…” je finis par dire sur fond de Bruce Springsteen qui joue tout bas. Tous ces scénarios qu'il s'est monté à notre sujet, cette histoire dégoulinante qu'il s'imaginait en un coup d'oeil. Certes, je ne suis pas du genre à m'engager et j'ai mes doutes sur mes capacités à être un bon père par temps apocalyptique, et il est vrai que Ginny est rescapée d'une véritable tempête émotionnelle… mais ce n’est pas ça, ce n’est pas ce qu'il disait, parce que c'était ridicule. “...hein ?”
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Message(#) Sujet: Re: zombenny ▲ devil beneath my feet zombenny  ▲ devil beneath my feet EmptyVen 27 Oct - 16:15


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Les paroles de Billie Jean trouvent étrangement leur place sur nos lèvres comme un amusement morbide, comme si l’apocalypse qui se passait tout autour de nous n’avait pas lieu d’être. Comme si ce trio de zombies, là, qui se nourrit sur le cadavre qui trône au beau milieu de la traînée de sable n’existait pas vraiment. « 10 points pour celui de droite, 50 si tu les enfonces tous les 3. » et un doux souvenir de toutes ces fois où derrière sa moto je lui avais lancé le même commentaire, beaucoup plus innocemment, beaucoup plus à la blague. Adam avoue ne pas connaître Michael et au-delà même ne pas aimer, et je laisse aller un rire presque honnête, presque normal devant la réaction de Ben. Tout jure dans cette scène, tout est différent, tout est irréel. La musique que crache la radio, le regard qu’on partage à l’avant quand le refrain se dédouble et qu’Adam soupire en se bouchant les oreilles comme si ça changeait quoi que ce soit au traitement qu’on allait lui faire vivre. Oui, ils m’avaient sauvée. Parce que ç’aurait pu être pire. Parce que j’aurais pu rester en retrait, à attendre mon heure, à abandonner. Promesse faite à mon fils de son vivant, de toujours être forte, de toujours être solide. Et j’avais perdu pied, à son décès. J’avais tout perdu, mon pourquoi, ma raison d’être. Ben avait été là, du mieux qu’il avait pu. Sans grande conviction, maladroitement le plus souvent, mais il n’avait pas bougé. C’était pas facile de nous définir à l’époque, ça l’était encore moins aujourd’hui et c’était probablement pour ça que j’avais perdu le fil. Mais ces esquisses de sourire qu’il m’arrachait parfois, ces blagues auxquelles je riais, pas souvent mais au moins, quand notre survie n’en dépendait pas, c’était un énorme pas pour moi. Pour celle qui sent son coeur battre un peu moins vite de jour en jour, pour celle qui, bien souvent, a regardé son pistolet comme la solution à tous ses problèmes, le plus lâchement du monde. J’essayais d’être forte pour eux en espérant que ça suffise pour moi. « J’peux lui trouver des autocollants des Minions à coller sur son shotgun si ça peut te rassurer. » que ma voix distraite lui répond, le regard toujours vissé sur la route où je remarque de plus en plus d'amoncellements de cadavres, ce qui n’est pas sans me mettre la puce à l’oreille. Mais son silence me force à tourner la tête dans sa direction. Il a le regard las Ben, il est vidé, déçu. Et je ne peux que le comprendre, fibre parentale qui s’étiole. Ma plus grande fierté sera certainement de ne pas avoir eu à faire vivre ce monde horrible à Noah, qu'il n'ait pas gardé de sa vie un souvenir tiré d’un film d’horreur où chaque nuit, le moindre bruit peut être synonyme d’une finale sanglante. Bien souvent, je me demande si ça en vaut vraiment la peine, si les séquelles que tout ceci laisseront sur Adam ne seront pas ses pires blessures. « Y’a plus de place pour l’enfance, de nos jours. C’est pour ça qu’il faut en profiter quand ça va bien, quand tout est calme, quand on peut souffler à nouveau. » fallait faire avec la situation, parce qu’elle n’était pas prête de changer. Et je soupire, les prunelles détaillant toujours Ben. « Pour ce que ça vaut, t’as de quoi être fier de lui. T’as fait un bon boulot, avant. Et même encore aujourd’hui. » Si j’avais l’habitude avant d’être sa plus fidèle supporter, presque sa cheerleader dédiée, elle était loin l’époque où j’étais douce, rassurante. Parce que les moments comme ceux-là, dans la confidence, étaient bien rares. « C’est pas ce qu’on a entendu de pire. » l’histoire sentimentale que l’autre Ken nous avait balancée plus tôt était bien loin derrière les séries d’insultes dont on nous affublait depuis qu’on avait commencé à voler des bagnoles. L'avis romantico-cliché du dude était bien le dernier de nos soucis, ou alors c’est ce que je croyais, quand Ben le ramène sur le tapis, quand son questionnement à demi-mot me fait froncer des sourcils. « Peu importe, y’a que lui que ça intéressait, right? » je joue sur ses mots, je dénature le sens derrière, je passe maître dans l’art du déni. Parce que c’est plus du tout comme avant. Avant, c’était une question de timing. Avant, je m’étais juré que dès que tout serait réglé dans ma tête, dans mon coeur, dans ma vie, je tenterais. Je ne savais pas quoi, je ne savais pas comment, mais je savais que je voulais que ce soit avec lui. C’était simple avec Ben, c’était doux, c’était facile. Ça avançait lentement, ça me convenait. Avant, je faisais des tests, je levais des yeux brillants dans sa direction, je voulais le faire rire, je voulais rire avec lui. « J'imagine qu'il y aurait eu du vrai dans son discours y'a 6 mois... mais maintenant, ça me semble tellement à côté de tout le reste de penser à ça. Peu importe ce que ça signifie. » Maintenant, j’avais tout relégué d’un côté, dans un dossier privé, inachevé, auquel je n'accordais plus la moindre importance. Parce que rien n’était facile, rien n’était simple, rien n’était nous depuis les six derniers mois. Je me surprenais de rares fois à l’espérer, à fermer les yeux en me disant que le lendemain, tout serait comme on l’avait laissé. La fin du monde pour trame de fond, c’était une bien bonne distraction pour chasser ce qui aurait pu, probablement, sauver ce qui restait d’humanité en moi. « J’t’ai jamais montré, finalement, la vidéo à ma graduation avec Kanye et mon abus de punch. » Stronger qui commence à jouer dans l’habitacle, le souvenir qui remonte je ne sais d’où, je ne sais de comment, suffisamment pour que je lui envoie un sourire, sincère. Coup d’oeil complice, presque, et la déception de ne plus être la même, celle qu’il aurait peut-être pu aimer un jour. Pourtant, le temps des regrets est bien loin quand je finis par enfin regarder à nouveau la route, et réaliser que les diverses piles de cadavres éparpillées sur le bas côté sont maintenant recouvertes de zombies affamés. Sur la distance, je peux compter au moins 4 bancs de morts-vivants s’alimentant dans la pénombre et évidemment, les phares de la voiture suffisent à ce qu’ils lèvent leurs yeux exorbités de sang dans notre direction. « Fonce, fonce, on dégage d’ici. » j’ai un mauvais pressentiment alors que je me redresse sur mon siège, que j’entends Adam se réveiller doucement à l’arrière, ma voix un brin alarmée ayant dû suffire à ce qu’il ouvre l’oeil. On aura peut-être le temps de conduire assez vite pour éviter les dizaines de zombies qui avancent vers nous - ou pas.  

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Message(#) Sujet: Re: zombenny ▲ devil beneath my feet zombenny  ▲ devil beneath my feet EmptyLun 6 Nov - 19:15


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Plonger l'arme d'Adam dans un bain de glitter et lui coller des oreilles de panda sur la visière ne suffirait pas à me rassurer, me sentir moins coupable. Même si tout ceci n’est pas de ma faute, c'est un sentiment persistant. Parce qu'il me protège plus que je ne le protège, parce qu'il me défend et assure ma sécurité plus que je ne le fais, alors que c'est mon rôle. Il devrait se reposer sur moi et non l'inverse, il devrait savoir qu'il peut compter sur moi et non me voir comme le boulet du groupe. Pour sûr, il tient tout ça de sa mère. Loan est la forte tête, celle qui ne se laisse pas faire, qui n’a peur de rien. Est-elle encore en vie ? Voilà une question qui restera sûrement sans réponse. Adam ne l'a jamais posée, j'imagine qu'il ne se fait pas d'illusions. Il se montre fort, le bonhomme, véritable petit guerrier. Pendant que je suis bon à conduire, faire diversion, et m'inquiéter pour eux. “Ouais, pourquoi pas.” je réponds donc d'une voix monotone et distraite à la proposition de Ginny de décorer le gun de mon fils. Je me dis que ça ne rendrait le tir que plus attractif et la dernière chose que je souhaite c'est qu'il prenne du plaisir à appuyer sur la gâchette. Comme quoi, il fallait une apocalypse pour que mes instincts de père se réveillent un peu. Je fais ce que je peux, je reste Ben, le même, mais un peu plus paumé. Ma passagère tente quelques paroles rassurantes qui ne font pas trop mouche, mais je force un sourire. “C’est gentil.” Mais en réalité, Adam s'en sortirait aussi bien sans moi. Il s’est toujours élevé tout seul, et si c'est un garçon comme il faut, c'est uniquement parce que son paternel lui a donné tout l'exemple de ce qu'il ne faut pas devenir. L'invasion des morts-vivants aura transformé Ginny et Adam en deux véritables Vikings, tandis qu’elle n’aura fait qu'exacerber mes doutes. Il n’y a plus rien pour m'occuper l'esprit autrement -plus rien en quoi je suis bon un tant soit peu, plus de boulot, plus de belles blondes dans les bars bondés, plus de Zelda, sainte Trinité ayant toujours régi ma vie. Mes seuls repères sont dans cette voiture avec moi. Lorsqu'ils ne tuent pas des zombies à la pelle et ne dépouillent pas d'autres survivants qu'ils laissent pour morts. Tout ce sentimentalisme est parfaitement accessoire aux yeux de Ginny. Qui ça intéresse, tous les “et si” qui n'auraient pu avoir lieu que dans une réalité aujourd'hui révolue. Personne. Même pas nous. “Yep.” je souffle, résigné. La route se poursuit à l'infini. La nuit est tombée, les yeux me piquent enfin. Mes paupières clignent de plus en plus, mon champ de vision uniquement concentré sur les marquages au sol m'empêchant d'être attentif à quoi que ce soit autour. C'est la jeune femme qui me pointe les troupeaux de zombies qui se forment le long de la chaussée, sortis d'entre les piles de cadavres. Et ils courent vite, les salauds. Avant que mon pied n’ait le réflexe d'appuyer sur l'accélérateur, deux d'entre eux ont sauté sur le pickup et frappent de leurs membres disloqués sur la fenêtre arrière dans l'espoir de la briser et se frayer un chemin à l'intérieur. Adam s'est réveillé et a eu le réflexe d'attacher sa ceinture dans la seconde avant de les pointer avec son fusil au cas où ils arriveraient à leurs fins. “Accrochez-vous.” je lâche, déterminé, empoignant le frein à main pour le serrer soudainement, le volant complètement braqué. L’auto nous balade sur un violent demi-tour qui parvient à faire voler un des deux monstres. Pour le deuxième, je cogite encore -pourquoi autant, je ne reste pas à l'arrêt et enclenche la marche arrière pour continuer d’avancer, retourné sur mon siège pour voir où je vais dans le noir, les feux avant éclairant la meute de corps en décomposition qui détale vers le capot. “Vas-y papa, fonce !” Mon pied écrase la pédale jusqu'à ce que nous soyons hors de portée de la bande d'immondices ambulantes. Il ne reste que celui qui squatte l'arrière du pickup, bien accroché. Je tente un nouveau coup de frein à main, encore un demi tour qui nous remettent sur la bonne trajectoire mais qui n'est pas suffisant pour ce coriace. Alors j'ouvre la fenêtre de la portière de Ginny afin qu'elle y passe le buste, et le fusil, profite de l'étourdissement du zombie et comme un tir entre ses deux orbites vides. Voilà la voiture repeinte à la cervelle. Une fois Ginny à l'intérieur, la fenêtre remontée, je lâche un soupir de soulagement. “Ça tu vois, c'est des années d'entraînement sur GTA.” dis-je avec un petit rire. Au moins un truc que je sais faire, un truc où je suis vraiment utile ; piloter. Il n’en faut pas plus pour que mon égo en berne soit regonflé à bloc pour les prochaines heures. Ginny et Adam m’entendront m'en vanter un bon moment. Du moins, si j'avais été attentif. Si j'avais vu les deux zombies qui étaient postés au milieu de la route, attendant que le buffet vienne à eux. Si je n'avais pas braqué comme un idiot plutôt que de leur foncer dedans, pris d'un doute, d'un réflexe incontrôlable. Si nous n’avions pas terminé dans le décor, les roues quittant le sol pour nous faire voler dans l'habitacle pendant plusieurs tonneaux. Un moment interminable qui commence par un “Papa ! Attenti-” et se termine par le fracas de tôle froissée au milieu du désert.

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Message(#) Sujet: Re: zombenny ▲ devil beneath my feet zombenny  ▲ devil beneath my feet EmptyMar 7 Nov - 6:48


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C’était pas nouveau ce rush d’adrénaline qui remonte le long de notre gorge, qui chauffe notre ventre. Ben a la réaction facile et il reprend de suite le contrôle du volant, laissant le pickup glisser d’un sens et de l’autre, renversant un premier zombie du revers de l’aile. L’impact nous cogne contre la porte du véhicule, mais on n’en a que faire, des bleus. Un de plus, un de moins. Je vois des yeux qui brillent dans la nuit, je vois des corps qui s’articulent, saccadés, dans notre direction, et le Brody les remarque aussi, vrillant autour de notre deuxième assaillant qui réussi à nous éviter de justesse. Le signal dont j’ai besoin, et mon corps rachitique se glisse par l’embrasure de la fenêtre, fusil aux aguets. C’est un coup direct, une balle en pleine gueule qui le propulsera en arrière, suffisamment pour qu’on puisse prendre un nouvel air d'aller. Le coeur bat un peu plus vite, mais ça passera, comme toujours. On l’échappe, on passe en mode survie, on en a vu d’autres. La ferraille qui grince sur la vitesse, je juge que le camion sera quand même assez solide pour faire le reste du chemin vers dieu sait où - rares étaient les bagnoles qui restaient intactes plus de quelques heures dans ce monde recouvert de chair putréfiée, de cadavres et de créatures d’outre-tombe. C’est léger, du côté conducteur, maintenant qu’on sent nos prédateurs loin derrière - avant qu’on en remarque de nouveaux droit devant. Et même si j’avais une confiance aveugle en Ben, et même si je savais qu’il ne ferait jamais rien de stupide volontairement, qu’il avait la survie de notre trio à coeur, là, je retiens un cri de protestation, une main accrochée à la porte, l’autre qui s’agite. « Freine pas, merde!  » et c’est trop tard. L’élan pris avant a suffi à faire voler le pickup en l’air, et zombies ou non, la trajectoire du bolide vrille plusieurs fois avant de s’immobiliser, en angle. Le corps ankylosé, j’ai peine à me souvenir lequel de mes membres a heurté le pare-brise en premier, si c’est bien mon sang, là, qui coule le long de ma tempe ou si c’est celui de quelqu’un d’autre. Je ne réalise que trop tard que ma main est agrippée à celle de Ben durant les culbutes, mes ongles ancrés dans sa peau, marquée rouge, presque au sang. Mon regard qui capte le sien, l’échappée belle, le souffle qui manque. Puis c’est le silence, les craquements, le vent dehors, les gémissements. « Adam? Adam?! » je peux jurer qu’il s’était attaché, je peux jurer que son petit corps est resté derrière durant l’impact, et c’est en sentant chacun de mes os craquer sous l’effort que je me détache enfin, que j’essaie de ramper sur le côté, de l’aider à se sortir de sa position recroquevillée. D’un pied, j’éclate les restes de verre de sa fenêtre qui n’avait pas cédé en entier, avant de l’attirer avec moi hors du véhicule. Ben viendra nous rejoindre quelques secondes après, en lisière de la route. « Regarde-moi, respire, ça va aller? » il peine à tenir debout, mais mes yeux sont suffisamment adaptés à la noirceur pour que je puisse détailler son corps et m’assurer qu’aucune grosse blessure apparente ne le marque. Probablement une commotion, sa main qui coupe sa tempe, sa tête qui dodeline. Il est sous le choc, et c’est une impulsion de dédramatiser, de le secouer un peu, de le ramener vite et bien avec nous qui me fait ajouter la suite. « C'est quoi le cri que fait ton père quand des zombies le poursuivent? » les questions habituelles pour relancer la mémoire, à savoir son adresse, sa ville, la date du jour, me semblent bien dérisoires. Et ne génèrent pas une réponse aussi drôle. Il pousse un cri de fillette, ce n’est pas encore ça, sa gorge est enrouée, sa voix est chancelante, mais il esquisse un sourire à la fin, et juste ça nous suffit. Adam finira par reprendre ses esprits en s'appuyant sur la carcasse du pickup, et je fais volte-face vers Ben au même moment, toujours consciente que si nous n’étions pas seuls quelques minutes plus tôt, c’est probablement toujours le cas. Pourtant, ses yeux ne se portent pas tout autour à la recherche d’ennemis, mais dans ma direction, vers ma hanche droite. Pas besoin de passer la main sur mes fringues pour savoir que quelque chose de mauvais se cache sous le tissu. C'est chaud, ferreux, frais, humide. Liquide carmin qui coule le long de ma peau. J’en deviens un appât, et surtout, j’ignore la gravité du truc. « C’est rien. » quand je vous disais que j’ignorais, volontairement. Je verrai à la lumière du jour, je verrai lorsque je retirerai mon t-shirt, je verrai lorsque j’aurai le temps, et certainement pas tout de suite, alors qu’on risque de faire buffet pour les zombies du coin. En voilà déjà un qui sort de derrière un amas de sable, puis un autre qui l’accompagne à notre gauche. Je change mon fusil d’épaule pour viser du côté où ça n’élance pas, et malgré le fait que j’arrive à attraper le genou de l’un, et à presque faire peur à l'autre, ce n’est pas tout à fait ça. Entre Adam affaibli et ma blessure qui est encore inconnue, on est mal en point.

« Montez! » mes rétines désespérées repèrent une voiture en retrait à quelques mètres de nous, derrière les arbustes. En courant, on risque d'y arriver, et de rejoindre la voix qui nous intime de venir nous planquer dans leur propre véhicule, d'y reprendre des forces. Le moteur marche, la détonation de leur fusil garde notre duo de zombies à distance, et il n'est pas question de tourner l'option 14 fois dans notre tête avant de sauver notre peau. Pas la peine de tenter de convaincre Ben et Adam avant que j'emboite le pas - on avait absolument rien pour nous, et le mieux qu’on pourrait faire là serait de saigner sur les baskets de nos futures victimes. Je me félicite de la décision prise sur la volée, la main d'Adam dans la mienne, lorsqu’on s'élance vers la voiture de nos sauveteurs, là, tout droit. Un mouvement brusque fait entrer plus profondément dans mon flanc ce qui je crois est un bout de métal du pickup qui s’est arraché durant l’impact. La douleur est nettement moins facile à masquer, et je pince les lèvres, retenant mon malaise. « Si ça s'infecte, tu sais quoi faire. » et je profite d’une seconde d'attention de Ben une fois installée sur la banquette arrière pour lui glisser ma demande à l’oreille. J’avais confiance en lui, et pas juste en sa conduite. Il s’occuperait d’abréger mes souffrances si ça en venait là. Une poignée de secondes plus tard, et je calme au mieux mon souffle, luttant de toutes mes forces pour ne pas perdre connaissance.

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Message(#) Sujet: Re: zombenny ▲ devil beneath my feet zombenny  ▲ devil beneath my feet EmptyMer 22 Nov - 12:34


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Sonné, sans dessus-dessous, il me semble encore entendre le son des vitres qui se brisent, les portières qui se froissent, la cage métallique qui se referme sur nous et menace de nous écraser à force de rouler bouler alors que nous sommes bel et bien à l'arrêt -enfin. Mon cœur fait un bruit assourdissant, cette peur, cette panique me paralysant quelques trop longues secondes. C'était pas aussi drôle que dans GTA. Du tout. Je sens des cailloux incrustés dans ma peau, les coupures liées au pare-brise en morceaux, et une cheville qui n’a pas bien vécu les secousses. Mais le constat attendra ; je m'assure que Ginny est toujours à côté de moi, Adam sur la banquette arrière, tous en un morceau -ou presque-, tous choqués -complètement. Cela ne doit pas empiéter sur notre réactivité ; ce désert n’est pas sûr, et les zombies courent vite sans plus connaître la fatigue. Seulement la faim. Nous nous extirpons du véhicule, et pendant que Ginny s'occupe d’Adam je m'assure que nous avons toujours toutes nos affaires -tout ce qui nous reste, tout ce qui est important à notre survie. En arrachant le fusil de mon fils de l'arrière cabossé, je me fais la remarque que ce n’est pas léger, comme engin. Si je peux éviter qu'il en fasse usage à nouveau… Un bruit dans les fourrées, je dégaine comme si j'avais fait ça tout ma vie. Hors de question de survivre à ça pour que de foutus morts-vivants puissent faire les charognards. Not today. J'explore nos options, mais nous sommes vraiment en mauvaise posture. Et quand je remarque l'immense tâche rouge sur le t-shirt de la brune, je comprends que c'est encore plus mal barré que je ne le pensais. C'est rien, qu'elle ose me dire, et j'aurais bien rétorqué que mon cul c'est des nuggets, mais je me surprends à tirer à l'aveugle sur ce que je crois être un autre zombie profitant de ce moment de faiblesse. C'est à peine s'ils mouftent, alors que je sursaute plus qu'eux à chaque coup de feu. Tirés d'un mauvais film, nos sauveurs arrivent comme sortis de la poussière ; la voiture freine devant nous et tandis que le conducteur nous ordonne de monter, le passager éloigne la menace. Cerveau sur off, je nous vois grimper à l'arrière, claquer la portière et faire crisser les pneus sur les cailloux avant de foncer vers on ne sait quelle destination qui, à cet instant, n’a aucune importance. Nous pourrions avoir sauté dans le van d’une bande de psychopathes qu’il serait trop tard pour s’en soucier. Pour le moment, la seule vraie problématique, c’est cette plaie qui fait souffrir Ginny. Tu sais quoi faire. J’ai envie de lui dire de la fermer, que tout ira bien, mais c’est le genre de discours qui ne prend pas. “Promis, je ne parlerai pas de ta vidéo de la honte à ton oraison funèbre.” dis-je plutôt, parce que c’est toujours ce genre d’âneries qui traverse mes lèvres plutôt que ce que j’ai réellement sur le coeur, et même si un petit rire a plus de chances de la faire grimacer à nouveau, je préfère minimiser et tourner en ridicule la simple idée qu’elle puisse succomber aussi bêtement. Ce n’est que lorsque le calme revient et que, visiblement, nous sommes à l’abri pour le moment que je me penche sur le cas de nos mystérieux sauveteurs. “Vous êtes qui ?” je demande sans m’encombrer de beaucoup de diplomatie, pas même un merci. “Lui c'est Chip, et moi Dale.” Chip and Dale. Je pouffe tout bas, je me passe de tout commentaire. L’humour pourri a de beaux jours devant lui, apocalypse zombie ou pas. Ginny a lutté pour rester conscience une grande partie du trajet, mais vers la fin, ses paupières furent trop lourdes pour elle. Nous arrivons justement dans ce qui ressemble à un campement de fortune, rien à voir avec les sortes de cités organisées militairement où les survivants s’amassent en attendant allez savoir quoi. Ceux-là ont l’air de commencer à s’installer, mais sans être totalement sûrs de rester à cet emplacement là. Quelque chose de bizarre flotte dans l’air, mais je suis trop épuisé pour m’en soucier. Nous descendons de voiture et Dale arrache Ginny d’à mes côtés dans cette paire de gros bras tatoués. “C'est un camp assez récent, on est pas beaucoup, mais on a le nécessaire. On va s'occuper d'elle.” explique Chip en parallèle avec ce sourire bienveillant qui ne parvient pas à m’inspirer confiance. “Je viens.” Il se dresse sur mon chemin. “Pas besoin, on gère. Allez vous reposer, le gamin aussi. Je vais vous trouver une tente libre.” Et il ne nous laisse pas d’autre choix que de lui emboîter le pas, prend les devant et nous conduit jusqu’à un abri de fortune où sont étalés des duvets. En voyant ça, je ne me pose plus de questions et m’affale par terre, prêt à roupiller jusqu’au matin, voire même deux jours entiers. Mon sac sera office d’oreiller, ce qui n’est pas tout confort, mais reste le meilleur moyen de toujours l’avoir à portée. Adam, lui, s’est assis et me juge lourdement du regard, plus adulte que je ne le suis. “Quoi ?” “T’as failli tuer Ginny, et maintenant tu la laisses toute seule.” Mon coeur se serre, et alors que je devrais, je ne sais pas, lui dire de me parler sur un autre ton, lui faire une bonne grosse leçon de papa en colère qui ne va pas se laisser faire par son môme, je demeure muet, abattu. Adam finit par s’allonger en prenant soin de me donner le dos. Je ne me souviens même plus à quel moment j’ai sombré à mon tour.

Une détonation, dans un rêve, m’arrache aux images de ce couple que nous avons abandonnés sur la route en début de journée -ce qui semble pourtant remonter à une éternité. A la lumière qui traverse la toile de la tente, il ne fait pas encore tout à fait jour, et je n’ai pas eu beaucoup de repos. Je n’ai pas non plus le temps d’émerger, car je réalise que la couchette à côté de la mienne est vide ; mon fils n’est plus là. “Adam ?” Je saute sur mes pieds, déjà tout habillé, me précipite dehors, dans les allées entre les abris, sur le chemin qui me paraît être celui où nous avons suivi Chip la veille. Et lorsque je m’apprête à l’appeler à nouveau, j’arrive à quelques mètres d’un feu de camp ; là, il y a non seulement Adam, mais aussi Ginny, et nos deux sauveurs. Et pas mal de rires de bon coeur qui émanent sur leur petite sauterie privée. Je tente de réprimer l’amertume qui me gagne et cette affreuse, ignoble, écoeurante jalousie qui me tord l’estomac avec une bonne grosse de déni. Tout le monde va bien, tant mieux. Je tourne les talons, retourne à la tente. Si personne n’a besoin de moi, autant gratter encore un peu de repos. Je ne retrouve mes compagnons, leurs baskets toujours collées par Chip et Dale, au moment du petit-déjeuner. Je n’ai pas vraiment d’appétit, encore moins pour cette espèce de gruau grisâtre, mais je me dis que si je me remue avec ma cuillère assez longtemps tout le monde croira que j’en ai mangé un bout -comment quand on essaye de feinter à la cantine quand c’est le jour de la brandade de morue. “On se tire dès que tu vas mieux.” dis-je tout bas à Ginny. Je sens pas cet endroit, je sens pas les deux hamsters qui ont décidé de nous aider.

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Message(#) Sujet: Re: zombenny ▲ devil beneath my feet zombenny  ▲ devil beneath my feet EmptyMer 22 Nov - 21:07


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J'ouvre les yeux, sursaute dans la pénombre, serre les poings, redresse du mieux que je peux mon corps enroué, disloqué. « Ben?! » le réveil a été brutal, rien ici ne fait de sens, aucun repère n’est familier et je n’aime pas du tout la silhouette inconnue qui se rapproche, mon t-shirt taché de sang qui traîne au sol, la sensation d’être confinée, d’avoir le bassin serré, trop. « Il dort, ils vont bien. Tous les deux. » il comprend tout de suite à mon expression que de ne pas avoir de nouvelles des Brody sera synonyme d’attaque verbale assez venimeuse. Parce que physiquement, c’est pas tout à fait ça. « Où est-ce qu’on... » je gesticule, je tente de me mettre droite, et tout élance, tout brûle. Ma main s’appuie sur ma hanche, je serre les lèvres pour retenir un énième cri. « Bouge pas. » il aurait pas pu le dire avant? Un regard noir plus tard et il exhibe sa dernière prise, un éclat de la porte côté passager, apparemment tout droit retiré de yours truly. « J’ai réparé les dégâts, nettoyé la plaie, reste juste à attendre que ça cicatrise. Comme une neuve. » son rire est rauque, comme sa voix cassée, mais ses gestes sont doux, avenants. Il finalise le pansement autour de ma taille lorsque ses mots percent à nouveau le silence, banalités, tentative de me changer les idées. C’est pas tout à fait ça, il lui en faudra beaucoup pour faire baisser ma garde, mais je reconnais un rire lâché distraitement, à un moment dans la nuit. Quelques bribes sur nous, rien de trop personnel, sur moi. L’effet je t’ai sauvé la vie (et pour ce faire j’ai dû te voir à poil) couve drôlement la scène, et à force, je suis un peu plus en confiance. Même si ma pudeur de jadis s’est envolée avec tout le reste, je garde mes distances. Étrangement, il ne me donne pas de raison de le faire à outrance. « T’es frigorifiée. » comme une neuve, le petit groupe déménage autour d’un feu de fortune aménagé pour les insomniaques, et ce sera une fin de nuit qui s’y poursuivra, avant qu’Adam ne vienne nous rejoindre, presque à la course, se blottissant dans mes bras comme si j’étais passée à deux doigts de crever - ce qui est un peu le cas. Je sursaute, j’ai un pincement au coeur mais je le montre à peine - il fabule déjà à écouter les histoires rocambolesques des deux sauveurs mystérieux et de leurs combats nombreux depuis les premiers jours de l'apocalypse.

« Et vous êtes arrivés ici quand? » l’aube a fait place à la matinée. 3 autres personnes se sont jointes à nous, on distribue des rations de gruau, on se donne l’impression qu’il s’agit juste d’un matin comme un autre, en plein désert, en pleine survie. « Hier. On est allés faire le tour des lieux pour s’assurer que c’était pas trop dangereux autour, on s’est posé pour la nuit. On part après-demain. » que Chip explique. Il se ressert, je retiens un haut-le-coeur, il rigole. « Vous nous avez trouvés loin d’ici? » Adam demande, la bouche pleine, et j’hoche de la tête, curieuse de savoir où se trouve la dépouille de nos affaires, si on devra marcher beaucoup pour tout retrouver. Le principal intéressé pointe vers l’est, quelques kilomètres par là qu’on apprend, il est vague, mais je n’ai pas le temps de demander plus de précision qu’il rajuste le tir. « Tu sais… si vous voulez rester avec nous le temps qu’il faut, on a de la place. Ça me permettrait de voir aussi si ta blessure guérit bien. » aucune décision ne sera prise sans la présence de notre avocat, et j’hoche simplement de la tête, pas tout à fait certaine de vouloir rester, ni de vouloir partir. « Sleeping beauty. » Ben finit par émerger de la tente et se poster à mes côtés. Adam choisit ce moment pour se lever, muet, et quitter la table pour suivre Chip vers le stand de tir qu’ils ont aménagés à la va-vite, quelques conserves vides disposées sur une planche de bois. « Il est bizarre lui. » c’est pas dans son habitude d’avoir cet air-là, de ne pas saluer son père, de se la jouer coup de vent. Je mets ça sur le fait qu’il veut vraiment travailler sa technique de tir, et oublie déjà le reste en entendant la confession de Ben. Il a pas l’air bien à l’aise. « Oui, oui. » qui sort vite, trop d’empressement. Je me surprends à me demander si c’est vraiment ce que je veux, ou si c’est l’habitude qui parle. Le gruau roule dans ma bouche. « Ils ont pas mal d’armes, d’autres voitures derrière. Ils partent pour Brisbane dans deux jours. » je profite d’un moment à deux pour lui dire tout ce que je sais, au cas où. On n’est jamais trop prudents. « Ce sont des nomades comme nous. Tous solitaires, sans rien, ils se sont trouvés un peu partout sur la route, ils errent aux alentours. » mon regard tombe sur Chip qui a le bras couvert de cicatrices, montant même jusqu’à sa nuque. « On fait le bon choix, hen? De compter que sur nous? » et je pense tout fort, je tourne la tête, je me mords l’intérieur de la joue. Et si on était notre pire ennemi depuis le début? L’humain fait de bien drôles de choses en situation d’urgence, et on l’avait vu hier, qu'en mauvaise posture et sans backup, on était morts. Peut-être avions-nous épuisé notre karma, notre maigre chance de trio? J’ai pas le temps de poursuivre que mon attention file vers un nouveau venu, visage légèrement familier, j’arrive pas à trouver d’où. Seul signe distinctif, son pied gauche est recouvert d’un bandage frais fait. Il boîte. « You gotta be kidding me... » mais lui, il nous a reconnu. Dites tous bonjour à Ken, de Ken et Barbie. Et à son moignon bien sanglant.

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Message(#) Sujet: Re: zombenny ▲ devil beneath my feet zombenny  ▲ devil beneath my feet EmptyVen 12 Jan - 11:46


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Le voilà qui boude, Adam. Je pose mes fesses, il lève les siennes. Il suit un des deux abrutis vers un stand de tir, à croire que tout le monde s'en fiche bien que je sois en train d'essayer d'élever un garçon et non une machine à tuer. Je fais mine de ne pas relever, je le considère comme le grand qu'il veut être, celui qui croit qu'il serait mieux sans son père, que tuer est un jeu, puisqu'il y tient. “Il pense que j’ai failli te tuer.” j'explique à Ginny en haussant les épaules. Déformations d'enfant qui prouvent que quelque chose cloche dans l'état actuel des choses. Ce n’était pas de ma faute, ce n’était de la faute de personne ; c'est la définition d'un accident. Et quant à laisser la brune entre les mains d'inconnus, je dirais que l'on ne m'a pas réellement laissé le choix. M'occuper d'Adam me paraissait aussi important, mais il n’avait pas été de cet avis. Et puisque rien n’est assez bien, il peut troquer son père contre le premier inconnu croisé qui trouve ça si cool qu'un gosse sache tirer dans la tête. “Bientôt il va se mettre à m’appeler Benjamin.” j'ajoute, mine d'en rire, mais je le sens venir le jour où “papa” sera pour les bons jours et les “Ben” dédaigneux pour le reste du temps. Je prends rarement les devants mais cette fois j’exige presque que nous fassions compagnie à nos sauveurs aussi rapidement que possible. Et si Ginny me l'accorde sans concession dans un premier temps, je la sens finalement moins sûre, la fatigue parlant à sa place, la lassitude aussi. Sa question pique, je me sens seul à préférer faire route à trois bras cassés qu'avec Chip et Dale, à ne pas leur faire confiance une seule seconde. “Il n'y a pas de choix, Gin', je réponds en plantant mon regard dans le sien. Ils vont vers Brisbane, on va de l'autre côté. Je sais pas ce qu'ils vont chercher, mais y’a plus rien pour nous là-bas. Tu l’as dit toi-même.” Tout ce chemin pour revenir en arrière ? Nous n’avons pas de destination, certes, mais eux non plus. Pas réellement. Ils se sont donnés un point sur une carte uniquement pour se donner un objectif, mais une fois sur place, ils ne seront pas plus avancés que nous. Seulement plus proches du coeur de ce merdier. Entre le cagnard et moi se dresse soudainement une ombre. Mes yeux n'ont pas besoin d'effectuer tout le chemin sur cette silhouette de bas en haut ; le pied manquant suffit à me faire comprendre de qui il s'agit. Un concentré d'ennuis revanchard aux naseaux dilatés comme un buffle prêt à charger. “Je suppose que ça ne sert à rien de te proposer de partager le gruau de la paix ?” je demande avec ironie, le bol tendu vers lui. Sa grande paluche vient le déloger de ma main et faire tomber la mixture par terre. “Ton môme m’a éclaté le pied.” qu'il vocifère du haut de ses béquilles improvisées, le regard fusillant Adam. Et je sens le danger d'un type largement prêt à s'en prendre à un môme, puisque le môme n’a pas hésité à s'en prendre à lui. “Oui, je constate, et ça n’a pas très bonne allure.” Le bandage suinte, sanguinolent et collé la plaie encore fraîche. Ça doit faire un mal de chien et j'imagine qu'à la place de Ken je serais en train de pleurer comme un bébé au fond d'une tente, mais l'heure n’est pas à la compassion. Je me lève face à lui, un peu trop sûr de moi, avec cet air d'imbécile heureux, de pirate éméché, prêt à brouiller ses nerfs comme des oeufs. “Mais les demoiselles adorent les cicatrices et les blessures de guerre. Et dis toi que vu l'état de l'humanité sur ce caillou, les nanas vont se raréfier, faudra se battre pour elles. Donc tu pars avec un sacré avantage amigo, tu pourrais dire merci.” Je lance un regard à Ginny, un signe de tête en direction du colosse, lui demandant avec insistance d’acquiescer… ou de m’aider à s’occuper de lui en faisant le tour avant qu’il ne me laisse K.O avec une pichenette ? De je ne sais quelle manière, je suis convaincu qu’elle comprendra. Les situations étriquées, nous connaissons bien. Je reprends avant que Ken ne soit capable de reprendre le fil de ses pensées sanglantes : “En plus de ça je vois que vous avez été secourus, alors on peut dire qu'il n'y a littéralement pas mort d'homme. Seulement mort… de pied. Et qu'est-ce qu'un pied quand vous y gagnez une nouvelle belle famille pour casser gaiement du zombie sur les routes ?” Vous me direz qu’un pied c’est quand même sacrément utile, surtout dans des temps pareils, mais l’idée n’est pas vraiment de débiter des choses sensées que, d’au contraire, le rendre bien trop occupé à me trouver plus crétin que je ne le suis, ainsi que de lui faire oublier Ginny et Adam. “Faut remettre les choses en perspective, depuis le temps. - C'était hier. - Exactement ! Et aujourd'hui est un autre jour ! Regarde comment ta vie a changé en vingt-quatre heures, si c'est pas beau ! Imagine ce que te réservent les vingt-quatre prochaines, petit chanceux !” Il avance d’un pas, je recule d’autant. “Tu la fermes jamais ?” “Si, bien sûr, ça m'arrive, mais vu que même avec un pied en moins tu fais une tête de plus et tes bras font chacun deux fois l'épaisseur de mes cuisses, que je suis pas très bon avec une arme, ni pour tuer des gens tout court, et que tu m’as l'air franchement benêt, j'utilise un de mes rares talents qui est faire l'appât en attendant qu'eux puissent faire ça.” L’index en l’air, je fais signe à Ken d’effectuer un petit demi-tour, histoire de coller son nez à la bouche du canon de Ginny. Reculant à nouveau, l’arrière de mon crâne heurte le métal froid d’un autre fusil dont le chargement résonne près de mes oreilles ; celui de Barbie qui me tient en joue. “ENCORE ?!”
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Message(#) Sujet: Re: zombenny ▲ devil beneath my feet zombenny  ▲ devil beneath my feet EmptySam 20 Jan - 8:23


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À l’instant où il vient se poser à mes côtés, je sais que quelque chose cloche. Adam qui quitte la table n’est qu’un énième dommage collatéral, et lorsque j’en glisse un mot à Ben, désabusée, il renchérit d’un soupir. « Si j’ai bien confiance en quelqu’un pour ne pas me tuer, c’est toi. » tentative de désamorcer une bombe qui n’en est pas une, ou juste d’articuler ce qui me chicote, ce qui me ronge, ce qui dérange depuis l’accident d’hier, depuis l’escouade à la rescousse, depuis mon réveil en sursaut. « Puis même en essayant fort, t’y arriverais jamais. » la tête penchée au-dessus de mon bol de gruau, c’est un regard malicieux que je lui envoie en coin, sachant très bien qu’il râlera que son pauvre manque au niveau du pistolet soit encore une fois remis sur son nez. Et d’un haussement d’épaules, j’espère que ce soit clos, qu’on ne se prenne pas la tête avec des conneries, qu’on ne perde pas de temps avec des intentions qui sont toutes autres. Adam avait toujours été beaucoup plus émotif, plus sensible à ce genre de choses que nous deux, et s’il a vu ou imaginé quoi que ce soit, reste qu’il finira par le ravaler, l’instinct qui se chargera du reste. Ça va passer. Comme cette impression qui contracte ma mâchoire, serre mes doigts. Comme ce questionnement que j’expose tout haut, parce que malgré tout ce que je niais, rien de ce qui me triturait l’esprit n’était pas articulé à Ben, partagé, confié. Il efface l’interrogation sèchement, exactement comme il faut, comme j’en avais besoin. J’hoche de la tête, je jure que ce n’est qu’une faille, qu’une cassure, qu’un doute stupide qui n’a pas lieu d’être. « T’as raison. C’est juste... » je jure, et ce n’est pas tout à fait ça. Parce que depuis cette fraction de seconde où j’ai cru, sincèrement, ne pas m’en sortir, j’ai flippé. Pour eux. Mon propre cas peut encaisser beaucoup, ma carcasse en a assez vu, assez donné. J’ai le corps et le coeur suffisamment cassés pour lâcher prise sans heurts, pour ne laisser personne dans mon sillage le jour où ils m’auront jusqu’à la moelle. Pourtant, je sais que je ne me le pardonnerais jamais s’il venait à leur arriver quelque chose. Je sais que la simple pensée de les laisser seuls pendant qu’on m’isolait dans une tente à l’autre bout du campement avait suffit à me donner des sueurs froides, à presque m’achever de penser une unique seconde qu’ils soient en train de crever sans que je puisse faire quoique ce soit. Les laisser derrière a toujours été hors de question, même à l’aube de mon départ pour Brisbane. L’idée que d’autres soient là pour eux si un jour j’en venais à disparaître me conforte, me rassure. « C’est con. Depuis quand c’est moi la sentimentale du groupe? » par chance, le café - ou ce qu’ils nous servent à consonance de - est infect et me roule assez en bouche pour ramener mes esprits, pour me secouer un peu. Retour au programme principal, et à Ken qui apparemment a choisi de s’établir dans le même campement que nous.
   
La suite me conforte dans le fait que finalement, comme toujours on n’a besoin de personne. Ben se lève, babille, chantonne, cantonne, et surtout, il gagne du temps. Adam attrape mon regard au vol alors que je me replace tranquillement sur le banc, glisse la main dans mon sac qui siège à mes pieds, mon fusil toujours bien en place, chargé. L'attention qui se reporte à Brody senior au moment où il tourne la tête dans ma direction, et c’est nickel, limpide, le mouvement se fait de lui même, naturel au possible. « Conquise sans même avoir vu la balafre. » je couvre d’un battement de cils, l’ironie dans la voix que seuls les initiés sauront déceler. Alignée avec la tête de notre interlocuteur charcuté, c’est l’air totalement en contrôle que je l’accueille lorsqu’il pose enfin ses rétines sur moi, que dis-je, sur mon canon. « On se calme. » Chip intervient bien sûr, bondissant du stand de tir où il traînait encore avec Adam, se posant entre Barbie et moi, les mains bien en vue. Je soupire, elle roule des yeux ; les discours et la charité ne prendront pas et s’ils veulent rendre des comptes, je serai la première à les en empêcher. « Ils ont un blessé eux aussi - le karma, tout ça. » et il me pointe le connard, il désigne du menton le tissu qui colle dangereusement à ma plaie, qui signale de suite que notre maigre clan a un estropié en banque, et donc une faiblesse supplémentaire. Je le fusille du regard - et du revolver, en pensée - avant de reporter mon attention sur Ken qui rugit. « Ça me redonnera pas mon pied. » du tac au tac, je change la mire de mon arme, visant directement la droite, là où ses orteils sont encore en excellent état. « Tu dis si tu veux que j’égalise. » « On se calme, j’ai dit. » Chip insiste, posant maintenant ses doigts sur nos fusils respectifs, les baissant le temps qu’on accepte durement que ce ne sera pas ici, devant public, que justice sera faite. « De toute façon, on reste pas. » que je m’entends répondre, hargneuse, l'adolescente rebelle en moi qui a envie de sortir de sa coquille, et qui ne se gêne pas pour prendre les devants. Adam est attentif, il fronce les sourcils, mais ne dit rien. Malgré nos désaccords sporadiques, jamais notre trio n’avait été du genre à faire voir ses altercations devant de potentiels ennemis. Au moins ça de gagné. « C’est pas sérieux?  » et il tourne la tête vers moi, ses iris passant de mon visage fermé à la plaie qu’il a soignée quelques heures seulement plus tôt. « On a prévu partir en fin de journée. » le temps que la cicatrice s’ancre un peu, et surtout qu’on dresse le plan possible pour la suite. Ken et Barbie fulminent, mais semblent tout de même satisfaits que leur campement de fortune ne nous abrite pas plus longtemps, et je regagne notre tente dans la minute, sous le regard alarmé de Chip.

Une sieste de quelques heures suffira à me donner l’impression d’être prête à conquérir le monde ou presque. Ben et Adam étaient restés derrière plus tôt dans la journée lorsque j’avais décidé d’aller dormir, mais c'est maintenant que je les trouve, en train de profiter des quelques heures de sommeil supplémentaires qu'il leur reste. Seule, je finis par sortir de notre abri temporaire. J’ai à faire là où le reste de mes affaires se trouve, là où, la nuit dernière, on m’a amenée d’urgence. La simple bribe de drame arrivée au petit-déjeuner a suffi à me refroidir vis à vis de tout ceci, et il n’est pas dit que je vais me laisser prendre au jeu une nouvelle fois, attendrir par de purs inconnus, infirmiers ou non. Le rideau glisse sous ma main qui le tire, et j’entre dans ce qui, je crois à prime abord, était la tente où on m’a soignée. Ce qui s’avère être toute autre chose, maintenant que devant moi s’étalent des dizaines de pichets, gobelets et verres remplis à rebord d’eau - et de membres humains. « What the... » l’odeur d’abord est absolument pestilentielle, un haut-le-coeur me taillade le ventre avant que je planque mon nez sous ma veste, ce qui ne retient pas du tout l’odeur de s'immiscer. Définitivement pas la tente que je cherchais, et encore moins ce que je devais voir, à mon sens. Précipitée, je fais volte-face, décidée à me tirer d’ici dans la volée, avant de percuter de plein fouet la silhouette de Chip qui se tenait vaillamment derrière moi. « J’peux expliquer! » qu’il ose ajouter, les mains en l’air, alors que de chaque côté s’étale un grossier cours de biologie. Encore heureux qu'il ne m’ait pas piqué un bras ou une main avant de sortir le bout de métal de ma hanche. « Pas la peine. » la main qui se resserre sur mon arme, il n’est absolument pas question que je reste une seconde de plus près de ce freak. En le bousculant pour sortir, j’entends le cliquetis distinct de clés de voiture, et c’est la pulsion de survie qui réagit alors que je botte le trousseau vers l’avant, assez loin pour qu’il ne le remarque pas et que je puisse l’attraper en pressant le pas vers notre tente. À peine entrée que je file au chevet de Ben, me penchant à sa hauteur. Les doigts qui tapotent sur son torse, puis sa joue, je finis par accélérer le mouvement, pressée, empressée. « Faut partir, et vite. Ils sont louches, très, très louches. » seront mes seules explications pour le moment, maintenant que je brandis les clés de la voiture qu’on devra trouver ultimement. Le temps qu’il bondisse de son lit, je m’assure d’aller réveiller Adam.
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