Assit dans la voiture, garée devant le bâtiment dans lequel se trouve l'appartement de mon meilleur ami, je ne parviens pas à faire le moindre mouvement, paralysé par la terreur de me retrouver seul. Le regard fixé sur le volant, je sens l'émotion qui me gagne. Celle qui m'enserre la poitrine, me brise le cœur et m'empêche de respirer correctement. Les lèvres pincées, je sers mes mains sur mes cuisses essayant ainsi de contrôler les tendrement dans mes doigts et ferme les yeux pour retenir mes larmes alors qu'une seule et unique pensée me vient à l'esprit : il est parti.

Myrddin est parti. Il a eu cette opportunité en or et est parti à l'autre bout du globe. Je l'ai déposé à l'aéroport il y a une heure et je lui ai dit au revoir, lui promettant d'être là à son retour. Il m'a, lui-même promis qu'on restera en contact, que nous ferons tous pour gérer cette relation longue distance. Ce n'est pas la première fois que je le fais, je l'ai déjà fait avec Ida quand je partais de longs mois en mer mais j'ai tout abandonné quand je me suis installé avec Myrddin. On s'était promis que jamais on ne se quitterait, qu'on resterait éternellement ensemble et pourtant voilà où je suis. Seul dans ma voiture a essayé de retenir mes larmes et a viré cette idée que c'était la dernière fois que nous verrons lui et moi. Le pire dans toute cette histoire c'est que je ne serais pas là quand il n'annoncera à Arthur, Alex et Clara. Sa première destination étant la Norvège, son arrivé à Oslo coïncide parfaitement avec le retour de Ida dans la capitale, il a décidé qu'il annoncera le tout seul, sur place. J'ai bien essayé de le convaincre de rester encore deux jours de plus le temps de revoir nos enfants ici et leur annoncer le tout dans un cadre familier, mais il s'était déjà engagé et avait déjà prit des billets.

Le sentiment de trahison est énorme et est pareil à un coup de poignard en plein cœur. Est-ce ainsi qu'Ida s'est senti lorsqu'elle a apprit que je ne lui étais pas fidèle ? La douleur est horrible, ignoble et insoutenable. Déglutissant avec difficulté, je prend une profonde inspiration puis rouvre les yeux et sors de ma voiture. Claquant la portière, je me dirige vers l'entrée du bâtiment au moment où l'un des voisins de Cian ne sorte. Je me glisse à l'intérieur et monte les quelques étages avant de frapper doucement à la porte de mon meilleur ami, espérant qu'il soit là car j'ai vraiment, vraiment, besoin de lui.

Another heartache, another failed romance

Thomas & Cian

Il est tard et je viens tout juste de rentrer chez moi. Sullivan m’a appelé tôt ce matin pour que je vienne régler une question de paperasse à la base et il ne m’a pas laissé le choix. J’ai essayé de repousser la chose lui disant qu’aujourd’hui n’était clairement pas le jour, mais bien entendu il ne voulait rien entendre. Je ne pouvais pas lui dire que j’avais besoin de ma journée afin de récupérer mon meilleur ami à la petite cuillère. J’avais promis à Thomas que je ne parlerais du départ de Myrddin à personne et je compte bien m’y tenir. Personne n’a besoin de savoir cela à la base et si Tom ressent le besoin d’en parler à notre supérieur il le fera lorsqu’il se sentira prêt. A cause de cette urgence administrative, je n’ai pratiquement pas été chez moi de la journée et tel l’idiot que je suis, je n’arrive pas à me souvenir de l’horaire de départ de Myrddin. Thomas me l’avais dit pourtant, il m’avait prévenu qu’il allait déposer son mari à l’aéroport et j’avais prévu d’être assis devant sa porte d’entrée à son retour afin d’être présent pour lui. Bien entendu, rien ne c’est dérouler comme je l’avais prévu. Sullivan m’a tenu la jambe pendant des heures et j’ai failli l’envoyer chier. J’ai tout de même fini par trouver une parade pour partir de la base pas trop tard et repasser chez moi avant de partir en direction de l’appartement de mon meilleur ami.

Je suis en train de courir dans tout mon appartement afin de réunir quelques affaires dans un sac de voyage. Les enfants ne rentrent pas avant début Septembre et il est clairement hors de questions que je laisse Thomas ruminer seul chez lui. Je le connais par cœur, il va se terrer chez lui et passer son temps à se demander ce qui a bien pu foirer pour que Myrddin accepte cette proposition sans lui en parler. Je compte bien squatter chez lui quelques temps ou jusqu’à ce qu’il décide qu’il en a marre de moi. Je finis donc par fermer mon sac et retourne dans le salon pour récupérer mes papiers, mon ordinateur portable et mes clés.

J’étais en train d’enfiler mes chaussures en stressant d’avoir complètement abandonner Thomas à sa tristesse pendant des heures. Je vais tellement vite que je manque de me casser la gueule et surtout sursaute violemment lorsque j’entends que l’on sonne chez moi. Je me retiens d’hurler que je n’ai pas le temps, mais attrape mon sac et vais pour ouvrir la porte, qui que ce soit je n’aurais qu’à dire que je suis pressé. Je ne m’attendais pas à tomber nez à nez avec Thomas. « Oh Tom… » Je lâche mon sac de voyage et mon cœur se brise quelque peu en voyant ses traits tirés et son air si triste. Fait chier. Je l’attrape par le poignet et l’attire contre moi sans rien dire. On n’a jamais été câlin tous les deux, mais c’est clairement nécessaire aujourd’hui. Je le serre fort contre moi et finis par l’attirer à l’intérieur de mon appartement. « J’allais partir en direction de chez toi. » dis-je doucement en relâchant mon étreinte. « Comment… Comment tu te sens ? »   

Debout devant la porte de Cian, le poing lever, je ne parviens pas à l'abattre contre le bois. Qu'est-ce qui m'en empêche sincèrement ? La possibilité que mon meilleur ami ne veuille pas de moi aujourd'hui ? Il a beau m'avoir expliqué par sms que jamais je ne le dérangerais et qu'il sera là pour moi aujourd'hui, je ne peux empêcher cette voix dans ma tête hurler à tort et à travers à quel point je suis con d'aller le voir lui alors qu'il est, lui-même submergé par les émotions concernant Eavan, la dernière mission qui a mal commencé, notre dispute. Je pourrais lui trouver tant d'excuses où je pourrais le comprendre qu'il ne veuille pas me voir aujourd'hui. Et pourtant c'est ici que je veux être, avec lui. Alors déglutissant, je ferme les yeux et toque doucement à la porte.

Je n'attend pas très longtemps que celle-ci ne s'ouvre sur mon meilleur ami. Et, tandis que je le regarde, je me sens submerger par l'émotion que je ressens depuis plusieurs jours. Je m'étais interdit de craquer mais là je ne peux plus rien retenir. Alors, lorsqu'il m'attrape par le poignet pour m'attirer contre lui, je le laisse faire et me blottit contre lui. Niché là, dans ses bras, mes larmes coulent toutes seules et se déversent sur mon visage. Le corps secouer de sanglot, je m'agrippe à son t-shirt alors que mes jambes finissent par se dérober sous moi et j'attire Cian avec moi alors que je me laisse glisser au sol, mes pleurs reprenant de plus belle.

Je ne sais pas combien de temps on est là, immobile au sol, la porte d'entrée encore ouverte. Je sais juste qu'à un moment donner je parviens enfin à reprendre le contrôle sur mon flot d'émotion et réussi à me calmer quelque peu. Prenant une profonde inspiration, je me redresse légèrement et me passe le dos de la main sous le nez en reniflant puis pince les lèvres et secoue la tête  « Il est parti» dis-je d'une voix étranglée  « Il ...il est parti» répétais-je, fermant les yeux essayant de contrôler la deuxième vague de sanglots  «ça ...ça fait tellement mal putain » je pose une main sur ma poitrine puis la passe sur mon visage et relève mon regard sur Cian  «Pourquoi... ? Pourquoi je l'ai pas retenu ? » soufflais-je  «Je l'aime. Je l'aime tellement. C'est horrible  »je ferme à nouveau les yeux alors que les larmes recommencent à couler et retourne me blottir dans les bras de mon meilleur ami, ayant ce sincère besoin presque viscéral de ressentir sa proximité.

Another heartache, another failed romance

Thomas & Cian

Je ne m’attendais réellement pas à me retrouver nez à nez avec un Thomas au bord des larmes. Cela ne devait pas se passer comme cela. À la base, je devais être chez en lui en avance. Je devais prévoir les choses, ne pas le laisser seul, mais j’ai foiré. Enfin… Pas le temps de penser à tout cela, il faut que je gère l’urgence du moment. Et l’urgence là maintenant, c’est de rattraper Thomas avant qu’il ne sombre. J’ai à peine le temps de l’attirer contre moi qu’il s’effondre. L’espace d’un instant, je ne sais plus comment faire. Thomas n’a jamais été du genre à laisser les émotions le submerger, bien au contraire. Je l’ai toujours vu comme un roc même quand la vie à décider de lui envoyer des sacrés bâtons dans les roues. Je me souviendrais toujours de la naissance de Clara, a quel point j’avais admiré son calme pendant quelques jours alors que dans le fond, il était complètement effondré. Il est comme cela mon meilleur ami et pourtant aujourd’hui, il ne tente pas de cacher sa détresse, loin de là. J’ai à peine le temps de le réceptionner que ses jambes le lâche. Incapable de retenir son poids contre moi, on se retrouve tous les deux au sol. Je finis par sentir ses larmes rouler le long de mon cou et je le serre comme un forcené contre moi. Je n’avais pas prévu ça. Je ne m’étais clairement pas blindé pour cela. Il ne faudra que quelques secondes pour que mon cœur se serre violemment en l’entendant sangloter de cette manière. Et quelques secondes de plus pour détester Myrddin de tout mon être. En se mariant, ils c’étaient fait une promesse tous les deux, ne jamais se quitter. On fait les malins en tant que militaire, on croit que notre moitié va sagement nous attendre toute notre vie alors que l’on passe plus de temps en mer que sur la terre ferme. On se berce d’illusions au départ et puis tout fini par exploser. Thomas m’a toujours montré l’image d’un couple solide, que ce soit avec Ida ou avec Myrddin. Et c’est comme cela que ça se finit ? Ida qui a craqué après des années seule et Myrddin qui se barre alors que son mari a renoncé à sa carrière embarqué pour lui et pour leurs enfants. Je sens la rage monter en moi sans même l’expliquer, mais ce n’est clairement pas le moment de la laisser exploser. Alors, je continue à serrer Thomas contre moi avec presque trop de force tandis qu’il se met à parler sans vraiment de logique, juste à laisser sortir sa tristesse. Il s’écarte de mes bras juste quelques secondes, le temps de sécher ses larmes qui reviennent tout de suite. « Respire Thomas » dis-je doucement. Je me rends compte que la porte d’entrée est toujours ouverte et du bout du pied, en me contorsionnant un peu, je la ferme afin que mes voisins n’assistent pas à tout cela. On se retrouve seul et je ne sais tout simplement pas quoi dire pour calmer Thomas. Lui dire que Myrddin n’est qu’un con ne changera rien, lui dire que cela passera non plus. Alors quoi ? Je prends un instant pour souffler un bon coup. Je suis au même stade que lui. Eavan est parti et je ne sais pas gérer. Je suis clairement pas le mieux placé pour lui donner des conseils. « Votre histoire est pas finie Tom… » Parce que c’est la réalité. Myrddin est parti, mais il ne l’a pas trompé, il n’a pas demandé le divorce, il est juste parti réaliser son rêve. Juste. Non Cian, pas de commentaire sur son mari, tu les gardes pour toi. « Je sais que c’est dur, mais… Vous allez rester en contact et puis… » Et puis quoi ? J’ai l’impression de galérer comme jamais, mais c’est compliqué de le voir comme cela et de ne pas me mettre à pleurer avec lui parce qu’on est deux cons qui se sont fait blesser par ceux qu’ils aiment. « Il va revenir. » J’espère que ce petit con va revenir sinon je vais aller le chercher moi-même. Je ne sais pas quoi lui dire d’autres. Je veux être là pour lui, mais j’ai peur de dire quelque chose de travers comme je le fais si souvent… « Maintenant… Si tu as besoin, laisse tout sortir Tom. Si tu veux hurler, vas-y ou même casser un truc c’est pas grave. » Je lui souris un peu, j’aimerais le faire rire, même si ce n’es pas gagner. « Mais met toi une chose en tête, son départ ne veux pas dire qu’il ne t’aime plus et c’est parce que tu l’aimes que tu le laisses réaliser ton rêve. » Et parce que lui, il a réalisé le sien pendant près de vingt ans. Je finis par me taire, parce que ma voix est en train de vriller et si je craque, on est pas dans la merde.    

Je n'aurais jamais pensé réagir ainsi. Je suis à l'aube de mes quarante ans et pourtant j'ai l'impression d'agir comme un adolescent à qui on vient de briser le cœur pour la première fois de sa vie. Alors qu'au final, ce n'est pas le cas. Myrddin est juste parti, il n'a pas mit un terme à notre relation, n'a pas demander le divorce et n'a jamais dit qu'il ne m'aimait plus. Son départ est simplement du au fait qu'il ait envie de vivre sa vie correctement, de vivre son rêve le plus cher. Et je lui ai promis il y a quelques années que je ferais tout pour le soutenir, que peu importe ses décisions, je serais là pour lui. Pour toujours. Qu'il pourra compter sur moi et mon infaillible soutient.

Et pourtant la vérité est dure et cruelle, elle est insoutenable et douloureuse. Et je suis là, au sol, entrain de pleurer, accrocher à Cian comme si ma vie en dépendait. Tout me semble irréel, tant j'ai l'impression que mon monde est entrain de s'écrouler. Mon esprit se montre irrationnel, ne réfléchit pas correctement et ce sont des paroles sans queue ni tête qui sortent de ma bouche alors que je sens les bras de mon meilleur ami qui se referment d'avantage autour de moi. Alors que je pensais avoir réussi à me calmer, mes sanglots reprennent de plus belle.

C'est à ce moment là que Cian reprend la parole. Et ses mots parviennent enfin à me remettre d'aplomb dans la réalité de la chose : non, le départ de Myrddin ne signifie pas la fin de notre couple. Il ne m'a jamais dit qu'il ne m'aimait plus, il m'a même promit qu'on gérerait cette relation longue distance car nous nous aimons sincèrement. Et c'est parce que je l'aime tant que je le laisse partir pour vivre ses rêves.

Rouvrant les yeux, je me redresse et pose mon regard sur Cian. Les lèvres tremblantes, je parviens enfin à reprendre le contrôle total sur mon flot d'émotion et hoche doucement la tête en déglutissant.  «t'as raison » soufflais-je en me passant la main sur le visage pour essuyer mes larmes puis prend une profonde inspiration tremblante et pince les lèvres. Baissant le regard sur le sol, j'attends encore quelques instants, le temps de me rendre compte que mes sanglots ont réellement cessé puis me redresse  «T'as raison » répétais-je  «On s'est promit de gérer la relation longue distances et je ...je veux dire je l'ai déjà fait par le passé et ...non vraiment ça va le faire» je me passe la main sur la bouche puis prend appuie sur mes genoux pour me relever  « Désolé, je ...» désolé pour quoi ? D'avoir ainsi craqué face à la personne qui m'est le plus cher et qui jamais ne me jugera ? Qui a toujours été là pour moi, peu importe les épreuves de l'un ou de l'autre ? Cette même personne qui m'a dit de ne jamais m'excuser de montrer mes sentiments ?  « Tu … t'as dit que tu étais en route pour venir chez moi ?» demandais-je en désignant le sac de sport posé à nos côtés  « ce ...ça me ferait plaisir de t'avoir avec moi pour les prochains jours» avouais-je, gardant le regard baissé, me sentant comme un gamin qui à fait la plus grosse bêtise de sa vie.

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Thomas & Cian

Je savais que Thomas allait être mal après le départ de son mari. C’est bien pour cela que je courrais de partout dans mon appartement afin de récupérer quelques affaires pour me rendre chez lui le plus rapidement possible, parce que je savais. Pourtant, je n’avais pas prévu que ce soit autant. Qu’il se mette à pleurer comme il est en train de le faire dans mes bras. On se connaît depuis vingt ans tous les deux, on en a vécu des merdes ensemble, mais jamais je n’ai vu Thomas craquer comme cela. Il sanglote comme jamais et s’accroche à moi comme à une bouée de sauvetage. Et plus je sens ses mains s’accrocher à mon tee-shirt, plus je déteste Myrddin pour l’avoir laissé comme cela. Ils s’étaient promis de ne pas vivre séparément, de construire le reste de leur vie ensemble avec leurs enfants. Voilà que tout cela vient de voler en éclats. J’en viens à détester le jeune homme qui est parti vivre ses rêves. Comme si ce n’est pas ce que je faisais depuis des années déjà. Comme si ce n’es pas ce qui a brisé mon propre couple. Alors, je serre mon meilleur ami contre moi en le laissant faire sortir tout ce qu’il a besoin de faire sortir. Et je me retiens de faire des remarques sur Myrddin. Je lui en veux, mais je suis réellement mal placé pour dire quoique ce soit sur ses choix de vie. Pourtant, lui a des enfants et il va également les laisser derrière lui. C’est ce que je ne comprends pas. L’espace d’un instant, je me demande ou va vivre Arthur. Est-ce que le petit bonhomme va partir avec son père biologique ? Cette pensée me fait froid dans le dos. Si c’est le cas, je ne sais pas dans quel état, je vais retrouver Thomas. Je préfère même pas y penser. Une chose à la fois. D’abord, je dois calmer Thomas.

Il me faudra plusieurs minutes pour calmer les sanglots de mon meilleur ami, je tente de rester rationnel et il faut croire que cela fini par fonctionner. Après tout, il ne va pas divorcer. Myrddin a choisi de partir certes, mais il reste son mari et c’est quoi un an dans une vie ? On est partie pendant si longtemps tous les deux et il la gérer avec Ida déjà. C’est une blessure, un choc, mais cela ne signifie clairement pas la fin de leur amour. C’est ce que j’essaye de faire comprendre à Thomas qui finit par hocher la tête doucement. Il prend encore quelques secondes pour retrouver un souffle normal et pour ralentir la course des larmes sur ses joues. Il me donne raison et je me retiens de faire une blague sur le fait qu’il me dit rarement ce genre de choses, pourtant, je m’abstiens. Je sais pas vraiment si elle serait bien reçu et j’ai réellement pas envie qu’on en vienne à se prendre la tête aujourd’hui. Il a besoin de moi et ce n’est pas le moment de faire le con, alors je me contente de hocher la tête. « Je suis sûr que tout ira bien. » Je dois l’être vu qu’il ne semble pas l’être lui-même. Je me dois de garder mes doutes pour moi. Quoiqu’il arrive, je serais toujours là pour lui et toujours de son côté. « T’excuse pas Thomas ! » On se relève tous les deux et j’attrape la boîte de mouchoir posé sur le comptoir de ma cuisine pour le lui tendre. Il a les yeux rougis par les larmes et je n’aime vraiment pas du tout le voir dans cet état. Je préfère encore largement quand on se prend la tête pour des conneries. Thomas finis par désigner mon sac de la tête et je lui souris. « Je te laisse pas le choix, tu sais. » Il m’aurait dit qu’il voulait être seul, que je serais quand même aller chez lui. Pour veiller sur lui jusqu’au retour des enfants au moins. « A la base, j’avais dans l’idée d’être déjà chez toi lorsque tu serais rentré de l’aéroport, mais Sullivan m’a retenu à la base. » Et je me redresse pour faire ma meilleure imitation de notre chef. « Atwood votre paperasse ne va pas se faire toute seule ! Je veux les dossiers sur mon bureau dans une heure. Une heure Atwood ! » J’y ajoute même la gestuelle pour tenter d’arracher un rire à mon meilleur ami. Je lève les yeux au ciel et lui lance un sourire. « Mais oui, je vais pas te laisser seul Tom. Jusqu’à ce que tes petits monstres rentrent okay ? » dis-je avant d’ajouter rapidement « Après si tu préfères rester ici, c’est jouable aussi. Comme tu préfères. »     

Tout ira bien. Nous allons gérer cette relation longue distance et n’allons pas laisser les kilomètres gâcher notre amour et notre bonheur. Voilà ce qu’il faut que je me répète encore et encore, incessamment et tous les jours. L’entendre de vive voix par mon meilleur ami me fait prendre conscience que tout n’est pas fini, que Myrddin est juste parti vivre ses rêves en saisissant une opportunité en or. S’il m’en avait parlé avant, je l’aurais sûrement obligé d’accepter cette proposition et on aurait sans doute trouvé des solutions pour gérer le départ et les mois sur places.

Réussissant à me calmer, je fini par me relever, m’excuse rapidement (même si ça ne sert à rien et que Cian me le fait bien comprendre) avant d’aviser son sac de sport et lui demander s’il comptait sincèrement rester chez moi pendant quelques temps. Dans un soupire, il me dit que son but c’était d’être chez moi avant que je ne sois rentré de l’aéroport mais qu’il a été retenu à la base. L’imitation de Sullivan que m’offre mon meilleur ami m’arrache un petit rire alors que je me passe une main sous les yeux pour essayer le reste des larmes. « Tu ferais un super amiral» soufflais-je, amusé avant d’hausser les épaules «J’t’avoue que je te préfèrerais rester ici pendant quelques temps si ça te dérange pas » je pince les lèvres « Mon appartement est rempli de choses qui me rappellent Myrddin et je pense que je vais pèter un plomb si je reste là-bas maintenant, même avec toi» avouais-je, soupirant doucement.

Cian fini par se détourner pour aller dans le salon et je le suis, m’installant sur le canapé. J’observe le soldat qui s’affaire à déposer deux verres de whisky sur la table avant de fouiller dans l’armoire à alcool. « Tu sais, si Myrddin m’en avait parlé avant de cette opportunité, je l’aurais sans doute obligé d’accepté » dis-je en levant mon regard sur Cian «Je evux dire, c’est son rêve et je lui ai promis de toujours le soutenir pour tout. On se serait arrangé avec les enfants, on aurait aussi pu s’accorder sur le fait de se retrouver quelque part, je sais pas » j’hausse les épaules « mais là j’ai juste l’impression qu’il a eu envie de fuir un truc. Genre …pourquoi il ne m’en a parlé qu’à la dernière minute ? Tu crois qu’il avait peut-être peur que je n’accepte pas ? Que j’essaie de lui mettre des battons dans les roues ? » demandais-je, sachant pertinemment que Cian n’aura jamais de réponses correctes à me donner. «je sais pas … c’est bizarre. Pendant toutes ces années je n’ai jamais rien fait pour lui donner l’impression de ne pas suivre sa passion, au contraire ! j’ai toujours été là, présent quand il avait besoin d’être rassuré, quand il craquait ou quand il avait besoin que je lui donne la réplique. Pourquoi ne pas m’avoir prévenu plus tôt afin qu’on puisse voire ensemble les possibilités que nous offre cette opportunité … » je souffle doucement, incapable de contrôler mon esprit et le rationaliser.

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Thomas & Cian

Heureusement Thomas finis par se reprendre. Il avait tous les droits de craquer, mais je dois dire que je ne sais pas vraiment gérer les larmes. Je ne suis pas doué pour rassurer les gens, je finis toujours par mettre les pieds dans le plat et je ne veux clairement pas le faire avec mon meilleur ami. Je comprends parfaitement ce qui le blesse, Myrddin ne l’a pas prévenu, il a pris sa décision seul et c’est là où réside le problème. Je ne peux que le comprendre. Je me demande également ce qui a pris au jeune homme pour ne pas évoquer cette envie avec son mari. Je veux dire, ils ne sont pas que deux amants, ils ont des enfants, un mariage. C’est le genre de décision que l’on prend à deux. Pourtant, je garde pour moi tout ce que je pense. Je ne veux pas que Thomas se laisse influencer par mon impulsivité. Sur ce sujet, nous sommes bien différents et loin de moi l’idée de créer une dispute entre eux. Tout ce que je peux affirmer à mon meilleur ami, c’est que son mari ne l’a pas quitté, qu’il est juste parti réaliser son rêve et que leur histoire d’amour existe toujours.

On finit par se relever tous les deux et pour détendre un peu l’atmosphère, j’imite Sullivan pour faire sourire mon meilleur ami. Je lui parle de mon plan de rester avec lui un petit moment. Je ne sais pas trop ce qu’il va me répondre, mais je refuse de le laisser seul. Heureusement, Thomas ne joue pas les fortes têtes et accepte immédiatement. Il me fait néanmoins savoir qu’il aimerait mieux que l’on reste dans mon appartement. Je hoche la tête immédiatement. « Pas de souci, comme tu préfères Tom. » Mon loft est bien plus petit que celui de Thomas, mais on fera avec. On a déjà partagé un lit tous les deux après tout et au pire, je me mettrais sur le canapé, c’est comme il préfère. « On va se faire un squat ici, ça marche aussi. » Je lui souris pour lui faire comprendre que je n’y vois vraiment aucun inconvénient. Je pense juste rapidement qu’il va falloir que je lui annonce qu’Eavan vit désormais dans l’appartement en dessous du mien, mais on verra cela plus tard. J’avais fait savoir à la jeune femme que je ne serais pas chez moi ce soir donc elle ne risque pas de débarquer à l’improviste.

J’entraîne mon meilleur ami dans le salon et vais sortir deux verres de whisky. Je hurle toujours sur tous les toits que chez moi, on ne trouvera que de l’alcool Irlandais, pourtant cela fait des années que je planque une bouteille de scotch Écossais en cas de crise. Je ne pensais pas avoir à m’en servir un jour, mais il faut croire que ce fameux jour est arrivé. Alors, que je cherche la fameuse bouteille, dans mon dos Thomas, commence à réellement se confier. À trop se confier même. Il me pose des questions auxquelles je suis incapable de répondre puisque je me pose exactement les mêmes malheureusement… Alors, je prends mon temps pour nous servir deux verres avant de me diriger vers Thomas et de lui tendre son verre. « Je… Je peux pas parler pour lui Tom. » Je vois bien que tout va trop vite dans son cerveau et je ne veux pas l’entraîner dans son délire. « Peut-être qu’il a cru que tu le prendrais mal, je sais pas… Je veux pas me prononcer pour lui. » Et je me pose les mêmes questions que toi surtout, Tom. Je lui souris un peu et viens m’installer à côté de lui. « Je sais que ça t’aide pas, mais c’est à lui que tu dois demander tout cela. »       

Je crois que j’avais juste besoin de parler et de me confier. A vrai dire, je n’attends pas vraiment de réponses de la part de mon meilleur ami, juste une oreille attentive et un esprit ouvert qui ne me jugera pas, peu importe les conneries que je puisse dire ou les larmes que je puisse pleurer. Malgré tout ce qui s’est passé entre Cian et moi ces dernières semaines, malgré que nous ayons eu une période de grand froid, je sais que l’épaule sur laquelle je peux laisser libre cours à mes émotions et que les bras qui me soutiennent lui appartiennent. En vingt années d’amitié, nous sommes passé par tant d’épreuves qui ont solidifiés les notre relation et même si les bases étaient bancales, nous avons réussi à construire un bâtiment solide et incassable. Bien que la semaine dernière sur le bateau j’avais, l’espace d’une minute, l’impression que ça y est, s’en est fini de nous et notre amitié, je sais qu’il en faut bien plus que ça pour briser tous ces bons moments que nous avons vécu ensemble. Comme deux frères entre lesquels il y a des frictions mais à la fin de la journée nous restons une seule et même famille qui se soutient envers et contre tous.

Alors j’ai beau ne pas attendre de réponses concrètes à mes questionnements, je sais aussi que Cian ne trouvera pas forcément les bons mots et qu’il ne sera pas très à l’aise, je suis persuadé que c’est ici, chez lui et en sa présence que je trouverais le réconfort nécessaire. Et celui-ci commence lorsque mon meilleur ami s’approche de mois avec deux verres et un whisky écossais. Touché par cette attention –Cian étant extrêmement chauvins en ce qui concerne l’alcool Irlandais- j’en aurais presque à nouveau les larmes aux yeux. Mais nous mettrons cela sur le compte que mes nerfs sont déjà, de base, à fleurs de peau et qu’il en faut peu pour me rendre émotionnel aujourd’hui.

L’amiral finit par reprendre la parole, me disant qu’il ne peut pas parler pour lui, qu’il ne sait pas quoi me répondre et que toutes ses questions je dois les poser à Myrddin en personne « oui, je sais » soufflais-je en me passant une main sur le visage « Désolé, je sais bien que tu pourras jamais répondre à mes questions mais je …je crois que j’avais juste besoin d’exprimer mes pensées à hautes voix pour réussir à mettre un peu d’ordre dans ma tête» je soupire doucement « Je vais lui en parler. Assez rapidement pour pouvoir être plus serein » je prends une profonde inspiration « J’ai vraiment pas envie que ça s’arrête entre nous» soufflais-je en secouant la tête «ça fait même pas un an qu’on est marié et je …» je me tais et me frotte le front

« Ok. Mais plus sérieusement » je me penche en avant et attrape la bouteille « depuis quand t’as du Lagavulin toi ?» demandais-je sur un ton plus léger «Me dis pas que t’as fait un trait sur le Jameson ? J’te croirais pas …» je parviens à lui offrir un sourire presque amusé alors que je me permet d’ouvrir le contenant et d’en verser un peu dans mon verre avant de servir Cian «merci, en tout cas » d’être là, car ta présence seule m’aide énormément.

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Thomas & Cian

Jamais je n’avais vu Thomas aussi désemparé et triste. Tellement que je ne sais quoi faire pour le rassurer. Lui dire que tout ira bien ? Je l’espère sincèrement, mais dans le fond, je n’en sais rien. J’espère juste que Myrddin ne jouera pas au con. Alors, je laisse mon meilleur ami déverser tout ce qu’il a sur le cœur. Je ne l’ai jamais vu pleurer comme cela et j’espère bien que c’est la première et la dernière fois que cela arrive. Je soupire longuement lorsqu’il finit par se relever en essuyant ses larmes. Je l’espère sincèrement, mais dans le fond, je n’en sais rien. Je l’aide à se relever et je finis par réellement fermer ma porte avant d’entraîner Thomas dans le salon puisqu’il a décidé que nous allions rester chez moi pour un bon moment. Je comprends qu’il ne veuille pas réellement rentrer chez lui pour le moment et cela ne me dérange pas. Bien au contraire, je préfère l’avoir sous les yeux après la crise de larmes qu’il vient de me faire.

Tandis que Thomas me bombarde de questions auxquelles je ne peux lui amener de réponse, je nous cherche des verres et surtout la fameuse bouteille Écossaise que je cache chez moi. Je tente de résonner Thomas en lui disant de parler très sérieusement avec Myrddin sans s’énerver, en posant les choses clairement. Je sais clairement que je suis en train de donner des conseils que je suis incapable de suivre moi-même, mais c’est toujours le cas après tout, non ? Toujours plus facile à dire qu’à faire. « Et tu sais que tu peux parler de tout ce que tu veux ici. » lui dis-je en souriant un peu. Mais déjà, il repart dans des idées négatives et je finis par lui coller un verre à la main avant de m’asseoir en face de lui et de plonger mon regard dans le sien. « Eh Tom… Myrddin t’aime. » Je ne suis pas souvent sûr de ce que j’avance, mais ça j’en suis réellement persuadé. « Je veux dire ça crève les yeux vous êtes… Ça dégouline d’amour chez vous. » Et j’en ai souvent été jaloux ces derniers temps, c’est certain, mais ça je le garde bien pour moi. « Alors non, je sais pas pourquoi il t’a rien dit. J’ose imaginer qu’il craignait juste ta réaction, mais je ne sais pas. Tout ce que je peux t’assurer, de mon point de vu extérieur, c’est que ton mari t’aime. » Et une nouvelle fois, je lui souris.

Et finalement, il remarque la bouteille que je viens de sortir. « C’est pas trop tôt, j’ai cru que t’allais boire sans même questionner ce que t’avais dans ton verre. » Oui, parce qu’on se prendra toujours la tête sur ce qui est meilleur entre Écossais et Irlandais. Alors, ce soir, je fais clairement un effort pour lui servir cela et en boire avec lui. Haute trahison dans la maison Atwood ce soir. « Ça va pas non ?! » Je pointe du doigt vers le bar qui sépare le salon de la cuisine ou trône fièrement une bouteille de Jameson à moitié entamée. « Oublie pas chez qui tu es quand même. » Je ris un peu avant de me redresser et de m’installer plus confortablement dans mon canapé. « Et j’ai cette bouteille chez moi depuis ton divorce avec Ida… J’ai voulu te l’offrir à ton mariage, mais il faut croire que j’ai eu la bonne idée de la garder chez moi en cas d’urgence. » Je hausse un peu les épaules, pour moi c’est presque normal même si je le taquine toujours à propos de ça. « Et arrête de me remercier, c’est normal Tom. » Et pendant un instant, un silence confortable nous entoure. Je bois une gorgée de mon verre et soupire longuement. La sonnerie de mon téléphone vient couper le silence et je regarde rapidement qui viens de m’envoyer un message : Eavan. Je soupire et ne réponds pas avant de me tourner vers Thomas. « T’as faim ? Tu veux te doucher ? Dormir ? » Il faut que je continue de m’occuper l’esprit.       

La seule fois où je me suis autorisé à craquer c’était il y a deux ans lorsque mon père m’a renié et que toute la pression emmagasiné pendant toutes ces dernières années est retombée. C’était dans notre salle de bain et face à Myrddin. Mais jamais je n’ai montré de tels sentiments à mon meilleur ami. Pour lui j’ai toujours été un rock, celui qui résistait avec calme à toutes les tempêtes et qui ne craquait jamais. Et pourtant, aujourd’hui, je m’autorise à me montrer sous un tout autre visage. Si bien que Cian ne semble pas savoir comment réagir. Il perd facilement ses moyens en tant normal, alors lorsque son meilleur ami s’effondre devant lui puis lui pose un nombre incalculables de questions auxquelles personne –a part Myrddin- n’a de réponse, il est normal qu’il panique un peu.

Ainsi, afin de le détendre un peu et de lui faire comprendre qu’il n’y absolument aucun mal  au fait qu’il ne sache pas répondre à mes question, je m’excuse un peu et lui dit que je n’ai que besoin de parler et de me confier. Après m’avoir confirmé que j’ai tapé à la bonne porte, Cian me rassure quelque peu en disant que Myrddin m’aime et que ça ce n’est pas près de s’arrêter. «Oui on me le dit souvent » dis-je doucement, souriant légèrement lorsqu’il me dit que mon mari et moi ‘dégoulinons d’amour’. «Je vais lui en parler. Je vais l’appeler pour lui demander des explications » assurais-je en attrapant le verre de whisky que me tend mon meilleur ami.

Mais avant d’en prendre une gorgé, mon regard se pose sur la bouteille d’alcool et c’est comme si j’oubliais pourquoi j’avais débarqué ici il y a quelques minutes. Intrigué voire carrément choqué je demande à Cian pourquoi il m’a servit du Scotch et non du irish. Il m’avoue avoir cette bouteille depuis mon divorce d’Ida et qu’il voulait me l’offrir à mon mariage mais qu’au final il est content qu’il l’ait gardé chez lui en cas d’urgence «t’as bien fait » dis-je doucement en prenant un gorgé, appréciant sans ménagement l’arrière goût fumé et caramélisé de ce whisky de qualité.

Lorsque Cian me demande si j’ai faim, je réfléchis un peu puis hausse les épaules « Je me commanderais bien une pizza. Non ? T’en pense quoi ?» demandais-je « et je suis pas fatigué» je lance un coup d’œil vers la télé « Tu regardes quoi comme séries ces derniers temps ? Y en aurais pas une style comédie qui pourrait être bien à regarder ensemble ? J’ai juste envie d’essayer d’éteindre mon cerveau et me vautrer devant un truc sympas et sans prise de tête»

Another heartache, another failed romance

Thomas & Cian

Plus Thomas lance des questions à la volée, moi je me sens à l’aise avec toute cette situation. J’avais prévu qu’il aille mal, j’avais prévu de le divertir en disant mes conneries habituelles. J’avais même plus ou moins prévu de passer la nuit dans un bar s’il avait envie de se soûler pour ne pas y penser. Pourtant, je n’avais véritablement pas prévu qu’il craque comme cela et qu’il me pose toutes ces questions. Je tente d’y répondre au mieux, mais j’ai tellement peur de faire une connerie, de mettre les pieds dans le plat que je finis par bégayer comme un idiot. La seule chose que j’arrive à lui affirmer, c’est que Myrddin l’aime. Ça, je pourrais en mettre ma main à couper. Ils se sont mariés récemment, mais depuis la première fois où je les ai vu ensemble, j’ai compris. Ils s’aiment vraiment. J’en ai souvent été jaloux, malgré moi, après ma rupture avec Eavan, alors je sais de quoi je parle. « Je suis persuadé que ça ira. » C’est tout ce que je peux lui dire. Et au fond de moi, j’espère réellement que je ne me trompe pas.

Au moins, j’arrive à faire diversion avec la bouteille de whisky que je sors du fin fond de mon placard. Une relique que je gardais précieusement en cas d’urgence. Pas le genre de truc que je m’ouvrirais seul. Il m’est déjà arrivé de tomber à court de Jameson et pourtant, jamais je n’ai tapé dans cette bouteille. Je la gardais pour Thomas. Je voulais la lui offrir pour son mariage puis j’ai trouvé ça un peu idiot et je l’ai gardé chez moi. « Dis-moi que je me suis pas trompé sur ce que t’aime. » demandais-je quand même. Non parce que si je me suis trompé, je vais en entendre parler pendant des mois.

Thomas semble reprendre du poil de la bête, il a encore les yeux rouges, mais au moins il ne sanglote plus et je dois dire que cela me rassure un peu. On profite de notre verre un instant dans le silence avant que je lui demande ce qu’il veut faire pour le reste de la soirée. « Pizza ça me va ! » dis-je en souriant avant de me lever pour aller chercher les dépliants qui remplissent un des tiroirs de ma cuisine. J’en ai tout un tas. Le parfait dépliant du célibataire qui n’aime pas cuisiner la plupart du temps. Je reviens avec ma trouvaille et la tends à Thomas. « Je te laisse choisir ce qui te fait plaisir. » Et j’allume la télé pour direct allé sur Netflix pour trouver le reste du programme de notre soirée. « J’ai une série parfaite pour toi lad. » Il va soit me haïr, soit me moquer de moi pour le reste de ma vie, mais je m’en fiche. « C’est Eavan qui m’a montré ça hier soir, c’est une série Irlandaise ! » Et je suis heureux comme un gamin le matin de Noël parce que tous les acteurs de cette série sont des purs Irlandais avec l’accent qui va avec. « Bon, ce n'est pas… Enfin c’est un truc d’ado, mais ça se passe à Derry. » Je n’ai pas besoin de chercher longtemps puisque c’est le dernier truc que l’on a regardé avec Eavan. « Tu veux voir ? C’est super drôle en plus. Je te mettrais les sous titres promis. »        

En presque quarante ans je n'ai pas vécu tant de jour aussi violent émotionnellement parlant comme aujourd'hui. Il y a, bien évidemment, eu la mort de ma mère, puis celle de mon frère, puis le moment où Ida a quitté la maison en emportant les enfants avec elle et maintenant le jour du départ de Myrddin, l'amour de ma vie. Je ne le met pas au même niveau que les décès que j'ai vécu, mais la douleur est presque aussi insoutenable. Et la seule personne qui, aujourd'hui, peut me comprendre, c'est Cian. Non seulement est-ce celui qui me connaît le mieux, mais aussi -et c'est horrible à dire- il a, lui aussi, connu une sale déception amoureuse. Eavan n'est pas partie, certes, mais elle l'a trompé et c'est tout aussi horrible. Alors je m'épanche sur Cian, littéralement. Sans pouvoir me retenir, je tombe dans les bras de l'amiral et pleur à chaudes larmes.

Plusieurs minutes passent et ce n'est que grâce aux paroles rassurantes du jeune homme que je parviens à me calmer et reprendre le contrôle sur mes émotions. Nous finissons par quitter le couloir pour aller nous installer au salon où Cian me sert un whisky. Et pas n'importe lequel ! Il s'agit là d'un alcool écossais, un Lagavulin 16 ans d'âge, parfaitement tourbé, avec cette légère saveur caramélisé que j'aime tant. Tout à coup, tout semble avoir été oublié et lorsque mon meilleur ami me demande s'il a bien choisi, je ne peux qu'hocher la tête  «plus que parfaitement bien » soufflais-je en reprenant une nouvelle gorgé, faisant rouler le whisky sur ma langue avant de reposer le verre sur la table basse.

Finalement, je demande à Cian s'il ne connaît pas une série légère et amusante qui pourrait m'aider à éteindre mon cerveau et qui me changerait les idées. Il me propose 'Derry Girls' et je ne peux empêcher un léger rire de sortir de ma bouche, secouant doucement la tête  «avec plaisir, tu me traduiras juste leur langue incompréhensible, hein » commentais-je avec un clin d'oeil complice alors que je me cale confortablement dans le canapé, près à oublié la journée de merde que je viens de passer.