J’avais pas pris le temps de suivre le pointage, prenant pour acquis que je saurais bien assez tôt qui avait gagné quoi. Depuis le début du Brisbane Health Fest, c’était devenu tradition que tous se rassemblent au dbd pour l’apéro post-compétition, où y’avait une populace de gens en vêtements de sport, des dossards de toutes les couleurs, des discussions de temps record, d’entraînements, de performance. Ça me rappelle le lycée obviously, les entraînements de rugby jusqu’à pas d’heure, les voyages de compétition, le bon vieux temps. Aucun regard envoyé à l’horloge que je sais déjà que le match du jour est fini, lorsqu’en un claquement de doigts, un coup d’oeil à la réserve, un dernier café glacé servi pour emporter et l’établissement est presque plein à craquer. D’une Scarlett qui lave des verres avec un mouvement au ralenti pour s’assurer de pas pousser l’effort trop loin et d’étirer ses heures de boulot devant un café vide, je la vois de suite passer en mode productif, courir dans tous les sens, prendre les commandes le sourire aux lèvres et le stylo qui s’agite avec entrain la seconde suivante. Shaker en main, je compile les divers papiers qu’elle laisse à mon intention avant de butiner à travers les différentes tables, et le tout s’apparente presque à une chorégraphie étudiée, si c’est n’est qu’on y va au feeling et que c’est probablement le fait de bosser ensemble depuis presque six mois et se connaître depuis toute une vie maintenant qui fait le reste.

Du service de cocktails, je passe maintenant à celui des bières quand un groupe pêle-mêle et quelques visages familiers viennent s’installer aux dernières places restantes au comptoir. Pintes par ci, verres par là, je dispose le tout avant de capter un sourire au passage. À force de travailler dans le public, les détails du genre étaient du tacite pour lancer la conversation, bien loin de ceux et celles qui débarquent ici pour cumuler les boissons et s’enfermer dans leur mine résignée. Salutations de base, et je fais ce que je sais faire de mieux. Du small talk en bonne et dûe forme. « Ce qu’il y a de bien, c’est que peu importe qui a gagné et qui a perdu, on a une bonne raison de remplir nos verres. » d’un geste, je pose devant ses yeux la commande passée précédemment déjà toute prête à être engloutie. « Ils ont gagné, on célèbre. »  servant trois shots au prochain, ma théorie du dimanche que j’explique tout bonnement au fil des onces distribuées.  « Ils ont perdu, on est en deuil. » levant à nouveau la tête vers mon public - ou mes clients, ce qui est beaucoup mieux et me fait sonner un tantinet moins douchebag faut dire - je renchéris, curieux. « Vous buvez votre victoire, ou votre défaite, aujourd’hui? »

Made by Neon Demon

Pour ceux & celles qui veulent se joindre:

Une soirée imprévue au Death Before Decaf, tu aimes ça. Surtout que t’as un truc à fêter. Fini le traitement et tes résultats d’analyses viennent d’arriver, elles sont parfaites. Le HIV t’a frôlé mais t’as eu les réflexes qu’il fallait. Un mois durant, t’as pris religieusement ton traitement, mettant des rappels sur ton téléphone afin de ne pas commettre d’impairs. T’as aussi levé le pied considérablement niveau du sexe, mais cette lettre avec les précieux résultats, c’est le feu vert pour retourner dans ta vie de débauche. Et donc pour ça, il faut sortir et boire. Pourquoi pas trouver quelqu’un à baiser. En plus tu pourrais bien te faire une place chez Matt afin de tirer ton coup confortablement. Il ne t’avait pas dit non la dernière fois que tu lui as ouvertement demandé si tu pouvais squatter. C’est donc un oui, techniquement.

T’as envoyé un SMS dans le group chat avec tes potes de soirées et y’a Ashley qui a répondu par l’affirmative. Ashley, elle t’a remonté les bretelles assez souvent récemment à cause des mauvais pronoms que tu utilises à son égard. Tu vas essayer de pas faire le con ce soir à ce niveau là. T’as bien compris qu’elle était sérieuse. Après presque 10 ans les habitudes ont la vie dure. Elle a toujours été un dude à tes yeux. Un dude super efféminé mais un dude quand même.

Une de tes chemises préférées sur le dos, une Burberry bleu marine avec des motifs à gros carreaux. Tu l’as laissée ouverte sur un tshirt blanc. Les manches sont relevés aux trois quarts. Tu t’es trouvé beau gosse avec ton jeans qui te moule le cul parfaitement. Tu entres dans le bar et tu cherches ta pote des yeux. Tu fais un petit tour des lieux au cas où elle se cacherait mais non. Elle n’est pas encore arrivé apparemment. Tu vérifies ton téléphone et t’as la confirmation qu’elle est en chemin. Tu décides d’aller vers le bar et en y allant, tu passes à côté de Matt qui discute avec des clients. Tu glisses ta main dans son dos pour qu’il te capte. Ton geste est doux. Quand il se tourne pour te regarder, tu lui fais un clin d’oeil, tu lui souffles un baiser alors que tu files déjà vers le bar, le laissant à ses occupations.

Y’a du monde, alors tu patientes. Tu jettes un coup d’oeil au peuple autour de toi et tu y vas de ton petit commentaire pour faire le malin.

« Faut baiser qui pour être servi plus vite ? »

T'es même pas assez proche du bar pour que la personne qui bosse de l'autre côté du comptoir puisse t'entendre. La musique n'aide pas non plus.

Une main sur ton cul. Déjà ? Tu viens à peine d’arriver. T’es vraiment trop attirant pour ce monde. C’est pas toi qui le dit, c’est l’univers qui te le prouve une fois de plus et c’est pas pour te déplaire. La meuf, car oui, après coup d’oeil, il s’agit d’une personne qui a l’air de se qualifier avec des pronoms féminins, prend la peine de répondre à ton interrogation. Ton regard se fait un peu plus intéressé et le sourire qui s’affiche sur tes lèvres le reflette assez bien. Sauf qu’elle revient sur son geste, s’excusant. Matt vous file les menu et tente une approche avec la fille. Ariane débarque en même temps, parlant de ce geste également et tu réponds à Maze qui vient de se présenter.

« L’écoute pas. »

Comme si c’était déjà ta pote alors que tu la connais depuis moins d’une minute. Les contacts physique, ça rapproche. Nadia également présente, y va de sa remarque et ça te fait sourire parce que t’allais dire un truc similaire.

« Ouais. Ariane est pire que moi. »

Que tu dis à Maze sur le ton de la confidence. Tu en profites pour aller faire un bisou sur la joue de la rousse, parce que t’es bien content de la voir dans le coin. Ca fait un moment que vous vous êtes pas vu.

« Je suis Andy, comme Nadia l’a précisé. »

Tu fais les présentations subtilement au passage. C’est la moindre des choses pour cette jeune fille qui a l’air d’avoir de bons goût au niveau du fessier. Tu ne vas pas embrasser Nadia par contre, un baiser soufflé fera l’affaire.

Le menu dans les mains, t’as même pas besoin de le regarder que Matt propose la même chose que d’habitude. T’es pas sûr à quoi il fait référence parce qu’il t’as déjà fait pas mal de cocktails différent ici. Toujours parfait. A ton goût. Alors tu hoches la tête, reposant la carte.

« Je te fais confiance. »

Tu te retournes vers Maze parce que clairement, c’est la seule de tout ce monde autour de toi avec qui t’as potentiellement une chance de tirer un coup. Priorities.

« Donc si j’ai bien compris… On fait parti du club fermé des gens qui boivent à l’oeil ici ? J’ose pas lui dire que même si je devais payer tous mes verres je viendrais quand même à son bar. »

Tu jettes un coup d’oeil à Matt qui t’a certainement entendu et tu nies tout en bloc.

« Quoi ? Non. Bien sûr que je viens ici juste pour faire des économies. J’ai un voyage à Vegas à préparer. »

Parce que Gaga a annoncé sa residency pour la fin de l’année. Y’a pas moyen que tu loupes ça.

La journée avait été un calvaire sans nom pour le jeune avocat. A commencer par toute la paperasse qui se trouvait à son bureau le matin en arrivant, chose qui avait tendance à le décourager. En prime, il se ramassait une énième gueule de bois pour avoir encore passé toute la nuit à faire la bringue avec Chadna. Cette petite soirée cinéma entre copains avaient terminé en bamboula et le poussaient, pour la quatrième édition de la semaine, à prendre le petit déjeuner avec une boite d’aspirines. Le pompon était qu’il avait fini par croiser, par hasard, Heidi sur le chemin en rentrant chez lui. Non seulement il pouvait encore flancher devant elle par son allure naturellement élégante mais, en bonus, elle n’était pas seule à cet instant. Se sentant comme le pire des cons et s’en voulant à lui-même d’être toujours aussi crétin par rapport à elle, il changea tout aussitôt de direction et oublia l’idée de rentrer sagement chez lui. L’heure était la picole et à l’oubli des problèmes, se dit-il finalement.

Ainsi, sur le chemin, il vit le Death Before Decaf. L’établissement était aussi coloré que le Brisbane Health Festival. Fuck, ce festival, pensa Dean. Voilà une raison plus sage de passer le temps, en faisant du sport, un peu de musculation accompagnée par un peu de cardio. Faisant une mine hésitante quelques instants, tout en regardant la devanture du bar, le jeune Irlandais se dit que finalement, son choix était déjà fait. Il poussa alors la porte du pub et afficha le sourire le plus trompeur possible, cachant toute once de tristesse concernant son état. Ainsi, il vit une ribambelle de personnes déjà présentes, tout autant vêtues de tenues de sport les unes que les autres. Lui, bien habillé, chaussures cirées et chemise pas encore tâchée par le vin, faisait presque mouche.

Au loin, il vit le plus bel étalon de la pièce, à savoir Matt McGrath. Il avait l’air de gérer son établissement à la perfection. De là où il se trouvait, Dean pouvait voir qu’il parvenait à servir à boire à ses clients, tout en louchant de temps en temps sur le derrière de Scarlett. Quel homme ! Inutile de préciser qu’il en fallait peu pour impressionner Dean Maguire à ce moment-là. Lentement, mais d’un pas assuré, il se dirigea vers son ami qu’il avait eu l’occasion de croiser plusieurs fois depuis son arrivée à Brisbane. Entre-temps, il vit Maze Crawley qui parlait avec un inconnu. Une belle gueule de latino qu’on ne voyait habituellement que dans les magazines de mode. Dean leva les yeux au ciel en voyant cette drague pointer le bout de son nez, fit un grand signe à son amie en passant à côté d’elle, en se notant dans un coin de la tête qu’il reviendra plus tard vers elle, puis arriva face à Matt, au comptoir : « Mets-moi la meilleure bière que tu aies mon vieux. Et prends la même pour toi, c’est ma tournée. » Mais avant que Matt n’ait eu le temps d’ouvrir la bouche, Dean leva son index pour lui indiquer de se taire : « Et je me fiche que tu sois en service, tu prendras bien une petite pils avec tonton Dean, non ? ».

Cela ne faisait que quelques semaines à peine que Jill McGrath se trouvait à nouveau sur le sol australien que c’était déjà le bordel partout où elle passait. C’était à commencer par cette femme enceinte qu’elle avait agressé en pleine rue, uniquement pour prendre son portefeuille. Fort heureusement pour la femme en question, les policiers n’étaient pas loin et avaient pu arrêter Jill tant qu’il en était encore temps. Cependant, pour Jill, c’était une tout autre affaire. A présent, elle était obligée de suivre une thérapie, ordonnée par un juge, à cause de sa maladie serait responsable de son acte. Selon Jill, c’était n’importe quoi. Elle avait délibérément piqué le portefeuille parce que, putain de merde, elle était en chien sur l’argent. Retrouver Finnley Coverdale n’avait été qu’un des seuls points positifs de son retour. Jusqu’ici, Jill n’avait pas encore trouvé la force de poursuivre ni son frère ni sa petite sœur. Il lui fallait quelques jours d’adaptation avant d’à nouveau faire face à la réalité familiale, qui allait sûrement encore lui mettre une claque en pleine gueule… à condition qu’elle ne mette une claque à cette situation elle-même avant. Quelques heures plus tôt dans la journée, son fidèle complice Theodore et elle étaient dans son appartement, en train de refaire le monde, surtout tous les deux complètement enveloppés par l’alcool. Cette poussée d’adrénaline, doublée par le traitement qu’elle prenait, lui donna une idée de feu de Dieu. Theo semblait, lui, ne pas apprécier l'idée. Et si aujourd’hui était justement le jour idéal pour se rendre à l’établissement de son frère ? Après tout, elle aussi pouvait aller faire la fête à cet endroit. Jusqu’à preuve du contraire, sa tête n’était pas encore affichée sur la devanture comme quoi elle était interdite d’entrée. Autant elle avait toutes les forces en tête pour affronter Ginny et sauter dans le train de sa vie infernale, avec Noah, Ezra et toute la smala, autant Matt était la corde sensible, celle qui pouvait créer une explosion d’une seconde à l’autre. Cela justifia pourquoi l’alcool allait l’aider grandement à franchir le pas de la porte du DBD. Et elle y arriva. Une fois la porte claquée derrière elle, Jill poussa un long soupir pour se donner le courage et tituba grandement vers le bar, changeant aussitôt d’attitude : elle s’était redressée, avait levé le menton et abordait le plus grand des sourires. C’était comme si elle venait de se mettre des œillères pour ne voir que le comptoir en face d’elle et ne pas croiser le regard de son frère, au cas où ce dernier se trouverait dans la place. Autour d’elle, toute l’agitation des nombreuses personnes qui se trouvaient déjà dans le bar lui donnait déjà des étourdissements. La foule, fait chier. Comment ce bar pouvait-il avoir du succès et attirer autant de monde ? Si Jill aimait se montrer en spectacle d’habitude, pour le coup, avoir beaucoup de personnes autour d’elle ne l’aidait pas des masses. Et la musique qui allait fort dans le bar non plus. Les boum boum de la musique drillaient néanmoins ses pas. Une fois arrivée au comptoir, non sans mal, ayant attrapé un verre avec un restant de scotch qui trainait sur l’une des tables, elle se posa entre des personnes qui étaient de dos, qu’elle ne connaissait pas. Du moins, qu’elle ne pensait pas connaître avant de s’y attarder. A sa gauche se tenaient deux femmes et le client de plus fidèle du McTavish Pub, à savoir Gabriel Carnahan. Sans vouloir l’interrompre, Jill lui adressa un clin d’œil coquin pour lui montrer qu’elle l’avait vu. Puis elle fit claquer le verre de scotch sur le comptoir après l’avoir bu d’une traite, ce qui devait sans doute attirer l’attention de la personne à sa droite, qu’elle avait sans doute bousculé au passage : son propre frère, Matt McGrath. « Ah, super ! Une bière ! » dit-elle en se tournant vers lui, faisant mine de rien, aveuglée par la réalité qui la titillait de fondre en larmes ou de tout casser dans le bar, que celle d’avoir Matt en face d’elle. Elle but une grande gorgée de la bière qu’il avait en main comme pour s’assommer encore plus, puis jeta un coup d’œil à la jeune femme, Maze Crawley, puis aux deux hommes, à savoir Dean Maguire et Andy Rivera, à côté de son frère. « Tu ne me présentes pas à tes amis, frérot ? ‘paraît que tes copains rendent folles les filles de la famille ! » lâcha-t-elle, une pointe de rancune coincée dans la gorge, alors qu’elle fit mine de lancer un regard de braise aux amis de son frère en question, suivi d'un geste de la langue passée sur ses lèvres d'une manière provocante.

Journée de merde, nerfs à vif, je claque la porte de l’agence avec la force de mon agacement. Généreuse dans l’âme, j’ai besoin de partager mon agacement avec mes collègues qui ont dû se taper ma mauvaise humeur toute la journée. Le plaisir de bosser avec Chad Lakshmi, à n’en pas douter. Je fais griller ma clope alors que je me demande ce que je peux foutre de mon temps libre, et il est hors de question que mes miches prennent sagement la route de mon appart. J’ai besoin d’un verre ou de plusieurs, après j’irai récupérer ma bestiole chez Carmen, en retard c’est sûr, elle va finir par s’y faire.  Solaire sur le nez, je vais poser mon cul à l’arrêt de bus comme le commun des mortels, on remerciera ce tas de ferraille capricieux qui a refusé de démarrer ce matin. Et à peine installée que mon téléphone sonne. Carmen. « Ouais, t’inquiètes je suis en chemin » je mens, elle le sait. « Il t’emmerde ? » Non « T’as un rencard ? » non « pourquoi t’me fous la pression alors ? » tu sais que t’fais chier ? « t’inquiètes j’suis là dans une heure » t’as intérêt, sinon j’l’fous à la porte « t’as pas de cœur » elle raccroche. J’écrase le reste de ma cigarette à mes pieds et grimpe dans ce bus qui a l’air d’avoir fait toutes les guerres. Une heure et demi de secousses, de cris de gosses, de conversations inintéressantes, de freinage brutal plus tard, je débarque enfin avec la promesse de régler mes problèmes de caisses parce que je risque de finir en taule pour meurtre à ce rythme.

Sans surprise le bar est bondé, même si c’est un ironique avec l’évènement santé en ville. Tous ces efforts tués avec des verres de téquila, c’est comme se prendre un menu maxi au mcdo avec un coca zéro, de mon côté je trouve ça dommage que mcdo se soit pas encore mis à la téquila, meilleur remède pour calmer les petits et les grands. Je repère des visages familiers, Matt le grand manitou de ce château et à ses côtés, Dean habillé pour aller voir le curé, ça m’arrache un sourire. « Tu t’es perdu entre l’église et le bar ? » je lance à Dean quand j’arrive à sa hauteur « ou bien t’avais un rencard et elle n’est pas venue ? » il y a aussi l’option boulot, mais c’est chiant. Finalement, je porte mon attention sur le proprio des lieux, un air de donzelle en détresse sur la tronche « j’suis en pleine déshydratation, envoie ma dose de téquila » je reste persuadée que des ampoules de téquila manque à notre quotidien, au mien surtout.