"Tu m'as eu à proche du marché, je crois."
"J'avoue tout, j'ai dégainé ma meilleure carte."

Elle pouffe de plus belle la brune, elle y croit. C'est égoïste et elle ne s'en cache pas, pourtant le sourire que lui renvoie Zeke répond à sa place. Elle ne lui aurait jamais imposé un horaire ni même un endroit où vivre, sachant qu'il était bien plus à l'aise et heureux sur la ferme que nulle part ailleurs - et elle aussi, sans aucun doute. Mais l'idée qu'il passe la voir en ville rend le lien encore si solide, ses doigts se resserrant contre les siens le plus naturellement du monde, bien plus que par un calcul qui simplifie tout le reste quand bien même tout est si compliqué, dehors. "Ne t'embête pas pour moi. Je peux aussi dormir sur une chaise mais... Merci." il égare son pouce sur sa joue, elle plonge ses prunelles dans les siennes. "Note à moi-même : ne laisser qu'une chaise, dans ta chambre." elle est espiègle quand elle est heureuse. Elle ne porte aucun masque et sa liberté retrouvée lui font un bien fou, quoi qu'elle a dû passer par l'enfer avant de s'y complaire.

Ils en sont à une scène qu'elle ne dénote même plus, trop occupée à réinventer le monde en laissant ses iris mémoriser chaque parcelle, chaque teintes de ceux du Blythe. "Tu pars quand?" elle inspire, difficilement, déglutit en finissant par se pincer les lèvres sans pour autant vouloir mentir ou repousser l'échéance. Elle se questionne Chloe, mais pas pour les raisons qui nous viennent tous à l'esprit, à l'avoir vue fuir sa vie aussi facilement, aussi instinctivement, aussi rapidement il y a des mois déjà.

Elle n'hésite pas sur la réponse, ni même sur le mensonge à dégainer pour se protéger.
"Demain, officiellement."

Elle hésite à savoir si elle lui fait assez confiance pour lui dévoiler le tout, l'entière et complète vérité.
"Cette nuit, officieusement."

Elle déteste les adieux Chloe, elle s'esquive bien avant de devoir les articuler. Et voilà qu'elle lui confie son plus grand secret, celui auquel elle tient plus que quoi que ce soit d'autre.

Il savait que c'était inévitable Zeke, qu'elle allait partir et retrouver le confort de son ancienne vie. Tout y serait parfaitement rangée, contrairement au bazar permanent de sa vieille grange où se déroulait à l'heure actuelle une séance de cinéma improvisée. Blythe ne pouvait que sourire, ne rien dire pour protéger le silence toujours apaisant qui s'installait le plus naturellement du monde entre eux, toujours. Ils n'avaient jamais besoin de s'abrutir de milliards de mots pour se comprendre et c'était un fait qui permettait à Ezechiel de ne pas se forcer à être une personne qu'il n'était absolument pas. Tous les gens qui le connaissaient un minimum avaient conscience qu'il n'était pas fait pour les longs discours, qu'ils fussent pour dix, cent ou une seule personne. Il préférait montrer, le brun, et protéger ce qu'il avait au fond du coeur avec des jolies barricades silencieuses, de celles que Cohen n'avait absolument pas besoin d'abattre pour savoir ce qui se tramait dans la tête de Blythe. Là, elle devait le sentir heureux, s'osant même à plaisanter avec cette histoire de chaise car elle savait fort bien qu'il ne mentait pas qu'il essaierait forcément de prendre le moins de place possible en finissant sa journée quelque part dans l'appartement de la brune. "Ma chambre, carrément?" Le deal était grand et Chloe lui laissait un espace immense dans son petit univers, Zeke ne sachant pas très bien s'il était capable d'assurer son bonheur en étant celui sur qui elle compterait dans les moments de doute, comme ceux des derniers mois. La fameuse question fendit l'air après qu'il eut osé passer une douce main dans sa chevelure et il savait qu'elle lui dirait la vérité, que ce serait la dernière fois qu'ils se verraient avant un petit moment, qu'elle serait déjà loin au petit matin. Il hocha donc la tête, acceptant son sort, acceptant qu'elle lui manque dans les semaines à venir. "Attends que je dorme pour t'en aller." Il ne volait pas d'adieux non plus, il voulait juste être devant le fait accompli et se dire que c'était pour mieux, ses yeux se fermant avec une pointe de nostalgie déjà présente au creux de son âme.