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 stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby)

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Message(#) Sujet: stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) EmptyMar 28 Jan 2020, 23:43


@Tabitha Todd
today my forest is dark. the trees are sad
and all the butterflies have broken wings.

Louis était triste. Pas qu’aujourd’hui – il avait été triste hier, et il le serait probablement tout autant demain. Ses journées étaient remplis de malheur, de larmes et de désolation depuis des semaines ; elles se ressemblaient toutes et se confondaient en une masse grise et déprimante dans son esprit à la fois sonné et écorché par le désespoir. En semaine, il parvenait à s’arracher à sa détresse pendant les heures de bureau, bondissant hors du lit dès que résonnait l’alarme stridente de son réveil dans le silence glacial de l’appartement, et se précipitant loin de ce logement qu’il ne parvenait même plus à considérer comme son chez-lui. Il travaillait alors comme un acharné sans s’autoriser un moment de répit, certes désireux de faire bonne impression à quelques semaines de la fin de sa phrase de formation au sein du commissariat, mais surtout de crainte d’être rattrapé par les pensées et les émotions qu’il avait laissées derrière lui, derrière la porte d’entrée de l’appartement qu’il redoutait de regagner. Lorsque sonnait l’heure du départ du travail, Louis n’hésitait pas à laisser tirer en longueur sa journée de labeur. Les employés du commissariat voyaient en lui une recrue dévouée et à la limite de l’excès de zèle, bien loin de se douter qu’en réalité, Louis cherchait tout simplement à postposer autant qu’il le pouvait son retour à la maison. Lorsqu’il n’avait vraiment plus rien à faire, c’est avec des pieds de plomb qu’il entamait le trajet vers l’appartement qu’il partageait avec Tabby, et avec la boule au ventre qu’il insérait les clés dans la serrure, inspirant toujours profondément, comme pour se donner du courage, avant de pousser la porte de ce qui avait été leur nid d’amour et d’espoir.

Louis avait peur. Pas qu’aujourd’hui – jour après jour, lorsqu’il poussait la porte de l’appartement, il entendait son cœur battre à tout rompre dans ses oreilles et sentait se tordre ses entrailles et se nouer sa gorge alors qu’il avançait à pas de loup dans le hall d’entrée. À chaque fois, en parcourant ce chemin qui désormais le terrifiait, il redoutait de retrouver sa Tabitha, gisant sans vie quelque part dans l’appartement plongé dans la pénombre. Il apercevait, jour après jour, sa silhouette inanimée sur le canapé ou dans le lit, et se précipitait alors vers elle, terrorisé, pour s’assurer qu’elle était simplement endormie, assommée par la bouteille de spiritueux qu’elle avait bue au cours de la journée. Le soulagement de savoir qu’elle n’avait pas mis fin à ses jours faisait alors rapidement place à une autre émotion, différente selon les jours ; la réalité de sa vie le rattrapait, et, parfois, c’était la tristesse qui le submergeait – une tristesse profonde et inconsolable, comme il n’en avait jamais connu, qui s’immisçait dans chacun de ses pores et le glaçait de la racine des cheveux au bout des orteils. Parfois, c’était un profond sentiment d’impuissance qui s’abattait sur lui, face à l’idée que jamais les choses ne s’arrangeraient et qu’il n’y avait rien qu’il pût faire pour y remédier, contraint d’assister au tableau désolant de sa vie qui s’écroulait sous ses yeux. Et, parfois, c’était une colère sourde, une fureur désespérée, qui l’emplissait lorsqu’il faisait état de la situation : l’injustice par laquelle leur avait été arraché leur fils, la façon dont Tabitha se laissait sombrer sans même plus essayer de garder la tête au-dessus de l’eau, le puits sans fond dans lequel il avait la sensation d’être emprisonné et dont il ne voyait pas le rebord lorsqu’il levait les yeux. Et, au bout de quelques temps, finissaient toujours par jaillir, de ses yeux fatigués par le manque de sommeil, des larmes de tristesse, d’impuissance ou de colère.

La vie sans Jimmy n’était que désespoir, deuil et désolation. Elle était devenue terne et sombre depuis sa disparition, tout comme leur appartement, dont les rideaux étaient toujours tirés et les lumières éteintes, aucun des deux parents endeuillés n’ayant envie d’éclairer la misère qui les accablait. Les éclats de rire avaient cédé leur place à un silence complet, occasionnellement brisé par un sanglot ou par un gémissement désemparé. Tabitha était sonnée, sans qu’on ne sût trop si c’était plus par l’alcool ou par l’horreur qu’était devenue sa vie, et elle ne semblait être plus que la coquille creuse de la femme pleine de vie dont Louis était tombé amoureux. Peut-être était-ce parce qu’il avait l’impression qu’elle était à deux doigts du gouffre que Louis était parvenu à garder toute sa tête après le drame de la mort de leur bébé. Forcé à garder la tête hors de l’eau, Louis avait réprimé, probablement pas de la façon la plus saine, le deuil qu’il avait à faire. Et s’il s’était initialement convaincu qu’il était primordial pour lui de garder la tête froide pour s’assurer de la sécurité de Tabby, qui ne semblait accrochée à la vie que par un ultime fil effiloché, désormais, il avait plutôt l’impression que c’était elle qui allait le faire sombrer à son tour. La terreur profonde de la retrouver morte en rentrant du travail, se vidant de son sang dans la baignoire ou pendue près de la fenêtre de leur chambre, mais aussi le spectacle qu’elle offrait quotidiennement en se laissant mourir à petit feu, commençaient à avoir raison de lui. En partant, Jimmy avait emporté avec lui le sommeil de son père, qui passait ses nuits à fixer le plafond, les yeux grands ouverts par l’ampleur du deuil qu’il avait à faire, mais aussi par les cris et suppliques d’une Tabitha inconsolable d’avoir été privée de ce petit être qu’elle avait mis au monde si peu de temps avant qu’on ne le lui arrache si brutalement. Nuit après nuit, ivre d’alcool et de désespoir, elle se mettait à hurler, et il devait se précipiter pour la serrer contre lui, la berçant parfois pendant près d’une heure avant que ses cris ne finissent par s’atténuer. Il ne pouvait pas lui reprocher le cauchemar éveillé qu’il vivait à ses côtés, loin de là – mais Louis sentait littéralement la vie le quitter à chaque minute qu’il passait dans cet appartement endeuillé.

Aujourd’hui, pour la première fois, Tabby n’était affalée ni sur le canapé, si dans le lit lorsque Louis, plein d’appréhension, mit les pieds dans l’appartement. Comme à chaque fois, il était terrifié à l’idée de ce qui pouvait l’attendre au détour de chaque porte qu’il poussait, et il sentit son cœur manquer un battement lorsqu’il l’aperçut, les bras écartés et vêtue uniquement d’un débardeur et d’une culotte blancs, appuyée contre la balustrade du balcon de leur chambre. Aussitôt, il se précipita à l’extérieur et l’agrippa avec force par la taille, la tirant vers l’arrière, en sécurité dans la chambre. Lorsqu’elle lui fit face, il eut la désagréable et familière sensation qu’elle le regardait sans le voir. C’en fut trop pour Louis, qui, encore sous le coup de la panique, s’exclama en la secouant par les épaules : « Mais qu’est-ce qui te prend, Tabs ? Tu m’as fait quoi là ?! »
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Message(#) Sujet: Re: stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) EmptyMer 29 Jan 2020, 21:12


@louis nicholson

Son corps frêle était secoué de frissons. Brisbane ne soufflait pas un air glacial mais suffisamment frais pour qu’une tenue débardeur-culotte ne soit pas adaptée à la température. La chair de poule avait fait dresser les poils sur la peau métissée de la jeune femme, qui pourtant ne se décida pas à rentrer pour se réchauffer. Debout sur le balcon de son appartement, un regard extérieur aurait pu croire qu’elle était hypnotisée tant le corps restait immobile, dressé face à la nuit tombante de la ville. Ce soir-là, Tabitha n’avait pas d’alcool dans le sang, pas encore du moins, mais elle n’avait pas pleine possession de ses moyens pour autant. A vrai dire, elle n’était jamais vraiment dans son état normal ses derniers temps, ébriété impliquée ou non. Une telle douleur émotionnelle suffisait à faire l’effet d’une drogue chez Tabitha : elle avait si mal au cœur qu’elle ne sentait plus les autres parties de son corps. Elle dormait soit trop, soit pas du tout. Elle n’avait pas faim, pas soif, pas envie de sortir, pas envie d’aller aux toilettes, pas envie de prendre de douche. Frappée d’un élan de lucidité fugace, là, sur le balcon, elle se rendit compte qu’elle n’avait peut-être simplement pas envie de vivre.

Guidée par une pulsion subconsciente, Tabitha leva les bras et les écarta à la manière d’un ange, puis stoppa son geste et demeura un moment dans cette position. Elle ne s’apprêtait pas à faire quoi que ce soit car elle était tout bonnement incapable de se projeter dans un futur quelconque, aussi imminent soit-il. Donc elle resta là, l’esprit vide, un bref instant de répit avant de retourner à des pensées plus sombres. Le moment de soulagement s’interrompit vite, coupé net par la prise puissante des mains d’un homme qui déplacèrent le corps robotique de Tabby vers l’intérieur. Réagissant à l’effet d’un retour dans une atmosphère tiède, les frissons se dissipèrent. Tabitha se sentit vaguement secouée par Louis et comprit l’énorme panique dans sa voix. Au prix d’un immense effort, elle lui répondit avec la première excuse qui lui traversa la tête. « J’étais en train d’aérer la pièce. » Sa voix portait l’accent de quelqu’un qui n’avait pas parlé depuis longtemps, un peu enrouée, un peu éraillée, mais surtout très faible. Après cette phrase, le temps passa à une vitesse inconnue, mais lorsque les mains de Louis finirent par lui lâcher les épaules, Tabitha s’allongea immédiatement sur le lit. Elle avait passé un certain temps debout sur le balcon, ce qui lui avait demandé un effort incommensurable. Maintenant elle était épuisée et elle ne pensait pas avoir la force d’affronter l’inévitable conversation qui allait suivre, mais comme pour bien d’autres choses, elle n’avait pas le choix.

Louis n’était qu’à quelques mètres d’elle mais c’est comme s’il était très loin. Son rapport à l’espace temps complètement altéré, tout semblait distant pour Tabby. Comme absente de son propre corps, elle était devenue témoin de sa vie plutôt qu’actrice. Ainsi, elle savait vaguement que Louis était présente à ses côtés mais sans avoir la moindre idée, par exemple, de comment il était habillé. Il aurait très bien pu se teindre les cheveux en rose fluo ou ramener un iguane de compagnie et le porter sur son épaule qu’elle n’aurait rien remarqué. De ce fait, par le biais d’une étrange opération, la vision de Tabitha se floutait automatiquement lorsqu’elle était tournée vers Louis. Et ça l’arrangeait bien. Peu après la mort de Jimmy, juste avant que Tabitha ne se fasse happer dans l’antre de la dépression, elle avait vu l’air de Louis. Lorsqu’elle le regardait, elle ne pouvait pas échapper au malheur écrit sur le visage de son amoureux. Le voir ainsi ampli de tristesse ne faisait que mettre un coup supplémentaire dans une plaie déjà ouverte. Le pire dans tout ça fût quand elle se rendit compte qu’à chaque fois qu’elle regardait Louis, elle plongeait en fait ses yeux dans ceux de son fils disparu. En effet, Jimmy avait déjà hérité des yeux ronds de son père. Le cœur de Tabs se déchirait de nouveau dès qu’elle voyait ce visage, qui aurait pu être aussi plus tard celui de son fils si on lui avait laissé le temps de grandir. Les sublimes yeux de Louis, une des choses qu’elle admirait le plus au monde, étaient à présent ce qu’elle redoutait le plus.

D’ordinaire quand Louis rentrait du travail, il se mettait au lit en silence, et si Tabitha avait été dans son état normal, elle aurait senti quelque chose de différent, ce soir-là. Sûrement muée par un sixième sens, elle tourna la tête en direction de Louis qui n’avait manifestement pas fini de parler pour aujourd’hui. Elle fut soudainement prise par l’envie intense de le prendre dans ses bras et de le serrer fort jusqu’à l’étouffement. Mais elle demeurait inerte, toujours. Malade et allongée sur un lit encore défait de la veille (et de la veille avant ça), Tabitha avait l’air d’attendre son sort. Si son sort avait été de mourir là tout de suite, elle n’aurait pas bougé le petit orteil. Si un cambrioleur déboulait dans la chambre pour prendre tous les objets de la pièce, elle l’aurait regardé faire mais sans rien voir de la scène. On aurait même pu poser une tarentule sur le bout de nez qu’elle n’aurait pas louché. Ainsi, elle était à des lieux d’imaginer ce qui allait se passer et n’avait en sa possession aucune clé pour arranger la situation.

Les yeux marrons de Tabitha s’étaient teintés d’une nouvelle couleur ; ils se noyaient maintenant dans un océan rougeâtre, vestige des dernières larmes ou annonciateurs de la prochaine crise de pleurs, on ne savait jamais vraiment. Encore à cet instant, les paupières de Tabbby s’embuèrent puis les larmes coulèrent avant d’arrêter leur course paresseuse sur le haut de la poitrine. Du bout des lèvres, elle souffla les misérables mots : « C’est vraiment dur. » - au lieu des je t’aime, je suis désolée, ne m’abandonne pas maintenant, soutenons-nous, j’ai besoin de toi et d’une centaine d’autres appels aux secours qu’elle aurait dû lui lancer. Tout allait se terminer sur de nombreux non-dits.



Dernière édition par Tabitha Todd le Mer 25 Mar 2020, 23:30, édité 2 fois
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Message(#) Sujet: Re: stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) EmptyLun 03 Fév 2020, 03:22


@Tabitha Todd
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Tout doucement, l’effarement qui s’était emparé de Louis en voyant Tabitha à deux doigts d’une mort certaine commença à diminuer, mais il demeurait dans un état de choc qui rechignait à se dissiper, tant la peur avait été intense devant la vision d’horreur qui s’était offerte à lui lorsqu’il avait mis les pieds dans la chambre. Son cœur battait à tout rompre entre ses tempes, et son estomac demeurait recroquevillé. Petit à petit, cependant, la peur commençait à faire place à une autre émotion, comme elle le faisait quotidiennement après les montagnes russes émotionnelles dans lesquelles Louis s’embarquait à chaque fois qu’il rentrait à la maison. Aujourd’hui, ce n’était pas uniquement la colère, la frustration ni la tristesse qui s’abattit sur Louis. C’était un mélange des trois, une fureur désemparée, ravivée par le malheur qui l’écorchait vif. Il n’aurait su déterminer laquelle de ces émotions prédominait : elles se bousculaient dans son esprit torturé jusqu’à se confondre en une masse d’idées noires, et plus que jamais, il se sentit happé par un désespoir dont il avait la presque certitude de ne plus jamais réussir à ressortir. Il avait toujours su qu’il ne parviendrait pas à ressortir indemne du déchirement qu’avait causé la perte de Jimmy, mais aujourd’hui, alors qu’il secouait par les épaules une Tabitha complètement sonnée, il sentit que son état à elle commençait à avoir raison de sa santé mentale à lui.

Lorsqu’il la relâcha, elle marmonna une excuse qui lui fit écarquiller les yeux. Il aurait ri si la situation n’avait pas été aussi dramatique ; au lieu de cela, il secoua la tête, incrédule, sans même savoir pourquoi il prit la peine de répondre, pertinemment conscient que cela ne changerait rien et qu’il n’obtiendrait rien de plus de Tabby. « Arrête, Tabs. C’est n’importe quoi », s’exclama-t-il, sa voix pourtant à peine plus haute qu’un murmure étranglé. Louis n’avait pas la force d’exprimer son énervement. Il savait que c’était peine perdue, que Tabby ne réagirait pas, que tout au plus il parviendrait à lui faire verser quelques larmes. Elle ne réagissait jamais, et pourtant il avait déjà tout essayé pour lui soutirer quelque chose, peu importe quoi : une pensée, une émotion, quoi que ce fût qui lui aurait signifié qu’elle était encore là, quelque part à l’intérieur de ce corps devenu amorphe, abattu par une tristesse qui les dépassait tous les deux. Il avait câliné, embrassé, murmuré, supplié, crié, secoué, mais rien n’y faisait : elle gardait le regard vide, laissait échapper, tout au plus, deux ou trois syllabes vides de sens, mais rien de ce que pouvait faire ou dire Louis ne semblait avoir le moindre impact sur elle. Il était contraint à la regarder se laisser dépérir, totalement passive face à ce qui lui survenait.

Louis ne savait trop ce qui était pire entre le manque complet de réactivité de Tabitha et la façon dont elle le regardait. Lorsqu’elle posait sur lui ses yeux, d’ordinaire si beaux mais désormais injectés de sang et entourés de cernes violacés, il remarquait très nettement qu’elle le regardait sans le voir. Il ne savait pas pourquoi c’était le cas, si c’était une simple conséquence de l’état second dans lequel elle semblait être plongée en permanence, ou si elle se forçait, consciemment ou non, à ne pas le regarder convenablement. Les interactions avec Tabby se faisaient donc tout simplement impossibles – non seulement parce qu’il n’arrivait pas à susciter la moindre réaction lorsqu’il tentait de lui parler, mais aussi parce qu’il avait tout simplement l’impression qu’elle était absente quand il s’adressait à elle, le regard comme voilé, le fixant sans le reconnaître. Et encore, pour pouvoir faire cette triste constatation, il eût fallu qu’elle croisât son regard – car en général, elle baissait tout simplement les yeux, pas tant parce qu’elle avait l’air de ne pas oser l’affronter, mais comme si elle n’avait littéralement même plus la force de garder la tête droite. Ce jour-là, il parvint à intercepter son regard vide pendant quelques instants, limités à la durée au cours de laquelle il la tint par les bras ; sitôt qu’il la lâcha, elle s’allongea dans le lit. Il suivit sa frêle silhouette du regard, désemparé. Il était à deux doigts de s’effondrer, lui aussi ; il avait besoin de lui parler, de lui dire ce qu’il avait sur le cœur, de partager, lui aussi, sa souffrance avec elle. Mais il savait qu’elle n’était pas en état d’entendre quoi que ce soit, et que, au vu de la situation, toute tentative de discussion était tout simplement vouée à l’échec. À plusieurs reprises, Louis ouvrit la bouche, s’apprêtant à prendre la parole, avant de se raviser, car il n’avait en réalité pas la moindre idée de ce qu’il pouvait bien dire. Il finit par soupirer, se sentant complètement impuissant, avant de se détourner de Tabby, se frottant les yeux faute de savoir quoi faire. Un silence pesant s’installa entre les deux amoureux, qui, tristement, avaient à la fois tant à exprimer et rien à se dire. Pendant un long moment, aucun d’eux ne parla, et ils restèrent là, Tabby allongée en position fœtale, recroquevillée près du bord du lit, et Louis, debout un peu plus loin, complètement perdu et aussi dépassé par la situation que sa moitié.

Il n’aurait su dire combien de temps s’était écoulé lorsque, finalement et à sa grande surprise, il entendit s’élever, dans un murmure presque inaudible, la voix de Tabitha. Il fut frappé par la douleur que transpiraient ses paroles, et sentit une boule se former dans sa gorge déjà considérablement nouée. L’espace d’un instant, Louis envisagea de s’exhorter au calme avant de se retourner, comme pris d’un réflexe masculin qui aurait eu la dent dure ; mais il avait beau tenter de rester fort pour éviter de voir Tabby sombrer davantage, il n’était plus capable de faire semblant. Lorsqu’il lui fit face, son visage trahissait sans équivoque toute sa détresse, et ses yeux étaient embués. Il était rare que Tabby verbalise sa peine, elle restait généralement mutique du matin au soir. Et l’entendre exprimer son mal-être brisait le cœur de Louis. « Mais je sais que c’est dur, je sais que c’est horrible, je vis la même chose que toi, Tabby », s’exclama-t-il, s’embarquant finalement dans le laïus qu’il avait pourtant décidé de garder pour lui, convaincu qu’elle ne serait pas capable de l’entendre. « Mais tu peux pas continuer comme ça, c’est intenable ! Chaque fois que je mets les pieds dans cet appart, je crève de peur de te retrouver morte quelque part… Tu te rends compte de ce que ça fait de te voir sur le point de te jeter du balcon ? » La voix de Louis se brisa, et il se sentit impuissant et frustré en réalisant que, comme il aurait dû s’en douter, elle ne semblait pas l’écouter. « Et je sais pas quoi faire pour toi, tu me laisses pas t’aider, tu me forces à te regarder te détruire comme si j’étais qu’un étranger qui comprend rien à ce que tu vis, mais tu comprends pas que moi aussi, je souffre ? Je souffre et je suis obligé de gérer ça complètement seul et en plus de ça, tous les jours, j’ai peur de te perdre parce que je sais très bien que t’es à deux doigts de faire une connerie ! » C’était la première fois qu’il exprimait sa frustration face à son état, lui qui avait toujours tout fait pour tenter de la préserver, soucieux de ne pas la culpabiliser alors qu’elle était déjà au fond du trou. Mais il n’arrivait plus à prendre sur lui, cette dernière frayeur lui avait fait atteindre son point de rupture, et Louis était visiblement en train de perdre les pédales. Il les perdait d’autant plus qu’il avait toujours cette épouvantable impression de ne pas réussir à se faire entendre. « Mais merde, regarde-moi au moins quand je te parle ! », s’exclama-t-il, désespéré.
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Message(#) Sujet: Re: stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) EmptyDim 09 Fév 2020, 22:45


@louis nicholson

Tabitha écouta la tirade de Louis. Pour une fois, ses paroles ne glissèrent pas sur elle comme si l’on vidait une bouteille d’eau dans la mer ; elle eut pleine conscience du sens de ses mots. Cela faisait très longtemps qu’elle ne l’avait pas vraiment écouté mais quelque chose avait cette fois-ci fermement capté son attention. L’instinct féminin, sans doute, avait ressenti que la conversation qui s’engageait allait être décisive. La détresse de Louis se faisait clairement entendre. « Mais merde, regarde-moi au moins quand je te parle ! » Cette phrase fit sursauter Tabitha. Pour faire comprendre à Louis qu’à défaut de réagir, elle l’écoutait bel et bien, elle se tourna vers lui. Au prix d’un effort incommensurable, elle se redressa même, et s’assit, le dos contre la tête du lit, les bras serrés autour des jambes repliées. Elle tremblait, sans savoir pourquoi d’abord, puis se rendit compte qu’elle pleurait toujours et que ce qu’elle prenait pour des tremblements provenait des sanglots. Ses yeux assombris par le chagrin lui dévoraient le visage, tandis qu’elle faisait maintenant face à Louis.

Elle ne voyait pas de solution à sa peine et n’en cherchait de toute façon pas. Elle était à des lieux de songer à se soigner puisqu’elle vivait le moment le plus bas de son état dépressif. Elle ne comptait ni prendre de médicaments, ni parler de sa douleur et donc encore moins consulter un psy. Tous ces débuts de solutions auquel on peut penser lorsque quelqu’un traverse une telle épreuve, Tabby n’en avait pas la moindre idée, et personne n’était là pour lui souffler ces idées à l’oreille. En effet, elle était complètement seule. Ses parents ne lui étaient d’aucune aide ; elle n’avait pas un très bon rapport avec eux depuis qu’ils avaient appris qu’elle était tombée enceinte avant de se marier, et bien qu’extrêmement peinés par la nouvelle  de la mort du bébé, ils étaient trop emplis de fierté que pour chercher à l’aider. Ils l’avaient naturellement contactée, mais Tabby n’avait pas répondu : Louis s’en était chargé et leur avait signifié qu’elle n’était pour l’instant pas en état de discuter, sans s’épancher sur son état réel. Quant aux amis de Tabitha, tout aussi désolés par la nouvelle, ils multipliaient appels et messages sans réponse mais ne savaient pas quoi faire de plus. Il est naturel que les proches se sentent impuissants face à ce genre de situation, tout aussi délicate qu’inimaginable. Bien souvent, ils sont loin d’imaginer ce qu’il se passe vraiment dans l’intimité d’un chagrin, et après avoir dit « c’est une passade, ça ira mieux », ne cherchent pas à creuser plus puis se retirent dans un silence poli et solennel. Bref, par un cycle tortueux, le drame avait entraîné une solitude et cette solitude entretenait un isolement plus profond encore, qui laissait Tabitha cacochyme et démunie dans son malheur.

Déjà largement délaissée, Louis représentait la dernière roue de secours de Tabitha mais lui était, en même temps, d’aucune aide. Il gérait le deuil à sa façon, c’est-à-dire dans le dévouement à son travail et, soit dans le mutisme, soit dans une colère passive agressive. Par son comportement, il était dur de savoir si Louis se rendait compte que sa petite amie avait besoin d’un support, voire même d’une réelle aide médicale. Finalement, tout ce qu’il venait de balancer semblait signifier que oui, en effet, il voyait l’agonie dans laquelle était plongée Tabitha. Mais cette dernière ne comprenait pas où il voulait en venir, à lui cracher sa frustration au visage. « Je suis incapable de me battre, là maintenant. » dit Tabitha, la voix toujours tremblante. Son propos contenait plusieurs sens. Déjà, elle n’était pas prête à se disputer avec Louis, et c’était vraisemblablement la tournure que prenait l’échange. Ensuite, elle n’avait bien sûr pas la force de se battre pour aller mieux car la dépression était plus forte qu’elle, à ce moment précis de son existence tout du moins. Et finalement, si son couple était en danger, elle n’aurait absolument pas à cœur d’essayer de le sauver. Tabitha n’avait aucune idée de la façon dont Louis interpréterait ça, peut-être le prendrait-il juste dans son sens général mais qu’importe, car elle n’avait pas non plus l’énergie de faire de longs discours, d’expliquer en détail ce qu’elle voulait dire, de se justifier, de se défendre en long et en large. Louis s’était lancé sur une route qui la dépassait complètement et tout l’effort dont elle était capable, elle l’avait déjà dépensé dans le fait de réussir à se mettre assise et de lui répondre les yeux dans les yeux. D’ailleurs, ç’en était déjà trop pour elle, elle dévia son regard vers le côté et fixa sans le voir un cadre accroché au mur. Louis et elle l’appelaient « le cadre à souvenirs » car ils y avaient glissé des tas de petites choses qui marquaient des moments de leur vie à deux, des places de concert, des portraits des photomatons, des mots d’amour marqués sur des post-it. D’ordinaire, à chaque fois qu’elle regardait ce cadre, souvent au moment de se coucher ou de se lever, Tabitha souriait et son cœur se réchauffait de bonheur. Ils avaient vécu une relation incroyable, pleine d’actions, passionnée, fougueuse, où chaque moment de vie remémoré par le cadre avait été une aventure folle. Mais là, elle jaugeait le tableau à souvenirs sans l’ombre d’une expression sur le visage.

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Message(#) Sujet: Re: stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) EmptyLun 02 Mar 2020, 22:25


@Tabitha Todd
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L’apathie de Tabby à laquelle venaient se heurter chacune des paroles de Louis suscitait chez ce dernier un désespoir sans nom. Comme il avait pu s’en douter avant même de prendre la parole, elle resta muette et aréactive face à sa détresse, et il ne savait plus quoi inventer pour que cela change. Il était à deux doigts de prendre la fuite comme il le faisait bien trop souvent ces derniers temps, de laisser cet appartement funeste derrière lui et de tenter de se changer les idées quand bien même son malheur, aussi profond que tenace, ne laissait pas une minute de répit à son esprit épuisé. Mais, avant d’avoir pu se résoudre à commettre cet acte d’une lâcheté crasse dont il ressentait pourtant, et horriblement, un intense besoin, il remarqua que quelque chose avait changé chez Tabby. Ce n’était pas grand-chose : elle s’était redressée dans le lit, tremblant comme une feuille, et s’était efforcée de soutenir son regard tourmenté. Les yeux de Tabby brillaient de larmes qui coulaient silencieusement le long de ses joues, d’ordinaire pleines et rosées mais aujourd’hui émaciées, et Louis se haït d’avoir envisagé de l’abandonner là alors qu’elle avait besoin de lui. Il s’agissait d’ailleurs là d’un dilemme auquel il n’avait jamais réellement eu conscience d’être confronté : sa santé mentale semblait dépendre de son départ de ce foyer devenu toxique, mais, de toute évidence, ce départ risquait d’asséner le coup de grâce à Tabitha, dont la vie ne tenait plus qu’à un fil affreusement effiloché. Comment pouvait-il envisager de la laisser en plan après tout ce qu’elle avait traversé ? Mais, surtout, comment pouvait-il espérer ne pas finir dans le même état qu’elle s’il restait à ses côtés ?

Les larmes de Tabby eurent raison de son accès de colère et de frustration, qu’il refoula, comme il le faisait quotidiennement depuis ses semaines, pour la rejoindre et s’asseoir près d’elle, au bord du lit. La phrase qui s’échappa de ses lèvres suscita un pincement au cœur de Louis, qui secoua la tête avant de poser une paume sur sa joue et d’essuyer une larme du bout du pouce. « Je suis pas là pour me battre contre toi », souffla-t-il, profondément peiné par son état, s’efforçant de faire transparaître autant de douceur que possible dans sa voix devenue presque aussi tremblante que celle de Tabby. « Tu dois comprendre que je veux pas ça, je suis là pour qu’on se batte ensemble contre ce qui nous arrive. Je sais que t’en as pas la force là maintenant, et je suis là pour essayer de t’en donner, mais il faut que tu m’en laisses la chance, Tabs… » La voix de Louis se brisa, et il baissa les yeux, désespéré de trouver les mots justes qui parviendraient enfin à se frayer un chemin jusqu’à son esprit étourdi, maintenant qu’elle semblait enfin décidée à l’entendre. « On peut pas continuer comme ça, on va devenir fous tous les deux si on baisse les bras. Mais je peux pas t’aider si tu continues à m’exclure comme ça », souffla-t-il. L’espoir fou de parvenir à lui faire entendre la raison s’empara de lui, comme s’il n’avait pas vécu ses vingt dernières tentatives qui s’étaient toutes soldées par des échecs cuisants.

Mais c’était plus fort que Louis – il avait beau être frustré, furieux et anéanti face à la façon dont elle se laissait dépérir, il n’en restait pas moins fou de Tabitha et, naïvement, il était persuadé qu’il ferait le nécessaire pour l’aider à s’en sortir jusqu’à ce qu’il y parvienne. Loin d’envisager la possibilité qu’il n’était pas capable de faire faire aux autres ce qu’eux voulait pour eux, il se complaisait dans l’illusion qu’à force de persévérance, il obtiendrait gain de cause. Pourtant, il savait que parler d’espoir et de combat à une personne dépressive revenait à chanter la sérénade à un sourd, mais les œillères immenses qu’il se forçait à porter entre les moments de trop-plein où il finissait par perdre les pédales l’empêchaient de voir qu’aucun de ses discours ne parviendrait à réparer ce qui était détruit jusqu’à l’os. La mort de Jimmy avait gangréné leur relation, les éloignant là où le chagrin aurait pu les rapprocher, les enfonçant là où un soutien mutuel leur aurait permis de garder la tête au-dessus de l’eau. À présent, ils étaient presque deux étrangers, chacun évoluant silencieusement et tristement de son côté, échangeant des étreintes dans lesquels aucun d’eux ne parvenait plus à transmettre ce qu’il ressentait et essuyant des larmes qu’aucun d’eux ne savait comment arrêter. Au fond de lui, Louis le savait pertinemment, et probablement n’était-ce pas uniquement pour fuir le malheur évident qui hantait cet appartement qu’il sortait dès qu’il en avait l’occasion, mais aussi pour ne pas avoir à affronter la mort certaine vers laquelle se précipitait sa relation avec Tabby. Pour la première fois depuis le début de leur relation, celle-ci ne semblait plus avoir de sens. Tout avait été d’une intensité à peine imaginable entre eux, depuis le premier jour : leur histoire n’avait jamais rien été d’autre que passionnelle et éclatante. Leurs baisers, leurs rires comme leurs pleurs et leurs colères avaient tous eu en commun une ardeur et une fougue qu’aucun d’eux n’avait jamais connues auparavant – et aujourd’hui, c’était la première fois qu’ils n’étaient liés que par un vide profond et désolant. « Je t’en prie, Tabs, on a besoin l’un de l’autre, plus que jamais… » Leurs émotions d’autrefois étaient d’autant plus intenses qu’elles étaient désormais absentes, et c’était là l’horrible réalité que Louis s’efforçait d’occulter mais ne parvenait plus réellement à ignorer : il ne parviendrait pas à la convaincre aujourd’hui avec des paroles qu’il n’avait jamais eu besoin de formuler autrefois, lorsqu’un seul regard leur suffisait pour tout se dire.
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Message(#) Sujet: Re: stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) EmptyMer 04 Mar 2020, 19:52


@louis nicholson

Bien qu’elle eût su faire preuve d’une maturité avancée dès son plus jeune âge, Tabitha restait une gamine. Elle n’avait que vingt-trois ans. A l’âge où d’autres sont en plein dans leurs années folles, enchainant soirées étudiantes et expériences inédites, Tabitha avait déjà rangé sa vie. Elle avait brillamment terminé les études il y a plus d’un an déjà, avait immédiatement trouvé un travail et vivait une histoire formidable avec son première amour… Bien qu’imprévue, la grossesse s’était déroulée avec fluidité, et jour après jour Tabby avait construit l’image mentale de ce que serait le reste de sa vie, à savoir une vie heureuse à trois, pour l'instant, dont feraient partie Louis et Jimmy. Elle avait vaillamment affronté ces neufs mois ainsi que le douloureux accouchement qui les avait suivis. Malgré sa nature très sensible, Tabitha n’avait montré aucun signe de faiblesse durant cette période et Louis n’avait d’ailleurs pas manqué de lui répéter qu’elle était une sacrée warrior et qu'il était sacrément fière d'elle. Mais la mort de son si jeune fils avait été un tel choc, tant par son caractère dramatique qu’inattendu, que toute la force mentale et physique dont elle avait un jour fait preuve semblait n’être un lointain souvenir. La perte d'un enfant est sans conteste une lourde épreuve pour n’importe quel être humain, mais pour les épaules de la jeune et frêle Tabitha, du haut de son mètre cinquante-sept et de ses cinquante kilos, c’était comme si le ciel entier lui était tombé sur la tête. Elle n’avait que vingt-trois ans, oui, et c’était maintenant comme si elle était redevenue un bébé. Elle ne savait plus manger, se laver, bref, se comporter normalement et elle avait plus que jamais besoin d’assistance. Jusque-là, Louis n’avait pas su lui apporter cette assistance mais c’était largement compréhensible compte tenu du fait que même s’il avait l’air bien plus gaillard, lui aussi n'était qu'un pauvre gamin. A leur âge ils n’avaient pas encore connu les atrocités de la vie et pire encore, les dernières années passées ensemble les avaient enfermés dans une bulle d’amour qui ressemblait bien plus comme un conte de fée qu'à la vie réelle. Peut-être qu’à cause de ça, la douleur était plus intense encore, car ils n’auraient jamais cru possible qu’il puisse exister des balles assez puissantes pour transpercer leur bulle. Mais le cocon avait volé en éclat et à l’instar d’un verre brisé, il serait vain d’essayer de recoller les morceaux et de s'attendre à retrouver sa sublime d’antan.

A ce moment-là et dans la pénombre de leur chambre, ils avaient l’air particulièrement misérables. Tous les deux transpiraient le désespoir différemment, Tabitha d’une façon peut-être un peu plus évidente de par son allure. Louis était en train d’exprimer clairement son inquiétude, de mettre des mots sur ce qu'il ressentait. Contrairement à Tabitha, il avait l’air de vouloir de s’en sortir, c’est du moins ce qu’elle crut discerner dans ses paroles. Mais elle ne le comprenait pas. Comment ça, ils avaient besoin l’un de l’autre ? La seule chose dont elle avait besoin, c’était de prendre son bébé dans les bras et de respirer l’odeur de ses fins cheveux noirs et doux. Elle avait besoin de sentir le petit battement de son cœur qui rentrait en synchronisation avec le sien aussitôt qu’elle le blottissait contre sa poitrine. Elle avait besoin de le regarder dormir paisiblement jusqu’à en tomber elle-même de fatigue. Bref, tout ce dont elle avait besoin était résolument hors de sa portée et le resterait à jamais. Les yeux de Louis la dévisageaient tandis que Tabitha avait vu défiler dans sa mémoire les flashbacks de tous les - bien trop courts - moments de bonheur partagés avec son fils. Lorsqu’elle revint à elle, si l’on put dire, Louis n’avait pas bougé d’un millimètre, attendant désespérément une réponse.  « Il n’y a rien à faire, Lou. » L’utilisation de ce surnom avait pour but de lui signifier qu’elle avait conscience de s’adresser à lui, mais surtout d’accentuer le caractère immuable de son énoncé.  Non, il n’y avait strictement rien à faire, Tabitha en était persuadée et elle ne voyait sincèrement pas en quoi elle avait besoin de lui ou lui d’elle. « J’ai besoin de lui. » acheva-t-elle avant de respirer un grand coup, essoufflée comme après un marathon. Les souvenirs de Jimmy lui donnaient chaud et faisait monter en flèche les battements de son cœur. Elle avait tous les symptômes d’une crise de panique. Elle ne savait plus quoi faire pendant de longues secondes durant lesquelles des gouttes avaient perlé sur le haut de son front. Elle eut du mal à respirer encore un moment et lorsque tout revint plus ou moins à la normale, elle remarqua que Louis lui avait pris les mains. Elle avait ce genre de crises plusieurs fois par jour, souvent juste après avoir pensé à Jimmy. Généralement, les crises ne surgissaient pas après avoir bu de l’alcool, raison pour laquelle elle enchaînait les bouteilles jusqu’à en tomber de sommeil. Encore tremblante, Tabitha retrouva une respiration régulière. Éreintée, elle tomba mollement en avant, comme une poupée de chiffon, dans les bras de Louis qui la soutint avec vigueur.


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Message(#) Sujet: Re: stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) EmptyDim 29 Mar 2020, 06:52


@Tabitha Todd
today my forest is dark. the trees are sad
and all the butterflies have broken wings.

La réaction de Tabitha fut prévisible, mais n’en demeura pas moins douloureuse pour Louis, dont les propos étaient venus, une nouvelle fois, se heurter à un refus catégorique, répétitif mais auquel il restait incapable de s’habituer. Face à l’étendue de l’accablement de Tabby, ses paroles ne valaient guère mieux qu’un discours d’encouragement d’entraîneur de football de dernière division, et Louis se demanda comment il avait bien pu penser la convaincre, comme à chaque fois qu’il avait essayé de trouver le moyen d’atteindre et qu’il avait constaté que ses efforts étaient vains. Tabitha était engloutie par un défaitisme auquel elle semblait ignorer toutes les alternatives, et cette situation était tellement contraire à tout ce qu’elle avait toujours incarné que Louis ignorait comment l’en sortir. Il l’avait toujours connue combative, capable de soulever des montagnes et de se ruer dans l’adversité sans un regard par-dessus son épaule. Pendant ses études, pour lesquelles elle avait fourni un travail acharné et avait bûché sans relâche afin de fournir l’excellence dans des délais parfois impossibles, présidant année après année le peloton de tête de sa promotion. Face à ses parents, dont le conservatisme lui donna du fil à retordre à de nombreuses reprises, particulièrement lors de l’annonce de l’arrivée d’un enfant sans l’ombre d’un mariage à l’horizon, mais avec lesquels elle parvenait systématiquement à éviter les catastrophes diplomatiques tout en parvenant à rester fidèle à ses propres convictions. Et, plus que jamais, lors de sa grossesse, dont Louis n’avait pu que deviner les inconforts, dont elle ne se plaignait pour ainsi dire jamais, tant lorsqu’elle avait le corps secoué par des hauts le cœur à longueur de journée que lorsqu’elle avait pratiquement dû élire domicile aux toilettes après que sa vessie avait visiblement décidé d’être démise de ses fonctions de réservoir. Oui, depuis qu’il l’avait rencontrée pour la première fois, Louis avait toujours connu Tabby courageuse, déterminée et dotée d’un optimisme à toute épreuve. Et, désormais, le problème n’était pas tant qu’elle avait perdu cette combativité qui lui était si caractéristique, mais qu’elle n’avait, de toute évidence, pas la moindre envie de retrouver ce courage sans lequel elle n’était tout simplement plus elle-même.

Louis poussa un petit soupir, comme pour lui signifier qu’il ne pouvait faire autrement que de la comprendre mais qu’il aurait voulu être capable de la convaincre de ses propos. Il n’était pas blessé par sa réponse, mais celle-ci n’en demeurait pas moins douloureuse, car il savait que Tabitha était profondément incapable de lui en fournir une autre. Louis ferma les yeux lorsqu’elle mentionna Jimmy, dont la simple évocation était atrocement pénible. Derrière ses paupières closes, il sentit ses yeux s’embuer et les larmes perler à leurs coins, avant de paresseusement démarrer leur course le long de ses joues mal rasées. « Je sais, Tabs… », murmura-t-il doucement, avant d’enserrer avec douceur ses mains dans les siennes. « Moi aussi », ajouta-t-il, la voix brisée par la douleur. Dans un élan de cruauté, son esprit accablé le projeta au jour merveilleux de la naissance de son fils. Louis se rappela la franche terreur qui l’avait habité dès l’instant où Tabby avait perdu les eaux, et où s’était matérialisée définitivement sa paternité imminente ; sa panique contrastait avec l’impressionnante sérénité de sa moitié, qui avait commencé par le rassurer avant de finir, lorsque la douleur des contractions finit par avoir raison de sa patience, par lui intimer de se ressaisir et de lui rappeler qu’elle avait besoin d’encouragements bien plus que lui. L’angoisse et les milliards de questions qui avaient fusé dans l’esprit dépassé de Louis s’étaient évanouies instantanément lorsque, au bout de quelques heures, la sage-femme lui avait tendu Jimmy. Instantanément, il était devenu fou d’amour de cette petite créature recouverte de résidus peu ragoutants et s’époumonant jusqu’à lui percer les tympans. Louis se rappela avoir été frappé d’une sérénité comme il n’en avait jamais connue, et comme il n’en connaîtrait certainement plus jamais, au moment où il avait serré son fils dans ses bras pour la première fois, peau contre peau, lui murmurant un flot ininterrompu de paroles d’amour. Jimmy n’avait pas eu besoin de plus longtemps pour creuser une place énorme dans le cœur de Louis, et aujourd’hui, cet espace se retrouvait désespérément vide et froid, et Louis n’avait plus que ses yeux pour pleurer, comme cela lui arrivait à chaque fois que l’un deux mentionnait leur fils.

Louis ne tarda pas à rouvrir ses yeux embués, rapidement alerté par la respiration devenue haletante de Tabitha - il était quotidiennement le témoin de ces accès de panique déclenchés systématiquement par l’évocation de Jimmy. Avec douceur, il lui caressa les mains du bout des pouces, tout en lui chuchotant des mots tendres et rassurants jusqu’à ce qu’il entende sa respiration ralentir. Il la serra contre lui lorsqu’elle se laissa tomber, plantant un baiser sur le haut de son crâne avant de la bercer avec douceur tout en continuant à lui parler à voix basse pendant quelques instants. Leur étreinte se poursuivit ensuite dans le silence, sans qu’il sût dire si c’était pendant deux minutes ou une demi-heure. Au terme de ce laps de temps, pendant lequel Louis ressassa la maigre conversation qui venait d’avoir lieu, ainsi que toutes les précédentes, il parvint à la conclusion que si elle n’était disposée à fournir aucun effort, c’était à lui de trouver la force de les faire à sa place jusqu’au jour où elle en serait capable par ses propres moyens. Il n’obtiendrait pas la collaboration qu’il essayait de lui vendre, et force lui était d’accepter qu’en attendant, il devrait collaborer pour deux.
« On va aller faire un tour, tous les deux », annonça-t-il finalement, sans laisser de place aux objections. « Viens, mon cœur, on va te rafraîchir et après on va aller au parc juste en bas, toi et moi. Et si t’as pas la force de marcher, tu feras la balade sur mon dos », murmura-t-il avant de se lever tout en la maintenant serrée dans ses bras. D’ordinaire, il la soulevait sans l’ombre d’un effort, mais désormais, elle ne semblait peser guère plus qu’une plume. Il la transporta à la façon d’un couple de nouveaux mariés jusque dans la salle de bain, l’installa sur le rebord de la baignoire pour la déshabiller, frappé de voir combien elle avait maigri mais se gardant bien de laisser transparaître la moindre réaction, puis la souleva à nouveau pour la déposer avec douceur dans la baignoire. Après s’être assuré de température de l’eau, il plaça le pommeau de douche au-dessus de Tabby avant de s’affairer à la laver des cheveux aux orteils avec une douceur extrême. Depuis qu’elle allait mal, Tabby semblait fuir tout contact physique comme la peste, mais il était évident qu’elle en avait cruellement besoin lorsque Louis sentit se détendre un à un chacun des muscles crispés au maximum, alors qu’il massait prudemment chaque centimètre carré de son corps malmené.

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Message(#) Sujet: Re: stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) stop looking for happiness in the same place you lost it (tabby) EmptyMar 31 Mar 2020, 16:54


@louis nicholson

Tabitha occupait une place très étroite dans la baignoire, son corps chétif recroquevillé sur lui-même. Quelques mois plus tôt, elle s’était trouvée au même endroit, une bonne vingtaine de kilos en plus, son ventre rond occupant les trois quarts de l’espace. Louis avait réussi à se caser en face d’elle, les jambes tordues, dans une position très inconfortable pour ne pas faire de mal à sa copine. Elle avait insisté pour qu’ils prennent un bain mousseux ensemble, en amoureux, malgré ses sept mois de grossesse. Louis avait peut-être trouvé l’idée saugrenue, mais si c’était le cas, il l’avait bien caché et avait accepté le challenge avec bonne humeur. Ils avaient rempli la baignoire d’une eau tiède, vidé la moitié d’un flacon d’un gel douche à la cerise, et s’étaient plongé dedans en riant tant ils étaient tous les deux empotés : Tabitha avait eu du mal à passer les jambes par-dessus le rebord et Louis avait mis cinq bonnes minutes avant de trouver une position adéquate. Mais une fois dedans, la mousse arrivait presque au niveau de leur visage et l’eau avait tellement monté à leur entrée qu’elle menaçait dangereusement d’inonder le sol de la salle de bain. Alors, ils avait été pris d’un fou rire interminable, entrecoupé par Tabitha qui avait sorti, entre deux hoquets : « Arrê…te… de rire… je vais accoucher dans… la baignoire. », ce qui leur avait valu de repartir de plus belle dans les éclats.

Ce moment semblait avoir eu lieu il y a une éternité. Tabitha sentait à peine le contact de l’eau sur la peau, tandis que Louis s’affairait à la laver avec une délicatesse extrême. Elle avait les cheveux dans un état lamentable. Ses longues dreadlocks noires demandaient d’ordinaire une attention toute particulière, au risque de ressembler rapidement à des bouts de serpillères informes. Elle n’en avait pas pris soin depuis des semaines, se contentait de les laisser pendre sur la tête sans y toucher, sauf lorsqu’ils la gênaient vraiment et qu’elle les attachait négligemment dans un chignon haut et brouillon. Ses cheveux ne ressemblaient donc plus à rien, mais ils eurent au moins l’avantage de sentir bons après le passage appliqué des mains de Louis. Le corps de Tabitha s’était considérablement détendu après cette douche assistée. La douleur émotionnelle avait créé un certain nombre de boules de tension, en particulier au niveau du dos, si crispé qu’il en était devenu raide comme une planche de bois. Seulement maintenant que ça allait un peu mieux Tabitha remarquait qu’elle avait mal partout. En sortant de la baignoire, la souffrance physique s’était apaisée et elle eut plus de facilité à suivre Louis dans le mouvement. Elle resta cependant immobile pendant qu’il la séchait avec une serviette de bain. Une fois cela fait, il la tint par la hanche pour la guider jusqu’à la chambre, où elle s’assit docilement sur le lit pendant qu’il cherchait dans l’armoire des vêtements propres. Il cherchait sans doute les vêtements les plus confortables possibles mais qui restaient décents pour le monde extérieur. Elle enfila donc un legging, qu’elle mettait auparavant pour ses cours de yoga, dont la matière était très agréable. Heureusement qu’il était d’ordinaire très serré puisqu’elle avait perdu au moins deux tailles par rapport à avant sa grossesse, elle flottait donc légèrement dedans sans pour autant qu’il lui tombe aux chevilles. Louis lui avait aussi donné un tee-shirt blanc, lui bien trop large pour sa carrure, avec un sweat à capuche bordeaux par-dessus. Elle avait décidé de ne pas émettre de résistance et d’accorder cette sortie à Louis. Elle avait malgré tout compris que c’était important pour lui, que ça lui tenait même à cœur. Il lui enfila des baskets, et lorsqu’il s’apprêta à lui faire aussi les lacets, elle le repoussa doucement. « Laisse. » Puis Tabitha se pencha mollement pour faire elle-même ses lacets de chaussure. L’opération dura un poil longtemps, mais elle réussit puis suivit Louis jusqu’à la porte, s’apprêtant à sortir de l’appartement pour la première fois depuis… Elle n’en n’avait aucune idée. Longtemps.

La nuit était tombée sur Brisbane. Si Tabitha avait donné son accord tacite pour cette petite balade, elle ne souhaitait néanmoins pas croiser le regard de quiconque. Elle avait donc mis la capuche de son sweat sur la tête, dissimulant la moitié de son visage. « Tu peux… ? » demanda-t-elle à Louis, montrant du doigt la capuche du sweat que lui portait, le même que le sien mais en noir. Il comprit sans qu’elle n’eut besoin de terminer sa phrase. Il enfila lui aussi sa capuche et glissa son bras sous celui de Tabitha et mis les mains dans les poches. A présent, ils pouvaient marcher incognito dans la rue. Ils vivaient dans le quartier depuis un moment et Tabitha craignait de croiser des visages familiers et qu’ils aient à s’arrêter, à discuter. La nouvelle du décès de Jimmy était sûrement arrivé aux oreilles de tous et Tabitha n’avait pas envie d’endurer des conversations gênantes et encore moins de supporter les regards larmoyants et autres caresses dans le dos emplis de compassion. Sans qu’elle eut besoin de l’exprimer, Louis avait compris la préoccupation de Tabitha et il la partageait sans nul doute. Ils avaient besoin du grand air certes, mais seuls. Du coup, Louis adaptait son itinéraire, prenant soin d’éviter les rues les plus animées, celles des bars et des restaurants qui grouillaient sûrement de monde en cette belle soirée. Ils passaient par des zones plus calmes, résidentielles, avançant lentement et en silence. Au bout de longues minutes à faire des zig zag dans la ville, ils commençaient à sentir plus intensément l’odeur salée de l’océan et la brise se faisait plus intense. Louis emmenait Tabitha au bord de l’eau. Il savait que, comme beaucoup d’humains, la mer faisait le plus grand bien à Tabitha. C’était le lieu de prédilection de toute personne en quête d’un air pur et reposant. Ils avaient l’habitude d’y aller régulièrement, soit pour se prélasser sur la plage en mangeant un bout, soit pour se baigner et à l’occasion, faire une séance de surf. Ils y avaient eu de bonnes tranches de rire, comme la fois où un immense ibis avait essayé de leur voler leur sandwich, et aussi quelques disputes épiques, dont une qui avait valu à Tabitha de partir en prenant la voiture, laissant Louis seul et désemparé sur le sable. En effet, leur relation, même au top de sa forme, n’était pas que des moments mignons et romantiques. Elle était intense, passionnelle, parfois rythmée par des disputes énormes et disproportionnées. Après la tempête passée, ils se retrouvaient, tombaient dans les bras l’un de l’autre en s’excusant d’avoir dépassé les limites et se rassuraient en disant que ces moments maintenaient leur relation en vie. Maintenant, leur relation n’était rythmée par rien d’autre que par un chagrin monotone et c’était quelque chose dont ils avaient nullement l’habitude.


FIN
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