Il n’était pas au boulot et pourtant le lieutenant ne pouvait pas lâcher l’affaire. Il n’aurait pas dû être là, il n’aurait pas dû attendre le suspect devant chez lui pour essayer de trouver un élément qui pourrait lui ouvrir des portes pour un mandat potentiel. Gregory s’était retrouvé en tenue de civil devant la maison du supposé criminel, attendant qu’il rentre chez lui. Il ne savait pas bien si la musique de la fête foraine d’en face l’agaçait, ou si cela lui permettait de focaliser son attention sur autre chose. Il adorait les fêtes foraines étant gamin. Il y allait souvent avec Maeve, ils passaient toujours d’excellents moment sur les auto-tamponneuses après s’être empiffrés de barbe à papa et de pomme d’amour. La musique – qui passait en boucle dans le petit village nouvellement formé par ces grandes attractions colorées – leur restait en tête pendant plusieurs jours. Ils n’avaient alors qu’une hâte, c’était d’y retourner. Des beaux souvenirs envahir les pensées de Greg, avant… Avant qu’elle ne devienne comme ça, Maeve.

La musique qui provenait du petit village dans le parc le tentait. Greg avait envie d’y retourner, juste pour l’ambiance, juste pour déambuler entre les stands en bouffant des bonbons jusqu’à en être écœuré. Il n’avait de toute façon pas le droit d’être dans sa voiture et d’attendre ce bonhomme qui n’arriverait sans doute pas avant la tombée de la nuit. C’est comme ça qu’il réussit à se convaincre de sortir de sa bagnole, de décamper, de lâcher le boulot pour son dernier jour de weekend. Il reprend du service demain, cette affaire pouvait attendre, il fallait qu’il déconnecte. Lieutenant Morton laissa tout de même sa voiture garée en face de la maison du suspect, et se décida à marcher jusqu’à la foire. La musique redondante guidait ses pas, et il n’était pas encore arrivé qu’il pouvait déjà sentir les effluves de gras et de sucré qui émanaient des stands de sucreries. Les rires et les cris des gamins sur les attractions lui réchauffèrent un peu le cœur, et il se dit qu’il avait bien fait de venir ici.

Greg n’avait pas remis un pied dans une fête foraine depuis son adolescence, et l’ambiance n’avait pas vraiment changé. Les attractions étaient certes bien plus évoluées, mais les stands de bouffe étalaient toujours en premier plan toutes les conneries sucrées qui donnaient des caries. Un sourire vint étirer ses lippes. Il avait entendu le son des carabines dont le plomb venait éclater les ballons. Gamin, il n’était pas très bon au stand de tir. Maeve le battait toujours à plate couture, mais aujourd’hui, monsieur était un flic, un très bon même. Des cours de tirs, il en avait pris. Gregory dirigea instinctivement ses pas vers les PAF des ballons et observa la jeune femme qui semblait bien se débrouiller. Que venait-elle fait ici toute seule ? Elle avait l’air déterminée à plumer le forain de ses peluches. Bien, une adversaire de taille, pensa-t-il. Il lui restait un ballon à éclater pour pouvoir gagner sa licorne, mais Greg ne voulait pas la laisser partir. Il l’interrompit, tout juste avant qu’elle ne tire, de façon à la déstabiliser. « Waouh », s’exclama-t-il suffisamment fort.

La jeune femme rata évidemment sa cible, satisfaisant notre grand joueur. « Oh excusez-moi, je ne voulais pas vous faire perdre », mentit-il en levant les mains au ciel, sourire taquin sur ses lèvres. « Je pensais juste qu’un peu de compétition rendrait la victoire un peu plus… intéressante. » Il sortit un billet de cinq dollars qu’il posa sur la planche qui séparait les joueurs de l’intérieur du stand. « Je vous prends deux parties monsieur. », dit Gregory au forain. Il prit la carabine que ce dernier lui tendit et se plaça derrière son arme, jambes écartées et en position de tir. « Si je gagne la partie, c’est moi qui remporte la licorne. T’es partante ? » Il lui jeta un coup d’œil au-dessus de l’objet qu’il avait collé à sa joue, et sourit narquoisement en attendant la réponse de la jeune femme.

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« Je ne pense pas non. » Oh, la jeune femme se montrait résistante. Habituellement, les femmes ne refusaient jamais de se faire aborder par Greg, et il fut un peu surpris de cette agressivité. Il se justifia et tenta de se faire pardonner en offrant une nouvelle partie à la demoiselle. Le quarantenaire cherchait d’abord à la provoquer pour son propre plaisir, pour qu’il défie quelqu’un de son niveau, les jeux à la fête foraine sont tellement plus drôles quand il y a une concurrence. Mais quand son regard croisa celui de la jeune femme, il s’était alors fait la réflexion de l’avoir déjà vue quelque part, et s’était mis au défi d’en savoir plus sur elle et ses beaux yeux. Le forain prit d’ailleurs son parti, mais plus par soulagement de potentiellement garder sa licorne que par solidarité. « Je ne refuse jamais un défi. » La brune semblait déterminée à gagner, et cela ne déplut pas le lieutenant.

Satisfait, il se concentra et plaça son regard derrière le viseur. Il savait qu’avec ces carabines, il fallait trouver la combine pour toucher sa cible, mais il ne se souvenait plus de la façon dont il fallait procéder. Son attention fut perturbée par la jeune femme qui l’interpela « Mais vous ne voulez remporter que la licorne ? » Gregory détourna le regard du ballon pour plonger ses yeux dans ceux de la jeune femme. Si je pouvais remporter la perdante avec ça ne me déplairait pas, pensa-t-il. Il ne sait pas si son regard avait fait changer la vision des choses de la brune, mais elle avait l’air plus ouverte, voire même entreprenante. « Nous devrions rendre le jeu un peu plus...intéressant, qu'en pensez-vous ? » Elle avait lu dans ses pensées, et il ne pouvait que s’en réjouir, enfin c’est ce qu’il pensait. Ne se laissant pas perturber, il se replaça derrière son viseur, inspira, bloqua sa respiration et tira. PAF, le plomb venait d’éclater un ballon. Soulagé de ne pas avoir perdu la main, il ne se cacha plus derrière son arme, se redressa, et s’adressa à la jeune femme. « Je vous écoute, que me proposez-vous ? » Il ponctua sa question d’un sourire de charmeur, celui qu’il ressortait le soir dans les bars.

La jeune femme reprit la même attitude que celle que Gregory venait d’avoir, ne répondant pas tout de suite à sa question mais se concentrant sur sa cible. Se sentant permis, le quarantenaire en profita pour dévisager les courbes de la jeune femme. Il l’a trouvait réellement attirante, mais savait que ce n’était pas sa place de lui faire des avances si elle ne répondait pas. Replaçant son regard sur le visage de la jeune femme, le lieutenant avait vraiment l’impression de l’avoir déjà vue. Il observa ses lèvres à la recherche d’indices. Les aurait-il déjà embrassées ? s’interrogea-t-il. Il n’eut pas le temps de trouver la réponse à sa question, elle avait elle-aussi éclaté un ballon, et lui faisait désormais face.

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Greg aimait le flirt, il aimait provoquer, répondre, entreprendre. Cette jeune femme semblait ouverte à ses propositions, et il prenait un malin plaisir à jouer avec elle. Le quarantenaire connaissait l’effet que sa carrure imposait, mais il utilisait surtout son regard mystérieux de ténébreux pour arriver à ses fins. Ce bel homme savait user de ses charmes, emprisonnant ses proies dans son filet sans qu’elles ne s’en aperçoivent. Cette description pouvait s’apparenter à celle d’un psychopathe attaquant ses victimes, et au fond Gregory n’était pas si différent de ces pourritures. Il les amenait à lui pour son propre plaisir, il manipulait les mots pour les attirer à lui, et la seule chose qui ne le faisait pas passer de l’autre côté des barreaux, c’est le fait qu’il ne les tuait pas à la fin. Au lieu de ça, il s’échappait de leurs draps chauds pour ne jamais réapparaître, justifiant ses promesses alcoolisées par sa solitude et sa haine de l’amour. Aujourd’hui, il n’était pas dans son endroit de prédilection pour draguer, mais aujourd’hui il se retrouvait face à des ballons à éclater devant une belle brune aux courbes fines qui lui faisait clairement des avances.

« Que diriez-vous du fait que le perdant soit à la merci du gagnant pour le reste de la journée ? » Ce challenge lui plaisait. « Le gagnant choisit les activités, le perdant l'accompagne et règle. Et ce pour le reste de la journée, jusqu'à ce que nous décidions de terminer l'accord. » Le barbu haussa un sourcil d’amusement, et posa le cul de sa carabine sur la planche pour mieux observer celle qui lui faisait face. Il avait l’allure d’un cow-boy à qui on venait de proposer un duel qu’il était certain de remporter. Il se replaça derrière le viseur, sourire en coin. « ah, et ai-je oublié de préciser que ceci ne s'étant pas qu'à la fête foraine ? » Il avait du mal à retenir son expression joueuse, et ses lippes s’étirèrent d’autant plus. Il répondit après son premier tir réussi « Deal. » Le plomb vint éclater une nouvelle fois un autre ballon « Préparez-vous à vider votre portefeuille parce que je suis sur la bonne voie pour gagner. » Gregory éclata deux autres ballons, laissant le dernier voler seul dans sa cage. Il se redressa pour inviter la brune à réaliser ses tirs, choisissant volontairement de garder le dernier ballon en guise d’ultime défi et de provocation.

« Au final vous êtes arrivé à pic, vous allez pouvoir me distraire car je n'avais rien prévu de spécial. D'ailleurs, j'espère que vous n'avez rien prévu de votre soirée parce que j'ai déjà des idées de ce que j'aimerais vous faire faire. » Le lieutenant échappa un petit rire. Elle allait droit au but, et il adorait ça. « J’ai tout mon temps devant moi ma petite dame. » affirma-t-il d’une voix suave. « En revanche, j’aimerais bien savoir combien de ballons vous allez rater. » la charia-t-il en montrant de son menton la cage qui contenait les ballons. Il la provoquait en tentant de la déstabiliser. Elle ne fut pas perturbée et éclata tous ses ballons, sauf le dernier. « Bien, il ne vous en reste plus qu’un, tout comme moi » siffla-t-il. « On tire ensemble à trois ? » Il se plaça derrière la planche, prêt à exploser le dernier ballon qui lui restait. Le lieutenant se concentra sur sa respiration et sur son cœur qui battait un peu trop vite d’excitation. Il prit une grande inspiration avant de compter à voix haute « Un… Deux… » Il bloqua l’air dans ses poumons une dernière fois. « …Trois. » Gregory ne savait pas si son excès de confiance l’avait amené à baisser son attention, mais le dernier ballon volait toujours dans sa cage. Il cligna des yeux, et se redressa, déstabilisé. Il regarda la cage de sa voisine où plus rien n’y volait. P’tain mais c’est pas possible Greg, comment t’as fait pour rater ta cible, merde ! grommela-t-il intérieurement. « Je vous ai laissé gagner, je suis galant. » Il était mauvais perdant, mais ne voulait pas se l’avouer, et il ajouta un clin d’œil à sa remarque pour éviter qu’elle ne notifie sa déception. Sa rivale avait un grand sourire sur son visage, et cela réconforta un peu notre barbu. Il lui retourna son sourire avant de tourner sa tête vers le forain « Eh bien mon bon monsieur, cette jolie brune vous a volé votre licorne ! »


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Gregory s’avouait rarement vaincu, et affirmer qu’il avait perdu ne faisait définitivement pas partie de sa personnalité, il préférait détourner les choses à son avantage. « C’est marrant, vous ne me sembliez pas du genre galant et encore moins du genre perdant quand vous êtes venu vous interposer dans ma partie. » Elle lui rendait la monnaie de sa pièce, et le lieutenant appréciait cette répartie. Un sourire étira ses lippes. « Vous ne savez que peu de choses de moi, ne vous vantez pas d’avoir découvert toute ma personne sur une première impression. » Son calme et sa voix posée accompagnaient son regard appuyé, les deux tireurs semblaient être sur la même longueur d’onde. « On dirait bien que vous êtes à moi maintenant. Je me demande ce que je vais faire de vous…Même si ce n’est pas les idées qui manquent » Décidément, la jeune femme ne perdait rien pour attendre. Gregory laissa un petit riche s'échapper, il appréciait la spontanéité de la brune. Elle semblait déterminée à prendre en charge la soirée, et cela ne lui déplaisait pas. « Vous pourrez faire ce que vous voulez puisque vous avez gagné et que je tiens mes promesses, à une condition. » La jeune femme haussa un sourcil d'amusement. Elle avait décidé de jouer avec lui, il avait le droit d'en faire de même. « On doit d’abord passer par tous les stands de la fête foraine avant de sortir de là, et c’est moi qui choisis l’ordre. » Le perdant est à la merci du gagnant, oui, mais il avait décidé de ne pas se plier entièrement à la règle établie, c’était sa petite victoire après sa défaite.

« Qu’allons-nous faire de vous Gregory ? » Elle avait placé la licorne tout près de sa joue, narguant le lieutenant de sa victoire. Il plissa le front en relevant ses sourcils de façon faussement hautaine en guise de mépris, il avait du mal avec sa mauvaise foi qui lui intimait de refuser d’admettre qu’il avait perdu au stand de tir, mais il acceptait volontiers la situation que cela venait de créer et le fait que la jeune femme puisse avoir, de cette façon, le dessus sur lui. Ce ne sera pas le cas tout au long de la soirée, pensa-t-il. « Je suis sûr que tu prendras bien plus soin de cette licorne que je ne l’aurais fait. Et même si je ne t’avais pas laissée gagner, je t’aurai quand même donné la peluche. » Il se raccrochait à n’importe quelle excuse pour contourner sa défaite. « Je suis pas si vieux au fait, on peut se tutoyer non ? »

La jeune femme lui accorda le bénéfice de la réflexion pour une activité pour commencer leur soirée, et Gregory ne se fit pas prier. « J’ai faim pour l’instant, donc le premier stand qu’on va faire ce sera la roulotte des hot-dogs. » Il ne lui laissa pas le temps de réagir, il avait décidé qu'ils iraient manger, et il avait déjà emboîté le pas pour se diriger vers le stand de bouffe.

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« J’espère que tu n’es pas un tueur en série qui s’intéresse aux femmes qui gagne des licornes. » Gregory explosa de rire, il s’attendait à tout sauf à ça. Lorsqu’il reprit son calme, c’est d’un sérieux incontestable qu’il répondit. « On dit que la plupart des tueurs en série n’ont pas l’air louche aux premiers abords, qu’ils sont plutôt charmants et élégants, qu’ils observent leurs victimes avant de sympathiser avec elles pour gagner leur confiance. C’est peut-être ce que je suis en train de faire, fais gaffe à toi Elizabeth. » Il avait adopté un regard sombre, qui se voulait imposant et intimidant, mais il ne put empêcher ses lèvres de s’étirer en un large sourire plus longtemps. Il savait qu’il ne la ferait pas fuir aussi rapidement, elle cherchait à ce qu’il joue avec elle de la sorte, et c’est avec joie qu’il se pliait à ses attentes. Elle comprit d’ailleurs rapidement la taquinerie du barbu, et enchaîna rapidement d’un « Peut-être a-t-elle des pouvoirs magiques et elle me protègera » avant de lui rire au nez, pas de signe de malaise, c’était plutôt du foutage de gueule. Il savait qu’elle se moquait de lui, mais il acceptait avec plaisir cet échange. Lorsque Gregory se retourna pour se diriger vers le stand de nourriture, son interlocutrice l’interpella. « Profites du peu de liberté que tu as parce qu’après c’est moi qui reprends les rênes en main. » lâcha-t-elle. Elle s’attendait à commander ce soir, mais elle n’allait pas obtenir tout ce qu’elle souhaitait tout de suite. Gregory répondit un simple « Hm hm » pas convaincu, son expression joueuse s’étant désormais fixée sur son visage.

La pancarte qui affichait les noms des sandwichs le faisait saliver. Il avait faim, réellement faim. Le lieutenant n’avait rien avalé depuis ce matin, et son ventre commençait à le lui faire ressentir. Elizabeth s’était placée à sa droite, observant elle-aussi attentivement la liste des différents casse-croûtes. « J’ai une faim de loup par contre. T’as de la chance, c’est pas toi qui sors ton portefeuille ! » plaisanta-t-il. Son regard se tourna cette fois-ci vers le cuisinier de la roulote. « Je vais vous prendre le sandwich au steak, et mettez moi aussi un hot-dog et une barquette de frittes s’il vous plait. » Greg fourra sa main dans sa poche pour en sortir un billet, et s’adressa à la jeune femme. « Vas-y, vas-y commande je t’en prie. Prend quelque chose qui te ferait plaisir. » affirma-t-il, sourire en coin. La brune fit son choix, et en attendant leur commande, ils se placèrent sur les tables à côté. « Bon alors ma p'tite Chef, qu’est-ce que t’es venue faire ici toute seule à la fête foraine ? » Son regard vint plonger dans le sien. Il avait vraiment l’impression de l’avoir déjà vue, et il n’arrivait décidément pas à passer au-dessus.

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Il les connaissait bien les tueurs en série, plutôt très bien même. Ils faisaient l’objet de son travail au quotidien, et le lieutenant trouvait leur mode de pensée fascinant. La jeune femme qui lui tenait compagnie avait émis l’hypothèse que Gregory en soit un, et il avait sauté sur cette occasion pour ne pas la démentir et au contraire appuyer ses dires. « Je suis prête à prendre le risque. Je ne suis pas une femme que l'on effraye facilement. » Son regard brun plongea à nouveau dans celui de Morton, elle le provoquait clairement et attendait qu’il en fasse de même avec elle. « Tu acceptes donc le défi d’aller jusqu’au bout avec moi, même sans en connaître l’issue ? »

La brune commanda un hot dog et une barquette de frittes, elle était raisonnable. « Ca va, t’es gentille tu cherches pas à me ruiner. Si tu avais perdu le pari, je t’assure que j’aurais dévalisé leur roulotte pour te vider ton portefeuille. » assura-t-il, un clin d’œil venant appuyer sa remarque. La commande en cours de préparation, Gregory proposa à Elizabeth de s’installer sur les tables pour patienter, et commença la conversation. Question banale, pas engageante. « Ma p’tite Chef ? On en est déjà au stade des surnoms ? Cela dit, généralement on est censé ne pas aimer les surnoms mais honnêtement celui-là me convient tout à fait » Elle n’était pas passé à côté du surnom qu’il lui avait attribué, et ça le fit sourire. « Je trouve qu’il te va plutôt bien ce surnom, t’as l’air d’être pas mal dans le contrôle. Je suis sûr que t’es du genre à vraiment te tenir à ce qui est écrit dans ton agenda, je me trompe ? » Ce n’était pas une accusation, il tentait simplement de mieux la cerner. Et puis, généralement les personnes qui sont rigides dans leur vie personnelle et professionnelle ont tendance à bien se laisser dominer au lit. Il se focalisa sur leur conversation, ne laissa pas son esprit divaguer. « J’admire ces personnes-là, qui respectent leur emplois du temps et qui ne se perdent pas dans leur bordel. » trancha-t-il. L’organisation ne faisait pas partie de ses points forts, il avait du mal à se cantonner à ce qui était écrit sur papier, il fonctionnait tellement au feeling qu’il s’y perdait bien trop souvent.

La jeune femme lui expliqua la raison de sa présence à la fête foraine, elle devait venir avec une amie mais cette dernière l’avait abandonnée au dernier moment. « Ah, donc t’es du genre à ne dépendre de personne, et faire ce que bon te semble, si j’ai bien compris ? » Il était un peu comme ça aussi, Greg, il n’aimait pas compter sur les autres, un loup solitaire qui appréciait la compagnie à faible dose. Il ne dépendait de personne, il était maître de toutes ses décisions. « Et toi, qu’est-ce qui t’as poussé à venir ici ?  A part venir repérer tes victimes » Il n’avait pas envie de s’étaler sur la raison de sa présence, il n’avait pas envie de déballer à une inconnue que ça faisait trente ans qu’il n’avait pas mis les pieds dans une fête foraine, qu’il y allait avec sa meilleure amie qui est devenue aujourd’hui celle qui lui pourrissait la vie. Il se contenta de rebondir sur sa dernière réflexion, de rester vague et de jouer dans la séduction pour se détacher de son passé. « Je devrais pas te le dire mais bon tu n’as pas l’air de fuir. Je suis bel et bien venu pour toi, pour te surveiller et pour avoir un premier contact avec toi. Tu es ma cible Elizabeth, tu es ma future victime. Un sourire narquois étirait ses lèvres, elle avait l’air d’y tenir à cette histoire de psychopathes, et il allait se faire une joie de répondre à ses avances.

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Spoiler:

« Il parait que c’est comme ça que l’on vit les meilleures aventures » Eh bien elle allait en avoir de l’aventure avec Gregory, il n’était pas le genre d’homme à laisser passer sa chance, et Elizabeth semblait plus qu’ouverte à découvrir ce côté-là du lieutenant. Il continua dans sa lancée avec un petit surnom qu’elle semblait apprécier, et Morton se fit une joie de la taquiner sur ça. Parce qu’elle semblait rigide et prenait sans cesse le dessus, même inconsciemment. « Bien vu Sherlock. Effectivement, je suis du genre à être à cran sur mon agenda. C’est le joujou que j’utilise le plus dans mes journées…Impossible de tenir le cap si je ne suis pas bien organisée, j’ai beaucoup trop de choses à faire dans la journée » Le lieutenant se demanda à quel point cette femme pouvait être occupée dans sa vie, c’était le genre de femme qui bossait dans un bureau tôt le matin, et qui n’en sortait pas une seule fois avant la tombée de la nuit. « Qu’est-ce que tu fais de tes journées, alors, madame la ministre ? Me dis pas que t’es vraiment une sénatrice par contre, parce que je vais fuir là. » Et il ne rigolait qu’à moitié, Gregory avait beaucoup de mal avec la politique et tous les vendus dans ce domaine-là, tous ces rapaces qui ne foutaient rien de leur journée et qui gagnaient pourtant trois à quatre fois son salaire.

« Je parie que toi tu es du genre à avoir un bordel organisé, c’est ça ? » Il lâcha un rire amusé, parce que c’était vrai, plus ou moins. « Ouais, c’est plutôt ça ouais. J’ai du mal à m’organiser parce que je fonctionne beaucoup au feeling, mais des fois j’aurais bien besoin de quelqu’un qui me note noir sur blanc les choses à effectuer. » Parce que la plupart du temps, il se perdait dans ce qu’il avait à faire quand les tâches s’accumulaient, il parvenait généralement à terminer, mais jamais dans l’ordre initialement prévu. Quand son interlocutrice lui expliqua la raison de sa présence, il ne pût s’empêcher de se comparer à elle, et de faire le rapprochement sur leur besoin commun d’avoir leur propre indépendance et de ne dépendre de personne. « La plupart du temps je suis effectivement le genre de femme qui aime son indépendance. Mais il y a des domaines où je suis prête à lâcher un peu prise… » Un sourire narquois vint se tracer sur les lèvres du lieutenant, parce qu’elle avait compris où il voulait en venir, et qu’elle semblait ouverte à nouveau sur cette proposition.

Il ne s’étala pas sur sa profession, préféra jouer la carte du mec mystérieux, et elle sauta sur l’occasion pour jouer un peu plus avec lui. « Et bien nous verrons si je serai d’accord pour me laisser faire ou pas. Quelles sont tes intentions monsieur le tueur ? » Il s’humecta les lippes de sa langue avant d’emprisonner sa lèvre inférieure à travers ses dents. « Je sais pas trop encore, je suis encore en pleine réflexion. » affirma-t-il, charmeur. « En attendant, je crois que la nourriture est prête. » finit-il par annoncer en se levant de la table pour aller chercher leur encas. Le barbu engloutît son repas en un rien de temps, pendant que la belle faisait de même. Les conversations étaient fluide, il se sentait plutôt bien avec Elizabeth, c'était facile et elle était réceptive, et il ne pouvait pas être plus heureux que de passer cet après-midi avec elle. Greg attrapa la dernière frite dans sa barquette pour la coincer entre ses dents, il était repu, et son estomac le remerciait pour tout le gras qu'il venait d'ingérer. Va falloir que j'aille éliminer tout ça moi demain pensa-t-il tout bas alors que la jeune femme terminait son repas. « A toi de décider où on va maintenant.  » lui ordonna-t-il en espérant qu'elle ne lui propose pas de faire des attractions, il allait tout vomir sur place sinon.

@Elizabeth Warren