We all start with the beautiful: hope, pride and love. It's never meant to feel so difficult, your dreams become your drug. I'll give you something to believe in, I'd rather fail than never try. Broken pieces will fall apart, promises will tear down the trust. Find a reason to give your heart and I'll find a reason for us. • Broken Pieces, Andy Black

En dépit du sourire furtif qui se dessine sur ses lèvres, Aisling ne semble pas partager son opinion. Sans lui répondre, elle tire nerveusement sur sa cigarette, semble chercher ses mots sur le métal ondulé du hangar d’en face. « How so? » Un sourcil haussé, Sinner porte lui aussi sa clope à ses lèvres. Un peu étonné, il remplit ses poumons de la dernière latte qu’il peut en tirer et savoure la nicotine qui bourdonne dans son système. Il aurait pensé que les similarités entre la façon dont elle a construit son personnage pour le tournage et celle dont elle donne vie à ses photos lui paraîtraient évidentes. Cependant, il comprend rapidement qu’elle a abordé la question sous un angle différent : « The stories I try to tell only matter to me. I’m supposed to sell a fantasy, you see? » Une tristesse muette enrobe ses paroles, sème des paillettes sombres dans les grands yeux gris qui se tournent vers lui et lui échappent presque aussitôt. D’un geste vif, elle écrase son mégot comme si elle tentait en même temps d’écraser ses émotions. Machinalement, Sinner l’imite. Il songe à tirer une autre cigarette de son paquet, se laisse plutôt distraire par la moue amère qui tord les lèvres rosées de la jeune femme. « And fantasies are not real, they’re not meant to feel. » Il sent confusément que cette réalité lui pèse. Ne sachant trop comment lui répondre, il se mordille l’intérieur de la joue en détaillant son profil délicat. « But here, with you… It’s all about the essence of your song, raw emotions and the characters we portray. It feels right. » Impénétrable, son regard se pose sur lui, le capture et le cloue sur place tout à la fois. Perturbé par les émotions indéfinissables qu’elle fait naître dans sa poitrine, il lutte contre l’envie de se tortiller et le soutient sans broncher. « And I’m not trying to seduce anyone… Except for you. Maybe. » La révélation lui coupe le souffle. Il ignore pourquoi. Ce n’est pas exactement une surprise. Après tout, il sent l’énergie quasi magnétique qui les attire irrémédiablement l’un vers l’autre depuis qu’il lui a adressé la parole pour la première fois. Pourtant, de l’entendre confirmer qu’elle ressent la même chose éveille en lui une fébrilité étrange qu’il n’avait plus ressentie depuis longtemps et qui n’est pas loin de le terroriser. Assez pour que sa gorge se referme sur le commentaire nonchalant qu’il prévoyait laisser échapper. Jusqu’à ce qu’enfin, elle se détourne. Libéré de son emprise, il a moins de mal à penser, à rationnaliser la connexion inexplicable qui est en train de se tisser autour d’eux comme une toile d’araignée. It’s lust. You want her and you want her to want you. Nothing more. « I’m sorry I snuck up on you like that. » Il balaie l’air du revers de la main, comme pour indiquer que ce n’est pas grave. Au fond, il n’avait qu’à porter plus attention à son environnement. At least you weren’t Tiffany again, songe-t-il, amusé à l’idée de ce que l’assistante aurait certainement pensé si elle l’avait surpris en pleine contemplation des photos érotiques d’Aisling. « You were going to find out eventually… I guess I was just scared it’d change the way you see me. » Une tension étrange lui raidit les épaules, comme si elle se préparait au pire. Perplexe, Sinner incline légèrement la tête. Why would I see you differently? Et puis le souvenir de Pete et de ses commentaires vaguement déplacés lui revient. Un soupir au bord des lèvres, il comprend qu’elle doit souvent avoir droit à ce genre de remarques. À bien pire aussi, et de la part de mec qui ne bénéficient pas du genre de charme maladroit qui permet à son manager de mieux faire passer ses maladresses. Man that’s fucked up. Il entrouvre les lèvres pour protester, sans savoir exactement ce qu’il pourrait lui dire pour la rassurer. Mais déjà elle lui coupe la parole, bien avant qu’il n’ait pu rassembler ses pensées. « That’s fair in a way. » What is? Perplexe, il constate qu’elle semble apprécier le petit mystère qu’elle laisse planer. Heureusement, elle ne le fait pas languir trop longtemps avant de préciser le fond de sa pensée. « I mean, you were my sexual awakening after all and I’ve googled your name quite a few times when I was a teen so… I guess we’re even?  » Bouche bée, il la dévisage pendant de longues secondes avant que l’énormité de ce qu’elle vient de lui avouer ne se fraie un chemin jusqu’à son cerveau. Alors seulement il éclate d’un rire franc qu’il s’empresse d’étouffer derrière son poing appuyé contre sa bouche. En reprenant son souffle, il hoche la tête, l’air incrédule. « I can’t believe you just said that. » Sa surprise passée, il doit reconnaître que sa franchise lui plaît énormément. Peu de gens osent se montrer aussi directs avec lui et il y a quelque chose de rafraîchissant dans sa candeur. « I’m flattered though. Obviously you had great taste even as a teenager. I guess that makes us even, yeah. » Il lui offre un sourire en coin taquin avant de reprendre son sérieux.

Les sourcils froncés, il réfléchit à tout ce qu’elle vient de lui raconter. Étrangement, il ressent comme une envie de la réconforter. Plus rare encore, il craint de se mettre les pieds dans le plat en le faisant. Pas du genre à refuser un défi pour autant, il décide de se lancer quand même. « I’m sure that lots of people have lots of opinions about your job, and I’m sure most of them are talking out of their ass too. » Ils n’évoluent peut-être pas exactement dans le même domaine, mais il sait trop bien à quel point l’art alimente la critique. Quand ce ne sont pas les « spécialistes » du rock qui insistent pour offrir leur opinion détaillée sur sa musique, ce sont des fans plus ou moins bien intentionnés qui ne peuvent s’empêcher de lui expliquer comment faire son boulot chaque fois qu’il lance une nouvelle chanson. « I’m guessing you’re sick of it. » Probably means you should shut your mouth right now before you say something you shouldn’t. Ignorant la petite voix de la raison, il poursuit : « Don’t take this the wrong way, but… so what if you sell a fantasy? We all do, in one way or another. » Ses mains toujours enroulées autour de ses chevilles, Aisling tourne un regard indéchiffrable vers lui. Il ignore si c’est de la surprise qu’il lit au fond de ses prunelles ou de la désapprobation. Refusant de se laisser déconcentrer pour autant, il hausse les épaules. « Why d’you think we’ve decided to include a love scene in this music video? It helps build emotion, sure. But it’s also really nice to look at. And sex always sells. » Machinalement, il glisse la main dans la poche de son perfecto pour en tirer son briquet. Du pouce, il effleure le crâne décharné gravé dans le métal argenté. En-dessous, les lettres qui forment le mot Sinner reflètent les rayons aveuglants du soleil. « Maybe I’m being cynical, but the way I see it, we’ve all had to sell something that we might’ve wanted to keep for ourselves at some point. That’s just the price you have to pay to make it in showbusiness. » Submergé par une vague de nostalgie inattendue, il songe à toutes les parcelles de sa vie qu’il déverse dans ses chansons depuis des années. Aux émotions douloureuses qu’il expose comme un nerf à vif, à la portée de tous ceux qui ont envie de les analyser, de les toucher ou de se les approprier. À sa vie qu’il offre en pâture aux producteurs pour continuer à avoir le droit de monter sur la scène et goûter à l’amour du public. Au petit Sid qui a dû se replier dans l’ombre pour laisser toute la place à Sinner, la rock star plus grande que nature. Légèrement mal à l’aise, il passe une main distraite dans les mèches sur sa nuque en relevant les yeux vers Aisling. « I’ve come to realize that you can’t expect everyone to understand what you’re trying to say. And maybe that’s not even the point anyway. Maybe it’s just about creating something and expressing yourself, whether people get it or not. » Il a l’impression désagréable de s’être mis à nu. Pour camoufler cette aura de vulnérabilité inconfortable, il se déplie et se lève du bloc de ciment pour étirer ses longues jambes. Les mains enfoncées dans son perfecto, il se plante devant Aisling. « But that’s just my opinion… And maybe I’m talking out of my ass too, » blague-t-il pour alléger la lourdeur étouffante qui lui comprime la poitrine.

Au même moment, un taxi s’arrête devant le hangar. Une blonde peroxydée au maquillage épais comme un masque en descend et observe les environs comme si elle cherchait quelque chose. Elle s’attarde un instant en direction de Sinner et Aisling, semble même vouloir esquisser un pas vers eux, mais, sans doute dissuadée par l’air glacial du chanteur, elle décide finalement de remonter la petite allée de gravier pour entrer dans le studio sans leur adresser la parole. La porte s’est à peine refermée derrière elle que le chanteur pousse un juron. « What the fuck is she doing here? » Agacé et découragé tout à la fois, il se passe une main lasse sur le front. « I’m sorry, I have to go. » Il tourne les talons, s’éloigne de quelques pas avant de se raviser et de se retourner vers Aisling. « Actually, would you mind coming with me? » Au grand plaisir de Sinner, elle n’hésite pas à le suivre. Il lui ouvre la porte et la laisse entrer la première. D’abord aveuglé par l’obscurité relative du studio, il retrouve rapidement ses repères et dirige la jeune femme d’une pression légère sur son bras vers le coin repos où une bonne partie de l’équipe technique s’est rassemblée pour manger. Un peu à l’écart du groupe, Pete est en pleine conversation avec Brittany. Contrairement à ce qu’il espérait, son manager ne semble pas sur le point de la jeter tête première hors du studio. Au contraire, à mesure qu’ils s’avancent, des bribes de conversation de plus en plus distinctes leur parviennent malgré l’écho et il semble surtout désolé. « I’m sorry my dear, but it’s not entirely up to me. » Oh hell no! La mâchoire tendue et le regard acéré, Sinner s’arrête devant Pete et Brittany. « What isn’t? » Pete, qui ne l’avait clairement pas entendu arriver, sursaute légèrement et se tourne vers lui. « Oh… er… whether we give Brittany here her role back. » Un sourire suffisant au coin des lèvres, la blonde les observe en papillonnant des paupières. À côté de lui, Sinner sent Aisling qui s’agite, sûrement inquiète à l’idée de se faire virer à la dernière minute. Don’t worry darling, it’s not happening. « Why the fuck would we do that? » Avec une satisfaction sans doute un peu malsaine, le chanteur observe du coin de l’œil l’expression faussement agréable de Brittany se transformer en une colère mal dissimulée. Pete, quant à lui, laisse échapper un petit rire nerveux. « Well, she signed the contract weeks ago, for one… » marmonne-t-il dans sa barbe, visiblement peu convaincu que son argument réussira à adoucir Sinner. D’ailleurs, ce dernier darde un regard incrédule sur son manager. « You’re kidding, right? I’m not a lawyer, but I’m pretty fucking sure that contract went down the drain when she forgot to show up this morning. » Les yeux ronds, l’air insultée, Brittany se redresse de toute sa hauteur, ce qui n’impressionne pas particulièrement le chanteur, qui doit quand même pencher la tête pour la regarder dans les yeux. Seriously, who thought we’d be a good match anyway? We look like Snow White and one of her dwarves, except I’m Snow White. « I didn’t forget, I just couldn’t make it. » Les lèvres pincées, Sinner la dévisage d’un air dubitatif qui semble la pousser à se rapprocher de la vérité. « I mean, I guess I did forget. But only because I was hungover! » ajoute-t-elle d’une petite voix précipitée comme si ça changeait tout. Oh for fuck’s sake! Le chanteur hoche la tête, soupire bruyamment. « Get the hell out of here, we’re absolutely not reshooting half a day’s work because you couldn’t be bothered to get out of bed. » Les yeux brillants de larmes, elle semble sincèrement choquée par la tournure des événements. En désespoir de cause, elle se tourne vers Pete comme pour plaider sa cause ou le supplier d’intervenir. Cependant, sans doute résigné à l’idée que, même s’il la reprenait sur le plateau, Sinner refuserait catégoriquement de travailler avec elle, le manager se contente de la prendre par les épaules et de l’entrainer vers la sortie. « Sorry dear, it’s out of my hands. » Il les regarder s’éloigner, vaguement amusé en constatant que le blond a décidé de mettre en œuvre toutes ses techniques de drague maladroites. Convaincu que le résultat ne sera pas des plus positifs et pas trop d’humeur à observer la catastrophe, il ramène plutôt son attention sur Aisling. Elle n’a pas bougé de l’endroit où elle se tenait debout à côté de lui et l’observe d’un œil incertain. « I’m sorry you had to see that… But can you believe the nerve of that girl? As if we’d redo everything we’ve shot this morning like she’s this big name we can’t live without. » Peu de choses irritent autant Sinner que le manque de professionnalisme et les gens qui se croient tout permis, et Brittany a le malheur de réunir ces deux désagréables caractéristiques. Pour éviter de se mettre trop en rogne, il inspire longuement. « I guess it’s a good thing she bailed though. You’re a much better actress then she would’ve been. Especially hungover, » conclut-il en levant les yeux au ciel, l’ombre d’un sourire au coin des lèvres.

it's not too late for two lost souls

Sid Sinner & Aisling Rose

We're always running away and we don't even stop to think about it. The worlds in our hands. They don't need to understand. We do it our own way, no matter what they try to say about about it. We've got our own plans, they don't need to understand

We all start with the beautiful: hope, pride and love. It's never meant to feel so difficult, your dreams become your drug. I'll give you something to believe in, I'd rather fail than never try. Broken pieces will fall apart, promises will tear down the trust. Find a reason to give your heart and I'll find a reason for us. • Broken Pieces, Andy Black

Aisling lui offre un sourire rempli de timidité. « It’s really not that hard with that good of a concept and a partner like you. » Il ne peut s’empêcher de hausser un sourcil. Depuis le début du tournage, ce n’est pas la première fois qu’elle lui retourne les compliments qu’il lui offre. En temps normal, il supposerait que c’est parce qu’elle essaie de le flatter, mais elle est si clairement sincère qu’il ne peut s’empêcher de la croire. Alors il se dit qu’elle ne sait tout simplement pas se mettre en valeur comme elle le devrait, ce qui l’amuse un peu comme il n’a jamais connu ce problème lui-même. Elle se rattrape néanmoins, peut-être parce qu’elle se rend compte à retardement que minimiser ses talents n’est pas le meilleur moyen de se faire connaître dans le milieu où ils évoluent. « But it means a lot to see my efforts are appreciated, so thank you for saying that and giving me this chance… » See? That’s better already. Ses yeux clairs cherchent les siens, y plongent tandis qu’ils se chargent d’une lueur qu’il a du mal à interpréter. « And for reminding me what it feels like to be an artist, and not a product. » La remarque provoque une vague inattendue de curiosité. Les sourcils froncés, il scrute ses traits délicats comme s’il pouvait y découvrir l’explication manquante qui lui permettrait de mieux comprendre le fond de sa pensée. Il voudrait lui poser des questions, tenter de creuser sa réflexion, mais il n’en a pas l’occasion. La voix nasillarde et perçante de la styliste déchire la bulle qui s’était formée autour d’eux et le fait presque sursauter. « Yes, yes that’s very touching, » scande-t-elle avec l’intonation de celle qui s’en fout complètement. Parfois, Sid se demande si un bébé ou un animal mignon provoquerait chez elle la même réaction ou si ce sont seulement ses clients qui réussissent à la mettre d’aussi mauvaise humeur. La tête inclinée vers l’arrière, elle darde un regard franchement terrifiant sur lui, comme si elle avait lu dans ses pensées. « You have a costume change. » Il hoche la tête en soupirant, guère enchanté d’être réprimandé de la sorte. « I know. » Les sourcils finement sculptés de la styliste se plissent en même temps que ses lèvres se tordent en une moue impatiente, comme s’il venait de lui dire une énormité. « Come with me then! » Le regard rempli de compassion, Aisling lui offre un good luck muet auquel il répond d’un hochement de tête exagérément déprimé, comme s’il se dirigeait tout droit vers l’abattoir. Janet s’éloigne à petits pas si pressés qu’il doit lui-même allonger le pas pour la rattraper. C’est seulement cet écart providentiel qui l’empêche de s’écraser brutalement dans son dos quand elle s’arrête net devant les petites cabines. D’un index crochu de sorcière, elle lui indique dans laquelle entrer.

Résigné, il se glisse à l’intérieur, mais sans tirer le rideau sur la tringle pour que Janet puisse lui apporter ses nouveaux vêtements. Il n’a pas à attendre longtemps avant qu’elle revienne vers lui, un paquet de tissu sombre entre les mains, qu’elle lui remet. « Change your t-shirt for this one. Keep the jeans, but put this under. » De la poche de sa veste, elle tire un petit sachet de plastique contenant un bout de tissu couleur chair. Il grimace et secoue aussitôt la tête. « Oh no fucking way! » Visiblement peu concernée par son ton abrupt et le regard noir qu’il braque sur elle, elle se contente de hausser les sourcils. « You don’t have a choice. » Malgré l’envie de croiser les bras pour appuyer ses arguments, il résiste, pour éviter de ressemblant à un enfant qui fait une crise tandis qu’il affirme : « I don’t see why I have to wear that. I could keep my boxers on and it wouldn’t make any difference. » Les réserves de patience déjà maigres de la styliste sont manifestement épuisées. Sans chercher le moins du monde à se montrer discrète, elle soupire et lève les yeux au ciel. « It won’t look as good on camera and you know it. » Elle a raison, même s’il préfèrerait se couper un orteil que de l’admettre. Autrement, comment lutter contre sa tyrannie ? « But- » Elle ne lui donne même pas l’occasion de finir sa phrase. D’un geste plein d’aplomb et, surtout, dépourvu de la moindre pitié, elle plaque le sachet contre sa poitrine. « I really don’t have time for this. Quit whining, get dressed, and put the damn modesty pouch on. » À contrecœur, il referme ses doigts sur l’emballage sans se départir de sa grimace désemparée. Sous sa paume, le plastique crisse désagréablement. Avec un hochement de tête rempli de satisfaction, Janet fait un pas en arrière. Puis, un sourire narquois au coin des lèvres, elle ajoute : « Besides, if you’re going to ask your partner to get half naked, it’s only fair that you get to be uncomfortable too. » Elle a gagné et elle le sait fort bien, car que pourrait-il répondre à ça sans avoir l’air d’un connard insensible ? « Fine, » fulmine-t-il en tirant sur le rideau pour se réfugier derrière l’intimité factice du tissu.

D’abord, il pose le t-shirt plié et le sachet sur le tabouret qui occupe le coin de la cabine. Puis, avec un soupir dégoûté, il déboutonne son jeans et s’extirpe du vêtement avec autant de grâce que lui permet le tissu serré. Sans s’accorder le temps d’y réfléchir, il fait aussi glisser le boxer noir seyant qu’il a l’habitude de porter. Une fois nu comme un ver, il récupère le sachet et en extirpe le bout de tissu. Le nez plissé, il enfile la pochette comme une chaussette particulièrement moche pour recouvrir les zones à cacher et tire sur la petite cordelette pour la resserrer et faire tenir en place le sous-vêtement. Se redressant, il s’observe dans le miroir. « Fuck’s sake… » murmure-t-il en détaillant son reflet. Le tissu vaguement élastique de la chaussette de modestie moule inélégamment ses attributs masculins, les dissimulant de la façon la moins attrayante possible. Avec un hochement de tête blasé, il se désintéresse de sa morne contemplation et récupère plutôt son jeans, qu’il enfile à nouveau comme le lui a demandé Janet. Prudemment, il remonte la fermeture éclair, douloureusement conscient de la trop mince protection qu’offrirait le tissu de la chaussette à sa peau sensible contre les dents de métal. Enfin, il se glisse dans le t-shirt confortable. That’s better at least, songe-t-il en remettant un peu d’ordre dans ses mèches en bataille.

Il émerge de la cabine dans un bruissement de tissu, balaie les environs du regard à la recherche de Janet pour s’assurer qu’elle n’a rien à redire sur son costume. Elle a disparu, mais il repère Pete qui consulte son téléphone d’un air soucieux, installé dans l’un des fauteuils de réalisateurs tout près du plateau de tournage. Les mains dans les poches de son jeans, il s’approche de lui. L’ayant sans doute vu approcher du coin de l’œil, le manager relève la tête. « Yes? » demande-t-il, l’air à demi catastrophé comme s’il s’attend à devoir gérer d’autres récriminations. D’un geste de la main, Sinner s’empresse de le rassurer. « I just want to say I’m sorry for laying into you earlier. I really can’t stand that kind of unprofessionalism, but I probably shouldn’t have blown up like that. » Un sourire s’étire sur le visage rond de Pete, qui secoue la tête. « Don’t worry about it, mate. It’s fine, I’ll live. » Il n’en doute pas un instant, surtout que ce n’est pas la première fois que ce genre de tensions vient se dresser entre eux. Incapable de résister à sa bonne humeur, Sid lui sourit à son tour. « I have to say though, I’m surprised. That Aisling girl is actually pretty good. I had my doubts about hiring her because… well, y’know, of what she does. » Évidemment, ses petites recherches de toute à l’heure et sa conversation avec Aisling lui ont permis de savoir exactement à quoi Pete fait allusion, mais il n’a aucunement l’intention de lui faciliter la vie et se contente donc de l’observer d’un air vaguement intéressé. Il n’en faut évidemment pas plus pour que le manager tente de combler le silence et de repousser le malaise qui menace de se tisser entre eux. « She… err… how do I put it lightly? Let’s just say that her art really isn’t kid friendly. » Sans pouvoir s’en empêcher, le chanteur laisse échapper un ricanement. « Yeah, ‘cause what I do is all Care Bears and Teletubbies. » Un sourire aux lèvres, il roule des yeux. « She’s just a nude model, Pete, get over it. There’s nothing scandalous about it. Especially considering how you didn’t have to google her to find that out. » Sans égard pour les joues écarlates de son manager, Sinner lui tapote affectueusement l’épaule. « It’s a bit hypocritical to look down on what she does when you get your rocks off looking at girls like her, don’t you think? » Avec un clin d’œil moqueur, il tourne les talons et rejoint Jimmy qui vient d’émerger de derrière le paravent où Sharon s’occupe certainement d’Aisling.