TW : cambriolage

Minuit douze, l'heure du crime.

Regard braqué sur l'horloge analogique de sa montre noire, vêtu de noir, le regard noir, Jackson enfonce le passe-partout dans le trou de la serrure. Il ouvre la porte, fait un pas à l'intérieur puis referme le battant sans faire le moindre bruit. En silence, il range dans la poche intérieure de sa veste tactique la clé illégale. Un peu plus bas, contre son flanc, juste sous son pec, un pistolet automatique somnole dans son étui. L'arme est chargée, au cas où, mais l'agent espère ne pas avoir à s'en servir.

Debout dans l'obscurité du petit hall d'entrée, Mills laisse le temps à sa vision de s'accommoder. Il n'allumera pas les lumières, se contentera d'utiliser sa lampe torche, au besoin. Seuls ses yeux et ses lèvres dépassent du passe montagne recouvrant son visage. Il porte au bout des doigts dans gants militaires et de hautes chaussettes par dessus ses bas de pantalon afin d'éviter les frottements du tissu lors de ses déplacements. Cette nuit, Jackson Mills est un ninja plus qu'un cambrioleur, même si c'est bel et bien pour dérober quelque chose qu'il s'introduit chez Brody à l'heure des loups.

Le carnet, c'est tout ce à quoi il pense au moment de s'avancer dans la cuisine. Cette dernière ouvre sur un salon dont les fenêtres permettent à la lune d'éclairer la pièce. Jackson observe, l'oreille aux aguets. Tabourets, plan de travail, canapé, table basse ... Il liste mentalement les objets et cherche du regard un meuble sur lequel un sac à main aurait pu être déposé. Méthodique, il s'avance un peu plus dans le logement et repère un couloir le long duquel 3 portes s'offrent à lui. Mills sort sa lampe, rase les murs, teste la première poignée qui n'oppose aucune résistance. Il s'agit là d'une chambre d'ami ou d'un bureau dans lequel un lit aurait été ajouté à la hâte. Sans tourner le dos à l'entrée de la pièce, l'agent se rapproche. Il ne déplace rien, regarde seulement et prend des notes mentales. Le temps de fouiller viendra après la sécurisation de la zone. De retour dans le couloir, il tourne à droite. La porte du fond s'ouvre facilement, elle aussi. Une salle de bain plutôt banale dans laquelle Mills se dépêche de baisser sa lampe afin d'éviter le rebond de la lumière à travers le miroir. Ca sent le shampoing et les cosmétiques. Jax hume à pleins poumons. L'air est encore humide, signe de l'utilisation récente de la douche. Cela ne fait que confirmer ce qu'il pensait avoir vu à travers ses jumelles, à peine une heure plus tôt. La serviette dans laquelle Brody a traversé le salon avant d'éteindre les lumières est accrochée au mur, suspendue au porte-serviette à côté duquel il repère une autre porte. La déduction se fait d'elle-même : la salle d'eau est connectée à la chambre principale en plus de donner sur le couloir. Après avoir éteint la lampe, il se retrouve dans le noir complet, tendant l'oreille et attendant le moindre signe de vie qui ne vient pas. Alors il s'avance, plus discret qu'un chat, passant le nez à travers l'intersection de la porte laissée entre ouverte.

Dans la pénombre, il la voit. Deborah dort, le corps partiellement recouvert par le drap, la joue collée à l'oreiller et les cheveux en éventail. Les rideaux filtrent le clair de lune plus que dans le salon mais n'occultent pas toute la luminosité tant et si bien qu'après quelques secondes d'adaptation, l'agent peut distinguer les formes et les objets composant la chambre à coucher. Il s'applique à ne jamais trop s'approcher du lit, se basant sur son expérience personnelle qui veut que la moindre présence étrangère un peu trop proche de lui suffise à le réveiller. Sur la table de chevet, Jax repère des ouvrages qu'il ne prend pas le temps de lire, conscient que moins longtemps il restera dans cet appartement, moins il s'exposera au risque de se faire prendre la main dans le sac.

Le sac ! Mills l'aperçoit justement, posé sur la commode, la gueule ouverte à sa curiosité. Gardant son calme et contrôlant ses mouvements, l'agent s'en empare. Il se rapproche de la fenêtre pour jouir du maximum de visibilité et se cale dans un coin de murs, là où son angle de vue lui permet d'englober la pièce dans on intégralité tandis qu'il se met à fouiller. Rien d'intéressant n'attire son attention. Jax n'est pas venu voler des billets dans le portefeuille de cette connasse, ni même dérober les secrets de son agenda. Contrarié, il repose le sac là ou il l'a trouvé et se met à ouvrir précautionneusement les tiroirs de la commode. Ce qu'il y voit entraîne un haussement de sourcils appréciateur. Strings et dentelles se battent par dizaines dans le premier compartiment. Petites jupes et débardeurs remplissent celui du dessous. Jackson continue ses investigations, fouille sans déranger, soulève sans déplier, déplace pour mieux remettre en ordre. Il sort bredouille de ses recherches et se tourne à nouveau vers le lit où Debbie dort toujours d'un sommeil profond. Par acquis de conscience, il plie le genou et jette un œil sous le sommier. Deux caisses y sont cachées, l'invitant à tendre la main pour les déloger de là ; ce qu'il s'apprête à faire lorsque la jeune femme se met à gesticuler dans son sommeil. Instantanément, Mills se fige et se tasse sur lui-même. De là où il se trouve, à moitié faxé sous le lit, il ne risque pas d'être vu mais préfère la jouer prudent. Ça lui prend dix minutes de silence et d'immobilité complète avant d'accepter l'idée de se remettre en mouvement.

La première caisse regorge de paperasse administrative. Factures, avis d'imposition, papiers d'assurance ... Le genre de conneries qui intéresseraient beaucoup Widow mais qui le laisse de marbre. Il referme le couvercle et replace la boîte sous le lit. La seconde lui arrache un sourire entendu et le fait jeter un nouveau coup d'œil à la propriétaire des lieux. Le drap ne recouvre plus qu'une seule de ses fesses, là, juste sous son nez, à quelques centimètres à peine de son visage cagoulé. Jackson se verrait bien la mordre sauvagement pour lui faire payer de l'avoir tourmenté à ce point durant la matinée mais l'importance qu'il accorde à la réussite de sa mission l'en dissuade. Toute aussi sexy qu'elle puisse être avec son cul en buse, cette poupée ne viendra pas à bout de sa détermination militaire. Mills ravale ses pulsions, chasse de son imagination les images salasses implantées dans son esprit par la boîte de sextoys qu'il remet à sa place quand, tout à coup, son regard tombe à nouveau sur les ouvrages laissés sur la table de nuit. Lorsqu'il était debout, impossible pour lui de voir que, sous la pile, se trouvait son précieux. Mais, maintenant qu'il est à genoux, la tranche verdâtre du carnet lui saute aux yeux. Il inspire calmement, soucieux de contrôler le rythme de sa pulsation cardiaque. L'idée que Brody ait lu ses écris avant de s'endormir l'agace autant que cela l'excite, sans qu'il sache réellement se l'expliquer. Probablement parce que l'image d'elle à moitié nue tournant les pages de ce qu'il a de plus intime à quelque chose de particulièrement provoquant, mais Jax refuse de s'y attarder. Ses mains s'affairent déjà à extraire le carnet du tas de bouquins.

Lorsque le petit livre a retrouvé sa place dans le fond de sa poche, sacro-saint sanctuaire qu'il n'aurait jamais du quitter, Mills jette un nouveau coup d'œil à sa montre. 20 minutes qu'il est en infraction, c'est déjà beaucoup trop. Méthodiquement, il fait le chemin inverse, repasse par la salle de bain et retourne dans le salon sans plus avoir besoin de sa lampe désormais car le plan du logement est clair dans son esprit. Checkant mentalement les points de sécurité et les oublis à ne pas commettre, l'agent fait un tour sur lui même avant de retrouver le hall. A nouveau, il fait silence, s'assure que personne ne se promène de l'autre côté de la porte d'entrée et s'extrait du logement sans oublier de refermer derrière lui. Lorsqu'il retrouve la rue, Jax retire son passe-montagne, récupère son sac laissé dans les buissons et retire ses bas de pantalon de ses chaussettes pour se donner un air normal de civil rentrant chez lui. Son appartement n'est qu'à 2 kilomètres, un comble quand on sait qu'il espère bien ne plus jamais croiser le chemin de Brody et de sa curiosité mal placée.

Tandis qu'il retrouve son logement, Mills s'accorde un petit soupire amusé, balance son sac sur le canapé et retire sa veste. Il n'aura pas eu besoin de signer son crime pour savoir que Deborah aura des doutes sur la disparition du carnet. Pas besoin de lui envoyer le moindre texto pour la faire se sentir insécure sous son propre toit, désormais. S'il sait que le retour de manivelle de Widow lui sera douloureux aux premières heures du jour, Mills se console en se disant qu'à défaut d'avoir trouvé une solution diplomatique, il aura au moins remis les pendules à l'heure : personne ne le fait chanter, personne ne lui vole ce qui lui appartient.

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TW : prédation / arme à feu

Perché sur le toit de l'immeuble, allongé sur le ventre, Jackson compte les secondes :

Un, inspirer par le nez.
Deux, expirer par la bouche.
Trois, inspirer de plus belle.
Quatre, fixer son attention sur son rythme cardiaque ...

Un courant d'air lui caresse le visage. Mills le sent à travers la maille de sa cagoule. Il rapproche sa joue de la crosse. Frictionner le vêtement contre le métal de son arme lui permet de gratter la barbe de trois jour qu'il cache sous sa tenue de camouflage. Gris béton, ses vêtements se fondent parfaitement dans le décor. Son immobilité le rend invisible. Aucun hélicoptère, qu'il soit de police ou médiatique, ne pourrait fortuitement deviner sa présence.

Cinq, sentir les odeurs de la ville en contre-bas.
Six, écouter le silence du périmètre de sécurité dressé autour du block.
Sept, positionner son œil face à la lunette.
Huit, enlever le cache.
Neuf, faire le point sur la porte du palais de justice.
Dix, caler ses coudes de manière à tenir la position autant de temps qu'il le faudra.

Des semaines qu'il attend que la sentence tombe. Ce n'est plus qu'une question de minutes. Concentré comme jamais, Jax guette le signal de son indique. Le code est simple : Un appel = Coupable / Un texto = Acquité. Deux vecteurs de communication pour deux sonneries différentes. Si c'est la notification du message qui se fait entendre, l'agent pressera la détente à l'instant même où s'ouvriront les portes. Mills sait parfaitement ce qu'il fait. Répéter ces gestes qu'il connait par cœur ne lui demande aucun effort de réflexion. L'habitude est là, encrée, confortable, abrutissante. Elle lui donne la capacité d'être un robot d'une froideur mécanique malgré le feu anarchique dont brûle son esprit. Et si c'est un appel ... ? Réussira-t-il a accepter qu'on enferme gentiment le responsable du sabotage et de la mort de plusieurs agents comme lui ? Tant qu'a être en position ; tant qu'à avoir cette raclure au centre de sa cible ? La tentation est si forte qu'elle lui raidit l'intégralité du corps. A cet instant, Mills est aussi rigide qu'une mine sur laquelle marcher serait la pire des idées. Il s'interdit de repenser aux premières heures de la journée ; chasse rigoureusement de sa tête l'image de Gabrielle menaçant de le balancer s'il tente quoi que ce soit d'illégal. Son choix, Jackson l'a fait à l'instant même où il a posé le pied sur le premier barreau de l'échelle menant à son perchoir.

Une vibration discrète se fait soudain entendre.
On l'appelle.
Son cœur rate un battement : Hoover est reconnu coupable !

Le temps s'arrête. Jax a l'impression que le toit s'ouvre sous son ventre pour l'avaler tout entier. La Justice a tranché en faveur des victimes. Même si lui ne sera pas reconnu comme tel car il leur faut préserver l'anonymat du PSI, Mills sent un poids quitter sa poitrine en apnée. Ce soir, des veuves et des orphelins pourront enfin passer à la prochaine étape de leur deuil.

La vibration persiste.
On l'appelle encore.

Jackson fronce les sourcils. Il n'était pas prévu que l'indique récidive le signal. Un coup d'œil à l'écran lui permet de capter l'identité du correspondant. C'est Judy.

« Mills à l'appareil, un problème ? » Il oublie souvent que Judy n'est qu'une ado et que sa rigueur militaire l'amuse plus qu'elle ne l'impressionne. « Sérieusement ? » Elle glousse, parvenant à dessiner un fin sourire sur les lèvres du plus vieux. Les problèmes, ce n'est clairement pas ce qu'il lui manque, à Judy. Pourtant la gamine est toujours là, revenue d'entre les morts aprés sa tentative de suicide hivernale et debout malgré tous les coups que la vie s'acharne à lui donner depuis sa naissance. « Qu'est ce que j'peux faire pour toi, crevette ? » La taquinerie est d'autant plus improbable qu'il tient toujours contre son épaule la crosse de l'arme prête à tirer. Dans la lunette, le bois des portes du tribunal n'a pas encore bougé. Jax profite du kit main libre pour rester à l'affut mais l'appel de Judy le déconcentre. Depuis qu'il la sait prête au pire pour mettre fin à ses souffrances, il s'inquiète des moindres signaux pouvant trahir une rechute dépressive. « Rien. Je voulais juste te dire merci pour la course lundi. Je me suis fait une copine. » Les portes s'ouvrent enfin. Jackson sent sa mâchoire se crisper. Beaucoup d'informations lui tombent dessus en même temps, rendant l'analyse de la situation plus complexe qu'il ne l'avait anticipé. Hoover condamné, Judy qui sociabilise et là, sous ses yeux, des hordes de journalistes se précipitant sur le cortège de sécurité dans l'espoir d'enregistrer le moindre mot prononcé par le coupable. « T'es pas seule Jud. » Qu'il répond, l'indexe en pleine hésitation. « Toi non plus, Jax. » Elle raccroche, le laissant face au vide.


Lorsqu'il pousse la porte de son appartement, Jax s'effondre, litéralement. A même le sol, il reste allongé sur le dos, le regard rivé au plafond et le corps épuisé d'avoir lutté si fort depuis un an et demi. Son sac de sport, échoué à ses côtés, contient son arme et le reste de ses affaires d'intervention. Il revient à la maison avec le même nombre de munitions qu'en partant et s'endort sans demander son reste pour 24 heures de sommeil profond.

Le seul cadavre aujourd'hui est celui de son insomnie sacrifiée sur l'autel de l'acceptation.

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C'est le jour J.

Debout face au miroir, Jackson pousse un soupir contrôlé. D'ici quelques minutes, on appellera son nom. D'ici quelques minutes, ils seront plusieurs à l'attaquer sur tous les fronts. Psychologues, psychiatres, analystes du comportement, spécialistes en interrogatoires, maître de torture ... L'agent ne sait pas à quelle sauce ses tortionnaires ont prévu de le manger. Cela fait des mois qu'il s'entraine, aussi bien physiquement que mentalement, en prévision de ces tests de réintégration initialement prévus par l'AFP.

Le changement de direction du Projet Epsilon, annoncé de but en blanc lors de son arrivée au centre d'examen pour ce qui devait être un rendez-vous préparatoire, était venu tout chambouler. Mills s'en était rapidement aperçu car, en guise de paperasse à remplir en prévision des tests, on lui avait simplement tendu une arme par-dessus le comptoir. À peine avait-il posé la question (« C'est quoi ce bordel ? ») qu'une cagoule lui était tombée sur la tête suivie d'une paire de menottes destinées à entraver ses capacités de mouvements. Il avait grogné, menacé, gesticulé, mais les nombreuses paires de mains en charge de contrôler ses ruades avaient eu raison de sa résistance. Laisser faire tandis qu'on le fourrait à l'arrière d'une camionnette lui avait semblé être le meilleur moyen de garder son calme afin de réfléchir à la situation. Finalement, Jax s'était retrouvé balancé au beau milieu d'une simulation d'intervention, laissé à l'expression de ses réflexes d'agent de terrain pour neutraliser les agresseurs marqués d'un dossard rouge et dont les armes étaient chargées à blanc. Non létales donc, mais cela n'avait pas empêché l'agent de serrer les dents en recevant un projectile en plein dans les côtes. De toute évidence, on avait - sciemment ou pas - oublié de lui fournir un gilet pare-balles. Son temps d'adaptation à une situation aussi inopinée que celle-ci avait été honorable, tout comme son habileté à s'extraire du lieu en trainant dans son sillage deux blessés qu'il avait identifié grâce à leur dossard " citizen ". Il était bourré d'adrénaline, tous ses capteurs en ébullition, lorsqu'une sirène stridente était venue sonner la fin de la simulation. Comme une fleur, un inspecteur était alors sorti d'une porte dérobée afin de lui signifier qu'on le remerciait pour sa prestation et que ses résultats lui seraient communiqués en même temps que ceux de son test psychologique. Jax était revenu au centre d'examen en taxi, à la fois pensif et suspicieux ... En voilà des façons de faire ! Efficaces, certes, mais d'une violence discutable, même pour lui dont le poing avait tendance à trop facilement partir à la rencontre des mâchoires de ses interlocuteurs ...

« Jackson Mills. »

C'est maintenant.

Mills sort des toilettes. Dans la salle d'attente, une femme en tailleur le dévisage, un porte-document entre les mains, prête à le faire entrer dans la pièce à l'intérieure de laquelle son avenir en tant qu'agent fédéral sera bientôt scellé. S'il ne tremblait pas ce matin, alors qu'il slalomait entre les balles, Jax marque un bref temps d'hésitation au moment de passer la porte. Poings serrés, il inspire profondément pour se convaincre que tout se passera comme prévu, révisé et répété 1000 fois en compagnie de Sparrow. Il est guéri. Il sait ce qu'il a à dire, ce qu'il a à faire et surtout ce qu'il ne doit aucun cas laisser sortir. Ses émotions volcaniques, sa répartie provoquante, son insolence à peine dissimulée mais aussi et surtout la paranoïa qu'il cache depuis des mois et qu'il ne désespère pas de vaincre seul, sans l'aide de personne, comme si l'admettre revenait à perdre face à elle ... Aujourd'hui, Jax reprend, si ce n'est le contrôle de sa vie, tout du moins celui de sa carrière. La seule chose qu'il souhaite c'est réintégrer son équipe. Aussi, à la place du claquement de la porte se refermant derrière lui, Mills entend raisonner la cloche du ring du boxe sur lequel il a grandi. Que le combat commence.




« ... bla bla bla ... le plaisir de vous informer ... bla bla ... la validation de vos tests d'évaluation ! » La voix de Widow monte d'une octave tandis qu'elle redresse vers lui son regard satisfait. Après avoir reposé l'enveloppe contenant la communication officielle du ministère sur la table de réunion, la voilà qui lui décoche une claque dans le dos tandis que Simon lève la main à la recherche d'un high five. Jackson frappe la main du hacker, un sourire victorieux aux lèvres. Spontané, il attrape Sparrow qu'il gratifie d'une accolade reconnaissante. Sa collègue l'a beaucoup aidé à mettre en place les mécanismes nécessaires à la gestion de son impulsivité et même si cette étreinte sans préavis est la preuve qu'il reste du boulot, le principal pour l'équipe est de le savoir à nouveau dans le cercle. Ensemble, ils sont plus forts ! Protocolaire, Bond se rapproche, la main tendue pour le féliciter. Son air sincère convint Jackson de tendre la sienne en retour. À la surprise générale, le quinquagénaire ferme le point et check celui de Mills. Un fou rire contagieux secoue les épaules du petit groupe réuni sous la laverie de quartier. Le nouveau QG du PSI est une planque de film à l'intérieure de laquelle tous s'imaginent déjà faire de grandes choses pour l'Australie ...

Ils ne pensaient pas être si proches de la vérité mais l'arrivée de leur première mission en tant que cellule de l'ASIO se chargera de leur montrer à quel point Epsilon Project a monté en grade. Nouveaux moyens, nouvelles responsabilités, nouveaux membres pour grossir les rangs de leur unité d'élite ... Hoover, du fond de sa cellule, n'a qu'à s'en morde les doigts !

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TW : sexualité

Pour la première fois depuis l'incarcération de Hoover, Jackson n'a pas réussi à fermer l'oeil de la nuit. Il arrive déphasé au travail, évite soigneusement le regard de Neo au moment de prendre place autour de la table de réunion et se mure dans un mutisme inhabituel. Widow fait le point tandis que Bond se penche à son oreille pour lui reprocher d'être dans la lune. De l'autre côté de la table, Sparrow le fixe avec cet air qu'il connait bien et l'agace parce qu'il sait qu'elle cherche à lire en lui, à identifier les raisons de ses cernes, de son silence et de son manque d'investissement durant le briefing. Pyro, lui, a avancé dans ses recherches et Teach leur expose le résultat de ses premières traductions. Il n'y a que Bowser qui semble se foutre de ce changement significatif dans son comportement. Elle aussi a ses mauvais jour et toute l'équipe sait qu'il vaut mieux ne pas l'asticoter quand c'est le cas.

À la pause du midi, l'agent préfère sauter le repas plutôt que de remonter à la surface pour s'acheter un sandwich. Traverser la laverie est au-dessus de ses forces. Il a déjà dû prendre sur lui au matin afin de passer la porte sans extérioriser la nausée que les souvenirs de la veille lui provoquent et ne pas fracasser la vitre du distributeur qui lui renvoyait le reflet de sa salle gueule. L'estomac sur patte, celui dans le champ de vision duquel il vaut mieux éviter de laisser trainer son casse-croute sous peine de le voir disparaître, décide de jeuner et c'est suffisamment alarmant pour inciter Widow à le retenir à la fin de la journée. Mills sent la panique l'envahir et son regard dévie en direction de Neo. Le pirate l'a-t-il balancé à leur cheffe ? De toute évidence non ; cette dernière tient simplement à le remercier pour le bon travail qu'il fournit depuis sa réintégration. Jax acquiesce, conscient qu'il s'agit là d'une tactique de leader cherchant à le remotiver, le faire revenir à son état d'engagement habituel. D'ordinaire, il est le premier à proposer des actions visant à faire avancer leur enquête mais, aujourd'hui, l'agent fédéral s'est illustré par sa discrétion. Pas de rires, pas de blagues, pas de frappes dans le sac de la salle d'entrainement ni de partie de billard à la pause pour détendre l'atmosphère.

Le soir venu, il rentre chez lui les épaules basses après un entraînement de boxe merdique durant lequel il n'a fait qu'enchaîner les fautes stupides. Lorsqu'il consulte son ordinateur portable, il remarque un e-mail d'Isaac en attente de lecture mais referme le clapet sans l'ouvrir, pas disposé à travailler sur RUN FOR JUDY. Il finit par s'allonger dans le canapé, un bras derrière la tête, le regard rivé au plafond. Seule la lumière du retro éclairage de la chaine hifi tournant en boucle sur leur chanson éclaire le salon de l'appartement. Jax pense à elle. A toute ces fois où ils étaient allongés là, sur ce même sofa, empilés l'un sur l'autre, jeunes et amoureux. Il ne comprend pas. Avant que Marley ne revienne à Brisbane et depuis qu'elle lui avait envoyé ce sms très clair concernant la fin de leur relation, jamais il ne s'était posé la question de savoir si tout était fini entre eux. L'évidence était là : elle avait trouvé quelqu'un, elle ne souhaitait plus le voir ni lui parler, bref, ils étaient des exs, fin de l'histoire.

Mais que fait-elle en ville ? Pourquoi est-elle revenue ? C'était quoi, cette tentative de séduction à la laverie ? Cherchait-elle à le tester ? À voir s'il était toujours présent, toujours fidèle au poste et prêt à reprendre le jeu de leurs amours écorchés vifs au moindre signe de sa part, comme un bon chien ? Et son mec, alors ? Mills tourne sur lui-même, tend le bras et s'empare de la télécommande sur laquelle il zappe afin de changer l'ambiance sonore. Il pousse un grognement lorsqu'il réalise que l'album de The Weeknd est resté dans le lecteur. Voilà qu'une autre chanson se lance, pleine des souvenirs de sa si parfaite soirée en compagnie de Sofia. Agacé, il lance la télécommande sur l'autre fauteuil et se couvre le visage d'un coussin qu'il réserve d'ordinaire à des activités inavouables. Il n'arrivera pas à se masturber ce soir ; il n'a même pas envie d'essayer. L'impression d'être le dernier des losers lui saute à la gorge avec d'autant plus de puissance que Jax l'expérimente rarement, lui que personne n'arrête, que peu surpassent et que bon nombre admirent pour la détermination qu'il met dans tout ce qu'il entreprend.

Que faire ? Il ne sait pas. Des images de ses rêves de paternité viennent lui embrouiller l'esprit. Il s'aventure dans des projections scabreuses de ce que donneraient un mélange de Marley et lui, de Sofia et lui, d'Elizabeth et lui, de son ex de collège et lui ... C'est ridicule. Depuis quand est-il devenu une gonzesse travaillée par ses hormones et l'affolement de son horloge biologique ? Encore un peu, et c'est lui qui se tapera une grossesse nerveuse à la place de Brody ! Jax se redresse vivement, conscient d'être en train de se laisser sombrer dans son mal-être, dans ses remords et dans cet état d'impuissance qu'il déteste par-dessus tout. Son choix se fait sous le joug de son impulsivité légendaire : en moins de 10 minutes il s'est douché, a enfilé une tenue de soirée et claque la porte de son appartement bien décidé à n'y revenir qu'avec de quoi se vider la tête (entre autre). Peu importe son nom, l'heureuse élue, à défaut de rencontrer l'homme de sa vie, passera une nuit torride.

Mills a besoin de tirer les choses au clair.
Pour ça, il a besoin de tirer un coup.
Impossible de réfléchir correctement quand son bas ventre monopolise son attention.

S'il était déterminé à tout foirer, il ne s'y prendrait pas mieux.