all the past is haunting me

Ses pensées sont bruyantes, son esprit fatigué, son regard plus terne qu'à l'accoutumé. Channing ne se sent pas bien ce soir. Sa cravate lui donne l'impression d'étouffer, il sait que sa peau est plus chaude qu'elle n'est censée l'être à cause du champagne que sa fatigue tolère mal et il doit faire des efforts inhabituels pour suivre les conversations qu'il tient. Ce mois de juin est interminable et cauchemardesque, les événements qui se succèdent tous plus terribles les uns que les autres, et ses épaules faiblissent alors qu'il reste tant bien que mal debout. Pour reprendre les faits dans l'ordre, son cambriolage a ouvert le bal au début du mois en engendrant son déménagement. Un déménagement dont il se serait bien passé puisque quitter son cher à son coeur appartement de Spring Hill n'avait jamais été dans ses plans, mais la raison l'avait emportée et il s'était résolu à rejoindre Bayside pour dormir en sécurité. Puis c'est en milieu de semaine dernière qu'une chevelure rousse s'est présentée à la porte de son bureau au Walker Group, la même que celle qu'il a rencontré en mars dernier lors d'une course, avec dans son sac en bandoulière le pouvoir de déchirer sa famille. Freya est sa demi-sœur, fille de Richard. Une fille que son père a eu avec une femme autre que sa mère, une gamine de vingt ans dont il ignorait l'existence jusqu'à la voir débarquer avec des photos, un test de paternité et tout un carton de souvenirs dans son bureau. Comme si un grand frère absent et une petite soeur en détresse ne suffisaient pas à l'héritier, voilà qu'une nouvelle tête se joint à celles des enfants Walker. Comme si les responsabilités de l'entreprise familiale et celles de sa vie personnelles ne l'occupaient pas assez, il avait en plus à gérer une étudiante voulant apprendre à connaître le peu de famille qu'elle venait de trouver.

Sa coupe de champagne vide est échangée contre une pleine alors qu'un serveur passe à sa hauteur, et Channing y dérobe une gorgée de courage. Aux yeux de tous, sa mascarade est impeccable, son pas léger et son sourire toujours aussi photogénique. Le directeur général a l'air imperturbable, fidèle à lui-même, et il se plaît de ne pas trop attirer l'attention ce soir. Il échappe tout juste à une conversation lorsque qu'une porte entrebâillée sur un balcon lui fait de l'oeil, mais son regard s'attarde en chemin et s'arrête sur les courbes hâlées d'une demoiselle. Sur une silhouette qu'il connaît, une qui lui est familière et qui capte son attention. Une qu'il n'a pas vue ici depuis longtemps, une qui éveille sa curiosité alors que ses yeux remontent sur le dos puis les cheveux de Danika. Son premier amour est ici, au coeur d'un gala, et l'image le frappe. Les soirées mondaines ne les réunissent plus depuis des années, et il est surpris de la présence de la boxeuse aux prises d'une quinquagénaire qui semble lui tenir une palpitante conversation. Le Walker reste immobile un moment en songeant à détourner le regard et à sortir prendre l'air pour s'en tenir à son plan initial, il hésite à lui tourner le dos et à s'éloigner car il s'agirait sûrement de la décision la plus simple et sage à prendre. Mais quand il remarque que le poing de la demoiselle se contracte et que la femme en face d'elle ne semble pas vouloir lui faire grâce de sa compagnie, sa décision est prise. Ses prunelles noisettes se reportent une seconde durant sur l'extérieur, et il reprend une gorgée de sa coupe avant de s'avancer vers Dan.

S'approchant dans son dos, il vient prendre place à ses côtés en s'annonçant d'un sourire poli à la femme qu'il interrompt dans son monologue. « Channing. » Son regard vient à la rencontre du sien chocolaté alors que son sourire se fait plus doux et sincère auprès de la Riley. « Channing Walker. Oh mais si je me souviens bien, vous étiez un beau petit couple, les médias en étaient passionnés ! » La garce, pense t'il. Son attention se reporte celle qui a ouvert à nouveau la bouche, et l'amusement se veut de mise alors qu'il est loin de l'effleurer. « Madame Thomson. Vous me pardonnerez, mais je vous l'emprunte. » Esquissant un dernier étirement de lèvres à l'intention de l'autre, le couple d'antan lui tourne le dos et l'héritier les fait prendre congé en marchant à la hauteur de celle qui a cette facilité surprenante à le tirer en arrière en un battement de cils. Il attrape une coupe de champagne en chemin et la tend à la brune, s'arrêtant à pas lents avant de lui faire face. « Tu forces mon admiration pour avoir épargner le visage et la fierté de cette commère. » avoue t'il à voix basse dans sourire malicieux. Leurs dernières rencontres en date sont celles d'autres versions d'eux-mêmes, et revoir la brune dans une robe de cette beauté fait renaître des souvenirs douloureusement beaux dans son esprit. Elle le fait repenser à une période de sa vie où tout était plus simple, où ses épaules étaient plus légères et son quotidien plus facile, et ce soir plus facilement que n'importe quel autre il se surprend à être nostalgique. « Je pensais que tu avais déserté les galas. » constate t'il en prenant une gorgée de champagne, un peu curieux d'en savoir plus sur sa présence ici ce soir. et alors que Danika lui offre sûrement sa première conversation intéressante de la soirée, il tâche de ne pas trop abaisser ses murs. Pas pour les yeux de la boxeuse, il se moque de lui apparaître fatigué, mais parce qu'ils forment un tableau que les médias ne vont pas manquer de remarquer. Il peut avancer avec une certitude presque certaine que la brune bouillonne d'être ici, qu'elle préférerait mille fois être chez elle ou à frapper dans un sac, peu importe tant qu'elle n'est pas dans cette robe superbe et ces escarpins. Tout comme il sait que la brune peut lire en lui de la même façon, et que son sourire berne l'assistance mais certainement pas la femme dont il a intiment partagé le quotidien pendant deux ans. Mais la vérité est leur, et les médias ne doivent pas la voir.

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Ils s'éloignent, l'image du duo d'antan se réassemblant en l'espace de quelques secondes seulement. Channing ne pensait pas recroiser la brune ce soir, encore moins ici et dans cet univers qui, s'il a longtemps été le leur, ne leur ressemble plus à présent. Ses doigts attrapent une coupe de champagne supplémentaire sur le plateau d'un serveur alors qu'ils s'éloignent, et il tend cette dernière à la boxeuse alors qu'ils s'arrêtent à bonne distance de la quinquagénaire. Le brun fait une remarque à voix basse, félicitant le courage de la femme dont il connait les limites, et le rire de cette dernière ne tarde pas à clarifier la situation. « Sois pas admiratif tu serais pas venu me sauver et d’ici cinq minutes je causais un scandale. » Il porte sa coupe à ses lèvres en souriant sous le clin d'oeil qu'elle lui adresse, s'amusant un instant. « Ceci dis, cette soirée aurait peut-être été plus intéressante. » souffle t'il avant de tremper ses lèvres dans le pétillant doré, ses yeux divaguant à son tour sur la salle de réception. La soirée est longue et difficile pour l'héritier, et si le poing de Dan avait cédé à la tentation l'excuse aurait sûrement été parfaite pour les dispenser tous les deux de la moindre minute supplémentaire entre ces murs. Puisqu'il avait suivi la scène des yeux, il aurait sans doute été le plus rapide pour empêcher le pire et en aurait profité pour s'ellipser en même temps que la demoiselle. Une opportunité manquée, un scandale épargné et une réputation sauvée.

Le regard chocolat de la brune ondule sur sa peau, l'inspecte, et en apprend bien plus sur son état que l'objectif des médias n'y parviendra jamais. Danika le connaît et ce sur le bout des doigts, encore plus maintenant qu'elle a conscience des courses auxquelles il prend part. Elle sait lire les tensions de son visage et celles de ses épaules, elle sait qui se cache derrière ce masque et ce soir plus facilement que les autres elle peut aussi comprendre qu'il est fatigué et impatient de rentrer chez lui. Channing fait toutefois un constat à voix haute, celui d'être un tantinet surpris de la revoir dans cet univers alors qu'elle semblait l'avoir laissé derrière elle des années auparavant. « Ce n’est plus pour moi. » Leurs coupes se vident plus rapidement qu'elles ne le devraient, les aidant à maintenir le cap. Son regard se pose sur elle alors qu'elle hausse les épaules avec une certaine nonchalance, poursuivant. « Mon père a toujours été plus doué que moi pour ces choses-là. » Ses lèvres s'étirent doucement à la mention de son père, mais le Walker ne rebondit pas sur le sujet. Ni elle ni lui n'ont envie de s'engager sur ce terrain, pas quand cette soirée est déjà délicate. « Je ne pouvais pas y échapper à celle-là, mon père connaissait bien le conseiller.  Le dojo peut bénéficier de son petit coup de pub. » Il s'hydrate les lèvres après une nouvelle gorgée, lui souriant avec douceur alors qu'il ne peut qu'imaginer à quel point sa vie à elle est différente de celle qu'il lui a connu. « J'ai compris. Dis le, tu t'ennuies maintenant que je ne suis plus à ton bras. » il est un brin taquin, apportant une touche de légèreté à cette conversation. Il se permet d'être gentiment moqueur car il sait qu'elle va réagir, et qu'il n'est pas aussi rancunier que la fin abrupte de leur relation l'autoriserait pourtant à l'être. Les courses et les combats ont grandement contribué à les faire renouer, chacun trouvant l'un chez l'autre ce sentiment d'être compris et accepté. Celui qu'ils ne trouvent nul part ailleurs. « Merci de m’avoir sauvée. » Il hausse doucement les épaules, faisant une moue. « C’est que je me souvenais presque plus de comment tu étais habillé en costume ! » Il se reporte sur elle, un air amusé sur les traits alors que l'héritier est le premier à reconnaître voir deux personnes différentes dans le miroir selon les destinations de ses soirées. Ses tenues sombres et décontractées n'ont aucune similitude avec l'ajustement millimétré et raffiné de ses costumes, et il mentirait en prétendant ne jamais avoir eu un sourire amusé en pensant au contraste de ses deux identités. « et j'ignorais que ton dressing cachait d'aussi belles robes. » avoue t'il avec un sourire sincère. Danika est superbe, et peu importe que le lien qui les unit à présent n'est plus le même que par le passé, il n'est pour autant pas aveugle au point de le nier. Ses courbes hâlées sont mises en valeur par les teintes vertes de sa robe et les plis du tissu semblent lui avoir été destinés.

Le silence qui s'installe entre deux échanges est confortable, et les deux amants du passé ont tout le loisir d'en profiter alors qu'ils savourent la légèreté du moment qu'ils s'offrent. « Tu te souviens quand je venais te kidnapper ? » Ses lèvres dessinent un sourire sur son visage alors qu'il la regarde, laissant à son tour la nostalgie s'insinuer dans ses pensées. Bien sûr qu'il s'en souvient, et en y pensant cette époque lui semble si lointaine qu'il est surpris de s'en souvenir si nettement. Sûrement le fait que par sa simple présence, Danika réouvre ce chapitre de sa vie sans même avoir à essayer. « Tu étais ma conversation la plus attendue de la soirée. » souffle t'il sur le même ton avant de terminer sa coupe et de la remplacer. Dan avait toujours eu cette fâcheuse tendance à venir l'entraîner avec elle lorsque les galas s'éternisaient, et même quand ce n'était pas le cas. Channing la suivait en s'excusant de son plus beau sourire, et ils disparaissaient des radars en tâchant de ne pas semer leurs fringues en chemin. « J’ai l’impression d’être à un million d’années-lumière de ce monde-là. » Moi aussi pense t'il alors que les mots se meurent dans sa gorge. « Même si le costume te va toujours aussi bien Chan, ça ça n’a pas changé. Je ne sais pas comment tu fais. » Elle est moqueuse et il appuie sur elle un regard amusé, ses lèvres retenant un rire alors qu'il hausse mollement les épaules. « J'ai beaucoup de chance. » se contente t'il de répondre. Car il ne s'attribue pas vraiment de mérite, si ce n'est d'avoir un visage suffisamment distrayant pour endosser son rôle et l'habitude de s'en servir. Une énième gorgée de champagne descend dans sa gorge, et cela l'aide à respirer. « Je ne voudrais pas t'arracher à cette merveilleuse soirée, mais et si on allait faire un tour ? » propose t'il assez soudainement à son tour, sérieux. « En hommage au passé, et aussi parce-que cela nous fera le plus grand bien. » Parce-que toutes les excuses sont bonnes, parce-que c'est en suivant cette philosophie qu'ils ont maintes et maintes fois disparus de galas. Une fois de plus ne va pas les ruiner. Elle accède à sa requête et ils quittent la grande salle principale, l'héritier laissant échapper un souffle d'aise alors qu'ils s'avancent côte à côté et disparaissent du champ de vision de tous. L'occasion est idéale pour abaisser les masques et relâcher la pression. « Je ne sais pas si tu te souviens... c'est l'hôtel avec la grande cour intérieure. » Il lui jette un regard, ses pas les guidant jusqu'au luxueux jardin à ciel ouvert qui semble perdu au coeur du palace. Généralement, chaque lieu de prestige ici à Brisbane a une spécificité. L'Emporium Hotel par exemple a des suites d'exception avec des piscines à débordements et des vues imprenables, et le lieu de réception de ce soir ce magnifique espace arboré au coeur de ses murs. Channing n'y a jamais mis les pieds, n'ayant jusque lors pas eu l'occasion. « Sauf si tu as peur de prendre froid, bien sûr. » Il lui propose cette sortie à l'air libre quand l'ambiance qui règne à l'intérieur semble les oppresser. « Ou une meilleure idée. »

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Certains soirs, il est facile de revêtir le masque et de sourire en levant une coupe. Certains soirs, il est facile de berner l'assistance, de passer le temps et de trouver même un peu de plaisir à tout ce cinéma. D'autres, la mascarade est étouffante et interminable. Ce soir est l'un d'eux. Channing provoque ses moindres sourires, pense perpétuellement à conserver une démarche légère et regarde plus régulièrement que d'ordinaire sa montre. Il a hâte de rentrer chez lui, de se débarrasser de son costume et de se glisser sous ses draps. C'est la seule chose dont il a envie à l'instantané, du moins jusqu'à ce que Danika croise son regard et que ses pensées s'allègent. Elle échappe un rire alors qu'il fait mention du divertissement qu'elle aurait pu apporté à ce gala, et ils s'éloignent sans un regard en arrière. « C’est vrai que c’était pas mal d’avoir un bel homme à disposition,  ça rendait les choses plus…intéressantes. Moins ennuyeuses ça c'est certain. » Ses lèvres s'étirent alors que son regard se pose chastement sur elle, témoin de l'amusement qui scintille dans ses prunelles une seconde durant. Danika a toujours été de ces femmes confiantes et sûres d'elles, celles qui ne reculent devant rien et saisissent la moindre opportunité pour rebondir sur des propos appelant aux réactions. Ce n'est pas surprenant qu'ils soient nostalgiques, pas quand on voit la facilité avec laquelle ils parviennent en quelques phrases seulement à se comprendre comme s'ils n'avaient jamais cesser de se fréquenter. « Le divertissement préféré l'un de l'autre. » poursuit-il sur la même lancée en lui jetant un nouveau regard, riant à voix basse à son tour. L'héritier fait ensuite remarquer la beauté de la robe choisie par la brune, la beauté de sa robe et la sienne indirectement. Pourquoi le nier ? Ils n'ont jamais été avares de compliments l'un envers l'autre, et même si leur lien est bien différent après toutes ces années Channing doit reconnaître que la Riley est toujours une très belle femme. « J’en ai laissé quelques unes entre les gants de boxe. » Il secoue doucement la tête à son clin d'oeil, essayant d'imaginer ce à quoi peut ressembler son dressing à présent. Car si à une époque Channing le savait débordant de robes et diverses folies, il se le visualise dorénavant plus sobre. Il imagine le dressing de la mère célibataire plus fonctionnel et classique qu'il ne l'a été, il l'imagine bien différent de celui dans lequel il piochait quand Danika lui laissait le privilège de choisir sa tenue et lui de choisir la sienne.

Sa conversation la plus attendue de la soirée. Danika l'avait longtemps été, et étrangement le sentiment semblait se débarrasser de sa poussière ce soir. Elle parcourt son visage alors que le silence se réinstalle d'une manière confortable, et le brun la regarde sans un mot supplémentaire. À quoi songe t'elle à cet instant précis ? Est-elle entrain de découvrir une ride sur ses traits, de constater qu'il est épuisé ou de repenser comme lui à leurs soirées dorées ? Peut-être les trois en même temps, pour ce qu'il en sait. Il esquisse un sourire, comme pour répondre à la question silencieuse que ses yeux lui posent. C'est ce qu'il fait de mieux, prétendre aller bien, et pourtant il sait qu'il ne parvient pas ne serait-ce un minimum à le lui faire croire. Elle le connait trop bien pour tomber pour son sourire terne et son regard vide. C'est sûrement pour échapper à sa question qu'il lui propose d'aller prendre l'air, et il est heureux que sa proposition soit si bien reçue. « Allez en souvenir du passé. » Ils ont toujours facilement trouvé des excuses sur lesquelles s'entendre dans ces situations, et une fois leurs coupes échangées ils prennent la direction de la cour à ciel ouvert.

Le silence est apaisant en sa compagnie, et lorsqu'elle enroule son bras au sien Channing la laisse faire en ralentissant un peu l'allure. Il a tendance à l'oublier, mais en avoisinant les deux mètres ses foulées sont bien plus grandes que la moyenne. et même si ses talons lui font gagner quelques centimètres, Dan est loin d'avoir d'aussi grandes enjambées que lui. Ils atteignent peu après la grande porte qui s'ouvre sur le jardin, et alors qu'il sous entend que le froid risque d'onduler sur sa peau nue, la demoiselle fait mine de s'offenser. « Moi peur ? » Il met les mains en évidence alors qu'elle lâche son bras, sa coupe toujours pleine alors qu'il vient à en dérober une gorgée. « Sait on jamais. » se défend t'il face à son air provocant qui ne changera probablement jamais, et ce pour son plus grand plaisir. Ils s'avancent et la fraîcheur les enveloppe, pas que cela empêche leurs épaules de se détendre. Sa respiration forme quelques secondes durant un panache nuageux, sans doute encouragé par le champagne qui réchauffe son organisme. Il a anormalement chaud, et la nuit bien entamée à cette période l'année est fraîche pour des habitués de grandes chaleurs comme le sont les australiens. Son regard noisette découvre l'endroit avec un certaine admiration malgré lui, les rosiers ayant des teintes argentés sous les lumières artificielles tandis que le bruit d'une fontaine résonne dans le silence. C'est surréaliste qu'un endroit si beau soit perdu ici au milieu de ce palace. L'héritier s'avance à pas lents, distrait alors que Danika reprend la parole. « Je crois que des fois, ça me semble plus facile de monter sur un ring que d’affronter une soirée comme celle-ci. » Il ne peut qu'acquiescer doucement alors que son regard vagabonde toujours, avant de se reporter sur la brune. « Ton adversaire sur le ring est bien plus franc dans les coups qu'il te porte que ceux dans le dos qui te sont assenés ici. » souffle t'il d'un ton léger, quoique assez plat. Sa fatigue transpire bien davantage de ses mots maintenant qu'ils sont seuls, sa lassitude aussi. Il est las de faire semblant, depuis longtemps déjà mais ce soir le masque tombe face à celle en qui il a confiance. Il le laisse tomber, lentement et avec un brin de regret quand il préférerait être assez fort pour pouvoir le garder et se persuader d'aller. Mais si Channing ne sait pas à quel point Maddox et le temps a changé la combattante qui lui fait face, il est persuadé d'une chose : elle ne le jugera pas. Pas quand ils partagent les mêmes pensées, pas quand ils savent tant de choses l'un sur l'autre et que Danika a conscience de son épuisement juste en le regardant. Sans s'en rendre compte, il s'est arrêté et lorsque son regard retrouve celui de la demoiselle, elle est bien plus proche de lui qu'elle ne l'a été jusque maintenant. « Tu veux en parler ? » Ses yeux parcourent les siens en silence, et il a un moment de réflexion. Pas d'hésitation quant au fait de vouloir s'ouvrir à elle, mais sur la façon dont il souhaite le faire. Ils se sont déjà vus dans bien des situations, et même si le temps a laissé des traces celles de l'amour qu'ils se sont un jour porté sont celles plus présentes dans son esprit. Son sourire s'arque un peu, davantage par habitude que par réelle tentative de l'y faire croire. C'est lui qu'il cherche à berner, pas elle. « Je ne saurais même pas par où commencer, Dan... » souffle t'il à voix basse alors qu'il fuit son regard. Il hausse les épaules et secoue la tête en réfléchissant, mais les mots ne viennent pas. Il pourrait lui dire que Gabrielle, la femme dont il est tombé amoureux après leur histoire, est à Brisbane alors qu'il la pensait à Los Angeles. Il pourrait lui dire avoir été pris en joue quelques semaines plus tôt, un flingue entre les deux yeux sous son propre toit, alors qu'il rentrait de soirée. Il pourrait lui dire tellement de choses, tellement qu'il ne sait pas comment y arriver. « Je ne sais pas si j'ai besoin d'un mois de sommeil, de partir à l'autre bout du monde ou de me faire renverser par une voiture. » Il plaisante pour la voiture. quoique Son regard se reporte sur elle et il plisse ses lèvres entre elles, l'air désolé. « Je ne sais pas grand chose en ce moment. Mais c'est pas la grande forme, malheureusement. » Il ne réfléchit pas quand sa main vient replacer une mèche charbonneuse de la boxeuse derrière son oreille, ne se rendant compte de leur proximité que lorsque que sa main s'attarde sur sa peau. Une peau dont il sent presque le parfum, une dont il ne se souvient pas du goût mais dont la chaleur qui s'en émane trahit le fait qu'il n'est pas le seul a avoir eu la descente facile sur le champagne.

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« Je comprends ce que tu veux dire. » Sa voix résonne avec simplicité, lui faisant l'effet d'une caresse. Elle lui provoque les mêmes sensations que celles qu'il lui offre sans doute au travers de leur contact, sa main s'attardant sur sa peau comme si elle y trouvait soudainement du réconfort. et au fond, Channing le sait, c'est le cas. La nostalgie les enveloppe et ils n'y résistent pas, s'apaisant un instant durant tandis que leurs souvenirs refont surface. Ceux d'une époque plus simple, ceux de leur amour et de moments inoubliables. Ceux de souvenirs qu'ils ont forgé ensembles, et que l'héritier ne regrette pas le moins du monde. Danika est rattachée à une belle période de sa vie, une qui en a précédé une autre plus sombre certes, mais leurs récentes retrouvailles régulières ont contribué à réparer leur lien distendu par leur rupture. Il se sent en confiance et compris alors qu'il aimerait trouver les mots justes pour parler de ses tourments, mais ses paroles se meurent sur sa langue et il demeure vaste et imprécis. Chose que Danika ne semble toutefois pas lui reprocher. « Je sais que tu comprends. Je pense qu'on se comprend, et c'est pour cette raison que je t'en parle. » À sa façon, à sa manière et avec ses mots. Mais il lui parle, ne prétend pas aller bien quand le mensonge serait trop gros pour être entendu par celle qui a partagé intimement sa vie. La brune semble tout aussi fatiguée que lui, et il s'en rend compte un peu plus facilement alors que leurs regards s'ancrent. « C'est valable pour toi aussi, tu sais. Tu peux me parler, si tu en as envie. » de la source de la fatigue dans tes yeux, de celle qui affaisse tes épaules et calme ton regard de braise. Il est sincère, avant de se taire lorsque sa main hâlée et chaude vient superposer la sienne sur sa joue. Il ne bouge pas, n'esquisse pas le moindre geste alors que l'étau dans lequel vient d'être prise sa main est étrangement agréable. Chaud, réconfortant et tendre. et la chaleur, le réconfort et la tendresse, c'est tout ce dont il a besoin à l'instantané. « Si tu pars à l’autre bout du monde, je veux bien des vacances aussi. Bon par contre j’ai pas très envie de me faire renverser par une voiture. » La pointe d'humour dans ses paroles amuse courageusement ses traits, et il se met à sourire doucement alors que son pouce effectue une caresse sur sa pommette. « Je te ferais signe le jour où je prends un avion au hasard. » souffle t'il, faisant indirectement référence à leurs nombreux voyages tous plus différents les uns que les autres. Car l'aventure a toujours eu une place particulière dans leurs cœurs, les amants ayant été de ceux à céder à leurs moindres folies sur un coup de tête. Ils étaient riches, jeunes et beaux et avaient toutes les excuses pour en profiter au maximum. et c'est ce qu'ils ont fait. « Je suis là si jamais. » Il en prend conscience en l'écoutant, et son sourire se fait transparent alors que sa caresse sur sa joue s'arrête un instant. « Merci Danika. » il marque une courte pause. « Je vais le dire à voix haute également, quitte à me répéter. Mais je veux que tu saches que c'est valable pour toi aussi. »

Il n'aime pas s'appuyer sur l'épaule de quelqu'un. Il est de ceux dont elles sont solides mais qui n'aime pas infliger leur poids à d'autres, et Dan le sait. Pourtant, ce soir, quand elle lui dit qu'elle est présente pour lui, il l'entend et l'accepte. Il accepte de baisser les armes parce-que c'est elle, parcequ'il lui fait confiance et qu'il a envie de suivre son instinct. Celui qui lui dit de lui faire confiance et de saisir la main qu'elle lui tend. Un silence s'installe, et s'il n'est pas inconfortable il est toutefois marqué par un non dit. Channing la regarde avec patience, se faisant silencieux alors qu'il croit voir un éclair de chagrin traverser le regard chocolat de la boxeuse. « Chan…. je peux te poser une question ? » Sa main sur sa joue ne le quitte pas et il hoche lentement la tête, lui laissant le temps nécessaire pour trouver les mots qu'elle semble chercher. Elle s'apprête à lui dire quelque chose d'important, il le devine à son regard alors qu'elle ferme les yeux avant de les rouvrir pour les plonger dans les siens noisettes. Il soutient le contact avec sérénité, l'encourageant d'un chaste étirement de lèvres. « Est-ce que tu penses que je suis incapable d’aimer ? » Ses sourcils se froncent presque instantanément. C'est une question puissante et qui le laisse sans voix, la surprise se lisant sur son visage. Quelqu'un lui a balancé au visage, c'est une certitude, et il est décontenancé une seconde durant. Danika a été marquée au fer rouge par ces paroles à la façon dont elle les répète, et il s'hydrate chastement les lèvres avant de lui redresser délicatement le menton en voyant son regard flancher. « Eh. » souffle t'il, et il capture à nouveau l'intérêt de ses prunelles chocolatées avec un sourire doux. « Tu m'as aimé Dan, et je t'ai aimé. Tu m'as aimé, férocement et sincèrement. » Ses mots sont prononcés juste assez forts pour qu'elle les entende, et il poursuit sur le même ton. « Tu es capable d'aimer et plus encore. Crois moi, je sais. » Il sait. Il a reçu son amour, lui a rendu, et est sûrement l'un des mieux placés pour attester que son premier amour a un coeur qui a beaucoup à offrir. Un peu trop peut-être, trop pour que la brune puisse y contrôler à sa guise et il demeure persuadé que c'est cette perte de contrôle qui a provoqué sa fuite. Elle a eu peur, et il ne lui en veut pas. Plus maintenant qu'il a compris.

Il n'ose lui demander qui a tenu ces propos à son égard même s'il l'interroge du regard. Il ne veut pas la contraindre à faire un aveu qu'elle n'est pas prête à faire, même s'il aimerait qu'elle lui en parle. Channing est d'un naturel patient. Il se tait dans un souffle, attendant qu'elle reprenne la parole. Mais elle n'en fait rien. Il la suit des yeux alors que sa main se pose sur son torse, qu'elle se hisse sur la pointe des pieds et vient presser ses lèvres sur les siennes. Le contact l'électrise, le fait tressaillir un instant alors qu'il est trop surpris pour réagir. Ses yeux se ferment d'eux mêmes, son coeur se met à tambouriner et ses pensées se bousculent. Il est stoïque, avant de finalement réagir et de céder aux souvenirs auxquels aspirent ce baiser. Il ne devrait pas, pas quand il est proche d'une autre femme depuis quelques mois, mais il est incapable de rassembler ses pensées. L'héritier ne met pas cela sur le compte de l'alcool, car même s'il a chaud ce n'est pas uniquement le champagne qui l'incite à lui rendre son baiser, à glisser sa main sur sa taille pour la rapprocher de lui et prolonger l'instant. Ce sont ses doutes qui l'envahissent, la nostalgie et le confort que lui apporte son ex qui lui font beaucoup trop de bien ce soir pour qu'il lutte contre cet apaisement. Alors il y cède, et lui rend son baiser. Leurs bouches se fondent l'une avec l'autre comme s'il n'avait fallu qu'un frottement pour les faire se souvenir de la danse qu'elles ont partagé le temps de leur idylle, et l'héritier profite de l'instant. Lorsqu'il rompt le contact, son regard se plonge dans le sien alors que leurs bouches se séparent mais que le contact perdure au travers de leurs corps. « Dan... est-ce que ça va ? » souffle t'il, concerné et doux. Car il la connait assez pour comprendre qu'elle ne l'embrasse pas par amour, tout comme il ne lui rend pas de cette même façon non plus, mais qu'ils ont à nouveau bien plus de points communs qu'ils ne s'en soupçonnent. Sa main reste sur sa taille et il cherche pas à briser le contact, s'y accrochant malgré lui autant que la boxeuse. Il cherche à la réconforter, la rassurer et la soutenir. Il cherche à être là pour elle quand personne d'autre ne l'est pour eux au beau milieu de ce jardin luxuriant.

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all the past is haunting me

« Je crois que je suis juste fatiguée de me battre Chan. » L'aveu demeure vague et imprécis, bref et timide, et pourtant le brun sait qu'il est loin d'être anodin. Ils ont tous les deux toujours eu du mal à s'exprimer sur leurs sentiments, leurs ressentis et leurs émotions, trop habitués à les cacher aux yeux du monde. Si habitués à leurs propres mensonges qu'ils y croient eux mêmes, pris au dépourvu lorsque la réalité refait surface l'espace d'un instant. Lorsque les barrières de leurs cœurs cèdent et les contraignent à baisser les armes, lorsque le masque tombe et qu'ils ne sont pas seuls face à leur reflet. Il faut pourtant l'accepter, parfois, et redresser le regard pour affronter un miroir plus terne et plus triste. Plus réel. C'est ce qu'ils font au coeur de ce jardin, les confessions des amants du passé bercées par la brise nocturne et le silence apaisant de l'endroit désertique. Il n'est pas vraiment surpris par les paroles de la Riley, pas quand il sait à quel point Danika est une femme déterminée et forte. Pas quand il sait qu'elle est têtue et fière, assez douée dans cela pour berner bon nombre de ses proches quant au fait d'aller. et plus on s'enfonce dans un mensonge, plus il est difficile d'en sortir. Mais sans surprise, tôt ou tard la façade se fragilise et elle l'est visiblement assez ce soir pour que son coeur s'ouvre un tantinet. Pour qu'elle ose chercher du réconfort et de la compréhension dans les yeux de l'héritier qui ne la lâche pas du regard, attentif et doux. Il ne répond rien, pas quand il sait aussi bien qu'elle que ce combat peut prendre fin à n'importe quel moment lorsqu'elle se sentira prête à lui visualiser une autre fin que celle qu'elle s'obstine à lui attribuer.

Le brun lui offre son soutien à haute voix, comme une parenthèse évidente à laquelle il tient à mettre un point d'honneur, et ses mots sont reçus avec un sourire. « Je le sais Chan, merci. » Certains rappels sont bons à entendre, apaisent les cœurs et les maux, font guise de piqûre de rappel et ont souvent leur importance dans ces conversations profondes. Il y a un instant de flottement après ces mots, un durant lequel une hésitation s'installe jusqu'à être chassée par un battement de cils lorsque la brune replonge son regard dans le sien. Les mots qui s'échappent de ses lèvres le choquent et il trouve rapidement les siens pour parer à la douleur de ce que la demoiselle lui annonce. On ne fait pas une telle confession sans avoir été blessé, on ne prononce pas de tels mots en l'air. On les répète forcément, les rendant inévitablement plus vrais comme pour se blesser un peu davantage dans le processus en étant persuadé qu'on le mérite. Sa main toujours sur sa joue, Channing cherche à la rassurer mais au-delà de ça cherche surtout à ce qu'elle le croit. Il ne lui dit pas ce qu'elle veut entendre, ni quoique ce soit sans le penser. Elle soutient difficilement son regard et son coeur se serre tristement à la pensée que l'âme qu'il a jadis chéri et protégé est désormais abîmée et fatiguée. Quelqu'un y a touché, non pas pour l'embellir mais la salir, et il ne peut s'empêcher de se tendre. Danika mérite d'être heureuse, mérite de rayonner aux côtés d'un homme et non pas dans son ombre, et le simple fait que celui qu'elle ait laissé approcher son coeur n'en ait pas été digne l'attriste profondément. « Moi…je n’en suis pas si sûre. J’ai fui notre relation comme j’ai fui les autres après toi. » Ses yeux ne quittent pas les siens et ses lèvres se pressent chastement entre elles tandis qu'il secoue doucement la tête. « Tu ne sais pas apprivoiser tes sentiments, mais cela ne veut pas dire que tu n'en as pas pour autant. » Son pouce caresse chastement sa pommette et finalement, l'espace est réduit alors que leurs lèvres se retrouvent après de longues années d'abstinence.

Le baiser est doux, réconfortant et tendre, leur apportant à la fois tout ce dont ils ont besoin et tout ce dont ils essaient de se dispenser. et inévitablement, ils s'y accrochent. L'instant se prolonge, s'éternise alors qu'il sent les mains délicates de la boxeuse dans ses cheveux et que les siennes caressent ses courbes. Channing pourrait renoncer au baiser, rompre le contact quand il sait très bien que ses pensées ne sont hantées que par une seule femme et qu'elle n'est pas celle qu'il embrasse. Il pourrait, pourtant il n'en fait rien quand ce baiser n'est pas une preuve d'amour mais de compassion. Leur amour a été fort mais il n'est plus à présent, et cet échange est une parenthèse en hommage à une époque meilleure. À une époque où il était fier et léger à son bras, une où il était éperdument épris d'elle et prêt à toutes les folies pour la satisfaire. Le brun a bon espoir que la coréenne ne le prenne pas trop mal lorsqu'il le lui dira, lorsqu'il lui dira avoir embrassé son ex, sûrement car tout est si clair dans son esprit qu'il ne se doute pas un seul instant que cela puisse les mener à rompre si brutalement.

Il lui demande si elle va bien alors qu'ils se reculent juste assez pour se regarder, pour chercher des réponses dans le regard l'un de l'autre. « Je... Je ne sais pas… » Non, mais ce baiser aide à se sentir un peu mieux est sûrement la vraie réponse derrière son interrogation. Non, ils ne vont pas bien, mais pas à cause de leur échange qui au contraire les aide à aller un peu mieux. « Je crois que j’avais juste envie de t’embrasser. » Lorsqu'ils se sont séparés, l'héritier a été si meurtri qu'il ne pensait jamais lui pardonner un jour. Pourtant c'est le cas ce soir, alors que leurs facettes obscures se côtoient et les rapprochent, alors qu'ils se comprennent ce soir avec peut-être plus de profondeur que lors de leur idylle. « De revenir à un temps où tout me semblait plus simple. Où j’étais heureuse…dans tes bras. » Ses lèvres s'étirent doucement sous le regard chocolat de la boxeuse qui chute à nouveau sur ses lèvres. Channing ne recule pas, se penchant à nouveau vers elle pour presser un baiser protecteur sur son front. « On ne peut pas y retourner... pas vraiment, pas indéfiniment. » souffle t'il d'une voix douce, quoique nostalgique et lointaine, perdue dans ses souvenirs. Il la regarde toujours, sa main sur sa taille, comme désintéressée à l'idée de la quitter. « Mais pour le temps d'une soirée, il n'y a pas de mal à remonter le temps. Non ? » et sur ses mots, il glisse doucement sa main dans la sienne avant de faire tourner la demoiselle sur elle-même, l'héritier autorisant son éternel romantisme à refaire surface alors qu'il sait que Dan lui apprécie ce côté pourtant considéré comme de trop par la coréenne. « Viens, suis moi. » souffle t'il en se penchant vers elle avant de l'entraîner avec lui, réempruntant le chemin du passé.

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