« Assieds-toi Cian. » Après la cinquième fois à en lui donner l'ordre, il finit par capituler. Il faut croire que même son orgueil à des limites. Sa technique de semi-boiter qu'il pense super subtile ne l'est pas du tout. Tu te dis à chaque fois qu'il finira par écouter son corps et qu'il prendra une pause quand il en ressentira le besoin. Mais non, il ne fait que répéter que tout va bien, alors que ça crève les yeux que ça ne va pas du tout. Ce doit être terrible lorsqu'il arrive le soir chez lui après une longue journée à encaisser la douleur. Il en a sûrement pour des jours à s'en remettre. Putain d'orgueil de mec, il recommence à chaque fois cet idiot. Idiot que tu aimes de tout ton coeur et c'est bien la raison pour laquelle tu prends soins de lui - ou tente de, parce qu'il laisse personne le faire. Tu viens t'asseoir directement dans le sable à côté de lui, alors que les filles continuent leur immense château de sable un peu plus loin. Vous devez en avoir au moins pour dix minutes avant qu'une massacre la tour de l'autre et que la troisième guerre mondiale ne soit déclenchée. C'est un dix minutes non négligeable pour aborder les sujets qui fâchent - les siens, certainement pas les tiens. « Ton physio m'a dit que tu avais manqué pas mal de rendez-vous. » Non, c'est tout-à-fait faux. Même si t'as essayé de gratter l'information, son physiothérapeute sait très bien le lien qui vous unis et il respecte bien la confidentialité entre le professionnel et le patient. Malheureusement pour lui, tu peux encore passer par-dessus tout ça. Et soyons honnête, son physio a sûrement bien envie que tu le secoues un peu pour le forcer à être plus discipliné sur sa rééducation. S'il continue ses conneries, sa jambe pourrait ne jamais revenir comme avant. « Okay c'est faux, j'ai regardé sans demander, mais c'est parce que j'm'inquiète pour toi. » que tu lui avoues par la suite. S'inquiéter pour l'autre, c'est une raison suffisante pour passer outre les règlements, non ? Non, pas vraiment, mais tes motivations sont pures et Cian ne pourra jamais dire le contraire, même si tu sais très bien qu'il te sortira son baratin habituel: t'inquiète pas, je vais bien, gnagnagna. Non mais sérieusement à quel point il te prend pour une conne ? Toi et tous les autres qui l'entourent d'ailleurs. Tu es bien loin d'être la seule à avoir droit à ce mensonge. Tu le sais. Ça veut pas dire pour autant que tu l'acceptes. Il y a longtemps déjà qu'il aurait dû se reprendre en main. « Tu prends encore des anti-douleurs ? » que tu lui demandes par la suite. Ne manquerait plus qu'il crée une dépendance aux médocs en plus de tout le reste. Ça n'annonce rien de bon.

@cían atwood

« Assieds-toi Cian. » Je retiens avec force le soupir que j’aimerais lâcher, il me faut tout un contrôle pour ne pas lever les yeux au ciel et m’échapper vers les filles justes pour rappeler à Leslie que je fais ce qui me chante sans qu’elle ne soit dans l’obligation d’intervenir constamment. C’est le regard noir qu’elle me lance qui me conseille de finalement m’asseoir sur le sable plutôt que lui tenir tête et déclencher une guerre alors que l’après-midi fait tout juste de commencer. Ce que je ne souhaite pas lui dire, c’est qu’il m’est difficile de trouver une position confortable lorsque je me retrouve assis sur le sol de cette façon. Heureusement, le sable me permet de creuser légèrement autour de ma jambe et près de ma hanche afin de créer comme un coussin qui me permet d’être plus ou moins à l’aise. Je sens le regard de la brune qui se balade sur mon profil et je pourrais entendre la course de ses pensées qui démarre au quart de tour depuis quelques minutes. « Ton physio m'a dit que tu avais manqué pas mal de rendez-vous. » J’aurais dû me douter que son invitation n’avait rien de complètement innocent. « Il t’a rien dit du tout. » Je suis le premier à insulter Josh de manière régulière, si on me demande, il finira toujours par être le con de l’histoire, mais je sais que le jeune homme ne serait pas du genre à briser le secret professionnel. Même pour les beaux yeux de ma meilleure amie. « Okay c'est faux, j'ai regardé sans demander, mais c'est parce que j'm'inquiète pour toi. » Et nous y voilà… La véritable raison de son insistance pour que je vienne passer l’après-midi avec elles. Mon envie de me lever pour fuir ne cesse de grandir, mais le regard de Leslie me cloue sur place. « Je vais bien. » Elle aura le droit au même discours que les autres, parce que je suis incapable de faire mieux. Dire à tout le monde que je vais bien, prétendre que ce n’est trois fois rien, que les oublis ne sont pas si fréquents quand en réalité, je fuis la physio avec une volonté de fer. « Arrête de me regarder comme ça. » que je grogne, le regard fixé sur les filles qui continuent à jouer un peu plus loin.  

Ce n’est ni le moment, ni l’endroit pour se lancer dans une conversation au sujet de ma rééducation. J’ai conscience que Leslie est véritablement inquiète, que ce ne sont pas des paroles en l’air. Cela se lit sur son visage, à la manière dont elle se mordille la lèvre, nerveuse à l’idée que je ne lui dise rien ou plutôt face aux questions qu’elle n’a pas encore oser poser. J’aimerais qu’elle abandonne le sujet, que l’on revienne à une conversation tout ce qu’il y a de plus banale, mais à sa place… J’insisterais avec bien plus de force, alors j’attends, le reste de l’orage, les questionnements qui vont forcément arriver, sans jamais promettre qu’elle obtiendra toutes les réponses qu’elle cherche. J’enfile lentement ma carapace, n’étant pas prêt à lui donner toute justification sur mon comportement. Personne ne semble comprendre que la physio ne fait qu’accentuer les douleurs sans jamais m’offrir le moindre répit. Tous ceux qui s’immiscent dans le processus ne voient pas tout ce que j’ai pu perdre, tout ce que je suis incapable de faire et tout ce que cela implique. L’armée refuse de me donner l’autorisation de reprendre pleinement et tout cela m’entraîne dans une spirale qui ne m’empêche d’avancer. « Tu prends encore des anti-douleurs ? » - « T’attends encore que l’abruti te rappelle ? » Je mords plus vite qu’elle, mais le regrette à la seconde où les mots m’échappent. Loin d’être fier de moi, je baisse la tête, sans jamais croiser le regard de Leslie. Les secondes s’écoulent faisant s’étirer le silence avant que je ne soupire lentement. « Excuse-moi… » Elle sait. Elle me connaît assez pour savoir que si je réplique avec autant de force c’est que je ne vais pas aussi bien que je ne cesse de le prétendre et je déteste que l’on puisse aussi bien lire au travers de mes barrières. « J’en prends de temps en temps. » A chaque journée en réalité, plus que ce que le médecin m’a réellement conseillé. « Leslie, c’est rien. » A force de le répéter, elle va bien finir par me croire, non ?!

« Il t’a rien dit du tout. » qu'il te balance, clairement sur la défense. Tu roules des yeux intérieurement. Tu ne vas clairement pas s'abaisser à son niveau. À quel moment est-ce qu'il a commencé à ressentir le besoin d'être sur la défensive avec toi ? C'est idiot. Il n'y a pas de ça entre vous deux. Tu saurais l'écouter et entendre sa version de la situation. Tout comme il devra toutefois être capable d'entendre ce que tu as à dire, autant l'amie que la médecin. C'est sûrement cette étape là qu'il ne veut pas s'infliger. Sorry, not sorry, il y aura quand même droit qu'il soit ou non consentant. « Je vais bien. » Joli mensonge. Il ne va pas bien du tout. Peut-être ne le remarque t'il même pas encore. Le déni est toujours un excellent moyen de se protéger soi-même. « Arrête de me regarder comme ça. » - « Okayyy, ça va. » que tu réponds immédiatement en détournant ton regard qui voulait clairement dire je crois pas un seul mot de ce que tu racontes pour le retourner vers les filles qui ont la décence de vouloir bien s'amuser ensemble sans qu'une ne fasse pleurer l'autre pour une bêtise - ça viendra bien trop rapidement. Ce n'est pas le temps de crier victoire, encore moins de les sous-estimer.

Ça ne t'empêche pourtant pas de poursuivre sur le chemin particulièrement houleux de tes questions. La suivante, concernant les anti-douleurs, ne semble pas trpp lui plaire. Ce n'était qu'une question comme une autre, et il attaque directement. « T’attends encore que l’abruti te rappelle ? » C'est bas de jouer sur ta récente rupture, celle qui n'est pas encore totalement digéré, mais avec laquelle tu apprends à vivre de mieux en mieux. Ça ne s'est pas très bien terminé. Lawrence est toujours aussi impulsif et malhabile dans ses choix de mots - les fausses raisons de rupture balancé en pleine gueule en font bien partie. Tu n'es quand même pas assez idiote pour ne pas voir que c'était inévitable, que vous fonciez tout droit dans un mur. Tu n'étais quand même pas prête à affronter la vérité de cet échec imminent. Tu avais envie de gratter encore un peu du bonheur quand il n'y avait que vous deux. « C'est pas mon genre… » que tu lui réponds, la mâchoire légèrement serré, parce que le contredire dans ses paroles ne servirait à rien. Lawrence n'est pas un abruti. Et ce n'est définitivement pas ton genre de t'apitoyer sur ton sort et attendre nuit et jour devant ton téléphone dans l'espoir qu'il sonne. Non, tu tournes la page - ou fais semblant de - et tu t'occupes des problèmes des autres à la place. « Excuse-moi… » Le voilà qui semble vouloir reprendre ses esprits. Ou qui comprend qu'il envoie encore plus de signaux d'alerte en agissant de la sorte. « J’en prends de temps en temps. » De temps en temps, c'est bien vague tout ça. Ça suppose qu'il n'en prend pas tous les jours. Ce qu'il suppose et la vérité sont sans doute deux vérités bien différentes. Il n'est pas encore rendu assez profond pour admettre qu'il a un problème. Et espérons qu'il n'atteigne pas le fond du gouffre. « C'est combien de fois par semaine ça de temps en temps ? » que tu questionnes par la suite, parce que ton cerveau de médecin veut des chiffres, il veut la raison pour laquelle il prend cette pilule. Il l'a prend pour soulager sa douleur ou parce qu'il est incapable d'affronter sa journée sans elle ? Un addict ne dira jamais la vérité. Tu sais bien. Tu veux pas croire que ton ami tombe - ou frôle - cette catégorie. « Leslie, c’est rien. » - « C'est pas rien Cian. » Parce que tu ne reconnais pas la personne qui se trouve à tes côtés, même si c'est sans doute normal vu toutes les épreuves qu'il venait tout juste de traverser. Tu n'as aucune idée de la manière dont tu aurais réagi si tu avais été à sa place. Tout ce que tu sais, c'est que Cian serait aussi chiant avec toi que tu l'es avec lui. « C'est quoi le problème avec ta physio ? » Si c'est rien, alors pourquoi est-ce qu'il n'y va pas hm ?

Le coup est porté de manière déloyale, cherchant à heurter tout en détournant l’attention, mais qui finis par avoir l’effet d’un pétard mouillé. Ce n’est pas dans mes habitudes de vouloir lui renvoyer les coups de cette manière. On s’est souvent pris la tête avec Leslie, mais jamais je n’ai utilisé ce qui pourrait la blesser d’une telle manière. J’ai honte de réagir ainsi, mais tout mon corps est sur la défensive, prêt à mordre dès qu’une main tendue s’approche un peu trop. « C'est pas mon genre… » - « Je sais… » Elle préférera prétendre que tout va bien, qu’il n’a laissé aucune empreinte dans sa vie et qu’elle est déjà passer à autre chose. Oh, elle est bien capable de convaincre du monde avec ce genre de discours, mais pas moi. Cela ne fait plus effet depuis bien longtemps. Je pourrais saisir l’opportunité pour creuser un peu, mais les filles sont à quelques mètres de nous et ce n’est clairement pas le moment pour cela. Alors, je soupire, en espérant que Leslie va me laisser tranquille. C’est bien mal la connaître que de croire qu’une simple réplique piquante allait l’arrêter.

« C'est combien de fois par semaine ça de temps en temps ? » Plusieurs réponses me viennent en tête dans la lignée de "ce ne sont pas tes affaires", "je suis pas ton fils" et autre théorie en tout genre qui ne ferait que déplacer le sujet le temps d’un instant tout en continuant à piquer sa curiosité. Je pourrais prétendre ne pas avoir entendu, je pourrais me lever et rejoindre les deux petites qui jouent de manière bien trop calme pour que cela soit plausible. Je pourrais faire tout un tas de choses, mais le regarde de Leslie ne changera pas et mon silence ne fera qu’éveiller ses soupçons. Le souci est que si je sais mentir comme un arracheur de dents, cela n’a jamais réellement pris sur la brune. À mon plus grand regret. « Juste de temps en temps. » Si un regard pouvait tuer, je serais en train de me vider de mon sang sur cette plage. « C'est pas rien Cian. » L’inquiétude se lit sur son visage, pas celle de la médecine, mais celle de l’amie, la vraie, celle qui ne lâche rien. Elle est probablement la mieux placée pour savoir lire entre les lignes et c’est ce que je déteste le plus à cet instant. « Juste deux ou trois dans la semaine. » Je préfère taire le fait que la fréquence est en réalité journalière, que j’ai du mal à faire sans et que par-dessus cela s’ajoute des épisodes de dissociations que j’ai de plus en plus de mal à comprendre. Il faut qu’elle arrête de s’inquiéter pour moi, c’est déjà bien trop le cas depuis ce fichu accident. « C'est quoi le problème avec ta physio ? » Mon instinct premier s’agrément d’un langage fleuri sur tout ce que je déteste autour de la physio. Le fait que l’on m’impose des exercices ridicules, la douleur qui semble ne jamais changer et le fait que l’abruti que l’on m’a donné comme régulier veulent se la jouer psychologue. Alors, je soupire, tente de gagner une minute ou deux avant de ne plus avoir le choix que de former des mots. « L’armée m’a encore refusé un retour. » C’est déjà la deuxième fois. La première, parce que cela était beaucoup trop tôt et cette fois, ils souhaitent que je repasse des examens psychologiques et que je me fasse clear par un médecin de l’armée. « Ça avance pas Leslie, j’ai toujours autant mal, je suis incapable de faire tout ce que je savais faire avant et l’autre passe son temps à me masser la cuisse comme s’il rêvait de me sauter dessus. » Je déteste ce mec et son regard empli de pitié dès que j’échoue sur un exercice d’équilibre ou que ma jambe finis par flancher sous mon poids. « On m’avait dit que ce serait temporaire. » Autant la douleur que la perte de mes souvenirs. « Un an plus tard, rien a changé. » C’est même pire qu’avant. « Je veux juste reprendre le travail. » J’ai ce besoin d’aller retrouver le cockpit de mon hélico, de décoller et me retrouver seul dans les airs, mais personne ne m’en laisse le droit. Et tout ça m’angoisse, alors je laisse la physio derrière, j’essaye de me débrouiller seul, mais rien ne change. La douleur est présente et mon esprit se fait la malle.

« Je sais… » Il attaque vite, mais la culpabilité prend vite le dessus aussi. Ton regard parle pour toi. C'était injuste et gratuit de sa part d'attaquer de la sorte, mais il semble assez s'en vouloir lui-même sans que tu n'aies besoin d'ajouter quoique ce soit. De toute façon, tu préfères ne pas étirer la conversation en ce sens. Tu préfères plutôt pousser l'interrogatoire vers lui et non vers toi. Ces problèmes sont de toute manière bien plus importants que les tiens. « Juste de temps en temps. » Tu lèves les yeux au ciel devant le manque de précision de sa réponse. Il cherche à gagner du temps voilà tout. Et qui cherche à gratter toutes les secondes possibles, vient avec, soit une mauvaise nouvelle, soit une tentative de faire passer un mensonge subtilement. Il est bête Cian s'il pense que c'est la première fois que tu te retrouves devant un addict aux anti-douleurs. Il est encore plus bête s'il pense pouvoir te mentir à toi. Tu le connais tellement par coeur qu'on dirait presque que c'est toi qui l'a fait. « Je vais avoir besoin d'un chiffre. » que tu précises. De temps en temps n'est pas une réponse acceptable et il le sait très bien. Ton regard se plante sur lui et tu ne comptes pas le détourner jusqu'à ce que tu aies une réponse. Mensonge ou vérité, mais qu'il dise quelque chose avec toute la précision dont il est capable. « Juste deux ou trois dans la semaine. » Et ton regard ne le quitte toujours pas alors que cette fois-ci, c'est la véracité de sa réponse que tu vérifies. Si c'est vrai, ça veut dire qu'il vit dans la douleur tous les autres jours. Ce n'est pas forcément mieux d'encaisser. Mais non, c'est un mensonge. Sauf que Cian n'est pas prêt à te l'entendre le lui reprocher. Il va se braquer et te repousser. Ce n'est certainement pas ce que tu veux. « T'as pas intérêt à me mentir Cian. » que tu ajoutes, lui laissant à la fois croire que tu le crois, mais aussi une dernière chance de choisir la voie de l'honnêteté.  

« L’armée m’a encore refusé un retour. » Ce qui n'a rien de très étonnant. Tu n'aurais jamais signé non plus sa permission pour lui permettre de reprendre le travail. Pas totalement du moins. Et le reprendre partiellement ne serait sans doute pas une option pour lui. « Ça avance pas Leslie, j’ai toujours autant mal, je suis incapable de faire tout ce que je savais faire avant et l’autre passe son temps à me masser la cuisse comme s’il rêvait de me sauter dessus. » Bon, le sujet de discussion est on ne peut plus sérieux, mais la dernière partie de sa phrase t'arrache automatiquement un rire que tu es incapable de retenir. « Arrête de te penser irrésistible Atwood. Si t'es aussi grognon que ça, c'est claiiiire que tu l'intéresse pas. » Une manière comme une autre de tenter de désamorcer la bombe. Pas trop certaine qu'il y ait quoique ce soit qui lui arrache un sourire aujourd'hui. Autre que ses faux sourires qu'il présente aux filles en mode "tout va bien". Encore heureux qu'il soit pas trop grincheux devant elles. « On m’avait dit que ce serait temporaire. Un an plus tard, rien a changé. » On dit bien des choses. On fait plus souvent des suppositions qu'autre chose. Le cerveau est un organe rempli de surprises imprévisibles. Il peut surtout se considérer chanceux de ne pas être mort le jour de son accident. Mais Cian ne voit que le négatif de tout ça. « Je veux juste reprendre le travail. » - « Je sais. » Oh bien sûr que tu le sais à quel point son travail est important pour lui, à quel point ça ferait du bien à son morale d'y retourner. Mais il n'est pas prêt. Il le sera peut-être jamais, mais ça aussi, ce n'est pas une information à lui communiquer pour le moment. « Et toi tu sais que rien n'a changé, parce que tu fais pas d'effort. » Voilà une vérité qui risque de bien lui plaire hm. « Si tu ferais ce que ton physio te demande, t'en serais pas là. » Il sait que tu as raison, mais tu as de gros doutes qu'il l'avoue.

« Je vais avoir besoin d’un chiffre. » Bien sûr qu’elle ne va pas abandonner aussi facilement. Forcément que Leslie va vouloir se la jouer la plus têtue des deux quand je n’ai particulièrement pas envie de me lancer dans ce genre de conversation. Il est facile de prétendre auprès de certaines personnes, bien trop simple de juste laisser sous-entendre une mauvaise passe qui ne va pas durer, mais auprès de Leslie ? Tout se complique quand il semble que je sois un véritable livre ouvert pour elle depuis les prémices de notre amitié. Elle a toujours su déceler le moindre des détails et si cela peut s’avérer utile dans certaines situations, aujourd’hui, je déteste son petit pouvoir d’une force incommensurable. C’est pire encore quand elle vient rajouter à l’inquisition son regard le plus noir, celui qui vous ferait baisser les yeux en quelques secondes, mais celui que je cherche à maintenir malgré tout. Elle cherche à lire dans la moindre de mes failles et si je n’étais pas venu avec elle, je crois que je me serais déjà levé pour foutre le camp. Mais je reste là, sans broncher, sous le regard inquisiteur de la brune qui semble prête à me rappeler pour la centième fois qu’elle finira par connaître la vérité. « T'as pas intérêt à me mentir Cian. » Je me retiens de lever les yeux au ciel. Ce n’est pas réellement un mensonge que de ne lui dire que la moitié de la vérité. Et puis, je n’ai pas de problèmes avec ma prise de médicaments, qu’importe ce qu’elle est en train de s’imaginer. J’ai parfaitement conscience de ce que je suis en train de faire et je ne vais pas me laisser emporter sur la mauvaise pente. Ce n’est qu’une période à passer, la semaine à été longue et j’ai peut-être légèrement abusé, mais ce n’est pas non plus une catastrophe. « Est-ce que je t’ai déjà menti ? » À mon tour de plonger mon regard dans le sien afin de donner toutes leurs importances à mes mots. Elle n’est pas la seule à pouvoir jouer sur ce terrain et je peux être le meilleur quand il s’agit de convaincre quelqu’un. Si mes années à l’armée m’ont bien appris une chose, c’est que l’on ne se laisse jamais marcher sur les pieds. Je veux simplement que Leslie cesse de vouloir se la jouer infirmière avec moi, c’est usant et un peu dégradant pour être tout à fait honnête.

J’aurais préféré que l’on abandonne le sujet rapidement, que l’on prétende à une discussion banale ou qu’elle se lance dans l’explication de la dernière bêtise inventée par ses filles, mais il faut croire qu’aujourd’hui Leslie à décider de me dédicacer tous les sujets de la journée. « Arrête de te penser irrésistible Atwood. Si t'es aussi grognon que ça, c'est claiiiire que tu l'intéresse pas. » - « Pourtant, les infirmières ont l’air assez d’accord sur mon charme. » Je suis encore capable de jouer la carte de la légèreté même si le sujet est loin d’être plaisant. Cela a toujours été ma façon de mieux encaisser les coups durs, rire de ma situation plutôt que de montrer l’autre éventail d’émotions. « Et je te jure que l’autre me regarde un peu trop des fois. » Il n’est pas méchant et il n’est pas toujours le kiné en position lorsque je viens pour une séance, mais parfois, j’aimerais qu’il arrête de me lancer des yeux doux quand il est en train de manipuler ma jambe. J’aimerais surtout que tout le monde cesse de me traiter comme un objet cassé, mais cela semble être bien trop compliqué à concevoir pour mes proches. « Je sais. » Tout le monde semble savoir, même mes collègues, mais personne ne semble prêt à lever le petit doigt pour m’aider à retrouver ma place et cela commence à jouer sur la moindre de mes réactions envers eux. « Et toi, tu sais que rien n'a changé, parce que tu ne fais pas d'effort. » Et moi qui pensais que l’on allait pouvoir changer de sujet. Je me mords la langue pour ne pas laisser s’échapper un flot d’insultes et préfère fixer mon regard sur les filles un peu plus loin. « Arrête. » Il faut qu’elle cesse, je n’ai pas la patience et en rien l’envie de me lancer dans un débat. Oh, elle le sait. Elle l’a très bien compris, Leslie, mais elle insiste malgré tout. « Si tu ferais ce que ton physio te demande, t'en serais pas là. » - « Tu n’as aucune idée de ce que je fais ou pas. » que j’empresse de répondre sèchement. « J’ai fait la physio sérieusement pendant des mois et rien n’a changer. » C’est l’absence d’évolution qui m’a entraîné à oublier les rendez-vous les uns après les autres, parce que je n’y voyais plus aucun intérêt, parce que je pensais pouvoir m’en sortir tout seul. « Tu me gonfles Leslie. » Elle a raison pourtant, mais je déteste l’entendre déclarer cette vérité sans même sourciller. Je ne supporte plus que tout, le monde se donne un droit de regard sur ma vie et sur ma façon de gérer les choses. La physio que l’on me propose est bancale, personne ne veut écouter ce que j’ai à dire et l’armée s’entête à vouloir m’envoyer dans le cabinet d’une psychologue qui cherche à me faire parler de ma vie comme si j’avais un problème. Je n’ai pas de problèmes, je voudrais juste que l’on m’écoute et que la douleur disparaisse avec des exercices qui font sens.

C’est avec une grimace que je me relève pour m’avancer vers les filles, laissant leur mère derrière moi. Je n’ai plus envie de discuter, je sais que je vais finir par dire des choses que je vais regretter. Je préfère me concentrer un instant sur les enfants qui m’accueille avec un grand sourire. « Tu joues avec nous Cian ? » Je hoche la tête même si je sais que je ne pourrais pas leur courir après bien longtemps. Pour elles, je fais semblant, j’enfile mon meilleur masque et reprends le rôle qui est le mien, c’est-à-dire, le clown de service pour ces demoiselles. Si tout commence doucement autour de leur château de sable, les filles finissent par vouloir m’entraîner dans l’Océan et je force un peu à prétendre courir pour m’échapper d’elles. De la manière la plus têtue qui soit, je cherche à prouver à Leslie que je vais bien et que les douleurs ne sont pas aussi importantes qu’elle ne le croit. Mais rapidement tout va trop vite pour moi et lorsque Abby saute sur mon dos, je suis obligé de retenir un cri qui ne passe bien entendu, pas inaperçu aux yeux de l’adulte qui nous observe depuis le début. « Pfff vous m’avez trop fatigué les filles. » Elles rigolent et se moque les deux petites, mais elles me laissent retourner auprès de leur mère qui m’observe avec insistance. Je suis obligé de me concentrer comme jamais pour ne pas trop boiter, mais avancer dans le sable s’avère être le pire des exercices. « On t’a jamais dit que c’était pas bien de fixer les gens ? » Je suis toujours passablement énervé après elle, mais viens m’allonger sur la serviette à ses côtés. Il faut que je respire et ça va passer, si je continue à me le répéter cela finira pas s’avérer être vrai. « T’as pas des histoires à me raconter, ça fait longtemps… » Change-moi les idées Leslie, si tu veux pas me voir prendre un cachet. Je soupire un peu avant de tourner la tête vers mon amie. En tant qu’urgentiste, elle a toujours des anecdotes loufoques à raconter et c’est mon péché mignon de l’entendre me raconter tout cela. « S’il te plaît Leslie… » Et jamais elle m’a entendu la supplier ainsi de laisser tomber un sujet…

« Est-ce que je t’ai déjà menti ? » - « À chaque fois que je t'ai demandé si ma tenue me faisait un gros cul. » Un vrai gentleman qui ne dira jamais à quel point t'es laide avec tes cernes jusqu'en bas des genoux. L'humour est parfois la meilleure façon de faire passer un message. Les paroles ont l'air sans reproche ou leçon de vie parce qu'elles sont lancées en rigolant, mais le discours fait quand même son chemin jusqu'à son petit cerveau. Est-ce qu'il t'a déjà menti ? Non, sans doute pas. C'est la vrai réponse. Ou ce l'était. Tu ne pourrais pas dire que tu le sens à cent pourcent honnête avec toi depuis son accident. Tu le soupçonne plutôt de cacher certaines informations et non d'en inventer. Qu'importe comment il le fait, ça reste un mensonge. Tu as toutefois confiance que le temps fera bien son travail. Qu'un jour, il saura se confier à toi comme il le faisait avant. « Pourtant, les infirmières ont l’air assez d’accord sur mon charme. » C'est plus fort que toi, tu te mets à rire sur le champ. Oh pas que ton ami manque de charme. Il est beau gosse, tu l'as remarqué depuis le jour un. Il est pas assez beau gosse pour être irrésistible dans sa petite chemise d'hôpital. À moins que son secret soit de se promener les fesses à l'air pour les jolies infirmières. « Et je te jure que l’autre me regarde un peu trop des fois. » - « Je demande à voir. J'ai besoin de preuve. » que tu ajoutes en ricanant. Est-ce une manière très très subtile de l'accompagner à ses rendez-vous ? Oui, absolument. Est-ce qu'il va tomber dans le piège ? Non, il n'est pas assez idiot pour ça malheureusement.

« Arrête. » Insister sur sa physio est un terrain glissant que tu empruntes souvent et que tu n'es pas prête d'éviter prochainement non plus. Pas tant qu'il n'arrêtera pas de faire sa tête de mule. « Tu n’as aucune idée de ce que je fais ou pas. » C'est plus fort que toi, tu roules des yeux devant son arrogance qui n'a pas sa place. Oh si mon chou, j'en ai une très bonne idée. Il faut croire que ce n'est pas encore aujourd'hui la journée où Cian est enfin prêt à écouter et de prendre la main que tu lui tends depuis des mois. « J’ai fait la physio sérieusement pendant des mois et rien n’a changer. » C'est faux de dire que rien n'a changé. Ce qu'il veut plutôt dire c'est que les choses ne se sont pas améliorer assez rapidement à son goût. Voilà la nuance. Il n'avouera jamais que c'est pire depuis qu'il a cessé sa physio « Tu sais que c'est un long processus. » - « Tu me gonfles Leslie. » qu'il te coupe la seconde d'après. Très bien. Tu es allé assez loin pour aujourd'hui. Tu as compris. Tu n'insisteras pas davantage. « Avec plaisir. » Comme si tu allais te vexer pour si peu. Toujours un réel plaisir de gonfler Cian. Tu ne comptes pas arrêter de sitôt ça non plus.

Pour être sûr et certain que tu ne l'emmerdes plus, Cian se redresse non sans difficulté pour aller rejoindre les filles. C'est sûre que les deux gamines ne vont pas lui faire de commentaires pour le ménager. « Tu joues avec nous Cian ? » Non, bien sûr que non, elles vont lui sauter dessus pour qu'il soit deux fois plus blessé qu'avant son arrivée. Tu les observes de loin sans rien dire. Parler ne ferait qu'empirer la situation. Les filles s'amusent et tu ne peux pas t'empêcher d'être attendri par la situation malgré tout.  Sa limite est tout de même atteint assez rapidement et il revient te rejoindre au bout de quelques minutes. « On t’a jamais dit que c’était pas bien de fixer les gens ? » - « J'essaie encore de comprendre ce que les infirmières te trouvent. Franchement, j'vois pas. » que tu lui dis alors qu'un sourire amusé se glisse sur tes lèvres. Ton regard reste fixé quelques instants sur les filles alors qu'il se rallonge bien maladroitement sur la serviette. « T’as pas des histoires à me raconter, ça fait longtemps… » Tu détournes de nouveau la tête vers lui. « S’il te plaît Leslie… » Comme si tu pouvais lui refuser quoi que ce soit. Tu prends le temps de réfléchir quelques instants. Ce n'est sûrement pas une histoire personnelle qu'il a envie d'entendre. Non, il veut entendre à quel point les humains sont cons. « Ça fait longtemps que personne ne s'est rien mis dans le cul. J'ai presque foi en l'humanité. » Sans doute une phrase à ne pas dire. C'est ça qui risque de t'attendre lundi matin à huit heures tapant. « J'suis pris avec une vieille sénile depuis une semaine. » Bonjour le professionnalisme Leslie. « Elle arrête pas de se sauver et de s'foutre à poil. C'est très très plaisant. » Et la famille trouve que vous êtes des monstres à l'attacher après son lit. Ouais bah qu'ils viennent la gérer s'ils sont si parfait.

Elle avait su se retenir une dizaine de minutes avant de lancer cette conversation que je ne voulais clairement pas avoir avec elle. Le problème entre Leslie et moi, c’est que nous sommes aussi têtus l’un que l’autre. Cela a été au cœur de bon nombre de nos conflits aux fils des années et il faut croire que rien ne semble vouloir changer dans ce domaine particulier. Elle s’entête et je me renferme, bien décidé à tout faire pour qu’elle abandonner son idée première. « Tu sais que c'est un long processus. » Bien sûr que je suis au courant de cela, que j’ai compris que tout ne serait pas rétabli en un claquement de doigts et que je devais prendre mon mal en patience. Je l’ai compris, c’est certain. Cela ne veut pas dire que je l’accepte pour autant. « Est-ce que tu m’as déjà connu patient ? » Par tous les moyens, je cherche à divertir le sujet par l’humour, parce que j’ai encore tant de mal à mettre des mots sur tout ce que l’accident est venu chambouler. Je ne sais pas ce qui me pose le plus problème entre la perte de mémoire et les ennuis physiques, tout ce que je sais, c’est que la douleur est présente et que je ne suis plus vraiment géré autrement qu’en prenant des antidouleurs, mais ça je ne peux pas vraiment le dire à Leslie. Alors, je me contente de plaisanter sans jamais laisser mon sourire s’effacer et peut-être que l’illusion pourra encore un peu perdurer.

J’utilise clairement les filles de mon amie comme la meilleure des distractions. L’espace d’un instant, je m’échappe auprès des gamines qui sont ravies d’avoir un adulte voulant bien descendre et remonter la plage plusieurs fois pour leur ramener des seaux d’eau qui aideront à la construction de leur château de sable. Malheureusement, leur énergie débordante m’épuise plus rapidement que je le voudrais et je déteste le regard que Leslie pose sur moi alors que je me ramène à nouveau à ses côtés. « J'essaie encore de comprendre ce que les infirmières te trouvent. Franchement, j'vois pas. » Au moins, elle a abandonné les conversations sérieuses pour se laisser aller sur un terrain que l’on maîtrise à la perfection : la moquerie. Alors pour l’effort, je roule des yeux, avant de reprendre ma place à ses côtés. « Mon charme est trop hétéro pour toi ? » que je plaisante sachant d’avance que Leslie allait trouver la répartie parfaite pour venir contrer ma réplique. Un léger sourire se placarde sur mes lèvres et je rêve que le moment s’allonge un peu, que l’on reste dans l’innocence d’une conversation tout ce qu’il y a de plus banale. « Ça fait longtemps que personne ne s'est rien mis dans le cul. J'ai presque foi en l'humanité. » - « Oh non, c’est les meilleures histoires pourtant ! » Je ne compte plus le nombre de fois où elle m’a appelé, incapable de parler tant elle riait de la dernière absurdité qu’elle avait rencontré dans une salle de consultation. « J'suis pris avec une vieille sénile depuis une semaine. Elle n’arrête pas de se sauver et de s'foutre à poil. C'est très très plaisant. » Je ne sais retenir mon éclat de rire tandis que j’imagine la blonde courir après une vieille dame dans son plus simple appareil. « Tu devrais avoir de l’entraînement pourtant, je me souviens d’une époque où Abby aimait bien courir les fesses à l’air. » Douce période où la petite fille avait compris comment retirer sa couche et adorait passer son temps cul nu dans l’appartement de sa mère.

L’ambiance était plus douce, comme si Leslie avait compris que je n’étais pas d’attaque pour une leçon de morale sur mes problèmes de santé. On échangeait depuis un moment et je ne cessais de vouloir dire quelque chose sans jamais trop trouver les bons mots. Il y a quelque chose que je voulais lui dire, j’avais besoin d’échanger avec Leslie sur ce sujet et c’est le regard interrogateur qu’elle finit par me lancer qui m’aida à franchir le pas. « J’ai revu Matilda. » Elle savait Leslie, toute l’histoire, les sentiments et les raisons qui m’avaient poussé à mettre une certaine distance entre la jeune femme et moi. Matilda avait sa vie, ses enfants, je ne pouvais plus réellement faire partie du paysage. « Nico, son mari, il est décédé… » Et moi, je sais plus vraiment comment me situer là-dedans, parce que je n’avais pas été là pour elle à la pire période de sa vie. Dans le fond, tout ce qu’il reste à retenir, c’est que j’ai fini par retrouver Matilda.

« Est-ce que tu m’as déjà connu patient ? » - « Je sais que tu te fais plus tout jeune, mais c'est pas trop tard pour changer. » Dit la fille qui est le moins sujette au changement, surtout pas quand on parle de trait de caractère et de mode de vie. Tu t'assumes peut-être un peu trop, disons cela ainsi. Qu'on t'accepte comme tu es sinon tu peux très bien leur montrer le chemin de la sortie. Que Atlas ne se méprenne pas, tu l'acceptes avec tous ses horribles défauts et son impatience. Sans oublier son excellent talent pour la fuite. Dès qu'il en a l'occasion, il se sauve avec les filles, qui elles au moins, ne remarquent pas qu'il est brisé et n'émet surtout aucun commentaire sur sa condition physique. Tu te demandes d'ailleurs combien de jours il devra rester immobile après ces quelques minutes à courir (ou tenter de) simplement pour te prouver que tu as tort. Ah l'égo, ce que ça peut nous faire faire. « Mon charme est trop hétéro pour toi ? » - « Clairement trop pour ton physio, ouais. » que tu lui réponds directement en riant doucement. Atlas revient étendre sa jambe d'une manière qu'il croit sûrement bien subtile pour faire genre qu'il ne souffre pas, mais ce n'est pas vraiment réussis. Avant que tu ne puisses commenter quoique ce soit à ce propos (encore et encore), Atlas reprend la parole. Son regard te supplie de changer de sujet, de laisser tomber ton discours moralisateur. Tu laisses tomber pour ce soir, mais tu ne laisses pas tomber indéfiniment. « Oh non, c’est les meilleures histoires pourtant ! » C'est les histoires que tout le monde préfères oui. Celle qui montre à quel point l'humain est une créature stupide. Non, personne avec une barbie dans le cul peut être doté d'un cerveau. « Parle pour toi. » Parce que si ça amuse tout le monde, ça amuse moins la personne qui doit aller retirer l'objet porté disparu. Bon, ok, peut-être que c'est un peu drôle après. Pendant ? Pas vraiment. Comme ce ne sera toutefois pas le sujet du jour - il faut bien se réinventer parfois - tu lui parles plutôt de la vieille sénile que vous retrouvez toujours à poil dans des endroits bien inapproprié. Elle n'est là que depuis quelques jours et tu as l'impression que ça dure des semaines tellement elle gruge l'énergie de tout le monde. L'hôpital est plein en ce moment. L'urgence n'est clairement pas le bon endroit pour elle, mais voilà, c'est qu'il n'y a plus de place ailleurs, youpi. « Tu devrais avoir de l’entraînement pourtant, je me souviens d’une époque où Abby aimait bien courir les fesses à l’air. » Tu rigoles devant se souvenir qui te semble bien trop lointain. « C'est mignon à un an. À quatre-vingt deux, un peu moins. » Impossible de comparer des petites fesses de bébé à des vieilles fesses plissées.

Un silence s'installe de nouveau entre vous deux alors que le seul son perceptible est le cris des enfants au loin. Des cris de joie, la guerre n'est toujours pas déclarée. Ce qui est un miracle, ou alors c'est la présence de Atlas qui les force à faire semblant d'être un minimum bien élevé. « J’ai revu Matilda. » Voilà une bien drôle de manière de briser le silence. Tes sourcils se froncent alors que tu détournes la tête vers ton ami. « Okay ? » que tu débutes d'un ton à la fois intrigué et incertain. Ton regard l'invite à poursuivre son histoire. « Nico, son mari, il est décédé… » Oui ? Tout le monde dans l'hôpital est au courant de l'infirmière devenue veuve… et puis, bon, tu connais l'identité de cette infirmière, sans pour autant avoir jugé bon d'en informer qui que ce soit. Ce n'est pas de tes affaires et ça reste des bruits de couloirs qui sont toujours à moitié faux. Ah les merveilles rumeurs ! « Je sais pas trop où tu veux en venir Atlas, mais je suis presque certaine que ce n'est pas une bonne idée. » C'est le bien-être de Atlas qui t'importe, mais tu es presque certaine que ce n'est ni bon pour elle, ni bon pour lui. Peu importe la suite de l'histoire.