| the sky is falling down (craker #27) | |
| Auteur | Message |
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| (#)Dim 23 Oct 2022 - 21:50 | |
| Ce n’était qu’une minute, deux au maximum. Je me suis détourné pour remplir son biberon d’eau. Ce n’était que ça. Décoller mon regard du petit garçon, juste le temps d’ouvrir le robinet et remplir le récipient. Cela ne devait être que ça. Juste une minute parmi les mille quatre cent quarante qui composent cette journée. Je n’ai pas vu que Gabriel était en train de se relever en se tenant à la bibliothèque, je n’ai pas vu la petite main qui est venue tirer un livre beaucoup trop lourd. Dans mon dos, je n’ai entendu que le bruit des livres qui tombent sur le sol suivi par les hurlements de mon fils. Mon cœur s’est arrêté de battre, je suis resté figé sur place, incapable d’avancer vers lui. L’instant m’a paru durer mille ans quand en réalité, je me suis retrouvé à ses côtés en un éclair. Au premier coup d’œil, tout paraissait n’être qu’une grosse frayeur, quelques livres étaient éparpillé autour de lui, mais il semblait aller bien, probablement effrayé par sa propre chute. C’est ce que je pensais et je l’ai immédiatement pris dans mes bras pour le rassurer. Ce ne devait être qu’une frayeur, un accident échappé de justesse. Cela l’était, jusqu’à ce que je réalise que ses hurlements n’ont jamais cessé tout le temps où je le berce contre mon torse pour tenter de le consoler. « Tu as mal quelque part Gabriel ? » La question est idiote quand le petit garçon ne sait prononcer que quelques mots, mais c’est la panique qui prend le dessus. Il refuse de se séparer de moi, mais j’ai besoin de voir. En un coup d’œil, je remarque la bosse qui commence lentement à se former sur son front et puis finalement son petit bras qui prend une étrange couleur bleutée. Un frisson me secoue avant que mon esprit ne se verrouille sur un mode d’urgence. C’est comme si je n’avais pas besoin de penser, comme si je connaissais le plan d’avance. Dans un calme olympien, je m’assure de garder Gabriel contre moi, en conservant son bras dans la position la plus immobile qui soit. Je récupère sa tétine, son doudou et me lève en me dirigeant tout droit vers l’entrée. Mon téléphone, mon portefeuille finissent dans la poche arrière de mon jean, dans un équilibre précaire, j’enfile la première paire de basket qui traînait là et récupère mes clés de voiture. Pendant ce temps, Gabriel ne cesse de pleurer, mais mon esprit se concentre sur l’objectif : l’emmener à l’hôpital.
C’est mon instinct qui nous permet de faire le trajet sans encombre. Je respecte les limitations de vitesse du mieux que je peux, appuyant tout de même un brin trop fort sur l’accélérateur lorsque la route est dégagée. Je me gare légèrement de travers, je me trompe d’entrée et finis par débarquer aux urgences qui paraissent surpeuplées. « Je... Je crois que mon fils, c’est cassé le bras. Il a chuté en voulant se relever, c'est... C'est arrivé si vite. » Ma voix tremble, mon bras fatigue sous le poids du petit garçon, mais j’insiste auprès de l’infirmière qui finit par me laisser passer en priorité, Gabriel est petit et je ne mens pas sur l’état de son bras. Je ne craque pas. L’important, c’est lui, qu’un médecin vienne se charger de mon fils, pour le reste, on verra après. Mais les urgences sont débordées, un pauvre interne vient maintenir le membre dans un petit foulard qu’il nous maladroitement autour du cou de Gabriel comme s’il était un adulte avant de me demander de patienter dans le couloir. Et soudainement, le brouhaha ambiant devient assourdissant, les pleurs de mon fils ont trempé mon tee-shirt et c’est mon corps tout entier qui tremble. Gabriel est tombé sous ma surveillance. Les images se rejouent sans cesse sous mes yeux, ce n’était qu’une minute, je lui ai tourné le dos juste une minute. « Dada, mama. » Je sursaute presque en entendant la voix de mon fils. Ses pleurs ont un peu cessé, comme si le foulard qui tient son bras en place faisait malgré tout effet. Il me regarde de ses grands yeux clairs et répète les deux mêmes mots une seconde fois. Merde, Rosalie. « Oui, on va appeler maman. »
Je ne souhaite à personne de devoir passer ce genre de coup de fil. Il n’existe aucune phrase dans ce monde pour rassurer une mère lorsqu’on lui annonce que l’on se trouve à l’hôpital avec son bébé, qu’importe la gravité des faits. Je lui explique vaguement ce qui s’est passé et surtout que j’attends encore que le médecin nous voie. « Rosalie, je suis avec lui, je te promets qu’il est en sécurité, fait attention sur la route. » que je martèle une dernière fois avant qu’elle ne raccroche abruptement. Je ne sais pas où elle est actuellement, mais je sais sans aucun doute qu’elle va arriver en un temps record. Maintenant, j’ai peur qu’elle ne soit pas assez attentive et l’angoisse monte à nouveau d’un cran. Gabriel est allongé sur mon torse, tétine en bouche. Désormais, une belle bosse, c’est formé sur son front et le bleu sur son bras n’a pas diminué. Il ne pleure presque plus, mais je sens bien qu’il ne veut surtout pas bouger de mon étreinte lui qui dernièrement passe son temps à vouloir explorer le monde. « Je suis désolé mon bébé. » Je ne cesse d’embrasser son crâne tout en laissant ma main glisser dans son dos dans un rythme régulier. Le mode d’urgence s’éteint pour ne laisser place qu’à cette panique tangente. Les minutes s’écoulent sans que jamais mon rythme cardiaque ne redescende en pression. À chaque nouveau battement effréné, c’est la culpabilité grandissante qui vient ronger mes pensées.
@rosalie craine |
| | | | (#)Mer 26 Oct 2022 - 14:04 | |
| Ça fait plusieurs heures que vous êtes la tête dans l’un des derniers chapitres du roman de Gaïa et si les lettres semblent commencer à danser sous tes yeux, tu ne veux pas t’arrêter. Pas alors que tout semble couler si aisément en ce moment, que vous arrivez à vous entendre sur les changements à apporter, que les idées fusillent de part et d’autre. Ça te fait étrange, de retrouver l’écriture sans que ce ne soit tes mots qui soient posés sur le papier, sans que ce ne soit ta création qui prend forme sous tes yeux. Tu aimes voir l’italienne s’émerveiller devant ce qu’elle est capable de faire, tu aimes les débats qui découlent de vos échanges et tu te sens confiante, avec le manuscrit qui prend forme depuis plusieurs mois maintenant. Tu connais assez Boyd pour savoir que le squelette sur lequel vous travaillez a beaucoup de potentiel et tu es curieuse de savoir ce qu’il en pense, et surtout ce qu’il pense de tes capacités à éditer dans un contexte informel. Tu ne te sens pas encore prête à replonger pleinement, tes projets persos prenant encore la poussière dans de vieux documents au fond de ton ordinateur, mais d’avoir à nouveau un pied dans le monde de l’écriture te fait du bien. Surtout que ça te permet de te retrouver un peu en dehors de ton rôle de mère, ce rôle que tu as encore l’impression d’improviser au fur et à mesure, même si tu gagnes en confiance à chaque jour, émerveillée par tout ce que ton fils de presqu’un an sait maintenant faire. « Je pense qu’on devrait revoir l’intrigue avec le dernier personnage introduit, je suis pas certaine que - » Tu ne termines pas ta phrase, la vibration constante de ton téléphone contre ta cuisse te coupant dans ton élan. Sur l’écran apparaît le prénom de Wyatt et lui qui n’utilise son téléphone que de manière sporadique et aléatoire, tu te dis qu’il doit y avoir une raison derrière son appel. « Excuse-moi une seconde, j’dois le prendre. » Et avant même que Wyatt n’est terminé sa première phrase, tu as déjà attraper ton sac et sans un mot de plus, tu quittes la pièce en trombe, oubliant de saluer Gaïa au passage.
Ton cœur bat à la chamade, tes doigts tremblent et tu peines à sortir tes clés de ton sac, ton téléphone toujours contre ton oreille, les mots de Wyatt qui essayent de se faire rassurant mais il y sa voix qui trahit l’urgence de la situation. « Rosalie, je suis avec lui, je te promets qu’il est en sécurité, fait attention sur la route. » Tu baragouines quelque chose qui se veut être un oui c’est promis bien peu intelligible avant de raccrocher. Tu réussis finalement à déverrouiller ta voiture et c’est brusquement que tu défais de ton sac et de ton téléphone. C’est l’adrénaline qui l’emporte sur tout le reste alors que tu réalises à peine les mouvements que tu effectues, de ton pied sur la pédale jusqu’à tes mains sur le volant. Soudainement, les rues qui mènent jusqu’à l’hôpital St-Vincent se dessine sous tes yeux, et les souvenirs de ta dernière visite là-bas remonte inévitablement. Tu te souviens de la douleur des contractions, tu te souviens du sang qui coulait abondamment, tu te souviens de la panique qui n’avait jamais quitté le visage de Wyatt alors que les gémissements de douleurs persistaient entre tes lèvres. Puis tu te souviens du noir aussi, de cette sensation que tout t’échappait sans que tu ne saches comment t’accrocher. Tu te souviens des moments volés, tu te souviens de la panique que tu as ressenti en te réveillant sans ton fils, attaché à des dizaines de fils et de tubes en tout genre. Tu te souviens de tout et tu détestes le fait que ça remonte, sans préavis, embrumant tes yeux alors que tu tentes de te concentrer sur une route dont tu voudrais oublier les détours. La notion du temps perd tout son sens alors que tu as l’impression que les minutes se sont éternisés avant que tu ne te stationnes enfin devant l’hôpital. C’est pire encore alors que tu te retrouves figée devant ton volant, soudainement incapable de bouger, les portes des urgences une barrière qui te semble impossible à surmonter. Ce n’est qu’une question de secondes toutefois, avant que tu ne claques la porte de ta voiture et que tu te retrouves devant l’infirmière au triage, à demander des informations sur ton fils. On t’annonce qu’il a été placé sur un lit aux urgences, en attendant qu’un médecin vienne l’examiner. Tu suis les indications de l’infirmière, tes pas précipités et c’est seulement lorsque tu poses les yeux sur Gabriel que tu te prends l’ampleur de la situation en plein visage. Son visage est rougi par des larmes qui ont cessé il n’y a pas longtemps si tu te fis à ses joues encore trempées et son bras est placé dans un bandage approximatif qui semble néanmoins restreindre les mouvements du petit garçon. « Mama! » qu’il s’exclame lorsqu’il te voit et voilà que les pleurs repartent à nouveau alors que délicatement, tu tentes de prendre ton fils dans tes bras sans lui faire mal. « Mon amour, ça va, maman est là. » que tu murmures à son oreille alors qu’il continue de s’époumoner le petit garçon. Est-ce qu’il a encore mal? Est-ce qu’il a eu peur? Depuis combien de temps est-ce qu’ils attendent ici, Wyatt et lui? Les questions s’enchaînent dans ta tête alors que tu essayes de calmer ton fils dont les sanglots finissent par se calmer pour laisser place à de petits gémissements fatigués, sa tête lourde contre ton épaule. « Qu’est-ce qui s’est passé? » que tu finis par demander à Wyatt, de l’inquiétude plein les yeux. « Comment est-ce qu’il s’est fait mal au bras? Est-ce que les médecins pensent que s’est cassé? » Ta voix tremble et tes mots sortent en trombe, pratiquement les uns par-dessus les autres. « Tu le surveillais pas? » que tu demandes comme une bombe que tu lâches sans crier garde, une accusation qui n’a pas lieu d’être mais que tu ne sais pas retenir. Tu ne comprends pas comment ça a pu se produire, tu ne veux pas être ici et inévitablement, tu cherches un coupable. |
| | | | (#)Sam 5 Nov 2022 - 14:29 | |
| Tout autour de nous, c’est l’effervescence, un ballet d’infirmières et de malades qui s’enchaîne sous mes yeux sans que je ne prenne le temps d’enregistrer la moindre information. Gabriel sanglote toujours contre mon torse et c’est lui qui me préoccupe, c’est son petit corps que je cherche à protéger du monde extérieur, de ces gens qui crient par impatience, de ceux qui pleure et de ceux qui gémissent de douleur. Par automatisme, sans y apposer la moindre pensée, je ne cesse de lui parler, pour le rassurer, pour lui rappeler que je suis là et que je ne laisserais rien lui arriver de plus. Et surtout, surtout, pour lui répéter par mille façons à quel point, je suis désolé de ne pas avoir été assez attentif. Les minutes semblent se transformer en heure avant qu’une jeune infirmière me demande de la suivre dans une salle d’auscultation au service pédiatrique où je peux allonger Gabriel sur un lit. « Je suis désolée, on est vraiment débordé, mais vous serez plus au calme ici et le pédiatre ne va pas tarder. » Je lui adresse un maigre sourire, je n’ai pas l’intention de faire un scandale, elle n’a rien à craindre. De la poche de sa blouse, elle sort une petite peluche qu’elle tend à Gabriel. « Merci. » que je murmure sans jamais me décoller de mon fils, toujours une main contre son dos. D’une seule petite main, il tient fermement son doudou et la peluche qu’il vient de recevoir. Il paraît minuscule allonger dans ce lit d’hôpital et l’image me ramène près d’un an en arrière, lorsque son petit corps semblait si fragile enfermer dans cette couveuse et rattacher à tout un tas de fils. Je ravale la bile qui envahit le fond de ma gorge tandis qu’un autre souvenir vient se superposer au dernier. Bien plus ancien, mais ancré au fer rouge, le visage d’une petite blonde accroché à mon bras, me suppliant pour que personne ne l’emmène loin. Je n’avais plus pensé à cela depuis des années, mais le souvenir s’invite sans frapper, ramenant avec lui l’angoisse de cette période de mon passé. À chaque regard posé sur nous, me revient à l’esprit les questions que l’on avait pu me poser, les conclusions qui, à l’époque, avaient amené les médecins à appeler les services sociaux. Et ce qui n’était jusqu’à présent qu’un accident, me paraît devenir pire à chaque seconde qui défile, d’un point de vue extérieur, je suis un père qui amène son fils aux urgences pour un bras cassé, Gabriel reste collé à moi et refuse de me laisser m’en aller, mais le bleu sur son front est bien présent et son petit bras continue d’enfler. Mes pensées en deviennent complètement irrationnelles et à mesure que mon esprit se torture des pires scénarios possibles, mon corps se rapproche de Gabriel comme le dernier bouclier qu’il me reste pour le protéger.
Jusqu’à ce qu’un autre corps ne vienne me pousser vers l’arrière pour se jeter sur le petit garçon. Mon premier instinct est de m’imposer avant que Gabriel ne se mette à pleurer après sa mère et que le visage de Rosalie apparaisse pleinement dans mon champ de vision. « Mon amour, ça va, maman est là. » Dans la précipitation, parce qu’elle voulait absolument le prendre dans ses bras, Rosalie n’est pas attentive à toute la situation et les pleurs de Gabriel viennent percer le silence de la chambre. « Fait attention… » Le regard de la jeune femme est noir, prêt à lancer des missiles tandis que tout son corps s’enroule de manière à protéger son fils. La mère lionne s’est matérialisée sous mes yeux, prête à grogner si j’ose m’approcher d’un centimètre de plus. Il lui faut un instant, pour sentir son bébé contre elle, pour s’assurer que malgré ses sanglots, il va bien, il n’est plus en danger. Et ensuite, bien longtemps après, son regard tombe sur ma personne. « Qu’est-ce qui s’est passé? » Je n’ai pas le temps de prendre ma respiration, à peine le temps de trouver le moyen de formuler une phrase cohérente, qu’elle enchaîne avec force. « Comment est-ce qu’il s’est fait mal au bras? Est-ce que les médecins pensent que c'est cassé? » Elle panique et je me lève de ma chaise pour m’approcher, pour tenter de la rassurer. « Il est tombé. Le médecin est pas encore arrivé, on… » Je n’ai pas le temps de terminer ma phrase, de toute manière, elle ne m’écoutait même pas, quand elle finit par asséner : « Tu le surveillais pas? » La violence de ses mots me fait l’effet d’un coup de poing en plein dans le ventre. De ceux qui vous coupent le souffle et vous empêche de bouger. Mes gestes restent suspendus dans le vent, une main qui était prête à caresser l’arrière du crâne de Gabriel, l’autre qui voulait se poser sur l’avant-bras de Rosalie dans un geste rassurant. Tout cela se brise en mille morceaux face à son regard noir et l’accusation qu’elle vient de balancer sans aucune hésitation. Je me trouve incapable de riposter, bloqué dans toute la culpabilité qu’elle jette dans ma direction. « Je me suis tourné une seconde. » L’excuse tombe mollement, à mesure que mes pas m’amènent à m’éloigner de la mère et de son fils pour ne pas lui laisser l’opportunité de mordre avec plus de férocité encore. Mon estomac se tord à la simple idée qu’un membre du corps médical est pu l’entendre m’accuser ainsi. L’angoisse se double d’une panique inexplicable qui en vient à altérer la netteté de ma vision, je me raccroche au lit sans jamais croiser le regard de Rosalie. Ce n’est pas le moment de lui laisser entrevoir qu’elle avait su me frapper au sol.
Le pédiatrie choisit cet instant pour faire son entrée, son attention de suite porter sur notre petit garçon avant qu’il ne pose tout un tas de questions qui me sont en réalité adressées. « Il s’est tenu à la bibliothèque pour se mettre debout et il… Il a tiré sur quelques livres qui lui sont tombés dessus. » Mon regard est fixé sur le médecin, déterminer à ne pas croiser le regard de Rosalie tandis que l’on me demande de conter les événements de l’après-midi. « Son biberon d’eau était vide, il me l’a tendu en signant encore. » C’est quelque chose que l’on avait appris à Gabriel pour communiquer avec lui en attendant qu’il trouve ses mots et le petit garçon sait exactement comment se faire comprendre grâce à cela. « Je me suis levé pour aller le remplir, la cuisine est ouverte sur le salon, je… J’ai détourné le regard quelques secondes pas plus. » Je me retiens de jurer, serrant les points pour ne pas laisser entrevoir les tremblements entraîner par la culpabilité qui me ronge de tous les bords. Je sens l’humidité qui envahit mes paupières à mesure que le regard du médecin s’attarde sur chacune de mes réactions. Je n’ai jamais voulu faire de mal à mon fils. « Je l’ai pas vu se relever. » Il a été trop rapide, comme toujours ces derniers temps. « C’était un accident. » Et ces mots-là, je les adresse à Rosalie uniquement. Je me fiche du regard du médecin, j’ai besoin qu’elle me croit, je veux juste qu’elle voie toute cette culpabilité qui me fait revivre chaque seconde de cet accident en me demandant ce que j’aurais pu faire autrement. « Est-ce qu’il a perdu connaissance ? » - « Non, il a pleuré tout de suite. » Le médecin hoche la tête et observe les réactions de Gabriel en promenant son doigt devant ses yeux. « Vous l’avez de suite amener aux urgences ? » - « Oui, même s’il n’avait rien eu au bras, je l’aurais amené, il a une bosse sur le front, je… Je serais venu juste pour me rassurer. » Une nouvelle fois, le pédiatre hoche la tête. « C’est mieux en effet. » Je ne suis pas idiot, je sais qu’il faut faire attention, j’ai conscience que Gabriel est incapable de nous dire où il a mal avec des mots et qu’il faut être prudent avec un choc à la tête. L’homme en blouse blanche s’approche de Gabriel pour ausculter son bras et entendre les petits gémissements de mon fils envoie une décharge insupportable dans tout mon corps, de la racine de mes cheveux à la pointe de mes pieds. Un sentiment qui terrasse et me fait vaciller au point où l’infirmière rapproche le tabouret pour que je puisse m’asseoir. « On va passer une radio, ma collègue va venir vous chercher. On va essayer de ne pas vous faire attendre trop longtemps. » L’homme échange encore quelques mots avec Rosalie, date de naissance de Gabriel, son groupe sanguin, est-ce qu’il a déjà eu d’autres blessures par le passé. Tout y passe sans que jamais elle ne se tourne vers moi pour que j’intervienne.
Et lorsque l’on se retrouve à nouveau tous les trois dans cette chambre d’hôpital, tout ce que je trouve à faire, c’est encore de m’excuser. « Je suis désolé. » Ces mots ne couvrent à peine l’immensité de tout ce que je voudrais dire, tout ce que je souhaite exprimer pour faire comprendre à la jeune femme que je n’ai jamais voulue tout cela. |
| | | | (#)Ven 11 Nov 2022 - 5:59 | |
| Gabriel dans tes bras, ses sanglots qui résonnent dans la trop petite pièce, tu ne ressens pourtant aucun soulagement à le sentir contre toi. Il y a son bras qui tourne bleu, cette belle bosse sur son front et ce sentiment de culpabilité qui te serre la gorge te rappelle que tu n’étais pas là. Que peu importe ce qui s’est passé pour qu’il se retrouve ici aujourd’hui, tu n’étais pas là pour le protéger. C’est irrationnel bien sûr, quand logiquement, tu sais que tu ne peux pas toujours être là, à chaque seconde pour t’assurer que rien de grave ne puisse lui arriver. Gabriel était en sécurité, il était avec son père et rien de tout cela n’aurait dû arriver et pourtant vous êtes là, à l’hôpital à chercher des réponses, s’assurer que les blessures qui apparaissent sur son petit corps trop fragile n’ont rien de sérieux, ou alors faire tout ce qu’il faut pour réparer le mal. Ça tourne à toute vitesse dans ta tête, c’est à peine si tu entends la voix de Wyatt derrière les sanglots de ton fils. Tu ne lui offres qu’un regard noir avant de reporter toute ton attention sur ton fils. Tu le couves, tu le couvres, mais c’est bien trop tard quand tu ne peux pas faire disparaître cette douleur qui transparaît dans une grimace sur son visage, une expression que tu aurais aimé ne jamais voir sur ses traits. Tu as besoin de quelques minutes avant de pouvoir faire du sens de toutes les pensées qui t’assènent. En vérité, tu aurais aimé avoir encore bien plus de temps pour te calmer, pour ne pas dire des choses que tu pourrais regretter, pour ne pas laisser toutes tes émotions prendre le dessus, mais il n’y a pas plus de minute à perdre. Tu as besoin de réponses, tu as besoin de comprendre. « Il est tombé. Le médecin est pas encore arrivé, on… » Le problème, c’est que tu poses la question, mais tu n’écoutes pas ce qu’il te dit avant d’attaquer à nouveau, posant désormais le blâme sur lui, incapable de prendre naturellement la route d’un bête accident. Son visage change aussitôt et tu sais que tu as frappé trop fort, que tu as poussé trop loin, mais tu ne penses pas à Wyatt, là tout de suite. Tu ne penses qu’à ton fils et ce qui aurait dû être fait pour lui éviter tout ça, oubliant momentanément que les enfants découvrent, que les enfants apprennent et qu’inévitablement, cela peut mener à des situations indésirables. « Je me suis tourné une seconde. » qu’il se défend sans grande conviction, et même si tu te pinces les lèvres avec force pour t’empêcher de répliquer trop rapidement, le commentaire t’échappe. « Une seconde de trop visiblement. » Ça se retourne constamment contre lui, quand c’est vraiment toi que tu blâmes, prisonnière de ce tourbillon qui te rappelle sans cesse que même avant sa naissance, tu n’avais pas su protéger le petit garçon calé dans tes bras.
Quand le médecin arrive enfin, tu t’assois avec Gabriel sur le bord du lit, lui laissant ainsi l’occasion d’ausculter ton fils tout en restant près de lui pour lui offrir un confort dont il a indéniablement besoin présentement. Les questions s’accumulent et Wyatt s’efforce d’y répondre comme il peut, sans jamais tourner le regard vers toi. Tu soupires légèrement lorsqu’il mentionne les coupables de l’accident du jour : ces livres dans la bibliothèque qui n’auraient pas dû rester si près du sol depuis que votre fils s’est mis à bouger par lui-même. Vous en aviez parlé, de réaménager la bibliothèque, de bouger quelques trucs pour justement éviter qu’un truc comme ça ne se produise, mais le temps de bien faire semblait s’être dérobé sous vos pieds et vous aviez manqué de vigilance. Vous. Alors pourquoi est-ce qu’inconsciemment, tu places déjà tout le tort sur le dos de Wyatt? « Son biberon d’eau était vide, il me l’a tendu en signant encore. » Un peu d’eau. C’est tout ce que Gabriel voulait. Combien de fois est-ce que tu l’as toi-même laissé seul au salon pour lui remplir son biberon, ou pour lui préparer une collation? C’est impossible de les compter, tu le sais bien. Et pourtant, tu n’es toujours pas en mesure de te calmer, de te défaire de cette appréhension et de cette colère qui prennent toute la place et se dirigent dans tous les sens. « Je l’ai pas vu se relever. » C’est qu’il est pressé, votre garçon. À tout vouloir voir et faire par lui-même. Ça aussi, tu le sais et quand tu sens enfin le regard de Wyatt se poser sur toi, c’est difficile de faire sens de tout ça en plus de garder une certaine contenance devant le médecin. « C’était un accident. » Tu le sais au fond de toi, mais tu ne l’acceptes pas. Pas encore, pas quand tout de cette situation ramène à un tout autre évènement, où tu ne cesses de mélanger le passé et le présent. À défaut de pouvoir lui répondre, le rassurer, tu restes silencieuse, le regard figé sur ton fils alors que le médecin continue de poser des questions pour s’assurer qu’aucun détail ne lui échappe. Gabriel est alerte, il n’a pas perdu connaissance et Wyatt n’a pas attendu avant de l’emmener ici. Il a fait tout ce qu’il fallait faire, et ça te rassure, lentement mais sûrement. Ça te ramène les pieds sur terre quand tout de cet endroit ne cesse de t’emmener très loin, trop loin et c’est un combat féroce que de simplement rester concentrer sur ton fils et les prochaines étapes de votre visite ici. « On va passer une radio, ma collègue va venir vous chercher. On va essayer de ne pas vous faire attendre trop longtemps. » « D’accord, merci. » Ce sont les seuls mots qui s’échappent finalement de tes lèvres alors que le médecin pose une main compatissante sur ton épaule.
L’infirmière prend une nouvelle fois les signes vitaux de ton fils avant de quitter elle aussi la petite pièce et tout semble atrocement lourd, lorsqu’il n’y a plus que vous trois dans un silence seulement percé par les petits gémissements fatigués d’un Gabriel qui somnole contre toi. « Je suis désolé. » « Je sais. » Ce n’est pas ce que tu devrais dire. Tu devrais le rassurer, lui dire que tu ne lui en veux pas. Vous aviez décidé d’être une équipe après tout, mais tout vient toujours bien plus naturellement quand c’est lui contre toi, quand bien même vous ne voulez que la même chose : que Gabriel se porte bien. « Les livres auraient pas dû être dans le bas de la bibliothèque. » que tu marmonnes, sans réellement t’adresser à lui, quand bien même le reproche lui, se veut lui être adressé malgré tout. Tu passes une main contre ton visage, détestes déjà la simple idée des heures à venir avant que vous ne puissiez passer les radiographies et avoir une réponse, sans compter les possibilités que vous soyez admis sur l’aile pédiatrique s’il s’agit d’une fracture et qu’il se trouve que Gabriel ait besoin d’un plâtre. Le silence s’éternise, tu n’arrives pas à parler. Tu n’as rien de bon ou de beau à lui dire, alors à défaut, tu préfères rester silencieuse. Tu refuses qu’une dispute explose ici, qu’elle s’ajoute à la longue liste des raisons pour laquelle tu ne veux plus jamais te retrouver prisonnière entre ces quatre murs blancs et les lumières fluorescentes qui t’agressent les yeux. « Je déteste être ici. » C’est tout ce qui tourne constamment en boucle dans ta tête, quand tous les bruits des machines environnantes te rappellent inévitablement quand c’est toi qui étais couchée dans un lit. Nerveusement, tu te mordilles les ongles incessamment, tes yeux qui se lèvent chaque fois que tu entends des pas dans les couloirs sans que jamais personne ne vienne chercher Gabriel. « Je sais… Je sais que c’était un accident, mais je… » Mais tu quoi, Rosie? « Pourquoi on est pas capable de le protéger, Wyatt? » Pourquoi est-ce que j’arrive pas à me défaire de cette idée, que je sais pas y faire, dans ce rôle de mère? |
| | | | (#)Dim 13 Nov 2022 - 16:29 | |
| C’est un véritable mur qui me fait face, une mère dans son attitude la plus primaire. Rosalie s’enveloppe tout autour de Gabriel, le protégeant de tout attaque du monde extérieur et m’empêchant même d’avancer vers eux. Il n’existe plus rien que la bulle qu’elle est en train de former tout autour de son fils, pour le garder tout contre elle, pour absorber le moindre de ses pleurs. Je ne suis plus rien face à une telle connexion, je ne suis plus un père, ni compagnon, mais un étranger qui représente une potentielle menace. J’ai beau parler, elle ne m’entend pas, je pourrais annoncer mes excuses dans toutes les langues qu’elle continuera à me jeter son regard le plus noir, tout en utilisant ses bras comme ultime rempart. J’ai souvent vu Gabriel et Rosalie s’unir dans une fusion que je ne pourrais jamais complètement comprendre, mais jamais cette union entre eux ne m’avait fait sentir comme un paria, jamais je n’avais ressenti un tel rejet en les regardant ensemble. Dans cette chambre d’hôpital, je ne deviens plus que le coupable de leurs maux, celui qui a fauté et qui va devoir le payer. Mon instinct premier me hurle de fuir, de ne pas la laisser m’atteindre ainsi, de ne pas accepter un tel rejet, mais je reste cloué sur place à m’excuser sans plus, ne savoir y mettre la moindre forme. Je laisse toute la culpabilité me bouffer à chaque inspiration et toute la haine qui semble irradier de la jeune femme se traduit par les pires mots criés par cette petite voix dans un coin de ma tête. « Une seconde de trop visiblement. » J’aurais encore préféré qu’elle m’insulte, qu’elle crie, qu’elle me demande de partir. J’aurais préféré bien des choses que cette accusation sans détour et la froideur dont elle fait preuve. Avant, je serais monté au créneau, j’aurais protesté avec véhémence, jeter quelques insultes pour lui prouver qu’elle ne pouvait pas m’atteindre. Aujourd’hui, je ne vois que la mère qui cherche à défendre son fils et je ne peux lui en vouloir. Alors, je me recule dans un coin dans la pièce, en souhaitant disparaître.
La visite du médecin se transforme en un interrogatoire qui réveille les vieilles angoisses, mais je tente de ne pas flancher. Je n’ai pas voulu tout cela, je n’ai jamais voulu que Gabriel se blesse, ce n’était qu’un accident. Jamais je ne me montre sur la défensive même lorsque les questions du docteur me paraissent un tant soit peu débile. Je me concentre sur le bras de mon petit garçon, je raconte tous les détails. Il n’a jamais perdu connaissance, il a de suite pleuré et bien sûr que je l’ai emmené aux urgences sans même attendre. Chaque coup d’œil du médecin dans ma direction me semble être une énième accusation, mais je reste de marbre. J’aimerais qu’il s’en aille, qu’il cesse de scruter ma famille de cette manière, je voudrais prendre mon fils et ma femme sous le bras et partir loin d’ici, mais je reste sagement assis sur mon tabouret tandis que tout le monde semble s’accorder sur ma négligence.
Puis comme en un claquement de doigts, la chambre se vide. Soudainement, il ne reste plus que nous trois et un silence qui m’écrase la poitrine. Je m’excuse encore, alors que Rosalie est toujours assise au bord du lit, Gabriel toujours précieusement enroulé dans son étreinte. « Je sais. » Alors pourquoi j’ai la sensation qu’elle ne me croit pas, qu’elle ne veut pas m’entendre, qu’elle n’arrive pas à percevoir toute la culpabilité qui émane de moi. « Les livres n'auraient pas dû être dans le bas de la bibliothèque. » Non, c’est vrai, j’aurais dû les bouger dès la première fois où on en a parlé, mais il y a eu d’autres choses à faire, d’autres activités avec Gabriel et j’ai oublié, comme elle avait oublié de refermer la porte des toilettes une fois alors que le petit garçon adore aller tirer sur le papier pour le dérouler à sa guise. « Je sais Rosalie. » Je sais que je n’aurais pas dû mettre son tapis aussi près de la bibliothèque pour commencer, je sais que j’ai dû le prendre avec moi pour aller remplir son biberon même si Gabriel aurait probablement ronchonné. Je sais tout ça. J’ai conscience de mon erreur. « Crois-moi si je pouvais, j’aurais préféré me prendre l’intégralité du mur sur la tête plutôt qu’il arrive quelque chose comme ça. » Est-ce qu’elle va m’entendre pour autant ? Je préférerais me casser tous les os du corps plutôt qu’il arrive quelque chose à notre fils, mais j’ai fait l’erreur de lui tourner le dos le temps d’une minute et je ne peux rien faire pour changer cela désormais. À part me flageller pour les jours et les semaines à venir.
Toute la nervosité de Rosalie irradie la pièce et je ne supporte plus de la voir ainsi, voir toute l’inquiétude sur son visage et les larmes qu’elle cherche désespérément à retenir depuis qu’elle nous a rejoint. Tout en douceur, je me lève de ma place sur le tabouret pour m’approcher d’eux. Ma main vient glisser sur sa joue avant de venir retirer ses doigts de sa bouche. « Je suis désolé. » que je répète pour la dixième fois, alors que ses doigts viennent enfin s’entremêler au miens dans une étreinte timide. Mes lèvres trouvent sa tempe avant que mon corps se rapproche un peu plus du sien, pour trouver refuge entre ses cuisses. À deux, on finit par créer un véritable rempart autour de Gabriel, qui reste coller à sa mère. C’est son crâne que je viens embrasser avec tendresse, prenant le temps de m’imprégner de son odeur de bébé qui clash avec l’ambiance aseptisé de cette chambre. « Papa est désolé. » Et je pourrais le dire mille fois encore, dans toutes les langues, avec toutes les différentes inflexions de voix. Et juste un instant, il n’existe plus que nous trois. Mon front collé à celui de Rosalie et nos regards posés sur notre fils. « Je déteste être ici. » Je sais. Ce serait redondant de le répéter pour la millième fois, mais je sais. Et que dire ? À part que je suis désolé et que tout va bien aller. Je ne sais plus quoi dire, si ce n’est serrer ses doigts entre les miens pour lui rappeler que l’on s’était juré de faire équipe pour lui. « Je sais… Je sais que c’était un accident, mais je… » Mon corps se tend et déjà, je me préparais à la voir m’échapper. Elle sait, mais elle ne pourra jamais me le pardonner ? Elle sait, mais je reste le coupable ? Je m’attends à tous les scénarios, je suis prêt à prendre les coups. « Pourquoi on est pas capable de le protéger, Wyatt? » C’est tout mon corps qui se tend dès qu’elle prononce ces mots. L’angoisse se réveille en puissance, sonne toutes les alarmes et me pousse à vérifier par deux fois que personne n’est entrées dans la chambre entre temps que personne ne nous entend. Je me recule d’un pas pour capturer son visage entre mes mains, je n’ai jamais été aussi sérieux et urgent qu’à ce moment. « Tu peux pas dire ça. » que je souffle en douceur malgré tout, mais tout en cherchant à lui faire comprendre que je ne plaisante pas, que je ne dis pas uniquement cela pour la rassurer. « Pas ici, tu m’entends ? » Parce que si les médecins l’entendent remettre en doute notre capacité de protéger notre fils, ils vont poser des questions. Elle ne veut pas qu’ils posent des questions. Moi, je les connais, je les ai déjà vécus et mon esprit n’arrive pas à me convaincre que la situation était diamétralement différente. On pourra en parler, plus tard, loin des oreilles qui traînent dans les couloirs, loin de ceux qui pensent lire des situations là où il n’y en a pas. « Ne dis pas ça. » Par pitié Rosalie, pour une fois, aie confiance en moi. « On fait du mieux qu’on peut, aucun parent n’est parfait, Rosalie. » Je soupire et reviens embrasser son front avant de la prendre à nouveau contre moi. Personne ne pourra s’approcher de ma famille.
Ils ont réussi à nous séparer malgré tout, quand il a fallu emmener Gabriel passer la radio et qu’un seul des parents pouvait l’accompagner. J’ai laissé la place à Rosalie avant même que quiconque ne pose la question, elle doit rester avec lui, je peux les attendre. Gabriel, c’est mis à pleurer en m’appelant dès qu’il a compris que je ne venais pas avec eux et j’ai pris deux minutes pour le rassurer avant que le médecin ne presse les choses et que l’on se retrouve séparé dans ce couloir blanc et froid. Pour ne pas craquer en public, parce que je me savais incapable d’attendre dans la chambre, j’ai trouvé une terrasse au détour d’un couloir pour aller me griller une cigarette. Juste une, celle qui brûle les poumons et tente de remettre les idées en place. Comme pour me rassurer, j’envoie un message à Leo, pour me rappeler qu’ils n’ont jamais réussi à nous séparer même si un jour quelqu’un a voulu tenter. On échange quelques messages rapidement avant que je ne retourne à l’intérieur. Et lorsque je reviens dans la chambre, Rosalie et Gabriel sont de nouveau là. Avec le médecin et une infirmière qui me bloque presque l’entrée. Rosalie est plus pâle que jamais, Gabriel toujours dans ses bras et lorsque son regard croise le mien, je comprends que quelque chose ne va pas. |
| | | | (#)Mar 22 Nov 2022 - 11:31 | |
| Ta tension ne descend pas, qu’importe les minutes qui filent avec Gabriel dans tes bras et la preuve tangible que malgré l’accident, il va bien ou du moins, aussi bien que possible. C’est toi qui ne vas pas bien en ce moment. C’est toi qui peines à séparer le passé du présent, qui laisse le traumatisme de la naissance de Gabriel toute la place alors que ce n’est pas le moment de le faire. Tu pensais que tu avais enfin été en mesure de laisser tout ça derrière toi, que tu avançais dans ce rôle de mère sans cette pression constante, sans le rappel de ce qui s’était passé mais il avait seulement fallut que tu mettes les pieds à l’hôpital pour que tout te revienne d’un coup, pour que tu te sentes aussi impuissante aujourd’hui que ce jour-là, incapable de croire qu’un jour, tu oublieras tout de cette lourdeur qui t’écrase les poumons, qui te retourne l’estomac, qui t’empêche de respirer correctement. Tu entends l’échange entre le docteur et Wyatt, tu entends les explications, mais c’est à peine si tu écoutes. Tu retiens toutes les informations, mais tu te formalises bien peu des insinuations bien peu subtile des médecins, des allégations qui pourraient tomber contre le Parker si tu n’es pas prudente, si tu ne réfléchis pas un peu avant de parler. C’est que rien de tout ça ne fait de sens. Tu ne penses pas à la négligence en soit, jamais tu ne croirais Wyatt capable de faire mal à votre fils volontairement, ce qui te hante et te harcèle présentement est bien plus sournois que ça et surtout, bien plus relié à toi et tes capacités qu’à celles du père de ton fils. Tu devrais être plus attentive, tu devrais voir le mal qui occupe chaque parcelle de celui que tu connais pourtant par cœur, il y a des milliers de choses différentes que tu devrais faire, mais tu en es incapable. Il n’y a que tes démons qui se démènent de partout et puis tes bras qui serrent ton fils juste assez fort pour le protéger sans lui faire de mal. C’est tout ce que tu peux faire pour te permettre de rester debout, pour ne pas prendre tes jambes à ton cou et laisser ces perverses pensées gagner, celles qui te disent parfois qu’ils seraient mieux sans toi, en sécurité sans toi, même si tu sais que c’est faux, même si tu refuses de les écouter.
« Je sais Rosalie. » La pièce est vide de toute présence de professionnels de la santé. Tu as parlé, des mots sont finalement sortis de ta bouche, des reproches surtout et tu le regrettes déjà bien que tu sois incapable de le démontrer. Tout est trop lourd et il est trop loin Wyatt, assis sur son tabouret à l’autre bout de la pièce pourtant minuscule. « Crois-moi si je pouvais, j’aurais préféré me prendre l’intégralité du mur sur la tête plutôt qu’il arrive quelque chose. » « Dis pas de bêtises. » que tu répliques aussitôt, d’un ton trop précipité et trop froid, passant à côté du message que Wyatt tente si désespérément de véhiculer. Tu n’entends qu’une situation plus saugrenue encore que celle dans laquelle vous vous trouvez, il tente de te dire pourtant qu’il préférerait par cent fois être celui qui se fait plutôt que votre fils. Tu souffles une seconde, prends le temps de réfléchir, de comprendre plutôt que d’être si réactive et un triste sourire apparaît sur ton visage. « Je serais dans tous mes états si c’était toi qui s’était blessé. » que tu finis par lui avouer, le regard mouillé de larmes que tu te refuses pourtant de laisser couler. Tu ne voudrais pas qu’il soit blessé, pas plus que tu n’aimes voir ton fils souffrir présentement. Aucun scénario ne saurait alléger ton cœur présentement, tout comme les nombreuses excuses de Wyatt n’aident en rien à te faire redescendre de cette panique qui perdure bien trop longtemps, qui t’engouffre complètement. C’est seulement lorsqu’il se lève enfin et qu’il s’approche de vous que tu te permets d’échapper ce sanglot qui t’oppressait le fond de la gorge, seulement lorsque tu sens sa main sur ta joue que tu permets aux larmes de couler. Tu sens ses lèvres sur ta tempe et vous devenez ce cocon, celui que vous avez toujours su être pour Gabriel même quand tout était compliqué.
« Papa est désolé. » Tout est toujours trop lourd, mais le poids semble partager désormais, quand enfin, tu te souviens que ce n’est pas lui contre toi, que c’est vous deux, ensemble, à traverser ce moment qui n’a pourtant rien de bien exceptionnel en soit. Des enfants qui se blessent en jouant, en découvrant leur environnement, c’est quelque chose qui arrive à tous les jours. Ça ne fait pas de vous de mauvais parents, alors pourquoi est-ce que tu te sens comme ça? Pourquoi est-ce que tu es incapable de rationaliser complètement? Est-ce que c’est ça d’être parents, ou bien c’est le traumatisme de sa naissance qui teinte encore et toujours le moindre de tes moments avec lui, la moindre de tes fautes en tant que mère? Les mots t’échappent, ceux que tu te répètes constamment, le blâme que tu portes, celui que tu lui imposes sans même réaliser l’ampleur de ce que tu dis et le cocon se brise lorsqu’il se redresse légèrement, de la panique dans les yeux. « Tu peux pas dire ça. » Tu fronces légèrement les sourcils, sa réaction te prenant par surprise alors que tes pleurs se calment finalement pour laisser place à l’incrédulité. « Pas ici, tu m’entends? » Ici? Tu ne comprends pas assez vite, le silence pose toutes les questions pour toi alors que Wyatt lui, enchaîne avec rapidité. « Ne dis pas ça. » qu’il répète et tu hoches finalement la tête en approbation, un léger s’échappant de tes lèvres. « On fait du mieux qu’on peut, aucun parent n’est parfait, Rosalie. » « Je sais, je suis désolée. » que tu lâches finalement alors qu’il te serre à nouveau et que tu trouves finalement un peu de confort contre lui, malgré la tempête qui perdure dans ton esprit. « Je sais que c’était pas de ta faute. » que tu murmures enfin, des mots que tu aurais dû lui dire bien avant, mais qui tu l’espères, sauront apaiser son esprit un petit peu.
Les minutes semblent interminables avant que l’infirmière ne vienne finalement chercher Gabriel pour une radiographie. Un seul parent peut l’accompagner et c’est sans vraiment donner le choix à Wyatt que tu accompagnes l’infirmière jusqu’à la petite seule, ton fils toujours dans tes bras. La procédure est facile et sans douleur pour Gabriel qui continue de somnoler pendant que l’infirmière l’installe de manière adéquate et lorsque tout est terminé, c’est une chambre vide que tu retrouves. Tu devines sans trop de difficulté que Wyatt a dû sortir pour prendre l’air et se noircir un peu plus les poumons, une habitude qui ressort d’autant plus lorsqu’il est nerveux. Quand la porte s’ouvre à nouveau, ce n’est pas au Parker que tu fais face toutefois, mais bien le médecin et l’infirmière qui sont de retour. Si tu pensais d’abord qu’ils avaient déjà les résultats de la radio, tu réalises bien vite que ce n’est pas là le but de leur visite. Les questions s’enchaînent sur votre vie à la maison, sur la nature de ta relation avec Wyatt, si tu le laisses souvent s’occuper de lui seul, ce à quoi tu ne peux t’empêcher de répondre avec une pointe d’agressivité, n’appréciant pas les sous-entendus pourtant bien peu subtils que le médecin est en train de faire. C’est seulement après tout ça que tu comprends enfin ce que Wyatt tentait de te dire un peu plus tôt et tu t’en veux encore plus de ne pas avoir su être plus à l’écoute, plus vite à réagir et empêcher que le doute ne se forme dans l’esprit du professionnels soignants. « Wyatt ne ferait jamais de mal à son fils, il vous l’a dit tout à l’heure, c’était un accident. » que tu répètes, le timbre de ta voix rapide et aigüe, l’agressivité toujours présente bien malgré toi. Quand tu aperçois sa silhouette derrière la porte qui s’ouvre, alors que l’infirmière l’empêche presque de rentrer, tu t’approches d’eux, te fichant bien des intentions de cette dernière, ta main attrapant la sienne et lui forçant un chemin dans la pièce. « Gabriel a bientôt un an, il apprend à se tenir debout, il est curieux et veut toucher à tout. Il n’y a rien-là de plus qu’un bête accident. » Une seconde d’inattention, c’est tout ce que ça a pris, mais Wyatt te l’a dit plus tôt, ça ne fait pas de vous de mauvais parents et maintenant que cela semble être questionner, c’est avec férocité que tu protèges ta famille. « Très bien. » se contente de répondre le médecin, ligne mince sur ses lèvres qui lui sert de sourire alors qu’il gribouille quelques mots dans son dossier avant de faire signe à l’infirmière de sortir. Avant que la porte ne se referme derrière lui toutefois, il ajoute « Les résultats de la radio devraient arriver d’ici une heure. On va continuer de garder un œil sur lui, mais si ses signes vitaux restent stables et que la radio est normale, vous devriez pouvoir partir bientôt. » Tu hoches simplement de la tête en guise de réponse, pour lui faire savoir que tu as compris.
Un dernier regard vers ton fils qui dort dans le petit lit – barrières levés pour éviter un autre accident – et une fois que vous êtes de nouveau que tous les trois dans la pièce, tu te tournes vers Wyatt et te loges aussitôt dans ses bras, le serrant avec force comme si tu craignais soudainement qu’il t’échappe. « Je suis tellement désolée. » que tu réitères, alors que ces mots semblent ceux que vous ne cessiez de vous offrir à tour de rôle depuis ton arrivée à l’hôpital. « J’ai pas pensé tantôt, j’avais pas réalisé ce que j’impliquais…je… J’ai jamais pensé une seule seconde que tu aurais pu lui faire du mal, tu le sais ça, hein? » Ce n’est pas ce que tu voulais dire, ce n’est pas du tout ce à quoi tu pensais, mais tu comprends maintenant, comment ça aurait pu être mal-interprété si cela avait été entendu par les mauvaises paires d’oreilles. « Je repensais juste à sa naissance et je… J’ai paniqué. » C’est vraiment le moins qu’on puisse dire. « Pardonne-moi. » que tu murmures contre son cou alors que tu refuses de te détacher de cette étreinte dont tu as terriblement besoin présentement. Tu mets quelques minutes avant de reprendre un semblant de contenance, assez pour distance légèrement ton corps du sien sans toutefois défaire complètement le contact de vos deux êtres. « L’infirmière semblait croire que c’était pas cassé. Il pouvait bouger un peu son bras sans pleurer et le fait qu’il se soit calmé était bon signe aussi. » que tu lui expliques, relatant les quelques mots que tu avais échangé plus tôt avec la jeune femme, avant que tout ne prenne un tournant bien plus désagréable. « On va rentrer à la maison bientôt et tout va bien aller, d’accord? » Tu n’en es pas convaincue toi-même, mais tu as besoin qu’il te le dise, tu as besoin qu’il te rassure et qu’il te répète que tout ça, ce n’est qu’un mauvais moment à passer. |
| | | | (#)Sam 17 Déc 2022 - 12:22 | |
| L’action pourrait être interprétée par biens des façons, du simple fait que j’ai cherché à entrer dans la pièce lorsque l’infirmière a voulu en sortir créant ce barrage inutile qui précède souvent un moment gênant de danse sur un pied pour savoir qui passera le premier, à la conclusion plus abjecte de la volonté de la part de la jeune femme de me refuser l’accès à la chambre. Dans un court-circuit énergiser par l’angoisse encore tangible, mon sang ne fait qu’un tour en s’arrêtant sur la deuxième conclusion. Il me faut toute la volonté du monde pour ne pas laisser mon agressivité protection ressortir de manière démultipliée. L’insulte est sur le bord de mes lèvres avant que la jeune femme ne rougisse quelque peu et fasse un pas sur le côté pour me laisser entrer. J’aimerais lui rappeler que personne ne pourra me séparer de ma famille et qu’elle ferait mieux de ne jamais recommencer, mais je ravale mes paroles face au regard du médecin. Il cherche à se montrer bienveillant quand chacune de ses questions me paraît être une nouvelle attaque personnelle. « Wyatt ne ferait jamais de mal à son fils, il vous l’a dit tout à l’heure, c’était un accident. » Je ne suis pas le seul à vouloir sortir les crocs, Rosalie se montre sur la défensive, prête à s’interposer, comme je ne l’ai jamais vu faire auparavant. Elle impose ma présence et sa main s’ancre à la mienne d’une force que je ne saurais reconnaître, mais qui hurle enfin que l’on ne fait plus qu’un face à l’adversité. Elle me permet de m’ancrer dans la réalité, retenant mon esprit qui cherche sans fin à s’en aller vagabonder dans des souvenirs qui ne servent en rien à la situation. « Gabriel à bientôt un an, il apprend à se tenir debout, il est curieux et veut toucher à tout. Il n’y a rien-là de plus qu’un bête accident. » Le médecin semble bien plus convaincu par les paroles de cette mère lionne qui s’est matérialisée à mes côtés plutôt par tout ce que j’ai pu dire auparavant et cela vient titiller les doutes qui m’assaillent depuis que nous sommes arrivés aux urgences. Je me contente de garder le regard fixé sur mon fils, conscient que rien de ce que je ne pourrais dire ne viendra changer les choses désormais. Lorsque la mère émet des doutes, la machine se met en branle, mais Rosalie s’entête à me défendre et pour la toute première fois, c’est moi qui viens me cacher derrière elle, devenant le compagnon qui a besoin de n’importe quelle forme de soutien. Je refuse de m’écrouler pour si peu, mais tout semble vaciller sous les coups d’accusations non fondés. Si j’écoutais mon instinct, j’aurais déjà hurlé sur le médecin de ne jamais remettre en doute la manière dont je traite mon fils, avant de prendre Gabriel sous mon bras, tout en tirant sur celui de sa mère pour que l’on quitte cet endroit, mais je reste de marbre. « Merci. » que je finis même par murmurer à l’adresse du médecin qui s’en va sans nous jeter un regard supplémentaire.
Dans la seconde qui suit, le corps de Rosalie vient se coller au mien dans une étreinte qui me coupe le souffle. « Je suis tellement désolée. » Il me faudra une seconde, pour réaliser que l’orage est probablement passé et enfin venir enrouler mes bras autour de ses épaules. « J’ai pas pensé tantôt, j’avais pas réalisé ce que j’impliquais…je… J’ai jamais pensé une seule seconde que tu aurais pu lui faire du mal, tu le sais ça, hein? » J’essaye de me convaincre qu’elle ne pensait pas à cela, je me dis que c’est juste la peur qui a parlé, je le sais au fond de moi qu’elle n’a même pas envisagé cela, qu’elle était simplement énervée que je ne fasse pas assez attention à Gabriel, mais tout peut être interpréter de différentes façons. « Je repensais juste à sa naissance et je… J’ai paniqué. » - « Rosie, je sais. » que je viens murmurer le visage enfoui dans ses cheveux, mon étreinte plus forte que jamais. « Pardonne-moi. » A ses mots, je me redresse et viens planter mon regard dans le sien. « Je ne t’en veux pas. » Jamais. Elle vient d’avoir sa première vraie frayeur de maman. Je me souviens encore de la mienne la première fois qu’elle a dû m’emmener aux urgences parce que j’avais chuté dans les escaliers, elle avait passé son temps à me couver, et même toutes les fois après cela, même quand on avait presque une carte de fidélité dans le service. « Je sais que tu as peur, mais regarde… » Je nous tourne légèrement afin qu’elle puisse voir Gabriel qui venait de s’endormir dans le petit lit. « Il va bien. » que je lui assure pour la troisième fois au moins. « C’est juste… » Je soupire un peu et l’entraîne sur le fauteuil avec moi, ne faisant plus vraiment confiance à mes jambes après toutes ces heures à tourner en rond. « Quand Leo était gamine, elle a décidé de fuguer par sa fenêtre parce que je lui avais interdit de rejoindre ses copines. » Je n’étais qu’un gamin aussi, mais ma mère passait son temps au travail et j’étais le seul à vraiment me soucier du fait que Leo devait rester dans le droit chemin. « Bien entendu, elle s’est cassé la gueule et j’ai dû l’amener ici. » Parce qu’elle avait lâché trop tôt et que sa jambe avait pris un drôle d’angle en atterrissant dans le jardin. « Elle était tellement énervée après moi que quand le médecin lui a posé des questions, elle a dit que je n’étais pas son frère et qu’elle me connaissait pas. » Ce n’était que les paroles d’une gamine de treize ans qui avait besoin de se rebeller pour compenser l’absence de sa mère, mais le médecin a vu cela d’une tout autre manière. « Ils ont appelé les services sociaux et elle a failli être placée pour mauvais traitement. » Je soupire, me souvenant encore parfaitement de la panique qui avait gagné ma cousine lorsqu’elle avait compris l’ampleur de sa bêtise. « Ça a duré des mois, ils venaient à la maison pour voir où vivait Leo, on nous a posé des milliers de questions, et même si ma mère était sa tante, on a bien failli la perdre. » Je sais que c’est bien différent avec Gabriel étant donné qu’il est véritablement notre fils, mais je n’ai jamais oublié ces mois de galère, cette peur qui flottait au-dessus de la maison. « Je veux jamais revivre ça. » que je finis par soupirer avant de revenir enfouir mon visage dans le creux de sa nuque.
Le silence s’étire alors que l’on peut entendre la petite respiration de Gabriel dans la pièce. « L’infirmière semblait croire que ce n'était pas cassé. Il pouvait bouger un peu son bras sans pleurer et le fait qu’il se soit calmé était bon signe aussi. » - « D’accord. » J’espère vraiment qu’il ne s’agit que d’un gros bleu et qu’il n’aura pas à se faire plâtrer, il est bien trop petit pour ça. « On va rentrer à la maison bientôt et tout va bien aller, d’accord? » Une nouvelle fois, je hoche la tête sans en dire plus.
Et elle avait raison, le médecin est revenu nous dire que rien n’était cassé, mais que l’on allait devoir faire attention quelques jours. Ils nous ont laissé partir quelques minutes après et à la minute où l’on est rentré à la maison, j’ai commencé à déménager les livres de la bibliothèque. |
| | | | | | | | the sky is falling down (craker #27) | |
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