My bad habits lead to wide eyes stare into space, and I know I'll lose control of the things that I say. Yeah, I was lookin' for a way out, now I can't escape. Nothin' happens after two, it's true, it's true, my bad habits lead to you @jameson winters

« Oooh, jingle bells, jingle bells, jiiingle all the waaay ! » Est-ce bien le chant des enfers qui parvient jusqu’à mes oreilles ? Sans m’arrêter, je jette un regard à ces fondus dans la rue qui braillent leurs inepties à la gueule des braves gens qui essaient juste de vivre leur vie. Des sourires mielleux fendent leur visage roses, l’un d’eux agite même des grelots. C’est malsain d’être aussi heureux.

Je perd pas de vue mes objectifs, je trace ma route. Mais le reste du quartier est du même acabit, si ce n’est pire. Des lutins empalés sur des bâtonnets qui se balancent lugubrement vers une hotte qu’ils remplissent et vident inlassablement de faux cadeaux avec des sourires de tarés. Des pères Noël écrasés contre les fenêtres comme s’ils avaient raté leur atterrissage, d’autres en Marcel dégueulasse avec planche de surf sous le bras pour rappeler qu’on est bien en Australie et que dans ce bled de beauf on s’crame le cul sous un soleil de plomb plutôt que de se la couler douce à la neige. Je remonte mon sac à dos d’un coup d’épaule et regarde autour de moi, accablé. Une pointe d’angoisse dans la poitrine, je vois qu’au-dessus de ce bordel trône une inscription peinte à la main sous laquelle on voit encore le dessin au crayon « la boucherie de Franky vous souhaite un joyeux noël ». Le long soupir qui m’échappe forme un nuage de fumée de tabac. Ils m’ont pas raté les salauds. Cette période insupportable pourrait pas finir trop tôt. Mais je suis arrivé à destination, c’est déjà ça. Mon saint graal, aka les grosses lettres jaunes sur fond rouge pétant lisant « Liquorland ».  Je jette ma cigarette, je rentre, je dis bonjour à personne, je marche droit et je remplis mon sac des bouteilles les moins chères qui restent quand même assez fortes pour pouvoir me retourner le cerveau dans les règles de l’art – y a certain calcul coût / biturage à réaliser, c’est subtil, mais pour ce genre de truc je suis subitement un crack en math. Dans un coin de ma tête, y a Fueldude qui agite son doigt en signe de réprobation, y a Aisling qui plonge sa truffe vers moi en s’écriant « TU AS BU ! », y a Socketman qui fait la moue et qui dit rien mais qui en pense pas moins. Ils disparaissent aussi vite qu’ils sont apparu. J’ai pas la loisir d’avoir une conscience. (Et sérieux à quel moment ma conscience à décider de se métamorphoser en ces trois ploucs ?) Mais je m'en tape, j’ai pris ma décision, et j’ai plus rien à perdre. On parle pas assez de la liberté qu’on trouve au fond du gouffre. T’as déjà déçu tout le monde, t’as plus à te battre, tu peux juste t’en battre les couilles. « Et joyeuses fêtes ! » s’écrit la caissière avec un sourire jusqu’aux oreilles façon scare-jump. Je paie en liquide, me congratule d’avoir réussi à faire aucun eye contact de la journée, et je me casse.

Je trébuche à la sortie. Ça craint. Mais la cliquetis rassurants des bouteilles dans mon sac remonte le moral des troupes. Comme je disais, la conscience j'en ai plus rien à foutre. La culpabilité par contre, celle qui ressemble vachement aux mines déconfites de Leila et Robin, elle... j’ai plus de mal à l’envoyer chier. Alors j’y pense pas. Je tourne le dos au vent qui me rate pas lui non plus, balance mes cheveux dans tous les sens pour hacher ma vision et bordel ils se sont tous ligués pour me faire chier ce soir. Je coince une cigarette entre mes lèvres et l’allume d’un geste rageur. Ensuite je relève dans la tête et entre deux mèches blondes un peu crades je vois une petite silhouette brune en grandes pompes se rapprocher de moi perchée sur talons hauts clac clac clac. Je la fixe une seconde parce que j’y crois pas. J’suis déjà bourré, et comme j’suis aussi taré c’est pas impossible que ce soit une hallucination - ce serait pas la première fois. C’est juste une inconnue que mon cerveau bituré redessine à sa guise pour me tourmenter. Je m’en formalise pas. Sauf que la brune se rapproche encore et ses traits se modifient pas. Et merde. C’est elle. Qu’est ce qu’elle fout là ? Avec un boug. Roux. En costard. Je sais pas pourquoi ça m'énerve. Mais je suis taré, alors c'est quoi la nouveauté ? Elle est rayonnante, sa queue de cheval sautillant au rythme de ses pas. J’hésite à tourner les talons, mais elle m’a clairement cramé. J’hésite quand même, commence à lui tourner le dos. Et finalement je décide d’être un peu sympa, un peu humain, de la saluer, alors je me tourne vaguement vers elle et – « Jaimie » je grogne en soufflant ma fumée dans l’air, le visage glacé.

Starseed

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« Well I’ll be damned » En effet. « What is it, ten years or something we’ve lived in the same city, without ever bumping into each other and here we are, hitting our once-a-month quota. » Elle est à peu près aussi sociale et rayonnante que je suis inapte et acariâtre. J’aimerais poursuivre la conversation mais ça fait pas parti de mes fonctionnalité de base. Je suis même pas capable de saluer la caissière sans trop faire la gueule. Comme je ne sais pas comment se débrouillent les humains quand ils veulent paraître sympathiques, je me contente de faire un haussement de sourcils pour confirmer ses dires. On s’est pas croisé quand j’étais au top de ma gloire et que j’aurais pu me la raconter un peu et who’s the fucking dishwasher now Ryder? Non. On s’croise maintenant, quand j’ai atteint le fond, et que je continue encore de creuser avec engouement. Ça doit être une punition Karmique. Je suis trop casse couille depuis trop longtemps.  « Anyway it’s good to see you, Phoenix. » Je pose mon regard dans le sien. Elle a l’air sincère. Pas de sourire gêné ou de connivence. Elle a réellement l’air contente de me voir. Incompréhensible. J’ai envie de répondre que c’est réciproque. Alors je sais pas pourquoi à la place je réajuste la hanse de mon sac sur mon épaule et je regarde derrière moi comme si je voulais me barrer. Au loin, un groupe d’illuminés brailleurs s’ambiance à l’idée que tis the season to be jolly la la la la lala la la. J’ai frisson d’horreur. Ils me suivent ces détraqués ! En face, mon attitude désagréable la refroidi pas, merci. « How are you? » Je tourne à nouveau la tête vers elle et j’ai limite un mouvement de recul. Elle s’est vachement rapproché non ? Ou bien c’est son regard vert braqué sur moi qui m’a perturbé, ce même regard intense qui sonde ton âme qui m’avait fait chaviré y a des années et qui là me donne envie de détaler comme un lièvre. « And how’s Leila? » elle m’enchaîne et voilà j’le savais, elle lit dans les pensées. J’aspire une dernière latte avant d’écraser la cigarette sur le trottoir - Elle est pas finie mais question de respect.  « She’s good. She uh… she’s gonna go live in Sydney with her grandparents. Paige’s. » Je précise, parce que ça allait pas être avec mon taulard de géniteur. Je souffle la fumée blanche. Elle sait pour Paige ? Putain j’sais même pas.  « My wife. She passed. » Ensuite je capte son regard soucieux et je me sens obligé d’ajouter : « They asked for custody and at this point it’s the best option for her. Nice house, harbor view, all that shit. » Je peux pas les encadrer ces sacs à merde. Je sais pas si je suis convaincant, moi j’suis convaincu. Je revois encore les grands yeux bleutés bourrés des larmes de ma p’tite, je sens encore les contours de sa minuscule main s’éclaté contre ma joue, j’entends encore les craquement dans sa voix quand elle criait “You! I want to stay with you! Why can’t you do something? I hate you! I hate you!” je sens encore la haine dans le fond son regard hanté quand elle m’a fixé avant d’articuler “It should have been you.”  « Yeah, it’s for the best. » Elle le voit pas encore. Mais un jour elle comprendra. Elle mérite ce qu’il y a de meilleur, et le meilleur ce sera toujours sans moi. Sortez les violons j’suis prêt. Et comme à ce stade j’ai malheureusement pas le pouvoir d’échanger nos places, à Paige et moi, les viocs ça l’fera. Je me frotte le nez et je mets ma main dans ma poche et comme j’aime pas trop le regard de Jaimie qui me brûle la peau je fais un mouvement de tête vers Le Roux qui swing entre les rayons en se croyant cool et dans sa ferme parmi le bas peuple et qui fait pas des clins d’œil et des finger guns aux bouteilles qu’il croise mais pas loin. « Boyfriend? » J’sais pas pourquoi je demande ça - on bifurque la conversation comme on peut, j’suppose. En tout cas c’est l’excuse que j’me raconte et qui m'va bien merci.

Starseed

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« Oh no » la nonchalance et le désintérêt total qui teinte ses paroles étirent vaguement le coin de ma lèvre - ma version à moi d’un sourire amusé dans mon langage de vieux con aigri. Of course not… une femme que Jaimie pourrait pas se contenter d’un p’tit bureaucrate bon chic bon genre qui se croit rebelle parce qu’il a assez de thune pour venir en hoodie au taf dans sa tour d’ivoire. Elle se ferait méchamment chier. « Actually you are » « What? » Je cligne des yeux. C’est sorti droit, elle a pas hésité, et moi j’ai failli m’étouffer avec ma salive - et ma médisance gratuite. Un flash de panique doit traverse mon visage alors que j’essaie de chercher dans ma caboche moisie si j’ai encore un foutu trou de mémoire et qu’il s’est passé un truc entre nous pour qu’elle s’imagine ça. Il s’est passé un truc quand on s’est vu pour sa cuisinière ? On s'est revu après ? Putain j’me souviens de rien. C’est quoi l’embrouille, c’est un jeu ? C’est quoi les règles ? Elle plante son regard effronté dans le mien et je m’attends presque à ce qu’elle me colle une baffe pour avoir oublié notre aventure. Mais quelle aventure putain ? « That custody claim is bullshit. What your kid needs is her dad… what if I told you she could stay with you and enjoy a nice house with a harbour view? » Elle est calme, posée, factuelle. Et moi je fronce les sourcils. Je suis paumé. « Sydney’s a long way from home Phoenix. And to a little girl, distance can feel even scarier. » De quoi je me mêle sinon ? J’ai envie de l’envoyer chier, je me frotte la bouche. Ensuite je fais 2+2 et je comprends ce qu’elle dit pas. Mon regard se durcit. Shit. La voilà la baffe. Elle était juste pas physique. Je relève les yeux vers elle, la mâchoire bien crispée. Je lui ai carrément fait pitié. Elle a écouté mon histoire de pleurnichard à la mord moi le nœud, elle a regardé ma gueule de clodo et elle s’est dit qu’elle allait se sacrifier pour la cause. C’est dans sa nature de sauveuse de kangourous. J’aurai du me douter qu’elle pourrait pas juste se contenter d’être contente pour Leila et enchaîner sur des banalités. Nan, faut qu’elle me voit comme un fucking kangourou en détresse. Pourquoi j’ai ouvert ma gueule ? Je crève de honte et je déteste ça. J’ai tellement les boules que le peu d’honneur qu’il me reste me flanque un coup de chaud dans le corps entier. Je rebaisse la tête pour attraper machinalement une nouvelle cigarette. « Not a charity case darling » je lâche en la regardant froidement avec la sèche qui pend entre les lèvres pendant que je cherche mon briquet au fond de ma poche. Putain j’le savais, j’aurais dû m’arracher. D’ailleurs c’est ce que j’fais. Sans demander mon reste j’tourne les talons et j’commence à m’barrer. Et garde ta pitié pour les foutus kangourous et la chorale de tarés.

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« Oh no... no, no. » Sa voix calme qui me récupère comme son bras qu’elle glisse dans le mien. Qu’est ce que- ? Je fronce les sourcils, regarde sa petite main, relève la tête vers la sienne. « Trust me, you’d be doing me a solid. » So long la p’tite hippie qui rougissait, baissait les yeux pour éviter mon regard ou s’emportait en me balançant son t-shirt à la gueule. La Jaimie qui se dresse devant moi a l’air aussi imperturbable qu’une statue de marbre. Et on va pas se mentir, ça me perturbe un brin. « I’m due to attend a reception tonight, you see? Christmas Gala for the company. Everyone comes with their partner or their family and those who don’t…  well, they usually find some unwanted courage at the bottom of their glass and come straight to me. » La chute me fait hausser les sourcils et la fumée de ma cigarette me sort par le nez comme un dragon barbu amusé. Je m’y attendais pas. J’y croyais pas qu’elle en ait quelque chose à foutre de se pointer seule a un gala de pingouins au point de vouloir un faux petit ami comme dans les comédies romantiques de Noël dont Paige raffolait. Mais non, elle en a juste ras le cul que des blaireaux imbibés de bravado et saupoudrés de magie de Noël se sentent pousser des ailes pour oser lui compter fleurette. « But if you’re here as my partner, they wouldn’t dare and so maybe I can actually unwind and enjoy the evening for once. » Elle en fait des tonnes. Son âme d’avocate. Elle a le mérite de me dérider. Je la suis du regard dans sa plaidoirie sans me détacher de mon expression passablement amusé. Encore une couche ? Encore une couche. « There’s booze, there’s food and there’s music, what’s not to like? » « People. For one. Corporate ones, no less » Elle regarde derrière mon épaule et je devine que Le Roux est probablement entrain de swinguer dans notre direction. « Give or take, no strings attached. And if after tonight it doesn’t feel right at least we’ll know we’ve tried. » qu’elle glisse à voix basse en urgence avec le ton des commerciaux qui te proposent un deal que tu peux pas refuser. Mais son regard est rieur, son sourire effronté, et pendant un instant je vois une lueur de la gamine espiègle qu’elle a été. « What do you say charming, will you rescue that damsel once more? » « You’re good » je raille une seconde avant que Le Roux ne fasse officiellement son comeback. « Fuck, I don’t think I’ve bought so much booze since I’m out of college! » Il distribue clins d’œil et sourires Colgate à droite à gauche (alors qu’il n’y a personne pour les apprécier). Je le regarde pas non plus, mes yeux rivés sur Jaimie. Je suis pas dupe. Elle sait jouer des mots, des flatteries, c’est son arme secrète. Tu crois que t’as compris le bail mais elle a trois longueurs d’avance sur toi. Elle a piqué ma curiosité. Qui es-tu ? « David Axford, Winters and I are associates. » Je tourne la tête vers celui à qui je posais pas la question pour le voir avec sa main tendue vers moi. Frère on est pas obligé. « And you are ? » Je glisse ma cigarette entre mes lèvres sans conviction pour libérer ma main et je serre la sienne. « Phoenix. » Ensuite j’attrape un sac de bouteilles et je me tourne vers Jaimie « Where to, babe? » D’autant que les enceintes du magasin de tise commencent à cracher les premières notes enjouées et angoissantes de All I want for christmas is you alors il est plus que temps de s’arracher. Puis quand on commence à marcher bras dessus bras dessous sur le trottoir je me penche vers elle pour glisser à son oreille, joueur : « Man, I must be wildly dumb or wicked smart to be dating a lawyer, hm? » C’est une idée de merde. Heureusement j’aime les idées de merde. Et c’est pas comme si j’avais mieux à foutre de toute façon. Fuck it. Game on.