One drink away from telling everyone what I really think. -- @Iris Castillo

« Tiens, tu avais l’air d’en avoir besoin aujourd’hui. » Caelan releva la tête et posa son regard sur sa collègue qui lui tendait une tasse café tout en lui adressant un sourire complaisant. Elle n’avait pas tort, les remarques incessantes de certaines de ses collègues commençaient à être lourdes sur ses épaules. Tout ce qu’il souhaitait, c’était de refaire sa vie sans déranger personne, mais son délit de fuite s’était su au bureau sans qu’il ne sache comment et, depuis, il sentait qu’il n’était plus le bienvenu dans l’entreprise. Les remarques étaient au départ subtiles, mais lorsque Channing s’absentait pendant plusieurs jours, l’intensité augmentait au point où il se demandait s’il n’était pas mieux de quitter son emploi même si ça voulait dire qu’il les laissait gagner. « Merci, c’est gentil. » dit-il en saisissant la tasse de café en lui souriant sincèrement. La jeune femme balaya ses cheveux derrière son épaule d’un coup de main avant de s’asseoir sur le coin du bureau du Leckie qui la suivit des yeux sans bouger. « Si un jour tu veux qu’on aille prendre un verre, ça me ferait vraiment plaisir. » dit-elle en caressant la jambe du brun avec son pied. « Hm… D’accord. » Il rit légèrement en se caressant la nuque, clairement déboussolé de l’attitude sa collègue avec ce qu’il vivait au travail ces derniers temps. Qui plus est, on ne pouvait pas dire que les femmes se bousculaient à sa porte depuis son incarcération, avec raison. « Tiens, je te laisse mon numéro. » Elle se pencha vers lui pour mettre un papier dans la petite poche de la chemise de Caelan avant de quitter le bureau de ce dernier en lui souriant. Silencieux, il porta la tasse de café à ses lèvres pour en prendre une gorge, mais en recracha aussi vite le contenu en réalisant que le sucre avait été substitué par du sel, suite à quoi il entendit plusieurs de ses collègues s’esclaffer au loin. Frustré, il sortit le papier qu’elle lui avait laissé et constata que ce n’était pas un numéro de téléphone qui y était inscrit, mais plutôt une insulte. Il s’était fait avoir comme un débutant et il en avait eu assez. Ce verre, il le prendrait tout seul ce soir, il en avait bien besoin. Sans même attendre que sa journée de travail soit officiellement terminée, il se leva et quitta rapidement les bureaux du Walker Group pour retourner chez lui où il se versa à boire à peine arrivé chez lui.

Habituellement amateur de bière, il opta pour quelque chose de beaucoup plus fort ce soir, remplissant son verre dès qu’il en buvait la dernière goutte au point d’oublier qu’il était supposé aller courir avec Iris en vue du marathon qui approchait de plus en plus. Il manqua plusieurs de ses appels, ce qu’il constata une heure plus tard lorsqu’il prit son téléphone et qu’il vit le message qu’elle lui avait laissé. « Je suis rentrée, rappelle-moi dès que tu as ce message. » . « Fuck. » D’un trait, il termina son verre d’alcool après avoir appelé un taxi. En attendant que son transport arrive, il alla enfiler ses vêtements de sport même s’il était visiblement trop intoxiqué pour aller s’entrainer. Il en oublia même son sac de vêtements de rechange. En arrivant chez son ex qu’il n’avait même pas pris le temps de prévenir en voyant ses messages, il balança bien trop de billets au chauffeur de taxi et il sortit pour rejoindre la porte d’entrée sur laquelle il cogna seulement après avoir vomi une partie de ce qu’il avait bu dans la plate-bande qui décorait l’avant de la maison. Lorsque la jeune femme ouvrit la porte, il finissait à peine de s’essuyer le coin de la bouche avec l’avant-bras. « Mais tu étais où?! Je me suis inquiétée. » Il leva les yeux au ciel en ricanant. « Je suis ici, c’est ce qui compte non? Quand je dis que je serai là, je serai là, moi. » Pas comme elle quand il s’était retrouvé derrière les barreaux, c’est bien ce à quoi il faisait référence. « Bon, on y va? » dit-il sur un ton impatient en descendant les quelques marches à l’avant de chez Iris en direction du trottoir, non sans passer près de tomber à plusieurs reprises à cause de sa démarche chancelante.

One drink away from telling everyone what I really think. -- @Iris Castillo

Pendant son incarcération, Caelan n’avait eu que ça du temps pour penser à ce qu’il allait faire lorsqu’il retrouverait enfin sa liberté. Il savait dès cet instant que son retour à la vie normale n’allait pas être simple, mais il avait sous-estimé à quel point ça allait être difficile. Maintenant qu’il avait les deux pieds dedans, il choisissait ses batailles en gardant parfois pour lui le fond de sa pensée pour s’éviter des prises de tête dont il n’avait certainement pas besoin actuellement. Malgré tout ce qu’il avait bien pu dire à Iris ces derniers mois, alors qu’il tentait de la rassurer lorsqu’elle s’excusait de ne pas avoir honoré sa promesse d’être là pour lui pendant son incarcération, il lui en voulait. Il savait qu’elle ne lui devait techniquement plus rien considérant qu’ils étaient séparés depuis plus de trois ans maintenant, elle lui avait créé des attentes et il était peut-être un peu frustré contre elle, mais aussi contre lui-même de l’avoir naïvement crue. Il s’était fait avoir comme plus tôt au travail et toute sa frustration remontait à la surface en raison de tout l’alcool qu’il avait consommé alors que c’était supposé lui faire oublier ses problèmes. Là encore, il s’était fait avoir comme un débutant. « Non, je ne crois pas que ce soit une bonne idée. » Il soupira bruyamment en levant ses yeux au ciel avant de poser son regard sur Iris qui semblait le juger. « Avoir su je serais resté chez moi plutôt que de venir pour rien. » dit-il en faisant un geste mou du bras en direction du taxi qu’il ne voyait déjà plus au bout de la rue. Le Leckie détestait dépendre des autres et il ne se faisait toujours pas à l’idée de ne pas pouvoir aller où il voulait quand il voulait en claquant des doigts et ce pour les trois années à venir.

« Tu as bu ? » Si ce n’était que de lui, il aurait repoussé les mains d’Iris qui le retenait, mais il n’était pas assez solide sur ses deux jambes pour pouvoir le faire, les deux mains agrippées après la rampe du balcon. « Qu’est-ce que ça peut bien te faire? Depuis quand je dois te demander la permission? » demanda-t-il d’une voix pâteuse en fronçant les sourcils. La jeune femme avait mis fin à leur relation il y avait plusieurs années déjà, elle était révolue l’époque où il devait lui rendre des comptes même si elle avait certainement raison de s’inquiéter considérant que le brun n’avait plus l’habitude de perdre le contrôle même si on le voyait souvent avec une bière à la main. Ses années de beuveries étaient finies depuis longtemps et c’était sans doute pour cette raison qu’il tolérait aussi mal l’alcool ce soir. Il n’était plus habitué. « Qu’est-ce qui te prends, Caelan ? » Il ricana en plongeant son regard dans le sien, les mains toujours solidement agrippées à la rampe. « Qu’est-ce qui me prend? Toi, qu’est-ce qui te prend? Tu m’as laissé quand j’avais le plus besoin de toi et là tu fais comme si j’avais des comptes à te rendre?! Bah j’en ai pas. Je peux faire ce queeeeeeee je veux. » s’exclama-t-il en approchant son visage du sien comme pour être plus convaincant. « Tu m’as biennnnnn fait comprendre que tu ne voulais plus rien savoir de moi… Deux fois plutôt qu’une. » Il fit un deux avec ses doigts avant de poursuivre. « Parce que là encore, tu m’as laissé tomber quand j’en avais le plus de besoin. Pendant que je t’attendais comme un connn! » Marcus avait raison au final, il devait l’oublier. « As-tu au moins une petite idée de comment c’était?! » La colère se lisait dans ses yeux, mélangée à toute la tristesse qu’il ressentait, au désespoir. « Pendant que madame se faisais bichonner chez sa coiffeuse, moi je me faisais battre. » Sa voix se brisa tandis qu’il détourna la tête en redressant le dos, lâchant la rampe d’une main. « C’est correct, tu pouvais bien faire ce que tu voulais… mais moi j’avais pas le choix. » Il lâcha la rampe et fit quelques pas d’un pas las avant de s’arrêter en réalisant qu’il n’avait pas vraiment nulle part où aller, si ce n'était que chez lui où rien ni personne ne l’attendait.

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« Caelan, voyons, tu n’es pas apte à aller courir dans cet état » Iris avait raison, mais l’orgueil de Caelan prenait le dessus alors qu’il voulait tout sauf lui donner raison à cet instant. S’il avait parfois tendance à garder pour lui ce qui l’irritait lors de leur mariage pour éviter les conflits, aujourd’hui il avait apparemment autre chose en tête au plus grand malheur de son ex qui essuyait les reproches de tous bords tous côtés. Il avait encaissé jusqu’à ce que sa jauge atteigne sa limite, jusqu’à ce qu’il explose, incapable de retenir ce trop-plein qui le bouffait de l’intérieur depuis des mois. « On aurait pu faire de la marche rapide… » Il rit un coup bien conscient au fond qu’il serait incapable de faire plus de trois pas sans trébucher dans une craque de trottoir ou dans ses propres pieds en zigzagant. « Je pensais que tu ne m’en voulais pas de ne pas être venu… C’est ce que tu n’as eu de cesse de me maintenir, Caelan… Ou est-ce que tu me reproches autre chose ? » Est-ce que l’alcool lui faisait dire tout haut ce qu’il pensait tout bas pour son mariage également ou est-ce que son sang avait une trop grande concentration d’alcool pour qu’il puisse réfléchir clairement? Lorsque son esprit était en état de lucidité, il savait qu’il était le seul responsable de leur séparation, mais l’alcool ne l’aidait pas à se sentir moins misérable et il devait donc mettre la faute sur quelqu’un d’autre pour se sentir le moindrement mieux. « Il faut croire que ça nous fait quelque chose en commun, moi aussi je suis capable de mentir. » répondit-il en haussant les épaules comme s’il s’agissait de quelque chose de banal. Il continua de vider son sac comme s’il s’agissait d’un besoin vital parce que ça lui faisait du bien sur le moment, mais ô qu’il allait le regretter une fois à jeun. « Ce n'est pas vrai ! » Il haussa les sourcils, presque surpris de la réponse Iris étant donné la façon dont elle l’avait ignoré après leur séparation, mais aussi en ne donnant pas suite à la promesse qu’elle lui avait faite la veille de sa dénonciation. « Ah non? Dis-moi alors… qu’est-ce que j’aurais dû comprendre? » Le corps vacillant, il se pencha vers Iris avant de reprendre sa place originale. « Du jour au lendemain, c’est comme si je n’existais plus! » Elle était partie de leur maison familiale le temps qu’ils la vendent et il s’était donc retrouvé seul à vivre dans cette demeure remplie de souvenirs. « Tu me brises le cœur et… » Et quoi? Pouvait-il vraiment lui en vouloir de ne pas avoir répondu à ses nombreux messages l’implorant de lui laisser une chance? De le reprendre? Des messages écrits alors qu’il était probablement autant intoxiqué qu’en ce moment, d’ailleurs. « Laisse tomber. Tu t’en fou de toute façon. » Il n’y avait que la barmaid qui s’intéressait vraiment à ce qu’il pouvait bien ressentir, ou était-ce plutôt son portefeuille qui l’intéressait? Hm… « Je suis désolée encore une fois pour ce que tu as eu à traverser Caelan. Désolé de ne pas avoir été là, comme je te l’avais promis… Mais je t’interdis de dire que, pendant ce temps-là, je n’en avais strictement rien à faire de toi. Je pensais à toi, Caelan ! » Il leva les yeux au ciel en ricanant. « Tes pensées n’ont pas aidé, merci quand même. » grommela-t-il sans même la regarder. « Tu n’as pas le droit de me reprocher que tout ça est entièrement de ma faute. Ça a été ta décision, dès le départ, Caelan. J’ai été là. J’ai été là quand c’est arrivé, je t’ai demandé un milliard de fois ce qu’il s’était passé pour que tu sois dans un tel état. Je t’ai épaulé en t’encourageant à aller te rendre. J’ai essayé d’être là, mais tu n’as pas voulu m’écouter… je ne suis pas l’unique fautive » Il se mordilla la lèvre inférieure en détournant la tête parce qu’il savait bien trop qu’il n’avait rien à répliquer quand elle avait raison sur tout. C’était lui qui avait frappé un piéton et qui était parti sans l’aider, pas elle. Il faudrait bien qu’il se rende à l’évidence que la colère qu’il déferlait sur elle aujourd’hui lui était plutôt destinée à lui. « Tu ne peux pas nous blâmer tous pour ce que tu es en train de vivre, Caelan… » À ces dernières paroles, il fronça les sourcils en secouant vivement la tête, un peu trop rapidement pour ne pas être étourdi d’ailleurs. « Je ne vous blâme pas pour tout?! » s’exclama-t-il en portant sa main à son visage pour se frotter les yeux du bout des doigts. « Tu ne comprends rien… » D’un pas chancelant, il retourna vers les marches où il s’assit en se tenant à la rambarde. « Les autres sont venus… » Pas toi. « Anwar a répondu à mes appels. » Pas toi. « Julie et Aiden m’ont écrit… » Pas toi. Elle s’était sentie incapable d’aller le voir, mais avec la technologie aujourd’hui, il y avait d’autres options et tout ce qu’il retenait, c’était qu’il n’en avait pas valu la peine. « Marcus avait raison… » murmura-t-il en penchant son corps vers l’arrière pour chercher dans ses poches d’une main. « J’ai compris, je vais te foutre la paix. » S’il pouvait au moins trouver son téléphone pour appeler un taxi. Eh.

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« Tu n’as pas le droit de me dire ça… » Jamais il ne serait permis d’être aussi désagréable avec elle si ce n’était pas de l’alcool et de son état psychologique actuel. Même s’il était quelqu’un de franc, il choisissait ses batailles et, surtout, il pesait ses mots pour ne pas blesser les gens autour de lui. Ce n’était pas pour rien qu’il s’était retenu de lui dire tout ce qu’il venait de lui dire et ça aurait dû rester ainsi. « La vérité fait mal? » Elle lui faisait mal à lui depuis des années, il ressentait le besoin de partager un peu de cette douleur avec elle, de lui infliger pour qu’elle comprenne, pour qu’elle se mette dans ses chaussures. Ou disons plutôt que l’alcool qui coulait dans ses veines ressentait ce besoin… « Arrête, Caelan ! Je ne m’en fou pas. Je ne m’en suis jamais foutu » Les lèvres pincées et le nez retroussé, il soupira avant de lui sourire. « Pourquoi tu m’as ignoré alors? » Il était lourd et elle avait toutes les raisons du monde de l’ignorer, il devait respecter sa décision et passer à autre chose, mais le Caelan intoxiqué n’arrivait plus à voir clair.

« Je le sais, Caelan ! Je ne peux rien faire de plus que m’excuser encore et encore. Qu’est-ce que tu attends de moi au juste ? » C’est un long silence qu’elle obtint comme réponse. Surpris par sa question, mais aussi parce qu’il ne savait pas du tout ce qu’il s’attendait d’elle en fait, il finit par hausser les épaules au bout d’un moment. « Je ne sais pas… » Elle comme lui ne pouvaient revenir en arrière pour changer les choses et il était déjà bien assez chanceux qu’elle accepte de continuer de le voir alors qu’il était loin d’être de très bonne compagnie depuis sa sortie de prison. « Et en quoi Marcus a raison ? » Ah qu’il regrettait soudainement ses paroles. S’il lui disait en quoi Marcus avait raison, il lui avouait en quelque sorte qu’il pensait toujours à elle et il n’était pas prêt à le faire, peut-être ne le serait-il jamais parce que ça ne leur ferait aucun bien à l’un comme l’autre de toute façon. « Rien, laisse tomber, ce n’est pas important. » Qui plus est, il voulait être tout sauf responsable d’une prise de tête entre les deux. « Tu n’es pas en état pour qu’on parle de quoi que ce soit, Caelan… Tu ferais mieux de rentrer. » Il soupira bruyamment en laissant mollement retomber ses bras sur ses cuisses. « Mais je viens juste d’arriver?! » Pour justifier le fait qu’il n’avait pas envie de partir, il tendit un bras en direction de la rue où était le taxi à peine quelques minutes auparavant. Se déplacer maintenant qu’il n’avait plus de permis de conduire lui coûtait cher et il n’avait pas envie d’avoir gaspillé son argent pour un arrêt d’à peine cinq minutes, mais avant même d’exprimer le fond de sa pensée, il fut distrait par Iris qui passa près de lui pour rentrer chez elle. « Attennnnnnnds! » Il tenta de l’arrêter, mais ses doigts effleurèrent à peine sa cheville et son regard s’arrêta sur la porte qu’elle referma derrière elle, le laissant seul à l’extérieur de sa résidence. Allongé sur les marches, il cogna sur le bas de la porte avec ses jointures. « Iriiiiiiiiis, ouvre-moi. » C’est plutôt les jappements du chien qui lui répondirent. « Yatzee, ouvre la porte à papa. » Comme si le petit chien en était capable… Découragé, Caelan se redressa et c’est alors que son regard croisa celui d’un passant qui le dévisageait en traversant la rue pour s’éloigner de lui non sans tenir la main de sa fille pour qu’elle le suive. « Ce n’est pas ce que vous pensez… elle blague. Elle va m’ouvrir… elle va m’ouvrir. » Il jeta un dernier regard vers la porte sur laquelle il cogna mollement une fois de plus avant de se résoudre à rappeler son taxi pour retourner chez lui. Il s’était déjà bien assez ridiculisé comme ça pour la journée, sans parler des regrets qu’il éprouverait un peu plus tard en dégrisant.