Hassan Jaafari & @Yasmine Khadji

watching the waves of time break on these shores of mine, i'll just observe and write in words that rhyme, i've seen it all before stuck to the ocean storm, closing my eyes, i'm sure this soul knows more. if you wanna know what the future holds, look inside your soul, only then you'll go higher, higher, hyperion. ☆☆

gifs  @ssoveiagifs & @harleystuff

début mars. L’ancienne chambre de Sohan investie depuis quelques jours donnait à Hassan un goût mélangé de nostalgie et de réconfort, témoin du temps qui passait autant que décor des souvenirs de soirées passées à s’échanger la manette de Nintendo 64, ou à comploter sur le meilleur moyen de convaincre leurs parents respectifs de les laisser aller camper seuls du haut de leurs treize ou quatorze ans. La chambre n’avait pas tant bougé depuis l’époque où Sohan avait quitté le foyer parental : les posters aux murs étaient toujours les mêmes, les cartouches de console débordaient toujours de la même boîte à chaussures, et la manie de Fatima aidant il y avait fort à parier qu’un tas d’autres affaires du Sohan adolescent dont lui-même admettrait n’avoir plus besoin devaient toujours dormir dans les placards, marquant un peu plus encore la dissonance dont avaient fait preuve les parents Khadji durant des années à regretter la présence de leur aîné sans se résoudre à faire les concessions nécessaires à son retour. Et à dire vrai, Hassan se serait probablement senti beaucoup moins à l’aise à l’idée d’occuper le bureau et le lit de son ami si la situation ne s’était pas améliorée dans les deux dernières années. Amjad et Fatima, quant à eux, n’avaient pas eu à insister longtemps pour convaincre l’enseignant de prendre ses quartiers chez eux durant quelques jours, Hassan gérant sa solitude récemment retrouvée aussi mal que l’on pouvait s’y attendre, et sans que cela ne surprenne personne. Tout passait. La déception, le chagrin, la culpabilité, et même le deuil – tout passait et il irait mieux, mais pour quelques jours encore il choisissait de se faciliter la tâche et de rentrer chaque soir auprès de visages chaleureux et bienveillants, plutôt que de réapprivoiser une maison dans laquelle il n’avait plus vécu seul depuis deux ans et dont le silence semblait assourdissant.

Et s’il attendait d’ordinaire que les Khadji aillent se coucher pour s’enfermer dans la chambre, rouvrir son ordinateur et continuer de travailler jusqu’à ses yeux piquent et que la fatigue l'assomme, ce soir-là il s’était contenté d’y faire un court passage pour troquer son jean contre un bas de jogging, et embarquer sa couette en s’y enroulant comme dans une cape pour aller gratter à la porte d’en face, la chambre de Yasmine. « C’est toi qui a employé le terme “soirée pyjama” je te signale. » avait-il d’ailleurs fait remarquer à cette dernière lorsqu’elle avait ouvert et jaugé son allure de haut en bas. « Si tu te posais la question, la planque à biscuits de Sohan est toujours au même endroit dans sa chambre, la seule raison pour laquelle je suis pas venu avec c’est : parce que les biscuits en question ont l’air de dater d’avant le mariage de Qasim. » Un Qasim et une Olivia qui, à n’en pas douter, seraient ravis de savoir que leur mariage servait d’échelle de valeur quant à ce qui était à considérer ou non comme une vieillerie périssable.

Le mauvais génie sur l'épaule d'Hassan n'avait pas encore statué quant aux motivations ayant subitement poussé Yasmine à passer la nuit ici, plutôt que de prendre sa Jeep pour repartir après le dîner. Loin de lui l'envie de s'en plaindre, mais il y voyait les mêmes procédés que dans les oeillades que lui jetait Fatima s'il tardait à finir son assiette, et dans les innombrables bricoles pour lesquelles Amjad avait subitement besoin de lui quant d'ordinaire son épouse devait le houspiller pour qu'il se ménage et ne s'en charge pas seul … Ils cherchaient une raison de l'avoir sous les yeux, de le surveiller comme le lait sur le feu, comme si on le soupçonnait à nouveau de vouloir “faire une bêtise” quand bien même les circonstances et sa propre psyché n’avaient rien de comparable avec ce dans quoi il était empêtré sept ans plus tôt. « Quoi, le mot de passe a changé et je suis pas au courant ? »  s’était-il en tout cas contenté de plaisanter, sans avoir besoin de forcer sur ses lèvres un sourire, sinon léger, au moins sincère, avant que l’infirmière ne les laisse entrer lui et sa couette dans une chambre aux allures bien moins coincées dans le début des années 2000 que celle de son frère – probablement parce qu’elle y avait fait plusieurs retours, de plus ou moins longues durée, depuis la fin de son adolescence. « Je promets pas de pas avoir besoin de redescendre chercher une tisane d’ici une demi-heure, ceci dit … et peu importe ce que tu estimes que ça veuille dire sur mon âge, Khadji. » Les vieux pots, les meilleures soupes, les expressions de vieil homme, bref.

hyperion
@Hassan Jaafari ☆ crédit gif/harley

"Parce que c’est ce que c’est, mon vieux." Une soirée pyjama, le terme reflétait des activités on ne peut plus féminines qu’Hassan, Sohan et Qasim se seraient insurgés de devoir subir lorsqu’elle n’était encore qu’une toute jeune fille et qu’ils devenaient des gaillards fringants, qui craignaient pour leur réputation de bonhomme virils à en devenir, c’était une certitude. Peu importait, ça restait un terme qui rappelait des souvenirs, et qui était synonyme d’un bon moment passé, quand bien même ce dernier était prévu à la toute dernière minute. Yasmine n’avait pas hésité à rester ce soir, comptant sur le soutien silencieux de sa mère pour qu’Hassan n’y voit pas une tentative désespérée de le faire se sentir bien, ou du moins mieux. Le temps guérissait tout, c’est ce qu’on disait. Seulement, Yasmine le connaissait assez pour savoir que, bien souvent, le temps prenait souvent des allures d’éternité, de fait elle avait usé de sa mine si adorablement convaincante pour le contraindre à adhérer à son plan de secours, qu’il n’avait pas pu refuser, se réjouissant doucement de l’idée qu’elle aussi, elle revenait à la maison le temps d’une nuit passée à papoter.
Bien sûr, elle avait ses propres soucis, ses propres secrets aussi, et peut-être que les heures allant, elle oserait lui parler de sa grossesse qui restait aussi discrète que son envie d’atteindre le deuxième trimestre avant de faire de grande annonce ; mais à quelques jours près, elle pouvait se permettre de le mettre dans la confidence, non ? Elle verrait, sonderait son état d’esprit pour décider si oui ou non cette nouvelle le réjouirait ou l’enfoncerait, le sujet des enfants ayant toujours été compliqué pour le jeune homme qu’elle regarda par-delà le cadre de la porte qu’elle n’avait ouverte qu’à moitié pour se la jouer cachotière insolente, quand elle comptait clairement le faire entrer à un moment où un autre, même si la menace des vieux biscuits de Sohan planait au-dessus de sa tête comme un gage de mauvaise fortune.
Elle grimaça "J’ai ma propre réserve. Tu crois que j’ai été élevée par des sauvages ?" lui fit-elle, tenant encore un instant la position avant de se décaler pour enfin lui ouvrir la porte et le laisser entrer sans plus de cérémonie, bien incapable de jouer à l’insolente très longtemps. La chaleur de la pièce, accentuée par les guirlandes de lumières qu’elle avait allumées et qui bordaient le cadre de son lit, lui donna envie d’un peu de fraîcheur, et elle piétina jusqu’à la fenêtre à guillotine de sa chambre pour l’entrouvrir un chouia, ne voulant  surtout pas que les bestioles du dehors prennent cette ouverture pour une invitation. Elle pivota sur ses talons pour dire à Hassan, un sourire en coin dessinant la rondeur de sa joue droite "C’est toujours Geri Halliwell est une traître puisque tu le demandes." Vestige de la rancune  tenace qu’elle avait gardée en elle un bail suite à la presque dissolution des Spice Girls. Les trahisons restaient gravées longtemps dans les mémoires, c’était un fait.

S’emparant de la couette qu'il avait ramenée avec lui, s’y blottissant en s’asseyant bien au fond de son lit, elle lui précisa sans délai "Je prends le côté près du mur." Suivit un léger roulement d’yeux lorsqu’elle lui annonça un air de dire quel idiot, alors "Bien sûr que tu vas dormir ici, sinon c’est pas une vraie soirée pyjama." Elle ne se contenterait pas d’une soirée papotage, elle voulait faire les choses dans les règles de l’art. C’est pourquoi après deux secondes à peine de pause, elle abandonna la couette d’Hassan pour se lever de son lit, trottinant dans ses chaussettes épaisses pour ouvrir sa penderie et se jucher sur la pointe de ses pieds pour récupérer une cargaison de biscuits planqués qui auraient eu meilleur goût avec un thé — comme le sous-entendit presque Hassan, lui parlant de tisane, qu’elle jugea d'un regard rapide en s’offusquant pour plaisanter "J’ai même plus besoin de m’échiner à faire ce genre de blagues. Tu les fais tout seul maintenant, ça perd en saveur." Rien ne perdait en saveur en ce moment en vérité, tout avait tendance à lui monter trop fort à la tête, ou à lui tourner trop rapidement sur le coeur ; les joies des premiers mois, ça ne l’empêcha pas d’entamer un croc d’un cookie au chocolat en s’asseyant à côté du jeune homme à qui elle tendit la boîte sans hésitation.
Un long cheveux brun se glissant entre ses lèvres, elle grimaça de nouveau en le retirant, avalant lentement sa bouchée pour se donner le temps de mieux l’observer un instant, mais pas trop fixement. Elle avait tendance à juger la chance d’Hassan un peu en panne depuis quelques années, et elle savait combien les derniers mois n’avaient pas été faciles pour lui. Entre Mo, Joanne et Rhett, elle savait que son retour sous le toit des Khadji n’était pas un choix anodin, comme ses parents ne prenaient pas de pincettes avec lui de façon anodine. Aussi, avec une diplomatie qui lui était propre, son épaule cognant très doucement contre celle d’Hassan pour le faire à peine basculer, elle lui demanda presque tout bas "Sur une échelle de 1 à 10, à combien t’estimes l’inquiétude de tout le monde à ton sujet avant que tu trouves que ce soit exagéré ?" Posant son cookie entamé sur son genou dénudé, elle leva les mains devant elle pour appuyer son innocence un peu surjouée "T’as le droit de me parler, ou tu peux aussi te goinfrer jusqu’à plus avoir sommeil parce que t’auras ingurgité trop de sucre. C’est toi qui vois, mais oublie pas que le diabète fais des dégâts chez les gens de ta tranche d’âge."

Hassan Jaafari & @Yasmine Khadji

watching the waves of time break on these shores of mine, i'll just observe and write in words that rhyme, i've seen it all before stuck to the ocean storm, closing my eyes, i'm sure this soul knows more. if you wanna know what the future holds, look inside your soul, only then you'll go higher, higher, hyperion. ☆☆

gifs  @ssoveiagifs & @harleystuff

« J’ai ma propre réserve. Tu crois que j’ai été élevée par des sauvages ? »
« T’es une enfant des années 90, ça revient pratiquement au même. »

Si l’insolence avait été un péché de taille à lui interdire finalement l’accès à la chambre, Hassan n’aurait plus eu qu’à se draper dans sa couette et dans sa dignité et à tourner les talons, mais battant des cils avec un sourire angélique ayant cessé de lui aller au teint au moins trente ans en arrière, il était néanmoins parvenu à se voir autoriser l’accès à l’antre de la jeune femme, et ce sans même avoir à fournir le mot de passe sans lequel, fut un temps, il n’aurait pas pu passer le seuil aussi facilement. « C’est toujours Geri Halliwell est une traître puisque tu le demandes. » avait d’ailleurs asséné la jeune femme à ce sujet après avoir entrouvert la fenêtre, et balançant la couette sur le lit avait de s’asseoir au bout du matelas, il s’était fendu d’un « Et on nous dit que les fans de Selena Gomez sont rancunières. » et avait levé les mains en signe de protestation face au regard que lui avait aussitôt lancé l’infirmière. « J’enseigne à des adolescents, je me tiens informé. » Et quel meilleur moyen pour ce faire que de feuilleter les magazines people qui s’entassaient dans la salle d’attente de la psy qu’il continuait de voir tous les mois ? Aucun, ou seulement ceux que Fatima entassaient pour sa part dans le porte-revues du salon, en jurant les acheter pour la page de mots croisés – ce que tout le monde faisait semblant de croire, bien sûr. « Je prends le côté près du mur. » Tirant sur la couette comme pour donner du corps à sa condition, elle y avait ajouté un « Bien sûr que tu vas dormir ici, sinon c’est pas une vraie soirée pyjama. » entendu, mais quittant de nouveau le lit un instant elle était allée récupérer une boîte tout en haut de son armoire tandis qu’Hassan, sourire narquois sur le visage, se laissait glisser sur le matelas pour venir y appuyer l’un de ses coudes en rétorquant « Chouette, j’ai toujours voulu jouer à Téléphone Secret en me faisant les ongles. » Mais des biscuits plus frais que ceux qui dépérissaient dans la penderie de Sohan feraient tout autant l’affaire, quand bien même ils rendraient d’autant plus bienvenue la tisane digestive que l’estomac de quarantenaire du brun ne manquerait pas de réclamer – dans son grand âge, n’est-ce pas. « J’ai même plus besoin de m’échiner à faire ce genre de blagues. Tu les fais tout seul maintenant, ça perd en saveur. » Et ses lèvres mimant un désolé que ses cordes vocales n’avaient pas accompagné, il avait pioché bien volontiers dans la boîte à biscuits lorsque son amie la lui avait tendue.

La brise de début de soirée s'engouffrant par la fenêtre était venue faire danser les lampions de la guirlande lumineuse, dessinant contre le mur des ombres chinoises qui avaient momentanément retenu l'attention d'Hassan, avant que la voix de Yasmine ne le fasse redescendre sur terre. « Sur une échelle de 1 à 10, à combien t’estimes l’inquiétude de tout le monde à ton sujet avant que tu trouves que ce soit exagéré ? » Son regard allant accrocher celui de l'infirmière, lequel avait repris un brin de sérieux, il avait coincé son cookie entre ses dents le temps de se redresser, et s'était adossé au mur avant de ramener l'une de ses jambes contre son torse. « Personne ne m'a encore confisqué mes clefs de voiture, alors je dirais un six ? Disons un petit sept. » Il faisait mine d’en plaisanter, pour désamorcer la situation, mais malgré les meilleures intentions dont il ne doutait pas, Hassan mentirait en prétendant que tout ce souci qu’il semblait causer à son entourage ne le mettait pas mal à l’aise. Il s’en accommodait pourtant, plus facilement que la dernière fois qu’il s’était senti à terre – et c’était sans doute le signe que les choses n’allaient pas aussi mal cette fois-ci. « T’as le droit de me parler, ou tu peux aussi te goinfrer jusqu’à plus avoir sommeil parce que t’auras ingurgité trop de sucre. C’est toi qui vois, mais oublie pas que le diabète fait des dégâts chez les gens de ta tranche d’âge. » Mordant dans son cookie de manière ostensible en guise de réponse, Hassan avait attendu de ne plus avoir la bouche pleine pour asséner « Tu commences à parler comme ta mère, Khadji. C’est très grave. » avec une sévérité feinte qu’il n’avait fait durer qu’une seconde. S’en était suivi quelques instants de silence, que le brun avait utilisé à chercher ses mots « C’est juste … C’est un peu comme être dans le creux entre deux vagues, j’attends de remonter. Quoique c’est peut-être pas la meilleure métaphore dans la bouche de quelqu’un qui ne sait pas nager. » Et à qui la simple idée d’apprendre donnait des sueurs froides, surtout. Marquant une nouvelle pause, ses lèvres s’étaient pincées comme s’il hésitait à donner le fond de sa pensée, avant qu’il ne reprenne à voix basse « Je me suis senti soulagé quand Joanne est morte. Je sais que ça a l’air horrible dit comme ça, mais la façon dont elle souffrait les derniers jours, je souhaite ça à personne … C’était le mieux qui puisse lui arriver, que ça se termine. » Et l’idée qu’il aurait pu en arriver là lui aussi, quelques années en arrière ? Il ne voulait même pas y penser. « Et je … Une fois Rhett en Suisse et Mo avec des gens dont c’est le métier, je m’attendais à ressentir la même chose. Que je serais soulagé. Mais au lieu de ça je me sens juste coupable, comme si j’avais pris la mauvaise décision … Et pourtant j’ai beau retourner la question dans tous les sens, j’arrive pas à trouver ce que j’aurai pu faire différemment. » Il n’y avait bien que ceux qui ne faisaient rien qui ne commettaient pas d’erreur – mais dans le cas présent, Hassan peinait à se contenter de cet adage comme consolation. Et forçant un sourire un brin amer sur son visage, il avait englouti le reste de son cookie en ironisant « Si c’est pas le diabète c’est peut-être bien les remords qui finiront par m’avoir, paraît que c’est aussi fréquent chez les gens de ma tranche d’âge. » comme on se réconfortait d’une blague trop souvent faite mais qui finissait par en devenir réconfortante.

hyperion
@Hassan Jaafari ☆ crédit gif/harley

Elle s’offusquerait un autre jour d’être considérée comme une sauvage par quelqu’un qu’elle, elle considérait comme un membre de sa famille, se retrouvant seulement à en rire doucement en allant ouvrir la fenêtre de sa chambre comme au bon vieux temps, prête à se laisser bercer par le bruit du quartier paisible dans lequel elle avait poussé, et par les bagarres des chats qui se baladaient en toute impunité.

"Je suis sûre que t’es team Hailey." lui dit-elle en plissant les yeux comme si c’était l’entame rêvée pour cette soirée qui promettait d’être riche tant aussi bien sur le plan des confidences que sur le reste. Un temps de pause força Yasmine à s’enfoncer dans ses pensées, et même si ce ne fût que très brièvement, elle en ressortit avec une remarque qui lui fit froncer le haut de son nez piqueté de taches de rousseur, donnant le sentiment d’avoir un peu honte de faire le constat qu’elle prononça à voix haute "Je me souviens pas d’avoir fait ça avec toi." Soit ils prenaient tous les deux de l’âge, soit c’était une analyse critique de leur relation. Mise à mal au cours des dernières années, Yasmine avait un moment arrêté de vouloir la sauver, elle devait bien l’avouer. Mais Hassan avait le chic pour lui faire réaliser que sa vie n’était pas complète si elle n’avait pas sa dose de lui. C’était peut-être ça aussi qui la poussait à rester ce soir : l’envie d’en profiter sans être gentiment parasités par leur vie respective, c’était quelque chose de plus engageant que de rentrer à la maison sans savoir vraiment comment serait l’ambiance.
Ici, elle était bonne, et c’était tout ce qui fallait pour la réconforter — ça, et un peu de chocolat qu’elle trouva dans les cookies qu’elle ramena avec elle après une expédition-express dans son placard, roulant des yeux en même temps lorsqu’il se moqua de leurs potentielles occupations au cours de ces prochaines heures. Si elle avait encore la boîte du Téléphone Secret dans son placard — elle penserait à le donner à Ava ne serait-ce que pour l’entendre se moquer du côté archaïque du faux téléphone qui résonnait des voix gentiment suave de faux prétendants —, elle avait cessé d’y jouer il y avait bien longtemps. En revanche, pour ce qui était de lui vernir les ongles, elle lui dit avec espièglerie "Je te laisserais choisir ta couleur. Le vert, c’est ce qui te va le mieux au teint." Et elle aussi, elle emprunta cette mine qu’il avait lui même dégainé tout à l’heure, battant des cils pour passer pour plus candide qu’elle ne l’était.

Mais cette candeur, elle disparut bien vite tandis qu’elle voulait sonder les pensées du jeune homme qu’elle rejoignit contre le mur, son dos venant s’y accoler, ses genoux se pliant en tailleur en même temps qu’elle terminait son premier cookie de la soirée. Dans un geste plus maternel qu’autre chose, elle déplia sa propre couette pour la poser sur leurs jambes respectives, l’arrière de tête sa trouvant lui aussi le mur, le regard tourné dans la direction d’Hassan qu’elle voyait faire de l’humour, et l’expression de c’est pas drôle qui passa dans ses yeux ne l’empêcha pas de l’écouter néanmoins.
Parce qu’elle était vraiment soucieuse à son sujet, comme le reste du clan que formait leur entourage qui n’osait pas soulever l’éventualité qu’il n’allait pas bien. Ça, c’était le rôle de Yasmine d’essayer de lui tirer les vers du nez avec douceur, et si le modestie faisant entièrement partie de sa personnalité, elle se savait pourtant assez douée pour rappeler à Hassan que sa parole était d’or et qu’elle la traitait comme telle, la gardant pour elle telle un trésor qu’elle ne partageait avec personne, sans exception. En d’autres termes, la zone qu’il partageait dans l’immédiat, elle était aussi sécuritaire qu’elle était réconfortante, la tiédeur du dehors faisant irruption dans la pièce, la danse des lampions remuant contre le mur finissant de donner une ambiance chaleureuse à l’ensemble. Elle l’était tellement que Yasmine ne pensa même pas à regretter qu’il la juge aussi inquisitrice que sa mère "Je sais. Je crois que moi aussi, je prends de l’âge. Tu veux quand même être mon ami hein ?" Feignant la tristesse, réponse à la sévérité qu’il choisit pour lui parler, elle retrouva pourtant vite son sérieux quand il lui répondit enfin pour de bon "T’es pas tout seul. On sait tous que t’as des progrès à faire niveau brasse." choisit-elle de lui dire, préférant se caler sur le petit ton d’humour qu’il choisit pour s’exprimer.

Mais le sujet ne prêtant pas plus que ça à la farce, il retrouva vite sa morosité. Continuant à le regarder par-dessous la barrière de ses longs cils naturels, Yasmine lâcha un petit soupir "Hm, je crois aussi que c’était la meilleure chose qui pouvait lui arriver à la fin. T’en veux pas de penser comme ça, c’est souvent plus dur pour ceux qui restent. Elle, elle doit avoir retrouvé la paix maintenant, c’est une bonne façon de se souvenir d’elle. Elle est bien maintenant." Mais effectivement, pour ceux qui restaient ce n’était pas évident, et si dans une certaine mesure, elle pouvait comprendre ce qu’Hassan ressentait, s’étant trouvée dans la position de devoir imaginer le pire à son sujet il y avait des années de ça, elle ne pouvait pas ignorer le sentiment de culpabilité qu’il devait ressentir à l’idée de préférer que son ex-femme ne soit plus là ; d’autant qu’elle avait des enfants et que pour eux, rien ne serait plus jamais simple à partir du moment où leur maman n’était plus là "C’est ce qu’il fallait à Rhett. J’ai pas tous les tenants et aboutissants de sa situation, je sais juste que l’addiction, c’est difficile à soigner seul." Elle hocha la tête pour marquer son point , croisant les chevilles sous sa couette "Et puis je crois le connaître un peu, il a pas dû vouloir se laisser aider. Vous deviez faire quelque chose, et vous l’avez bien fait, il n’y a pas de débat à soulever à ce sujet." fit-elle dans la foulée, cherchant à tâtons la main d’Hassan en ajoutant en même temps "Tu trouves pas de solution parce que c’était la meilleure que vous aviez. Te torture pas avec ça — et concernant Mo, t’avais pas non plus d’autres choix que ça, et tu le sais aussi bien que moi." Il aurait le droit de le revoir à un moment donné, elle en était aussi persuadée qu’il tentant de noyer le poisson en refaisant un peu d’humour tandis que les doigts de Yasmine se soudaient un peu plus aux siens, Hassan lui paraissait officiellement dans une mauvaise passe. Elle eut mal au coeur "T’as des remords parce que t’attends pas que ça passe, parce que tu vis. C’est mieux d’avoir des remords que des hésitations tu sais." Elle eut un léger sourire à son adresse, se trouvant bien sage alors qu’elle le regardait toujours. Elle laissa un silence s’installer pour finalement ajouter, presque dans un murmure "Tu fais de ton mieux, sois pas trop dur avec toi-même."

Hassan Jaafari & @Yasmine Khadji

watching the waves of time break on these shores of mine, i'll just observe and write in words that rhyme, i've seen it all before stuck to the ocean storm, closing my eyes, i'm sure this soul knows more. if you wanna know what the future holds, look inside your soul, only then you'll go higher, higher, hyperion. ☆☆

gifs  @ssoveiagifs & @harleystuff

Probablement que cela ne l’était pas, drôle. Et malgré tout d’en rire était la seule façon de faire qu’Hassan avait su apprivoiser au fil des années pour évoquer cette période de sa vie où penser au lendemain n’allait pas de soi, et où chaque tentative de faire des projets se balayait d’un “à quoi bon ?” morne et désabusé. Il l'avait crainte, bien sûr, l'éventualité de retomber dans les mêmes abysses desquelles il était bien moins aisé de s'extirper que de s'y laisser happer, mais sans parvenir à expliquer par quel miracle sa mélancolie actuelle ne l'empêchait pas d'apercevoir le point de lumière au bout du tunnel, quand bien même celui-ci semblait pour l'heure hors de sa portée. Peut-être apprenait-il de ses erreurs, à moins qu'il ne s'efforce seulement de ne plus garder pour lui ce qui alourdissait son cœur – Yasmine pouvait se vanter en cela de doser mieux que personne le ton et la bienveillance nécessaires pour le pousser à la confidence. Et c'est vrai, à ce sujet elle tenait sans doute de sa mère, mais pour rien d'autre que le mieux, passée l'envie de taquiner à ce sujet. « Je sais. Je crois que moi aussi, je prends de l’âge. Tu veux quand même être mon ami hein ? » L'air boudeur avait arraché au professeur un sourire complice, et l'index venant effleurer le bout du nez de la jeune femme avec tendresse il avait affirmé « Mmhm … Mais c'est bien parce que tu as des cookies. » avec un brin d'espièglerie. Un sourire qui ne l'avait même pas quitté lorsque le ton était redevenu un peu plus sérieux, l’infirmière se fendant d’un « T’es pas tout seul. On sait tous que t’as des progrès à faire niveau brasse. » auquel Hassan n’avait néanmoins répondu que d’un hochement de tête pudique, conscient de sa chance d’avoir des proches sur qui compter mais néanmoins coupable de ne pas savoir s’en contenter pour chasser le vague à l’âme qui lui collait de nouveau à la peau.

Coupable comme d’avoir ressenti au fond de lui un certain soulagement à ce que les souffrances de Joanne trouvent enfin leur épilogue, malheureux mais inévitable, rempli de l’injustice pour Hassan d’être passé entre les gouttes quand la blonde laissait derrière elle bien plus de choses inachevées que lui ne l’aurait fait. « Hm, je crois aussi que c’était la meilleure chose qui pouvait lui arriver à la fin. T’en veux pas de penser comme ça, c’est souvent plus dur pour ceux qui restent. Elle, elle doit avoir retrouvé la paix maintenant, c’est une bonne façon de se souvenir d’elle. Elle est bien maintenant. » Mieux que ne l’étaient ses proches, à n’en pas douter, et acquiesçant silencieusement en sachant bien que Yasmine avait raison, il n’en avait pas moins senti sa gorge se serrer avant d’ajouter à voix basse « Ce qui me rend le plus triste c’est de me dire que y’a un moment où ça ne sera plus autant le cas … Je sais pas si ça fait sens ? C’est comme … Je ne pense pas à mes parents tous les jours, et ils ne me manquent plus comme avant, tu vois ? Tu finis par apprendre à vivre sans les absents. » Et il trouvait cela plus triste que réconfortant, à bien y réfléchir, ponctuant toutefois sa pensée d’un haussement d’épaules résigné. Il n’y avait rien que lui ou quiconque puisse faire à ce sujet, c’était simplement dans l’ordre des choses, tout comme le fait que la blonde ne serait plus tard qu’un vague souvenir pour ses enfants, quand eux-mêmes avaient représenté tout l’or du monde aux yeux de leur mère. Et la vérité, c’est que tout cela aurait probablement été moins difficile à apprivoiser pour Hassan s’il n’avait pas été fâché avec les deux personnes avec qui il partageait le plus de souvenirs communs avec Joanne. Son amitié avec Jenna s’était éteinte depuis longtemps, de celle-ci il avait fait le deuil par la force des choses … Pour Rhett c’était une autre histoire, dont il refusait de croire qu’elle se terminerait de la même manière, mais dont l’absence résonnait aujourd’hui de la même façon et terminait d’éclater un quatuor qui n’existait désormais plus que dans leurs souvenirs.

La vérité, encore, c’était que la situation entre Rhett et lui pesait plus lourd sur ses épaules que la disparition de Joanne, en ce qu’Hassan avait eu un rôle à y jouer quand la blonde n’avait pour sa part été victime que de la fatalité. Il avait fait au mieux, bien sûr, mais par dépit et sans certitude qu’un autre “mieux” que celui-ci n’existait pas ailleurs, et loin de lui suffire pour dormir sur ses deux oreilles la situation minait un peu plus ses certitudes chaque jour qui passait. « C’est ce qu’il fallait à Rhett. J’ai pas tous les tenants et aboutissants de sa situation, je sais juste que l’addiction, c’est difficile à soigner seul. Et puis je crois le connaître un peu, il a pas dû vouloir se laisser aider. Vous deviez faire quelque chose, et vous l’avez bien fait, il n’y a pas de débat à soulever à ce sujet. » avait pourtant commenté Yasmine à ce sujet, visiblement assez certaine de ce qu’elle avançait, mais arrachant à Hassan un soupir résigné « Pour se laisser aider, y’aurait déjà fallu qu’il admette avoir un problème. À l’entendre y’en avait aucun et j’ai juste aidé son frère à se débarrasser de lui. » Pourquoi faire, dans quel but ? Tout cela n'avait pas de sens, si ce n'était dans l'esprit jamais sobre de Rhett. « J'ai l'impression de revoir Qasim et son alcoolisme … Mais au moins lui avait envie de se soigner. » Rien ne servait de comparer, chaque bataille contre l'addiction tenait sa source dans le vécu de celui qui la combattait, mais l'énergie que mettait l'ancien rugbyman à refuser d'admettre la sienne plongeait Hassan dans un certain désarroi. Les doigts de Yasmine allant finalement attraper les siens sous la couette, la jeune femme avait repris avec ce mélange de douceur et de fermeté dont elle avait le secret « Tu trouves pas de solution parce que c’était la meilleure que vous aviez. Te torture pas avec ça – et concernant Mo, t’avais pas non plus d’autres choix que ça, et tu le sais aussi bien que moi. » C'est vrai. Aucune autre solution que celle-ci n'aurait été bonne, tout cela aurait fini par leur attirer des ennuis à tous les deux, et murmurant un « Je sais, oui. » morose l’enseignant ne parvenait néanmoins pas à s’en contenter, le cœur serré à l’idée que l’enfant considère (lui aussi) qu’Hassan l’avait abandonné à son sort.

Les doigts de son amie serrant les siens, le brun avait englouti la fin de son cookie en ironisant sur sa propre situation avec autant de fatalisme que d’amertume, et levant le menton pour aller faire reposer l’arrière de sa tête contre le mur auquel il s’était adossé. « T’as des remords parce que t’attends pas que ça passe, parce que tu vis. C’est mieux d’avoir des remords que des hésitations tu sais. Tu fais de ton mieux, sois pas trop dur avec toi-même. » Un mince sourire s’étirant sur ses lèvres, la tête d’Hassan avait roulé contre le mur pour permettre à son regard d’aller accrocher à nouveau celui de Yasmine. « Je suis pratiquement certain d’avoir déjà entendu cette rhétorique quelque part, la personne qui te l’a soufflée doit être d’une immeeeense sagesse. » Oh, il n’avait pas révolutionné la pensée positive et inventé l’eau chaude, bien sûr, mais il se souvenait avec une précision assez fine de lui avoir tenu un discours équivalent tandis qu’elle hésitait à s’envoler pour le continent africain, pétrie d’hésitations légitimes mais parfois de nature à empêcher d’avancer. « Bon et toi, Khadji ? » Les épaules se décollant finalement du mur, il avait lâché la main de la jeune femme pour ramener un genou contre son torse. « Comment est-ce que tu vas ? T’as le droit d’utiliser les potins de l’hôpital comme joker, mais j’ai beaucoup trop étalé mes propres états d’âme pour me contenter d’un “ça va”. » Et parce que d’avoir la tête à ses propres problématiques ne l’en faisait pas totalement oublier pour autant que la jeune femme subissait ses propres tempêtes ; Le soleil ne brillait plus vraiment sur sa relation avec Edge, la dernière fois qu’elle l’avait évoqué à demi-mot, et si la position d’Hassan le rendait un peu frileux à creuser trop loin à ce propos sans y avoir été invité, tendre une perche avait au moins le mérité de permettre à Yasmine de ne pas s’en saisir si elle n’en avait pas envie.

hyperion
@Hassan Jaafari ☆ crédit gif/harley

"Bien sûr. Je comprends ce que tu veux dire." Et vraiment, elle le comprenait sans aucun mal. Yasmine n’avait jamais perdu quelqu’un de proche, pas avec une fatalité aussi pénible que celle que subissait Hassan du moins, mais elle parvenait à saisir les subtilités de son raisonnement qu’elle lui retourna sans réfléchir trop longtemps "C’est ce qui est le plus compliqué dans le deuil : se dire qu’on finit par se faire à l’absence de ceux qui ont comptés. Je sais que ça va paraître cliché ce que je vais te dire là, mais que ce soit tes parents ou Joanne, ils voudraient que t’ailles de l’avant. Que tu penses à eux évidemment, mais que tu t’appesantisses pas sur leur perte ni que tu les regrettes jusqu’à la fin de ta vie." L’entendre dire à voix haute, ça le soulagerait sans doute un peu de la culpabilité inhérente à l’idée que dans quelques temps, quelques années, il oublierait ce que ça faisait d’avoir Joanne Prescott à ses côtés, et bien qu’elles n’avaient jamais été amies et que Yasmine avait souvent remis en cause les intentions de la blonde à l’égard d’Hassan, surtout quand ils avaient repris contact après des années alors qu’elle avait eu des enfants et qu’elle s’était remariée, elle savait pourtant sans vraiment l’expliquer que c’était ce qu’elle aurait voulu : qu’Hassan aille de l’avant.
"Vous n’êtes pas amis pour rien. Il est aussi têtu que toi." commenta Yasmine en l’entendant parler de Rhett et de son refus d’admettre qu’il avait un problème d’addiction. C’était souvent le cas de ceux qui en souffraient, mais elle ne le fit pas remarquer à Hassan qui s’était de nouveau répandu en paroles, mettant en parallèles les difficultés de son vieil ami avec ceux de son frère qui s’en était mieux sorti. Elle se faisait l’avocate du Diable le temps de quelques secondes seulement, lui disant avec mansuétude "Laisse-lui un peu de temps. Sa cure lui aura sans doute fait du bien et remis en perspective ce qu’il risque s’il ne se prend pas en mains. Il aura peut-être eu un déclic et à son retour, il consentira à admettre qu’il avait besoin de votre coup de mains." Dans une moindre mesure, elle aurait pu lui rappeler que lui aussi s’était obstiné à ne pas vouloir qu’on l’aide à un moment donné alors qu’il s’enfonçait peu à peu dans la dépression, sauf qu’elle n’eut pas le courage de faire comme lui, de mettre en place un parallèle qui leur ferait de la peine, aussi bien à elle qu’à lui. Au lieu de quoi, elle passa un bras sur ses épaules lorsque sa morosité prit de l’ampleur à l’énoncé du problème Mo, lui frottant celle sur laquelle elle posa la main comme un ça va aller silencieux, sa joue trouvant la courbe de sa clavicule le temps d’une étreinte réconfortante.

Elle se montrait pleine de sagesse Yasmine, et sans hésitation aucune, riant à la réflexion de Hassan qui reconnu ses propres mots dans la bouche de son amie, elle lui dit "Je sais m’entourer de gens plein de sagesse. Jee ne peux qu’écouter et apprendre, j’ai toujours été bonne élève." Une petite posture de yogi plus tard, et elle laissa un rire lui échapper pour retrouver une posture normale, abandonnant ses cookies pour rester un court instant à réfléchir en s’attendant sûrement à ce qu’Hassan lui retourne la politesse en lui demandant comment elle allait, ce qui se passait pour elle en ce moment. La vérité, c’était que ses envies de cookies n’étaient pas seulement le signe habituel de sa gourmandise, et que sa sensibilité n’était pas l’expression naturelle de ses sentiments qu’elle ressentait toujours dix fois trop fort. À l’intérieur d’elle grandissait une petite graine qu’elle peinait à imaginer pour l’heure, trop transie d’angoisse pour se dire que c’était une bonne au fond cette grossesse inattendue "Ça v… hey non, t’as pas le droit de mettre des règles en place sans que je sois d’accord d’abord, c’est la base d’un dialogue sain et constructif, et c’est de la triche." C’était la base d’une mauvaise foi patentée surtout, mais passons.

Faisant la moue sans la garder boudeuse plus longtemps qu’une nanoseconde, Yasmine se cala sur la position qu’il prit soudain, remontant elle aussi son genou contre sa poitrine en réfléchissant faussement à la manière dont elle pouvait envisager le récit de sa propre existence sans réussir à remiser au fond d’elle son envie soudaine de mettre Hassan dans la confidence à propos de sa grossesse. Avec Edge, ils avaient décidé de n’en parler à personne avant la fin de son premier trimestre, avant cette première échographie qui serait rassurante pour la suite, et l’imminence de cette dernière arrivant à grands pas, peut-être qu’elle pouvait se permettre de partager le secret avec quelqu’un ? Elle le voulait sur le moment, parce qu’Hassan était Hassan, qu’elle avait une confiance sans limite en son jugement, et qu’à défaut d’avoir toujours su comment le situer dans le spectre des relations qu’elle entretenait, elle l’aimait assez pour ne pas lui mentir, même par omission. Faisant encore mine de réfléchir un instant, elle recula pourtant au dernier moment, et choisit un angle d’attaque qui lui éviterait de potentiels reproches si elle passait directement aux aveux, lui avouant sur le ton usuel de la conversation d’abord, sachant que le sujet Edge n’était pas celui qu’Hassan préférait, même s’il ne lui avait jamais vraiment dit de cette façon "Ça se passe mieux avec Edge. J’ai réaménagé depuis quelques semaines maintenant. Molly était super déçue de me voir partir de chez elle, mais ça la rassure que son petit équilibre soit préservé maintenant qu’on s’est rabibochés, lui et moi." Ça se passe mieux ça ne voulait pas dire ça se passe bien, mais ils travaillent là-dessus, encore que la découverte de sa grossesse avait remis les choses en relief de façon assez brusque pour que Yasmine se dise justement que c’était précipité, cependant c’était toujours mieux qu’il y avait quelques semaines où il se parlaient à peine.
Pinçant les lèvres, elle ajouta une secousse de sa tête, ses bras trouvant son genou qu’elle enveloppa et y déposant sa joue au sommet, la tête tournée en direction d’Hassan qu’elle observa un instant de trop tant elle hésitait à lui dire ce qu’elle avait très envie de lui dire — il sentirait peut-être sa réticence qui n’en était pas vraiment une au demeurant, qu’elle anticipa en lui disant presque tout bas "J’ai un secret à te dire. Mais tu dois d’abord me promettre de pas t’inquiéter et ensuite d’en parler à personne, surtout pas à maman même si elle te menace." Il fallait être clairvoyant, Fatima savait que quelque chose se tramait chez sa fille étant donné les regards qu’elle lui lançait de temps à autres, alors la promesse était plus qu’utile à quémander, même si elle se sentit honteuse de le faire sans pour autant remettre en doute l’idée qu’Hassan avait toujours été une tombe et qu’elle pouvait compter sur lui dans tous les cas.

Hassan Jaafari & @Yasmine Khadji

watching the waves of time break on these shores of mine, i'll just observe and write in words that rhyme, i've seen it all before stuck to the ocean storm, closing my eyes, i'm sure this soul knows more. if you wanna know what the future holds, look inside your soul, only then you'll go higher, higher, hyperion. ☆☆

gifs  @ssoveiagifs & @harleystuff

La confession d’Hassan ne s’était pas faite sans culpabilité, à l’égard de Joanne tout d’abord, mais aussi à l’égard de ces parents dont il admettait ne plus ressentir l’absence avec autant de tristesse et de douleurs que les premières années. Son père et sa mère lui manquaient toujours, bien sûr, et les occasions pour lui de regretter qu’ils ne soient plus de ce monde ne manquaient pas à mesure que la vie de son frère et la sienne se jonchaient d’événements auxquels la précédente génération de Jaafari n’assisteraient jamais, mais il avait bien fallu apprendre à faire sans eux, et au fil des années “sans eux” était simplement devenu la norme. Et si les mots de Yasmine ne différaient pas tant de ceux qu’il aurait lui-même employé avec autrui et dont il tentait déjà de se convaincre seul depuis des semaines, le fait de les entendre de sa bouche avait quelque chose de plus réconfortant que s’ils étaient venus de n’importe qui d’autre – le fait qu’elle tente de se faire la voix de Joanne malgré l’inimitié que la blonde et elle avaient toujours entretenu, peut-être. Et il est vrai, malgré la proximité qu’Hassan entretenait avec les deux Khadji, Joanne avait toujours été un sujet plus facilement abordé avec Rhett, doté envers la blonde d’une tendresse qui le rendait forcément plus réceptif à ce sujet, et qui dans d’autres circonstances aurait dû leur permettre de surmonter cette perte à deux plutôt que chacun de leur côté. « Vous n’êtes pas amis pour rien. Il est aussi têtu que toi. » n’avait pas pu s’empêcher de faire remarquer Yasmine au sujet du rugbyman, le soupir qu’Hassan avait laissé échapper par le nez trahissant autant sa lassitude face à la situation que le fait que l’infirmière n’avait pas (entièrement) tort. La suite néanmoins avait arraché au brun un sourire amer : « Laisse-lui un peu de temps. Sa cure lui aura sans doute fait du bien et remis en perspective ce qu’il risque s’il ne se prend pas en main. Il aura peut-être eu un déclic et à son retour, il consentira à admettre qu’il avait besoin de votre coup de main. » Que la cure lui ait fait du bien ? Il l’espérait sans trop y croire, ce genre de chose fonctionnait toujours mieux lorsque l’initiative venait du principal intéressé. Que son séjour lui ait permis de remettre en perspective le choix somme toute désespéré d’Hassan et Ruben ? Visiblement, les priorités de l’aîné des Hartfield étaient ailleurs. « Il est déjà de retour. » La pause ne lui servant qu’à secouer vaguement la tête, il avait ajouté « Je m’attendais pas à l’apprendre en zappant sur ABC y’a trois jours, mais bon. Il a remis de l’ordre dans ses priorités faut croire. » avec amertume, et finalement haussé les épaules, rien d’autre qu’impuissant face à une situation qu’il ne maîtrisait plus, et sur laquelle Yasmine n’avait pas plus de pouvoir que lui – un sujet qui ne méritait donc pas qu’ils continuent à le creuser, en somme.

Aussi lourd pesaient-ils sur son cœur et sur ses épaules, Hassan se lassait vite de s'appesantir sur ses propres problèmes, trop habitué qu’il était à s’ensevelir sous mille et une occupations, toutes destinées à ne pas se laisser une seconde de répit pour ressasser. Il écoutait ceux des autres bien plus facilement qu’il ne se livrait sur les siens, l’oreille toujours attentive à défaut de solutions à proposer, et l’optimisme bien plus facile à mobiliser dès lors qu’il n’était plus question de sa propre torpeur. Sans le dire clairement, Yasmine semblait cependant avoir retrouvé un peu du sien, et s’être éloignée de la morosité qu’elle peinait à dissimuler malgré tous ses efforts, durant les quelques semaines passées à arpenter de nouveau l’appartement laissé à Molly. Point de surprise, donc, lorsqu’après quelques secondes de silence et de réflexion elle avait finalement admis « Ça se passe mieux avec Edge. J’ai réaménagé depuis quelques semaines maintenant. Molly était super déçue de me voir partir de chez elle, mais ça la rassure que son petit équilibre soit préservé maintenant qu’on s’est rabibochés, lui et moi. » avec un sourire mesuré, auquel Hassan avait répondu d’abord par un « Pour un peu elle oublierait presque que vous bossez au même endroit, et que vous vous croisez déjà tous les jours. Tu lui as déjà conseillé de prendre un chat ? » taquin, avant que ses lèvres ne s’étirent à leur tour en un sourire tranquille et qu’il n’ajoute en hochant la tête « Mais tant mieux. Pour Edge et toi, je veux dire. » Il n’avait certes aucun avis à avoir sur la question, mais en la matière ses intérêts personnels se situaient là où Yasmine était la plus heureuse. Le silence dans lequel s’était murée l’infirmière durant les secondes qui avaient suivies laissaient néanmoins à penser qu’elle ne disait pas tout, son regard et celui du Jaafari qui questionnait en silence, soudainement soucieux de l’entendre reprendre à voix basse et sur le ton du secret « J’ai un secret à te dire. Mais tu dois d’abord me promettre de pas t’inquiéter et ensuite d’en parler à personne, surtout pas à maman même si elle te menace. » Le pouce et l’index allant machinalement frotter contre la barbe qui recouvrait son menton, il avait indiqué « Tu sais que c’est exactement ce que dirait quelqu’un avant de balancer un truc qui mérite carrément qu’on s’en inquiète ? » en donnant l’air de plaisanter, mais avec un fond de sérieux auquel il avait laissé la place la seconde suivante « C’est promis. Ça sortira pas de cette chambre. » Pinky promise, et petit doigt levé à l’appui. Cette promesse-ci il pouvait la tenir, il savait être une tombe lorsque l’on attendait de lui qu’il en soit une, mais quant à promettre de ne pas s’inquiéter … C’était une autre histoire, et déjà le cœur s’était mis à battre plus vite, tandis que la ride du souci creusait l’espace entre ses sourcils dans l’attente que Yasmine passe à la confession.

hyperion
@Hassan Jaafari ☆ crédit gif/harley

Oh, firent les lèvres pleines de Yasmine lorsque Hassan lui avoua que Rhett était déjà de retour en ville. Elle essayait de se faire l’avocate du diable, c’était dans sa nature. Laisser le bénéfice du doute à ceux qui faisaient des erreurs, c’était devenu un principe auquel elle ne forçait pas d’adhérer, l’idée de seconde de chance paraissant assez séduisante à ses yeux pour qu’elle tente à chaque fois de prendre de la hauteur et de voir le bon côté des situations les plus sinueuses en se disant que c’était possible, de faire amende honorable, de change et d’évoluer. Celle que connaissait Rhett l’était,  sinueuse, elle ne prétendait pas le contraire, mais elle voulait croire qu’une part de lui soit un peu moins têtue pour lui permettre de voir les choses en face et de cesser de faire souffrir ceux qui tenaient à lui et auxquels il devait autant tenir dans le fond.
Elle ne lui avait pas parlé depuis un bon bout de temps, difficile de savoir comment il prenait vraiment les choses, et puisqu’elle n’était pas une fervente admiratrice des potins dans l’ensemble, intéressée par la vraie vie plus que par celle rêvée par des pseudos-journalistes, elle s’était tenu éloignée des ragots le concernant. Mais ce qu’ajouta Hassan ensuite lui fit réaliser qu’elle ne devait pas être la seule à avoir des rapports au compte-gouttes avec l’ancienne vedette du ballon ovale. Elle ne pouvait rien répondre à ce sujet, elle se contenta seulement d’accuser une mine désolée pour Hassan, une main venant flatter l’épaule opposée au côté duquel elle était installée, sa tête se posant brièvement sur le haut de la sienne dans une étreinte fugace pour le réconforter.

"Elle supporte mal la solitude." répondit-elle finalement à Hassan quand Molly fût mentionnée. Pas tellement du genre à cumuler les reproches envers ceux qu’elle aimait, elle préférait là encore jouer la neutralité en se s’arrêtant pas sur le sentiment qu’elle avait qu’Hassan trouvait l’omniscience de la jeune femme un peu abusée. Molly était envahissante, mais Molly était aussi là chaque fois qu’il se passait quelque chose de bon ou mauvais pour elle. Elle ne lui tenait pas rigueur d’absolument aucun écart de principe ou de comportement, et ça comptait assez pour qu’elle lui en soit indéfiniment reconnaissante, quand bien même parfois elle la trouvait usante "Tu devrais lui proposer de t’accompagner faire le tour des refuges, c’est ton terrain." Malicieusement, elle tira sa langue dans sa direction. Elle savait qu’Hassan n’était pas le plus grand fan de la jeune femme, ça avait tendance à la chagriner sans qu’elle ne se sente trop hardie à l’idée de faire changer les choses — elle avait arrêté de s’engager pour ce genre de bataille. Elle n’était pas une fée, elle n’avait pas de baguette magique, et chacun avait son libre arbitre en ce qui concernait ses affinités ou inimitiés, il fallait qu’elle l’accepte.

Elle l’acceptait même quand il s’agissait de voir deux des quatre hommes de sa vie se vouer des sentiments négatifs, consciente là encore qu’Edge ne partait pas avec les appréciations du juré indécrottable qu’était Hassan. Au moins, il réussissait à se réjouir pour eux désormais, et elle lui en fut reconnaissante, un petit sourire venant fissurer le sérieux recouvré de son visage, sa tête opinant doucement pour y mettre son assentiment tandis qu’elle mûrissait l’idée de mettre le jeune homme dans la confidence de sa grossesse "Je suis pas malade." ajouta-t-elle quand Hassan lui reprocha que son entame était typiquement celle de quelqu’un qui avait une mauvaise nouvelle à annoncer. S’en voulant un peu d’avoir abordé les choses sous cette angle étant donné le sort que le destin avait réservé à Joanne, elle tacha de se rattraper en se préparant à se lever de son lit, lui disant en même temps "Et c’est pas une mauvaise nouvelle. Pinky promise." conclut-elle, crochetant le sien à celui qu'il avait tendu dans sa direction, bienheureuse de l'avoir toujours lui pour sceller ce genre de promesses quand, dans l’ensemble, on lui reprochait toujours de faire ce genre de choses à son âge, alors qu’elle était adulte et qu’elle s’apprêtait à devenir maman.
Ayant donc sécurisé leur promesse mutuelle, elle se détourna du lit pour aller fouiller dans son sac à main qu’elle avait emmené avec elle, et en retira la feuille d’analyse qu’elle avait ouverte avec Isaac lorsqu’il l’avait aidé à surmonter ses soupçons et qui confirmait sa grossesse. La plaçant devant son buste alors qu’elle s’approchait de nouveau de leur petit coin cocooning, elle se retourna d’un bloc vers Hassan à qui elle donna le petit rectangle de papier toujours plié, et l’encouragea à l’ouvrir d’un signe du menton en se rasseyant à ses côtés "J’ai pas encore de cliché à te montrer, je fais ma première vraie échographie dans quelques jours seulement." Elle ne rompait donc pas le serment qu’elle avait fait avec Edge pour ne pas ameuter leur famille avant d’être sûrs que tout se passe bien, que le bébé était costaud, prêt à s’accrocher : dans quelques jours, ce serait établi, et la nouvelle suivrait, Hassan serait le seul dans la confidence, et elle savait que c’était un bon choix. Le nez froncé, elle attendit que les yeux d’Hassan se pose sur le bonne ligne, celle qui disait sans doute possible que c’était positif — et quand elle en fût sûre que l’information avait fait son chemin, elle lui demanda en lui souriant doucement "T'aimerais qu’il t’appelle comment ?" Tonton sans aucun doute. Mais dans quelle variante de la langue qu’ils parlaient chacun à leur façon ? Continuant sur sa petite lancée malicieuse, non sans ressentir une certaine émotion, ses yeux se remplissant de larmes sans anticipation, elle lui fit en inclinant la tête sur le côté "J’ai réalisé qu’on en a jamais vraiment discuté. Je pense que c’est le bon moment."