@Caelan Leckie – Qui était l’adulte et qui était l’enfant ce jour-là ? Difficile à dire tant Anwar et Tarek semblaient animés de la même vague d'enthousiasme, doublée à une incapacité à tenir en place. Rares étaient les occasions pour le danseur de jouer les baby-sitters auprès de sa petite soeur une journée entière, mais aujourd’hui en était une que le père comme le fils avaient noté avec application dans leurs agendas : aujourd’hui Tarek profiterait d’Alma pour lui seul, et Anwar partirait à l’aventure. Comme tout parent, il avait reçu en cadeau d’anniversaire son lot de bonhommes en pâte à sel et autres colliers de nouilles au fil des années, et si à ce sujet Alma s’apprêtait à prendre la relève de son frère, Tarek avait pour sa part délaissé depuis longtemps les travaux manuels, mais en conservant intacte l’envie de faire plaisir à celui qui l’avait élevé pratiquement seul. Le jeune homme tombait toujours étonnamment juste, connaissant mieux son père que la moyenne des jeunes de son âge, et cette année encore il venait de réaliser un sans faute : il suffisait de voir l’enthousiasme avec lequel Anwar avait bondi dans sa voiture pour rejoindre le stage de survie offert pour son quarante-et-unième anniversaire le mois précédent. Un stage de survie avec Bear Grylls, s’il vous plaît.

Le genre d’expérience qui ne pouvait que ravir l’aventurier qui sommeillait en Anwar, que seules les obligations de la vie courante forçaient à s’en tenir à la pratique de la navigation. Le genre d’expérience, aussi, dont on ne profitait qu’à condition de la passer en bonne compagnie, et histoire de s’en assurer l’inspecteur Zehri avait entraîné dans son sillage un acolyte qu’il estimait tout à fait à la hauteur de la tâche : Caelan. Dont les mauvaises langues diraient que mettre un peu le nez dehors pour autre chose que son travail ne lui ferait pas de mal – mais ça, Anwar avait eu la jugeote de ne pas le lui faire remarquer. « Tu sais ce qu’on tient, là ? » Lâchés en liberté après que leur ait été dispensé le topo sur lequel se baser pour venir à bout du premier atelier, les deux hommes avaient fait comme le reste des groupes présents et s’étaient mis en quête d’un lieu qui leur paraîtrait propice à la construction d’un abri digne de ce nom. « L’occasion de devenir des experts certifiés en cabanes, et donc par extension : les meilleurs tontons de l’univers. » Rien que ça, et ne résistant pas à l’envie de se moquer un peu le brun avait ajouté en ricanant « C’est pas Marcus et ses mocassins qui pourront se vanter d’avoir construit une cabane dans la jungle. » Cheh, comme diraient les jeunes. La jungle, il en rajoutait sans doute un peu, mais néanmoins la végétation prenant le pas sur le sable ils avaient fini par arriver dans une clairière au sol un peu moins accidenté. « Ici ? T’en dis quoi ? » Avant le “comment” le “où” était tout aussi important : tel leur avait-on enseigné.

Citation :

WIN – on en dit qu'ils ont probablement trouvé le meilleur spot du coin, lucky them.
SO CLOSE – on en dit que ça respire pas le confort mais que ça fera l'affaire.
FAIL – on en dit que ça vaudrait peut-être le coup de continuer à chercher encore un peu, hm.

@Anwar Zehri – Caelan était excité comme un enfant le jour de Noël. Plus jeune, il rêvait de faire partie des scouts pour partir en forêt comme ils le faisaient actuellement, mais le basketball prenait trop de place dans son horaire, ce qui l’avait empêché de se consacrer à d’autres activités prenantes. De toute façon, il n’était pas le seul enfant de la famille et les activités parascolaires étaient assez dispendieuses, il fallait bien en laisser pour les autres. Depuis sa sortie de prison il y avait un peu plus d’un an, le Leckie n’avait pas pris de vacances. Il aurait sûrement pu piger dans l’argent qu’il avait reçu de la vente de son ancienne maison, mais il avait décidé de demeurer prudent puisqu’il n’avait eu que des emplois précaires. Il avait choisi de faire ce sacrifice parce qu’il désirait retrouver son indépendance en déménageant de chez Jacob et il avait enfin pu sauter le pas quelques mois plus tôt, déménageant en face de chez son frère Chris qu’il ne ratait pas une occasion de taquiner dès que Hayden lui rendait visite. Caelan n’avait pas encore tout à fait retrouvé son ancien lui, et ça n’arriverait peut-être jamais, mais dépenser son énergie dans son nouveau projet professionnel lui faisait beaucoup de bien. Même s’il sortait majoritairement pour le travail, passer toutes ces heures dehors à vélo avait au moins le bénéfice de le garder en forme et de redonner des couleurs à sa peau.

« Tu sais ce qu’on tient, là ? » Les deux mains agrippées aux bretelles de son sac à dos, Caelan fronça les sourcils en observant attentivement Anwar. « Non, quoi? » répondit-il juste avant de trébucher sur une roche en lâchant un cri de surprise. Le géant réussit à se rattraper avant de tomber face la première. Heureusement, ce n’était pas encore le temps de l’atelier premiers secours… « L’occasion de devenir des experts certifiés en cabanes, et donc par extension : les meilleurs tontons de l’univers. » Il claqua sa langue sur son palais en souriant d’un air fier. « Quand est-ce que tu vas comprendre que c’est moi le meilleur tonton de l’univers? » Et surtout, le meilleur parrain. Qui peut dire que son parrain est bad ass parce qu’il a fait de la prison? Oui, bon, ce n’était clairement pas quelque chose dont il était fier et dont il se vantait… « C’est pas Marcus et ses mocassins qui pourront se vanter d’avoir construit une cabane dans la jungle. » Il rit en imaginant son ainé dans le contexte. La dernière fois qu’ils étaient allés faire du ski en famille, Marcus s’était cassé une jambe. Cette expédition en forêt était l’occasion pour lui de se casser l’autre, voire même un bras. « Il n’en sortirait pas vivant, il serait le cobaye parfait pour l’atelier premiers secours. » Même s’il ferait une victime peut-être un peu trop bruyante. « Ici ? T’en dis quoi ? » Il pivota sur lui-même en se caressant le menton du bout des doigts, l’air peu convaincu. « Avec la proximité des arbres, ce serait dangereux de mettre le feu. » Il secoua négativement la tête et reprit son chemin. Quelques minutes plus tard, il s’arrêta soudainement, mis son index dans sa bouche puis le leva en l’air comme s’il essayait de connaître la direction des vents. « C’est vachement mieux ici, tu ne trouves pas? » Il haussa les sourcils en cachant difficilement son enthousiasme.

Citation :

WIN – On se croirait presque à l’hôtel. Moins le lit king, le réfrigérateur à boisson et l’énorme douche avec eau chaude. C’est ça, presque à l’hôtel. C’est le mieux qu’ils puissent trouver.
SO CLOSE – Le terrain est un peu en pente, mais ça fera l’affaire tant qu’ils ne se couchent pas perpendiculairement à la descente s’ils ne veulent pas se réveiller en bas.
FAIL – Considérant que le sol est rempli de racines d’arbres et de roches, leurs dos de vieillots n’approuvent pas l’emplacement et il faut continuer de chercher.

@Caelan Leckie – « Quand est-ce que tu vas comprendre que c’est moi le meilleur tonton de l’univers ? »
« Dans tes rêves, grande perche ! »

Cette bataille finirait-elle un jour ? Sans doute que non, et ni l’un ni l’autre ne semblaient de toute façon réellement disposés à trouver un consensus – même à la remise de diplôme et au mariage des deux rejetons de Norah, tous les deux seraient encore là à se chamailler pour le titre de meilleur parrain, de meilleur tonton, et s’il fallait faire preuve de sérieux durant un quart de seconde Anwar admettrait sans mal espérer tout cela et même plus : la vie ne tenait qu’à un fil, Norah et les enfants le savaient mieux que personne, et d’être simplement toujours là pour les regarder grandir était une chance que Caelan et lui ne devaient pas prendre pour acquise. Tout à leur guerre pour les lauriers du meilleur oncle, ils auraient de toute façon toujours l’assurance de pouvoir se proclamer plus dégourdis que Marcus – plus dégourdis et bien moins barbants, s’il fallait demander son avis à l’inspecteur Zehri, dont l’objectivité n’était probablement pas exemplaire. « Il n’en sortirait pas vivant, il serait le cobaye parfait pour l’atelier premiers secours. » Ricanant sans l’ombre d’une honte, le policier avait enjambé un rocher sur son chemin et commenté d’un air entendu « Exact. Mais pour son égo, on va continuer de faire semblant de croire que c’est uniquement ma présence qui l’aurait empêché de venir. » Pas que le brun n’ait envisagé l’espace d’une seconde convier Marcus à leur épopée – il envisageait de passer une bonne journée, loin des mauvaises ondes que ne cessait de dégager l’aîné des Leckie en sa présence.

L’égo d’Anwar, quant à lui, l’avait mené avec un peu trop de précipitation sans doute à désigner un endroit comme parfaitement adapté à la cabane qu’ils devaient entreprendre de construire, seulement pour récolter en retour le regard dubitatif de son acolyte. « Avec la proximité des arbres, ce serait dangereux de mettre le feu. » lui avait-il d’ailleurs aussitôt fait remarquer pour justifier ses hésitations, et bien que moyennement convaincu par cette explication Anwar n’avait pas insisté, se contentant d’une grimace (faussement) boudeuse tout en continuant de suivre le sillage de Caelan et de ses (trop) longues jambes. « C’est vachement mieux ici, tu ne trouves pas ? » Vue dégagée vers le ciel, sol aussi plat qu’il pouvait l’être en pleine nature, et même un arbre couché sur lequel ils n’auraient qu’à se servir pour récupérer des branches de bonne longueur – c’était même mieux que mieux. Mais fidèle à lui-même, inspecteur avait dodeliné la tête en ayant l’air de considérer la question avant d’enfin admettre « D’accord, d’accord … Je m’incline, on sera carrément mieux ici. » Tellement qu’il avait aussitôt posé son sac à dos contre un truc d’arbre, refusant de continuer à s’en encombrer s’ils devaient passer en mode construction. « C’est dommage qu’on n’ait ni le temps ni le matos pour construire une cabane en hauteur, ça aurait vraiment eu plus de gueule. » Plus de gueule que de s’allonger à même le sol avec seulement des feuilles pour les séparer du sable, et sans l’assurance qu’un crabe ou un rat de palmier ne viendrait pas leur chiquer les chevilles une fois la nuit tombée.

Les mains sur les hanches, et observant aux alentours pour faire l’inventaire de ce qu’ils avaient sous la main à proximité directe, Anwar avait énuméré à voix haute les propositions faites par l’instructeur durant la phase de théorie : « Du coup, dans un monde idéal il nous faut : des grandes branches pour la structure, des plus petites pour le toit, des lianes ou de longues feuilles plates pour les liens, encore des feuilles plates pour le sol, et des cailloux pour créer une délimitation extérieure … » Cela avait tout d’une liste de courses, que les deux hommes n’avaient plus qu’à suivre comme ils l’auraient fait entre les rayonnages d’une épicerie, passant des céréales aux paquets de lessives, en passant par les fruits et légumes.

Citation :

WIN – Grandes branches, ok. Petites branches, ok. Longues feuilles plates, ok. Cailloux, ok. Bref, un tiercé gagnant comme ils n’en auraient jamais eu en jouant au loto ou en pariant aux courses.

SO CLOSE – Branches petites et grandes, ok. Longues feuilles … plus ou moins plates, ok. Pas de cailloux en revanche, seulement d’immenses rochers impossibles à déplacer. Tant pis, ils n’auraient qu’à espérer qu’aucun animal rampant ne leur rendrait visite à la faveur de leur sommeil.

FAIL – Grandes branches ok, pour les petites il allait falloir s’éloigner un peu. Des feuilles oui, mais pas aussi grandes que dans l’idéal, il allait falloir s’en contenter. Des cailloux ? Oui, mais s’ils avaient la mauvaise idée de soulever ceux à proximité directe d’eux, ils ne feraient que découvrir un immense nid de fourmis … en espérant qu’elles ne soient pas rouges.

@Anwar Zehri – « Dans tes rêves, grande perche ! » Certainement que dans ses rêves il était le meilleur tonton de l’univers, il n’y avait aucun doute là-dessus. Il prenait ce rôle très à cœur, tentait d’être présent pour son neveu et sa nièce le plus qu’il le pouvait malgré son humeur instable de la dernière année et son emploi du temps rempli depuis le mois de mars avec le lancement de sa compagnie. S’il avait le temps d’avoir quelques date Tinder, il avait le temps d’amener Julie et Aidan à la plage. Et puis il trouverait toujours du temps pour s’empiffrer des desserts de Norah, personne n’en faisait des aussi bons en ville. « Exact. Mais pour son égo, on va continuer de faire semblant de croire que c’est uniquement ma présence qui l’aurait empêché de venir. » Bien sûr. « C’est pour ça qu’il n’aurait pas fallu lui dire. Si son égo l’avait amené à accepter de venir, ça aurait été encore plus drôle, tu ne trouves pas? » Pour Caelan, certainement. Pour les deux autres, pas vraiment. Marcus et Anwar étaient pires que des enfants de cinq ans qui se chamaillaient parce que l’autre était assis un peu trop au centre du canapé (vous savez, la fameuse craque entre les coussins à ne pas dépasser).

Que Marcus soit présent ou pas, ce n’était certainement pas lui qui allait trouver le meilleur emplacement pour construire leur abri aujourd’hui. Si Anwar crut trouver l’endroit parfait, Caelan n’en était pas convaincu, continuant de marcher jusqu’au prochain endroit qui lui semblait pas trop mal. « D’accord, d’accord … Je m’incline, on sera carrément mieux ici. » Une main sur l’épaule de l’inspecteur, Caelan ne put s’empêcher d’ajouter « Il ne reste plus qu’à t’incliner pour le titre de meilleur tonton. Tu vois, ce n’est pas si difficile d’avouer que l’autre a raison… » Il lui donna une petite tape dans le dos avant de déposer son sac à dos à côté de celui de son ami. « C’est dommage qu’on n’ait ni le temps ni le matos pour construire une cabane en hauteur, ça aurait vraiment eu plus de gueule. » Les mains sur les hanches, il hocha la tête en posant son regard sur le brun. « Pourquoi on n’en ferait pas une chez Norah? » Aidan allait adorer et eux aussi (peut-être même plus que lui, mais détail). « Du coup, dans un monde idéal il nous faut : des grandes branches pour la structure, des plus petites pour le toit, des lianes ou de longues feuilles plates pour les liens, encore des feuilles plates pour le sol, et des cailloux pour créer une délimitation extérieure … » Le Leckie hocha la tête en posant sa main contre son front comme le ferait un militaire. « Chef, oui chef. » Il s’éloigna lentement à la recherche de ce qu’ils avaient besoin. « Ces cailloux pourraient le faire, non? » Il se pencha pour en soulever un premier.

Citation :

WIN – Sous l’énorme caillou se trouvait un nid de fourmis-marcheuses. Elles devront trouver un nouvel endroit où se cacher, mais les deux hommes s’en sortiront sans piqûres. Du moins, pour l’instant. « En tout cas, les insectes suffiraient à garder Marcus loin d’ici. Pas besoin de cailloux pour lui. » dit-il en riant. Next.

SO CLOSE – Sous l’énorme caillou se trouvait un nid de fourmis de feu. Heureusement pour Caelan, il le remarqua avant que les insectes n’atteignent sa jambe pour le piquer. À la vitesse de l’éclair, il s’éloigna en direction d’Anwar et se cacha derrière lui en posant ses mains sur ses épaules comme s’il voulait le servir comme repas aux fourmis plutôt que lui. « Je te laisse le prochain. » À lui l’honneur.

FAIL – Sous l’énorme caillou se trouvait un nid de fourmis bulldog. « Oups. Mi casa es su casa. » L’une des rares phrases en espagnole qu’il avait apprise grâce à Iris. Les fourmis n’étaient pas tellement d’accord avec ce qu’il venait d’affirmer, cependant, et il lâcha un cri de douleur suivi d’un autre lorsque la colonie le prit pour cible. « Outch. Outch! » Il lâcha le caillou et recula rapidement en frottant ses jambes pour enlever les fourmis.

@Caelan Leckie – Anwar avait longtemps essayé de se faire accepter de l’aîné des Leckie, rompu à l’idée d’une dette éternelle qu’il entretenait auprès de Norah et de ses enfants, mais aussi de leur famille toute entière, pour n’avoir pas su empêcher la vie de leur reprendre Frank. Ce simple fait en disait déjà beaucoup, quand on connaissait le peu d’importance qu’accordait habituellement le policier au fait de se faire apprécier d’autrui, mais l’inimitié qui subsistait entre Marcus et lui faisait l’effet d’une vilaine tâche d’huile sur sa relation avec Norah et ses enfants, et sa seule volonté aurait été toute autre si le frère de Caelan avait consenti à y mettre un peu du sien. Au lieu de cela Marcus était resté borné, pas même acquis à l’idée de faire semblant de tolérer Anwar, qui de lassitude avait fini par abandonner l’idée qu’il en soit autrement et s’était laissé gagner par le sarcasme et l’amertume. « C’est pour ça qu’il n’aurait pas fallu lui dire. Si son égo l’avait amené à accepter de venir, ça aurait été encore plus drôle, tu ne trouves pas ? » Oh, sans doute l’espace d’un instant – il y avait quelque chose de terriblement humain à se délecter des petits malheurs des personnes que l’on ne portait pas en estime. Passée cette courte satisfaction, il aurait néanmoins fallu faire avec la présence de Marcus et les mauvaises ondes qui s’y attachaient, et haussant les épaules le policier avait rétorqué « C’est pas le Leckie avec qui j’avais envie de partager mon cadeau d’anniversaire, de toute façon. » d’un ton qui ne laissait aucune place au doute.

Pas le Leckie avec qui il souhaitait passer du temps, pas le Leckie avec qui il souhaitait crapahuter dans la forêt, et certainement pas le Leckie avec lequel il souhaitait construire une cabane – puisque c’était apparemment le plan pour (au moins) l’heure à venir, et que Caelan venait même de leur dégoter le coin parfait pour cela. « Il ne reste plus qu’à t’incliner pour le titre de meilleur tonton. Tu vois, ce n’est pas si difficile d’avouer que l’autre a raison … » Nice try, my friend ; Voilà ce que disait le regard d’Anwar sans qu’il n’ait eu besoin de le formuler à haute-voix, et avant que la conversation ne revienne à leurs moutons … Ou plutôt à leur cabane. « Pourquoi on n’en ferait pas une chez Norah ? » Très bonne question : « Ne m’appelez pas à la rescousse si vous vous rompez le cou, je ne travaille pas aujourd’hui. » Adoptant la voix haut-perchée supposée appartenir à l’infirmière, il avait ponctué son imitation d’un ricanement amusé, et repris de sa propre voix « Si on gère la cabane d’aujourd’hui elle pourra plus remettre en doute nos capacités cela dit. Et puis, c’est toi l’ingénieur. » Ce qui faisait à la fois de lui la personne la plus à même d’assurer à sa sœur que “t’inquiètes, on gère” et le candidat idéal à blâmer si tout ne se passait pas comme prévu. L’un dans l’autre, ils avaient tout intérêt à cesser de se disperser et à se mettre à l'œuvre, et singeant le salut militaire son ami s’était fendu d’un « Chef, oui chef. » arrachant à Anwar un « J’adore quand tu me susurres des mots doux. » taquin.

Première étape, et non des moindres : rassembler les matériaux dont ils auraient besoin, avant même de commencer à songer à l’élaboration elle-même. Facile dans la théorie, un peu moins dans la pratique, quand bien même l'œil du Leckie s’était rapidement posé sur un tas de caillasse qui semblait n’attendre qu’eux – presque trop beau pour être vrai. « Ces cailloux pourraient le faire, non ? » Pour sa part occupé à ramasser des branches, Anwar avait relevé le nez en direction de Caelan au moment où ce dernier, prenant les devants, soulevait une pierre sans se douter du bourbier dans lequel il venait de se mettre. « Oups. Mi casa es su casa. » Le regard du policier glissant aux pieds de son ami, il avait à peine eu le temps de questionner « Est-ce que c’est … ? » que déjà, la réponse s’était dessinée d’elle-même : « Outch. Outch ! » Les jambes s’agitant avec empressement, l’ingénieur avait tenté sans succès de se débarrasser des fourmis qui lui grimpaient désormais sur les mollets et attaquaient ce qu’elles estimaient être l’élément perturbateur à la quiétude dans laquelle elles existaient jusqu’ici. « Oh merde, elles sont énormes ! » avait été la première réaction du marin, ce qui n’était pas peu dire compte tenu de leurs standards australiens et du fait qu’il en fallait beaucoup pour l’impressionner en termes de faune locale. « Rebouche-le, rebouche-le ! » Le caillou bouchant initialement l’entrée du nid gisait un demi-mètre plus loin, laissant aux insectes de quoi s’en échapper comme d’une plaie béante, et abandonnant à ses propres pieds les quelques branches qu’il avait eu le temps de collecter Anwar avait entrepris de refermer la boîte de Pandore lui-même.

Citation :

WIN – Se saisissant du caillou, Anwar avait rebouché l’entrée du nid et empêché au moins au flot d’insectes décidés à s’attaquer à Caelan de continuer à grossir. Ce dernier, tant bien que mal, était quant à lui parvenu à se débarrasser des intruses, non sans quelques piqûres qui lui vaudraient des démangeaisons pour encore quelques heures – mais face aux animaux australiens, c’était un moindre mal dont il pouvait s’estimer heureux. « Norah n’est pas obligée de savoir toutes les péripéties par lesquelles on sera passés. » N’importait que le résultat, après tout. « Ça va aller ? » avait-il néanmoins questionné par acquis de conscience, le regard glissant à nouveau du caillou jusqu’à son ami.

SO CLOSE – Se saisissant du caillou, Anwar avait rebouché l’entrée du nid et empêché au moins au flot d’insectes décidés à s’attaquer à Caelan de continuer à grossir. Pas de quoi régler le problème des bestioles déjà aux prises avec l’ingénieur, celles dont il n’était pas encore parvenu à se délester remontant désormais sur le reste de ses vêtements et donnant à Anwar l’impression qu’une seule option s’offrait à son ami : courir jusqu’à la plage et se jeter dans l’eau. Des fourmis noyées, c’était des fourmis qui ne piquaient plus.

FAIL – A trop vouloir s’approcher, Anwar avait fini par se brûler lui aussi … Ou plutôt, il s’était retrouvé cible à son tour de ces charmantes (non) bestioles, déjà occupées à dévorer ses chevilles et le faisant bondir tel un marsupial tout comme Caelan avant lui. Et les voilà tous les deux qui couraient vers la plage et se jetaient à l’eau tous habillés, prêts à ressembler à des naufragés pour le reste de l’atelier si cela leur garantissait de se débarrasser pour de bon de ces encombrantes nouvelles amies.