:: Roaring Twenties :: Masquerade Ball

Si Cody est là, c’est uniquement car il s'est laissé convaincre. Il n’est pas venu de son plein gré, une telle chose serait tout bonnement impossible. Et pourtant, le voilà, vêtu d’un costume tout neuf pour l’occasion - on ne se refuse rien - agrémenté de bretelles et, bien sûr, d’un loup couleur métal cachant la moitié de son visage. Quand il entre dans la salle de bal, la première chose qu’il tente de faire est de retrouver son amie, ne souhaitant pas se trouver seul ici quand il n’a décidé de venir que pour une seule raison ou plutôt, une seule personne. La salle est grande et de nombreuses personnes piétinent son sol à la recherche d’un ou d’une partenaire de danse ou simplement d’un verre à siroter. En voilà une chic idée, un verre, c’est exactement ce dont il a besoin pour commencer cette soirée.

Ni une ni deux, Cody se dirige vers le bar installé sur le côté et patiente quelques instants avant de passer commande. On le retrouvera quelques minutes plus tard accouché au comptoir à siroter sa boisson tout en observant la salle d’un coup d'œil. Il reconnaît certaines personnes, le loup ne l’empêchant pas de deviner des minois familiers, il ne se déplace pas pour autant. La plupart lui sont - ou semblent - inconnus et il se plaît à observer tout ce beau monde de loin, sans réellement s’intégrer pour le moment. Cody n’est pas un habitué de ce genre d’événement, bien sûr on le retrouve régulièrement à fouler la piste de danse des soirées Rock de Rick et il réapprend peu à peu à sortir, découvrant des facettes de la vie - et de lui - qu’il n’a pas pris le temps de découvrir jusqu’ici mais ce genre d’événement est tout nouveau.

Pour lui oui, mais visiblement pas pour Adèle, qui semble bien à l’aise au bras d’un jeune homme que Cody ne reconnaît pas d’un premier - ni d’un deuxième - regard. Son regard se fixe sur la jeune femme, bien sûr qu’il la reconnaîtrait entre mille, ce visage qu’il connaît par coeur, ce sourire qu’elle arbore qu’il n’a malheureusement pas eu la chance de voir ces derniers temps : ça lui réchauffe le coeur, de la voir heureuse, et il sent une pointe de jalousie à l’idée de ne pouvoir le faire lui-même, quand il le faisait si bien avant que tout ne dégringole dans leurs vies. Sa petite sœur, au bras d’un homme qu’il ne connaît pas, la Terre lui semble tourner dans le mauvais sens.

La dernière fois qu’ils se sont vus n’a pas été un moment des plus agréables, et la honte, les regrets et la culpabilité se sont invités à la table de Cody dès que ce dernier s’est assis en rentrant chez lui, ne le quittant plus de quelques jours. Puis la vie a repris son cours, avec son lot de surprises - des enfants, une Sibel - et une chose en entraînant une autre, le voilà ici à observer sa petite sœur de loin, comme si sa présence dans sa vie ne tenait plus qu’à un fil. C’est sûrement le cas.

C’est sûrement le verre englouti qui lui donne le courage de se pousser du comptoir pour marcher d’un pas décidé en sa direction. Il se surprend lui-même à aller au bout de son action et se retrouve rapidement devant elle - eux, bien qu’il décide d’ignorer la deuxième personne présente -. Il pourrait la saluer, s’excuser, tendre une main, la prendre dans ses bras, pleurer, rire, s’enfuir. Il pourrait faire tout un tas de choses mais il se contente de ce qui suit : il lui tend une main et lui demande simplement. « Une danse pour ton vieux frère ? » Un léger sourire se place sur son visage, il attend, il espère, le cœur battant à la chamade.

@Adèle Shephard

Elle aurait pu l’envoyer bouler, refuser son invitation et ne pas accepter le pas en avant qu’il est en train de faire. Elle aurait pu faire éclater la bulle qu’il vient de gonfler pour leur permettre d’échanger un instant sans leurs disputes habituelles, leurs reproches, leurs non-dits. Une parenthèse de quelques instants pour retrouver cette complicité qu’ils ont toujours eue, et ce, malgré les années qui les séparent. Quelques instants passent, elle discute avec son partenaire - Cody l’ignore largement - et finalement, elle prend la main de son frère. Un soupir s’échappe des lèvres du plus âgé, il ne savait même pas qu’il retenait son souffle et pourtant… Le soulagement est là. Elle accepte, quand elle aurait pu lui balancer toutes sortes de choses au visage - comme ils le font généralement si bien - et lui tourner le dos. Il est bien heureux de voir qu’aujourd’hui, ils peuvent prétendre que tout va bien, qu’ils n’ont pas un demi-millier de choses à régler, ils peuvent se retrouver le temps d’une danse ou deux. Alors il la traîne un peu plus loin, elle passe ses mains autour de son cou alors qu’ensemble ils commencent à se bercer l’un l’autre - Cody n’appellerait pas ça danser. « C'est une surprise de te voir dans un tel lieu, tu es venu accompagné ? » Il rit un peu, n’étant pas aussi crédule qu’elle pourrait le penser. Il la connaît, sa petite sœur, il reconnaît quand ses questions en cachent d’autres. Aussi, il lui répond comme il le fait toujours : sans répondre réellement. Ce soir, ce n’est pas spécialement pour lui cacher quelque chose, mais simplement car ça l’amuse. « Tu te crois subtile. » qu’il rit avant de poursuivre. « Pas aussi bien que toi. » Il jette un regard en arrière, vers l’endroit où le jeune homme accompagnant sa petite sœur se trouvait quelques minutes plus tôt, avant que Cody n’embarque Adèle. Il ne le reconnaît pas, ne sait ni son nom ni ce qu’il fait, fait mine de s’en moquer bien que ça ne soit pas le cas : il ne s’est jamais moqué des fréquentations de sa sœur, observant toujours, de loin comme de près. Il sait aussi qu’Adèle est douée pour attirer le mauvais genre de garçon. « Tu aurais pu te présenter tout à l'heure, » C’est vrai qu’il aurait pu, ça aurait peut-être amélioré un peu plus la situation, un pas vers elle supplémentaire. Mais il ne l’a pas fait, et il ne le regrette pas, n’ayant jamais apprécié les petits-amis de sa sœur et n’étant pas sûr que ce jour soit enfin arrivé. « C'est lui mon colocataire.  » Il la regarde, tente de déceler sur son visage s’il y a autre chose. Il ne lui faut pas longtemps pour trouver la lueur qui confirme ce qu’il pense. Il ne se cache pas pour le lui dire, un sourire toujours posé sur ses lèvres, souhaitant éviter le conflit, il n’est pas là pour ça. Il veut un répit, un court moment avec elle où ils peuvent simplement discuter comme frère et soeur, ce qu’ils ne sont plus vraiment depuis longtemps. « Oui bien sûr, tu me prends pour plus con que je ne suis. » il secoue un peu la tête et lui tapote le front de deux doigts. « Fais attention. » qu’il se contente de lui dire, estimant qu’il n’a pas à dire plus, qu’il n’a pas à jouer au grand frère ultra protecteur quand ils n’arrivent plus à enchaîner deux phrases sans se déchirer. Pourtant, ce n’est pas l’envie qui manque. Pas de se disputer bien sûr, mais de se lancer dans un grand discours sur les garçons et pourquoi elle ferait mieux de les éviter, ou au moins de lui demander de lancer l’interrogatoire puis la validation en 8 étapes, tout ça avant que le prétendant ne vienne ne serait-ce que la saluer pour la première fois. Un grand frère classique, en somme.

Il est encore perdu dans son monologue intérieur sur les raisons pour lesquelles Adèle ferait mieux de lâcher son coloc et de revenir vivre avec lui pour qu’il puisse s’assurer de sa bonne santé quand elle lui fait un compliment auquel il ne s’attendait pas. « Tu es beau, je vais faire des envieuses. » C’est fou comme trois petits mots peuvent remplir un cœur de joie et d’affection. Trois petits mots qu’il n’avait pas entendu de sa bouche depuis si longtemps et qui pourtant comptent tant. Il pourrait retourner le compliment immédiatement, bien sûr, mais il préfère se cacher derrière un trait d’humour. « Ça doit être les cheveux gris et les rides, ça t’illumine. » Il rit, n’ayant strictement aucun problème avec ces signes de maturité avec lesquels il vit très bien, du haut de ses jeunes 35 ans. « Tu es très jolie aussi. » qu’il avoue finalement quelques secondes plus tard, d’une voix plus basse, presque honteux de se livrer à de telles confidences.

Ils dansent un peu, au rythme lent de la musique. Ils auraient tant de choses à se dire, alors que leur tempête est calme pour cette soirée. Tant de discussions à avoir, de souvenirs à se remémorer pour enfin tourner la page sur ces années difficiles. Mais c’est compliqué, et sûrement ni le moment ni le lieu. Mais Cody se décide malgré tout à faire un pas de plus, la boisson lui ayant délié la langue et donné un peu de courage. « Comment il s’appelle ? » qu’il demande alors, faisant évidemment référence au jeune homme rencontré plus tôt. « Et ça fait combien de temps que ça dure ? » dans sa tête, il ne parle évidemment pas de la colocation, ne croyant cette histoire qu’à moitié. Il veut savoir, réellement, veut entrer un peu dans la vie d’Adèle alors que la porte est restée fermée si longtemps.

Ce serait presque surprenant, l’aisance avec laquelle ils se retrouvent - le frère et la soeur - comme s’il n’y avait pas des années d’histoire derrière eux, comme des boulets attachés à leurs chevilles, les entraînant chacun d’un côté, toujours un peu plus loin l’un de l’autre. Ce soir, ils brisent les chaînes, un maillon à la fois. On lève l’ancre - comme le ferait un guindeau - pour avancer, même si ce n’est que d’un petit pas. Il se sent à l’aise, à danser avec Adèle ; il ne se souvient pas la dernière fois qu’ils ont échangé un moment si délicat, mais il se souvient de l’enfant qu’était sa petite soeur quand elle montait sur ses pieds pour qu’il la fasse danser, lui qui s’était déjà pris d’une petite passion pour le rock, danse qu’il pratique toujours régulièrement aujourd’hui. Désormais, sa petite soeur n’est plus une enfant, elle le porte dans son regard, dans son élégance et au bras d’un jeune homme que Cody ne connaît pas et qui pique évidemment sa curiosité : n’importe quel frère se poserait la question, s’en inquiéterait et se lancerait dans un questionnaire approfondi. Il n’ose pas aller au bout de son envie, évitant ainsi le questionnaire de mille et une questions mais ne se gêne pas pour lancer le sujet malgré tout, de façon subtile pour commencer - l’est-il réellement ? « Il est vraiment sympa, tu verras... » Tu verras ? Si Cody était tout à fait honnête, il n’a pas l’intention de voir quoique ce soit, il préfère mille fois prendre sa décision à distance, l’observer de loin même s’il n’en a pas l’occasion, ne trouvant pas le jeune homme du regard et ne se sentant de toute façon pas légitime à exercer ce rôle. Elle ne manque pas de le lui dire très rapidement, lui confirmant ainsi ses doutes. « Tu n’as plus ce rôle Cody… » Il le sait bien, trop d’événements les séparent désormais, et il sait pertinemment qu’il ne peut plus être le grand frère qu’il était autrefois, même s’il tente de se convaincre de l’inverse. Il sait aussi qu’il ne peut s’en prendre qu’à lui-même, et à son caractère buté qui l’empêche de déverser tout ce qu’il a sur le coeur, ce qui les aiderait sûrement à faire le tri et peut-être même à avancer ensemble dans une même direction, qui sait ?

Il n’a pas le temps de lui répondre un simple je sais bien ou j’aurai toujours ce rôle qu’elle change rapidement de conversation, attirant la lumière sur lui. Il n’aime pas ça pas du tout. Aussi, il ne peut lui répondre que par l’humour, préférant largement s’enfuir de la vérité par cette porte-là. « C’est le barbu qui tient le bar. » qu’il se contente alors de lui répondre en montrant le fameux inconnu choisi au hasard d’un geste de tête. Il sourit, pas peu fier de lui. Quand le regard du fameux barbu se lève sur eux - sentant peut-être leurs regards sur lui -, Cody lui fait un petit geste de la main, provoquant un regard un peu surpris de la part du barman. « Il est un peu timide. » qu’il explique alors, sourire et yeux rieurs placardés sur le visage. Il n’a jamais discuté de ses histoires avec Adèle, elle était trop jeune, puis malade, puis partie, et de toute façon, il n’y avait pas grand chose à raconter. Une brève histoire quelques années plus tôt, pas de quoi s’asseoir à table pour en parler - ce serait désormais plus le cas au vu des enfants nés de cette courte histoire - mais rien qui ne mérite de prendre la peine d’en parler à sa petite sœur. Il ne saurait même pas par où commencer, n’ayant pas pour habitude de s’épancher sur quelconque histoire le concernant. Elle, en revanche, c’est une histoire qui l’intéresse, et qu’il a pris pour habitude de connaître. Quand ils se sont retrouvés tous les trois, Cody a mis un point d’honneur à être là pour eux, à écouter leurs histoires, à tenter de les conseiller comme leur père avait fait pour lui. Il n’était peut-être pas toujours le meilleur mais il était là, n’est-ce pas déjà suffisant ?

« Carl. » Il peut mettre un nom sur un visage brièvement observé. Est-ce un prénom qu’il juge convenable ou non ? Le jury n’est pas encore complètement d’accord sur la question, et il se garde bien de dire quoique ce soit, connaissant très bien sa soeur et sachant très bien qu’il se fera vite rembarrer comme il l’a été un peu plus tôt : elle sait se défendre et il se plaît des fois à se dire qu’il a peut-être eu un petit rôle là-dedans. « Combien de temps ? Plus d'un an... » On pose des questions et on se doit d’en assumer la réponse. La réponse le frappe de plein fouet, il manque même de reculer complètement des bras de sa sœur. Une année et il n’était au courant de rien. Une année et il n’avait rien vu. Heureusement, Adèle vient le sauver bien vite de toutes ses pensées qui viennent l’assaillir et l’inquiéter, le culpabiliser aussi. « Détends-toi va. Comme je te l'ai dit, c'est mon coloc donc soit je t'invente une date pour que tu me laisses tranquille ou je te dis la vérité : c'est simplement mon coloc, au même titre que Chelsea... » Il lâche un soupir de soulagement, et décide d’arrêter d’insister sur le sujet - mais il n’oublie pas, dans un coin de sa tête, le regard d’Adèle sur ce fameux Carl. « Ok ok je te crois, c’est ton coloc. C’est naturel de se poser des questions vu que tu viens avec lui ici. » C’est idiot son raisonnement - puisque lui-même est venu avec une amie - mais c’est son raisonnement à lui. Il aimerait pouvoir percer la coquille autour d’Adèle et en savoir un peu plus sur elle, sur sa vie, comme au bon vieux temps quand il savait tout ce qui leur arrivait - et qu’il devait agir en conséquence puisqu’ils étaient sous sa responsabilité. Mais elle est dure, cette coquille, et la sienne aussi, ils ne sont pas frère et soeur pour rien, c’est certain. Alors il tente une dernière fois. « Peut-être qu’un jour, tu m’en parleras de toi-même. » Et il sera là pour l’écouter. Il lui avoue ces mots d’un souffle plus léger, car il a un peu honte peut-être d’avouer que c’est ce qu’il désire : qu’ils retrouvent une relation où Adèle pourrait se confier à lui. « On parle de toi aussi ? » C’est un yoyo entre eux, à celui qui poussera le plus aisément la conversation vers l’autre, à celui qui balancera la meilleure information, à celui qui réparera cette relation peut-être aussi. « Moi ? Je suis un livre ouvert. » Pour une fois, il ne rejette pas complètement la question et se contente de lui répondre sur ce qui lui arrive en ce moment - en petite partie. « Le club roule du tonnerre, j’hésite à embaucher un autre prof pour assurer un ou deux cours supplémentaires par semaine. Je suis encore en réflexion. Et puis, je vais voir pour racheter les locaux, si je suis propriétaire je peux faire les ajustements que je veux. Mais bon, ça demande des fonds alors il faut que je le regarde avec un ami qui m’aide un peu sur tout ça. » Ce club, c’est toute sa vie. Il y a mis toutes ses économies dans l’espoir - mais l’incertitude - que ça fonctionne et se voit récompensé de tout ce travail acharné : il ne pourrait pas être plus heureux qu’il ne l’est chaque jour quand il passe les portes de son enseigne.

C’est avec beaucoup de force que Cody empêche le flot de questions qu’il a dans la tête de sortir de sa bouche pour venir se déverser sur la piste de danse. Il aimerait tout savoir sur l’accompagnant d’Adèle, de son âge à son métier, en passant par son passé et ses envies pour le futur. C’est avec les paroles insistantes de son père que Cody a grandi, ses tu es le plus âgé, tu prends soin d’eux et ses ta soeur c’est la princesse, c’est comme ça, paroles auxquelles il a toujours acquiescé, acceptant ce rôle dès la naissance de sa cadette. La petite fille a grandi, s’est transformée en adolescente et Cody n’a pas oublié son rôle, encore moins quand elle est devenue une adulte prête à s’accrocher aux mauvais garçons plutôt qu’aux bons, aggravant ainsi l’attitude de son grand frère. Il ne peut évidemment pas se détacher de ce rôle-là maintenant, ancré en lui comme une seconde nature, conditionné à s’interroger sur les personnes ayant accès - ne serait-ce qu’un peu - au coeur meurtri de celle que lui chérit tant - pas très bien, accordons-nous là dessus.

Il ne peut cependant pas lui en vouloir quand elle tourne la conversation vers lui, tentant d’en savoir plus sur la personne qui a pu le traîner ici ce soir. Le voilà lancé sur une touche d’humour, préférant contourner la question de cette façon. Il est venu avec une amie ce soir, rien de plus pourtant, mais il ne souhaite pas lancer le débat comme lui le fait avec le fameux inconnu au bras de sa sœur. Aussi, il tente un instant de lui faire croire qu’il est accompagné d’un homme ce soir, mais la blague ne trouve pas preneur et elle ne le croit pas une seule seconde. « Tu te moques de moi ? » Il ne peut pas s’empêcher de lâcher un rire, petite accalmie dans la tempête familiale. Tant d’années ils ont été complices comme personne, et sa petite blague lui rappelle tous ces moments qu’ils ont partagés il y a bien longtemps. « Et ça te fait rire ? » Oui, ça le fait rire, et il ne s’en cache pas, bienheureux également que le sujet ait pu dériver sur autre chose. Le silence s’installe, car Cody ne répond rien à ça et bien vite, le fameux Carl revient se placer entre eux. « Pourquoi je n'aurai pas eu le droit de venir avec lui ? D'autant plus que je suis célibataire Cody et majeur. » Cody le sait bien, c’était déjà le cas pour toutes les histoires d’Adèle qui se sont mal terminées, ils en parlaient justement la dernière fois qu’ils se sont vus et Cody ne souhaite pas particulièrement remettre ce sujet sur le tapis, aussi, il préfère aller dans le sens d’Adèle, juste pour ce soir, juste parce qu’ils ont enfin un moment plus calme, où ils ne sont pas à se crier dessus et que Cody veut profiter de chaque seconde avant que les choses ne dégénèrent à nouveau : il reste tant de choses à régler entre les deux Shephard qu’il ne se fait pas d’illusion, cet instant n’est pas voué à ancrer une nouvelle dynamique dans la fratrie. « Tu as raison, tu fais ce que tu veux. » Qu’il capitule d’un sourire, pour éviter qu’elle ne prenne ses paroles pour autre chose qu’elles ne sont réellement.

Un nouveau rire s’échappe de ses lèvres quand il entend sa sœur. « De ? Notre colocation ? » Elle sait le taquiner également, c’est un jeu auquel tous les deux sont très doués. Aussi, il lâche un petit soupir quand elle vient poser sa tête contre son épaule. « Parle-moi de ta colocation et je te parlerai de la mienne. » Qu’il plaisante, Adèle n’étant pas sans savoir qu’il a l’intention de rechercher des gens pour ouvrir la maison à la colocation, ce n’est pour le moment pas fait. Trèves de plaisanterie, Cody se met à parler. Il lui parle un peu de son travail, son bébé à lui, la seule chose dont il soit réellement fier. Cette école, il l’a montée de a à z et tous les jours quand il franchit les portes, il réalise le travail accompli et il est fier de lui-même. Tous les jours, il se lève en sachant qu’il a fait le bon choix et que ça valait le coup de prendre un risque, quand on voit le résultat. « C'est génial Cody, » Il lève les yeux, presque surpris, alors qu’il s’était un peu perdu dans son monologue inhabituel. Il hoche la tête, petit sourire au coin des lèvres, presque gêné par la situation. Elle était là pour tout Adèle, elle sait combien cette entreprise lui tient à cœur. « J'aimerai bien voir ça... Et je pourrai peut-être taper dans les sacs t'en penses quoi ? » Il pourrait vouloir lui refuser cette requête, estimant qu’elle ferait mieux de se tenir loin de tous types de violence, mais ce sport, il l’aime beaucoup trop pour le refuser à qui que ce soit. Aussi, d’un coup, son visage s’illumine comme un enfant alors qu’il s’arrête, oubliant un peu qu’ils sont en train de danser - machinalement et sans y réfléchir - depuis plusieurs minutes. « Avec plaisir. » qu’il souffle, sourire bien ancré sur ses lèvres. « T’amèneras ton colocataire. » Cette fois-ci, son regard amusé ne peut que montrer qu’il n’insistera pas de façon négative sur le sujet. Mais une petite session de boxe ne ferait sûrement pas de mal. « T’es toujours la bienvenue tu sais, à la salle, à la maison… » S’en souvient-elle ou est-ce que les événements des dernières années ont effacé cette promesse tacite entre eux depuis toujours. « ça me ferait plaisir de partager ça avec toi. » Qu’il confie pour la première fois. C’était la passion de leur père et Cody a toujours baigné dans ce milieu, leur père persuadé qu’il pouvait faire de son aîné un champion. Aujourd’hui, il serait bien heureux de transmettre la passion familiale à sa petite sœur.
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« Cody j'ai une question... » Cody lève le regard vers sa sœur alors que ses yeux s’étaient installés sur le côté, sur les pieds d’un autre couple dansant, sans pour autant qu’il ne regarde vraiment. Il soutient son regard, comme pour lui donner son accord, lui autorisant alors à poser la question qui semble lui brûler les lèvres. « pourquoi tu es venu seul à ce bal ? » Son aîné sourit, il aurait pu s’y attendre, savoir qu’Adèle ne comptait pas lâcher l’affaire si facilement. Il regarde autour d’eux, scannant la salle d’un rapide regard au cas où il viendrait à tomber sur son amie. Il ne la voit pas et se décide à répondre très simplement à sa sœur. « Je ne suis pas venu seul. » C’est la vérité, et il n’a d’ailleurs pas menti à ses questions ; ses réponses étaient vagues mais il n’a affirmé être venu seul ce soir et il sait que cette réponse frontale risque de surprendre - et d’intriguer encore plus - sa sœur. Il n’est pas venu seul, c’est vrai, mais il sait qu’Adèle s’attend à ce qu’il soit venu accompagné d’une femme qui partage plus qu’une simple amitié avec lui. Sur ce point-là, il risque de la décevoir.

Il pourrait se lancer dans une explication plus détaillée, lui montrer du doigt cette amie - s’il la trouve -, les présenter peut-être même mais il n’en fait rien, se contente de bouger ses pieds sur la musique et de se laisser porter par la conversation, profitant pleinement de ces instants calmes, la laissant dériver vers la colocation si curieuse de la jeune femme. Bien que le sujet soit pris sur le ton de l’humour - ou de la protection d’un grand frère ? -, Cody est profondément intéressé à l’idée d’en savoir un peu plus sur les gens qui partagent désormais la vie de sa sœur. Autrefois, c’était chez lui qu’il la retrouvait tous les soirs, et elle a fui car il était incapable de gérer correctement tout ce qu’il ressentait en lui. Aujourd’hui, il espère qu’elle ne rentre pas chez elle avec une boule au ventre, bien incapable de prédire comment la soirée va se passer ; il espère que les rires éclatent tous les soirs dans cette maison et qu’Adèle passe plus de temps avec un sourire scotché sur le visage que l’inverse. Il espère le meilleur pour elle, tout simplement. « Tu veux savoir quoi ? J'ai eu la chance fin mai de tomber sur cette annonce qui recherchait un troisième coloc. » Il grimace un peu mais ne dit rien, pas franchement fan à l’idée qu'Adèle ait trouvé une annonce lambda et se soit jointe à l’aventure sans particulièrement connaître les personnes. Il n’a pas son mot à dire, qu’il se répète de façon incessante. « Je m'entends bien mieux avec Carl mais pour être honnête je le connaissais d'avant. » Voilà qui - aussi surprenant soit-il - est rassurant. Quand il la regarde, il voit encore la petite fille qui s’est retrouvée blottie dans les bras de son frère un bon paquet de fois pour une tonne de raisons différentes. Il voit encore ses joues rebondies et son sourire édenté ; elle a grandi bien sûr mais le regard de Cody sur elle a du mal à suivre le mouvement. « Soit sympa avec lui, je l'apprécie vraiment beaucoup.  » Il n’est pas dupe mais se décide à ne pas pousser et se contente de lui répondre. « C’est pas comme si j’allais le revoir j’imagine. » Que ce soit un simple colocataire ou plus, il a du mal à imaginer Adèle les mettre dans une même pièce, échange durant lequel Cody se devrait d’être sympa avec lui ; aussi il n’y a visiblement aucune inquiétude ou projection à avoir. « Avec Chelsea, c'est un peu plus tendu. Disons qu'elle me reproche d'être la sœur de Ash. » Si le premier prénom n’évoque rien aux oreilles de Cody - bien qu’il devine qu’il doit s’agir de l’autre colocataire - le prénom de son petit frère vient faire manquer un battement au cœur du plus âgé, comme à chaque fois. Il faut dire qu’il ne s’attendait pas à ce que Ash arrive sur le devant de la discussion. Il tente de tourner et retourner le prénom Chelsea dans sa tête, tentant de l’associer à celui de Ash mais rien ne lui vient : rien de surprenant quand on sait que la relation entre les deux frères a toujours été compliquée et commençait tout juste à s’améliorer au moment du drame. « Drôle de reproche, j’imagine qu’il y a une histoire derrière ? » qu’il demande, pas certain de comprendre qu’on puisse reprocher à sa jeune sœur ses liens familiaux. « ça va t'inquiète pas. Je suis une grande fille, ça lui passera… » Il la regarde, hoche la tête, tente de s’en convaincre. Elle n’a pas besoin de lui - l’inverse est-il vrai ?

Quand le sujet dérive sur la passion première de Cody, tout devient beaucoup plus simple pour lui : c’est un sujet qu’il maîtrise et sur lequel il peut parler des heures sans s’arrêter, en devenant presque bavard. « Et que tu l'assomme pas de questions en tout genre sur sa vie trop personnelle. » Sourire malin sur le visage, Cody se surprend à imaginer la scène, pas certain que ça n’arrive de toute façon et qu’Adèle ne traîne son ami dans les locaux du grand-frère, quelle drôle de situation ça ferait pour eux tous ! Ce qui l’intéresse le plus, Cody, c’est d’y voir sa sœur. Que ce soit pour un cours ou simplement pour quelques mots échangés, il s’imagine déjà bien heureux en la voyant débarquer sur son lieu de travail. « Mais j'y viendrais. » Sourire un peu gêné, Cody peine à camoufler la joie qu’il ressent à cette idée. C’est tout ce qu’il a toujours voulu, partager des choses avec elle. Et si autrefois ils se voyaient souvent et connaissaient tout - ou presque rien - l’un de l’autre, aujourd’hui que tout est différent, ce serait mentir que de dire que Cody n’en souffre pas, même s’il est bien incapable de faire quoi que ce soit pour changer la situation. « Tu disais rechercher quelqu'un pour t'aider dans les paperasses non ? Tu as besoin de faire quoi ? » Il hoche vigoureusement la tête ; ce sont des choses qu’il fait pour le moment seul mais ça le force à rester plus tard au travail - comme si ça le dérangeait. « Tu sais tout le côté administratif pour lequel je suis pas très doué. La compta notamment. » Cody n’a jamais été le meilleur avec les chiffres, préférant largement le terrain à ce côté plan-plan derrière un écran qui n’a jamais été pour lui. Il a besoin d’être en mouvement, n’a jamais travaillé dans un endroit où il ne faisait pas des kilomètres de marche simplement d’allers et venues dans son entreprise.

C’est comme si une force invisible l’empêcher de parler, de se dévoiler un peu plus à sa soeur ; comme s’il était physiquement incapable d’exprimer à sa soeur tout ce qu’il pouvait avoir sur le coeur. Certains diront qu’il s’est trop habitué à se cacher derrière un masque pour rester le modèle de grand frère sans tâche ; lui ne sait pas s’il croit à cette hypothèse ou s’il doit creuser plus loin. Toujours est-il qu’il reste vague, bien incapable de lui exprimer la vérité, bien incapable de lui dire tout ce qui lui traverse l’esprit au quotidien. « Je suis heureuse pour toi Cody. Tu mérites aussi ce bonheur... » Plusieurs choix s’offrent à lui, bien sûr. Le plus censé serait de la contredire, de lui expliquer qu’elle se méprend, qu’il ne s’agit qu’une amie et rien de plus, que celle qu’il aime en aime un autre et qu’il est condamné à vivre avec ce poids sur la poitrine, qui le serre encore et toujours ; mais Cody aime prendre la route plus sinueuse, il l’a toujours fait et n’est pas prêt de changer. Aussi, il se contente d’hocher la tête d’un geste timide, accueillant ainsi ses mots sans les contredire alors qu’elle ne lâche évidemment pas l’affaire. « Tu me l'a présenteras... » On pourrait presque voir un rictus s’apposer sur son visage ; lui présenter qui ? Une amie ou la femme dont il est amoureux ? Les deux personnes sont bien opposées et il est bien incapable de le lui expliquer. « Peut-être oui. » qu’il se contente de répondre dans le but de ne pas continuer cette conversation ; s’il la contredit, elle insistera et ils rentreront dans un débat sans fin qui ne mènera de toute façon à rien. Car il ment, à demi-mot sûrement mais ça reste un mensonge, visiblement il excelle dans ce domaine ces derniers temps.

Les relations amoureuses sont au cœur de la conversation alors que Cody tente également de soutirer des informations à sa petite sœur. « J'imagine, et pas la peine de mener ton enquête sur lui, je me débrouille seule ok ? » Peu importe la réponse qu’il lui apportera, ils connaissent tous deux la vraie finalité : il mènera son enquête s’il le peut et un regard vers sa soeur lui confirme qu’elle le sait, et qu’elle tente de le convaincre mais n’est pas persuadée le moins du monde que cela fonctionnera. D’histoire en histoire, ils arrivent à la deuxième colocataire d’Adèle, dont le prénom ne dit rien à Cody. Quand elle mentionne Amy, il se contente de hocher la tête ; il n’a jamais vraiment connu l’histoire de la jeune femme, et surtout son histoire avec leur frère, mais Cody a pris le parti de se ranger du côté de Ash, sans pour autant savoir si c’était la chose à faire. Aussi, bien qu’ils se voient de temps en temps pour que Cody puisse connaître sa nièce, ils n’ont jamais discuté plus loin que des banalités. « je suppose que ça s'explique comme ça. » Peut-être, mais Cody ne saurait dire de quoi il s’agit. Aussi, il hume comme pour exprimer qu’il comprend, même si la réalité est tout autre, il n’a jamais pu pénétrer dans les histoires de son frère et ça lui semble bien compliqué de le faire maintenant même s’il suffirait sûrement de simplement poser quelques questions à sa sœur.

Cody s’y voit déjà, travaillant côte à côte avec Adèle ; il imagine bien le regard fier de leur père, le sourire complice de leur mère, les deux seraient plus qu’heureux d’imaginer leurs enfants s’apportant du soutien autant dans le travail que dans la vie privée ; ils seraient aussi bien déçus de constater que ça n’est pour le moment pas réellement le cas, bien au contraire. « je me doutais. Quand je viens, on regarde ça si tu veux. Si je peux t'aider.. » Il hoche la tête et espère sincèrement qu’elle tiendra parole, qu’ils auront l’occasion de mettre ces paroles à exécution et que ça restera plus qu’une simple idée dans leurs têtes, chacun de leur côté. « Avec plaisir, avec grand plaisir. » qu’il confirme, hochant frénétiquement la tête comme pour appuyer ses dires, comme pour lui assurer que c’est ce qu’il veut vraiment.

Ce moment suspendu, il en profite, chaque seconde qui s’écoule et se refuse à imaginer qu’il ne puisse y avoir une fin, il sait pourtant que cela finira bien par arriver. « Je suis contente qu'on se soit retrouvé ici... » Léger soupir au bout des lèvres, il ne peut qu’être d’accord avec sa soeur - pour une fois. « Moi aussi… J’espère qu’on aura d’autres occasions. » C’est peut-être le début de quelque chose, peut-être le point de départ d’une nouvelle relation, d’une nouvelle dynamique. « et surtout que tu sois venue me proposer une danse. » Il n’aurait pas pu l’ignorer en la voyant ici, Adèle est et sera toujours sa petite soeur chérie, il ne peut pas l’ignorer et ne le souhaite pas. « Merci à toi d’avoir accepté. » Il n’ose imaginer comment il aurait réagi si elle avait refusé, il n’ose imaginer la souffrance qu’il aurait ressenti. Mais elle a accepté et alors que la danse se termine, il vient poser un baiser sur sa joue pour la remercier et lui transmettre tout l’amour qu’il lui porte, malgré tout.