♫♪ C’est bizarre comme elle se sentait finalement à sa place dans cette ville inconnue. Il faut dire qu’elle avait plus de famille et d’attaches à présent ici qu’en Angleterre. Elle avait suivi sa fille pour être proche d’elle mais au fond elle l’avait fait aussi un peu pour elle. Pas pour le connaître lui, ce père absent et forcément mauvais, mais juste pour savoir d’où elle venait. Pour savoir juste pourquoi elle n’avait jamais mérité son intérêt. Elle savait qu’il avait une famille. Et jusqu’à maintenant elle n’avait jamais rien voulu savoir. Jamais voulu entendre parler d’eux. Jusqu’à ce que Stella se pointe à une de ses dédicaces. Ce bout de femme qui n’avait rien à voir avec elle et pourtant. Pourtant avec qui elle partageait une partie de son sang. Son nom avait résonné en elle bien longtemps après l’avoir rencontré. Elle avait d’abord fait comme si ça ne l’atteignait pas. Et puis elle avait finalement cherché à la revoir. Parce qu’elle ne pouvait pas s’empêcher de vouloir la connaître. Un peu. Juste un peu. Rien qu’un peu.

Alors elle avait agi comme si elle était une simple inconnue. C’était si naturel avec Stella, comme si elle l’avait toujours connu. Parfois elle oubliait même qui elles étaient. Juste Stella et Ellie, deux nouvelles amies qui se découvraient. Deux connaissances qui devenaient plus. Deux sœurs qui ne s’étaient jamais connues. Ellie n’était définitivement pas prête à lui dire. Parce que ça compliquerait tout et parce qu’au fond est-ce que ça importait vraiment ? Le regard de Stella changerait et elle n’était pas sûre de pouvoir le supporter. Pas sûre de pouvoir être à la hauteur de tous les chamboulements que cela impliquerait. N’était-elle pas mieux ainsi ? Sans réelle famille, juste celle qu’elle s’était créée ? Charlotte et elle. Ça avait toujours été ainsi. Jusqu’à Stella.

- Est-ce que tu savais ? Son sourire se fige un instant alors qu’elle comprend pourquoi Stella vient de frapper chez elle. Bien sûr qu’elle savait. Pas quand elle l’a rencontré mais depuis assez longtemps maintenant pour que ça en devienne un mensonge. Elle n’avait juste pas eu le courage de lui dire, pas trouvé les mots pour lui dire surtout « hey c’est moi la demi-sœur dont tu n’as jamais entendu parler ». - Je suis pas sûre de tout comprendre et peut-être que tu ne sais rien toi non plus. Elle la laisse continuer, soudain comme incapable de parler, elle qui pourtant n’arrête jamais. Peut-être est-ce plus facile de continuer à mentir ? Peut-être peut-elle encore faire comme si elle ne savait rien ? Comme si leurs rapprochements n’avaient rien à voir avec le fait qu’elles avaient le même père. - Mais on doit être honnêtes, maintenant. Maintenant. Le mot résonne longtemps en elle et elle déglutit avec peine alors que Stella reprend sa respiration. Elle fait comme si elle ne comprend pas et au fond c’est un peu vrai, elle est perdue Ellie. Mais elle sait, elle sait ce que Stella a appris. Ce qu’elle sait. Et elle ne pourra le nier bien longtemps. - Mon père te faisait suivre par un détective. Et il y avait... des lettres, dans son bureau. Je crois qu'elles parlaient de toi. Un détective ? Elle lâche un hoquet de surprise et se retient à la porte de son appartement. Pourquoi ? Comment savait-il qu’elle était à Brisbane ? Voulait-il la connaître ? Ou juste s’assurer qu’elle ne lui nuirait pas ? Son cœur s’affole dans sa poitrine et la voix de Stella la replonge dans la réalité. - Est-ce que tu sais quelque chose ? Tout. Elle sait tout. Mais les mots restent coincés dans sa gorge et elle fixe Stella, cette sœur qu’elle espérait ne jamais connaître et qui pourtant a pris en quelques semaines une place inattendue dans sa vie.

« Stella je… » Les mots ne sortent pas mais elle croise son regard et elle sait qu’elle ne peut plus reculer. Parce qu’elles le veuillent ou non, elles sont liées. Par ce père qui les a détruites, chacune à sa manière. « Oui » Finit-elle par dire. « Mais je n’avais rien prévu… Je… Je ne sais même pas pourquoi il me faisait suivre. » Elle se racle la gorge encore une fois et fait un pas vers elle sur le pas de la porte. « Et je ne savais pas qui tu étais avant que tu me dises ton nom. » Elle fait un geste vers elle pour lui toucher le bras mais se ravise bien vite, par peur de cette proximité et laisse finalement tomber les bras le long de son corps. - Mais on doit être honnêtes, maintenant. Ça résonne encore elle. Maintenant. « Le nom de mon père. »