Il n’avait jamais eu l’occasion de préparer une pareille table, sauf lorsqu’il avait été réquisitionné par ses parents certaines années et qu’il avait participé à la dresser. Ces rares fois, il n’avait pas réellement mis de cœur à l’ouvrage même s’il était toujours ravi de faire plaisir à sa mère qui mettait un point d’honneur à mettre les petits plats dans les grands pour le réveillon de Noël. Il avait beau se moquer gentiment d’elle et de son soucis du détails à l’époque, elle avait été sa meilleure alliée pour l’inspirer et lui donner quelques précieux conseils quant à la façon de préparer une jolie table. Bien sûr, elle avait posé des questions, et Lewis s’était senti un peu plus à l’aise pour dire la vérité depuis sa discussion avec Lola. Elle, et même Atlas - qui s’accordaient forcément sur ce point - le lui avaient dit, il ne devait plus attendre. Pourtant, si les signaux décortiqués à l’aide de Lola semblaient clairs et qu’il était déterminé à faire ce saut dans le vide, Lewis ne pouvait s’empêcher d’avoir les mains moites et d’enchaîner les maladresses, signe d’une nervosité qu’il n’avait jamais ressentie auparavant. Sa table avait été habillée avec un chemin de table en satin rouge au centre duquel il avait posé un chandelier, le tout recouvert de quelques branches de sapin, des pommes de pin et du houx. Il s’était surpris à rire de lui-même en réalisant à quel point il prenait soin de tout placer de manière harmonieuse. Et en un instant, sa satisfaction en voyant le résultat final s’était transformé en un énorme doute et il s’était senti bien moins courageux. S’éloignant de la table pour aller se préparer, Lewis s’était efforcé de se concentrer sur autre chose. Il n’avait plus le droit à l’erreur et il se l’était répété en terminant d’arranger sa coiffure et son noeud papillon face à un miroir où son reflet ne lui indiquait pas être l’homme idéal. Une pensée avec laquelle il devrait lutter toute la soirée.

Il avait pris une grande inspiration avant d’aller ouvrir la porte, s’il était sûr de ce qu’il s’apprêtait à faire, il ne voulait pas désarçonner Shiloh en lui donnant cette impression dès les premières secondes. Le même sourire idiot s’était dessiné sur ses lèvres lorsqu’elle était apparue derrière la porte, et il avait été rassuré de voir qu’elle aussi avait soigné sa tenue. Et pour ce détail, ils pouvaient compter sur l’excuse des fêtes de fin d’année. « Si ça peut te rassurer, j’ai pas cuisiné, j’ai fait appel à un traîteur de Spring Hill. » Là-dessus aussi, Lewis avait vu les choses en grand, et puisqu’il s’agissait de la période de Noël et de Shiloh, tous les excès étaient permis. Il la voyait analyser l’environnement, et il n’était pas sûr de comprendre l’expression de son visage et la lueur dans ses yeux, alors il avait continué à parler. « J’ai emprunté de la déco et des bougies à ma mère, je voulais te préparer quelque chose de bien mais dis moi franchement si tu trouves ça ridicule »  En avait-il trop fait ? La mise en place ou sa nervosité allaient-elles trahir ses intentions ? Shiloh allait-elle partir, effrayée par toutes ces attentions ? L’esprit de Lewis était en ébullition, lui sachant pertinemment la direction qu’il souhaitait donner à la soirée tout en restant conscient de la délicatesse avec laquelle il devrait mener la danse. C’était un challenge mais le jeu en valait la chandelle, lui se rassurant en imaginant qu’il n’aurait pas été beaucoup plus à l’aise sans le lourd passé de Shiloh venant compliquer leur relation. Lola le lui avait dit, il se cherchait des excuses, et il ne souhaitait plus reculer. Surtout pas quand son sourire et les propres efforts de Shiloh venaient le convaincre encore un peu plus de son choix et de son incapacité à vivre une histoire avec quelqu’un d’autre qu’elle. Alors qu’elle prenait le temps de regarder la table, lui en profitait pour sourire discrètement en voyant le nœud dans ses cheveux, qu’elle avait probablement su créer avec une chute de tissu ayant servi pour sa robe. Il espérait y voir un indice supplémentaire à ce qu’elle ressentait pour lui. « T’es superbe. » Le compliment n’était plus nuancé, Lewis ne voulant plus cacher la manière dont il la regardait et qui n’avait plus rien d’amicale. « Assieds-toi, je vais te servir. » Il s’était absenté un instant dans la cuisine ouverte qui ne lui permettait qu’une intimité partielle, juste de quoi reprendre ses esprits, et était revenu avec deux cocktails. Quelque chose de coloré et de léger, à l’image de Shiloh.

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Perchée sur une chaise, elle cherche à montrer l’ensemble de sa tenue à Cleo au travers de l’écran de son téléphone. « Ça va comme ça ? » Elle se demande sincèrement si son amie arrive à voir quoi que ce soit, mais, de son perchoir, elle arrive à percevoir le sourire radieux de la rousse et cela la rassure davantage. Ce n’est qu’un repas, pour célébrer les fêtes avec un peu de retard. Il ne lui avait pas donné beaucoup de précisions, elle n’a aucune idée s’il a également invité Kendall ou non. Une part d’elle espère que non, tandis que l’autre aimerait voir leur ami s’imposer à la petite fête. Une dualité qui n’existe que dans une réalité où Shiloh a finalement pris conscience que son crush d’adolescente n’était pas éteint. Bien au contraire. Il semble se réanimer à mesure qu’elle partage des instants de qualité en compagnie de Lewis. Et ces derniers se font de plus en plus nombreux. Pour son plus grand bonheur, certes, mais également pour mieux troubler son esprit. Elle ne sait plus réellement sur quel pied danser ou quelle sera la prochaine étape s’il doit en avoir une. Une part d’elle souhaiterait ne jamais écorcher leur amitié, une autre se demande un peu trop régulièrement ce que cela ferait d’embrasser Lewis. Elle bataille sans cesse avec ces éventualités, laissant des scénarios improbables ralentir ses séances de couture ou même envahir son esprit lors d’une réunion de travail. C’est pire encore depuis que Lewis a traversé la ville pour venir lui tenir compagnie lors des incendies. Stressée de savoir le quartier de ses parents bien trop proche du brasier, elle avait du mal à s’apaiser et avait partagé son angoisse au jeune homme au travers de trop nombreux messages textes. Il n’avait pas hésité à la rejoindre et surtout à rester plus d’une journée pour lui changer les idées. Elle n’avait jamais aussi bien dormi que lorsqu’il avait fini par venir s’allonger à ses côtés. Le rire de Cleo la sort brutalement de ses pensées. « T’es pas drôle ! » Qu’elle commente face à l’image hilare de son amie. Descendant de son perchoir, elle s’assure que son décolleté ne se veut pas trop plongeant tout en continuant à échanger avec celle qu’elle ne connaît que depuis quelques mois, mais qui semble la connaître mieux que personne. Cleo la rassure tout en se moquant gentiment et surtout l’aide à réaliser qu’il serait l’heure de partir si elle ne veut pas être en retard. 

Sur le palier, elle arrange une dernière fois ses cheveux, s’assure qu’elle n’a pas oublié le cadeau dans sa voiture et finit par lâcher un léger soupir pour se donner du courage. D’un point de vue extérieur, on pourrait croire qu’elle est sur le point de subir un très long dîner avec l’oncle gênant de la famille, tant elle paraît stresser et sur le point de s’enfuir à tout moment. Il suffit que Lewis ouvre la porte pour que le sentiment s’échappe et qu’un tendre sourire ne vienne étirer ses traits. Il est beau. C’est bien la première pensée qui lui traverse l’esprit alors qu’elle remarque ses efforts pour avoir enfilé une chemise et même un nœud papillon. Et il a pensé à tout, jusqu’au moindre détail. C’est ce qu’elle remarque alors que son cœur s’emballe légèrement à la vue de la table dressée uniquement pour deux personnes. « Si ça peut te rassurer, j’ai pas cuisiné, j’ai fait appel à un traiteur de Spring Hill. » Un rire lui échappe alors qu’elle se tourne légèrement pour croiser le regard du jeune homme. « Ce sera parfait. » Même s’il avait cuisiné, elle aurait trouvé cela parfait, simplement étonnée qu’il ait pu mettre autant d’effort dans une soirée qu’il avait lui-même qualifiée de simple. Les yeux de Shiloh ne peuvent se décoller de la table, cherchant à attraper le moindre détail. Ce n’est pas quelque chose qu’il a préparé en deux minutes, afin de faire quelque chose. Dans chacun des éléments de décor, elle remarque une volonté de bien faire, un désir de lui présenter quelque chose d’abouti et cela la chamboule. Elle ne saurait définir les émotions qui la traversent à cet instant, mais Shiloh se retrouve véritablement émue. « J’ai emprunté de la déco et des bougies à ma mère, je voulais te préparer quelque chose de bien mais dis-moi franchement si tu trouves ça ridicule » Elle sent bien que son silence semble rendre Lewis nerveux et cela la fait sourire à nouveau. Sans attendre, elle se tourne à nouveau vers lui, venant poser sa main sur son avant-bras dans un geste rassurant. « C’est parfait, Lew. » C’est même bien plus que cela. « On avait pas fait ça pour moi depuis très longtemps. » Comme une justification murmurée à demi-mot. Lawrence n’avait jamais mis autant d’effort dans un dîner à deux. La plupart du temps, il la traînait au restaurant pour finir par passer sa soirée sur son téléphone. « C’est magnifique. » Qu’elle murmure à nouveau en s’approchant doucement de la table, comme si la moindre précipitation pouvait faire exploser cette bulle dans laquelle elle venait de pénétrer.

« T’es superbe. » Elle sent ses joues se teindre d’un léger voile rouge, ses mains venant lisser le jupon de sa robe dans un réflexe inconscient. « Tu es pas mal non plus. » Qu’elle commente en souriant, venant toucher du bout des doigts son nœud papillon. Tout ça pour elle. Elle ne saurait l’expliquer, mais elle se trouve particulièrement touchée par tout ce qu’il semble avoir soigneusement préparé pour cette soirée. « Assieds-toi, je vais te servir. » Déposant son sac à main dans l’entrée, elle s’avance finalement vers la table, et prend place sur l’une des chaises, observant encore chacun des détails. Les bougies, les petites décorations de Noël. Il avait pensé à tout et Shiloh se trouvait chanceuse. Qu’importe la nature de leur relation ou l’avenir de cette dernière, au fond, elle sait que Lewis sera toujours là pour faire attention à elle. 

Il revient avec deux verres emplis d’un cocktail coloré dont elle devine déjà le goût sucré. Tout ce qu’elle aime, parce que Lewis est ainsi, il prête attention aux détails, même les plus insignifiants. « J’ai un cadeau pour toi. » Qu’elle annonce avant de se pencher pour récupérer le sac qu’elle avait laissé à côté de sa chaise. « C’est pas grand-chose, mais j’ai directement pensé à toi quand je l’ai vu. » Elle rougit légèrement avant de lui tendre la boîte qu’elle avait soigneusement emballée. « Joyeux Noël, Lewis. »
 

Difficile de définir l’entre-deux dans lequel il se situait, s’il était nerveux, il n’en était pas moins euphorique à l’idée de savoir que quelque chose de beau était en train de se dessiner à l’horizon. Lui de nature si pessimiste acceptait enfin de faire confiance à ce qu’on lui avait dit, à ceux qui savaient mieux que lui et surtout, il acceptait de faire confiance à Shiloh. Elle ne l’avait jamais déçu, serait incapable de le faire même en refusant de transformer leur amitié puisqu’il ne l’obligerait à rien. C’était un risque à prendre, sûrement le plus grand de sa vie, et s’il était incapable de contrôler ses émotions, il acceptait volontiers de les ressentir parce qu’il avait eu le temps de s’y préparer. Malgré tout, il avait eu bien du mal à apaiser sa respiration et les battements de son cœur lorsqu’elle était enfin arrivée, plus belle que jamais parce qu’il s’autorisait pour la première fois à la regarder avec des yeux amoureux. Lola lui avait fait dire tout haut, avait parlé pour lui, et c'était finalement le déclic dont il avait eu besoin pour préparer tout ce scénario. « Ce sera parfait. » Il l’espérait, sincèrement, même s’il avait le sentiment que rien ne serait jamais assez beau pour elle. « C’est parfait, Lew. » Il préférait davantage le spectacle actuel, la voir s’émerveiller devant ses préparatifs et constater que ses efforts n’étaient peut-être pas vains. Shiloh savait voir les détails, était capable de se réjouir des toutes petites choses, il ferait de son mieux pour lui rappeler. Pour lui rendre cette innocence qu’on lui avait volée. « On avait pas fait ça pour moi depuis très longtemps. » Il avait pris une profonde inspiration pour chasser les sentiments qui naissaient de l’affreuse vérité que cachait cet aveu. « T’es la première personne pour qui je fais ça. » Il espérait qu’elle comprendrait ce que cela signifiait. « C’est magnifique. » La voir sourire suffisait à rendre ses zygomatiques douloureux, et il ne perdait cet air idiot que lorsqu’il en prenait conscience et se forçait à reprendre un visage neutre. « Tu es pas mal non plus. » Son compliment n’en appelait pas un de sa part, mais il avait accepté volontiers qu’elle le lui rende, non sans qu’il ne vienne alimenter sa gêne.

S’accrochant à chaque brin de courage qu’il possédait, Lewis l’avait laissée s’installer, cherchant à poursuivre la soirée selon l’ordre qu’il avait établi. « J’ai un cadeau pour toi. » Ses yeux s’étaient écarquillés alors qu’elle l’avait pris de court, lui qui avait laissé un joli paquet pour elle parmi ceux qu’il n’avait pas encore eu l’occasion de distribuer, en dessous du petit sapin que son appartement pouvait accueillir. Il ne lui donnerait pas tout de suite, ou peut-être que si, il ne savait plus comment organiser ce qu’il avait prévu parce qu’il n’avait pas pensé à ce type d’imprévus. Calmant ses pensées, il s’était recentré sur elle et sur la timidité qu’il voyait poindre chez elle alors qu’elle lui offrait son cadeau. « C’est pas grand-chose, mais j’ai directement pensé à toi quand je l’ai vu. » Elle le faisait sourire, à venir minimiser son cadeau, comme si le simple fait de lui en avoir fait un ne suffirait pas à le combler. « Joyeux Noël, Lewis. » Il avait attrapé le paquet et avait déballé le cadeau comme un enfant un peu trop pressé l’aurait fait. Sur la boîte, il avait vite reconnu la marque et le personnage - un élément d’un univers qui était devenu encore un peu plus cher à son coeur car il avait joué un rôle capital dans leur rapprochement.  « Dobby ! Tu sais que je l’avais repéré ? » Si elle ne pouvait pas le savoir, elle avait pu l’imaginer, et il se sentait extrêmement touché par l’attention. Retournant la boîte dans tous les sens, il avait fini par la poser, jetant un oeil à son cadeau puis reposant les yeux dans ceux de Shiloh. Il devait poursuivre, profiter de cette ouverture. D’abord, il avait trinqué avec elle, les autorisant à plonger leurs lèvres dans un cocktail dont la dose d’alcool ne leur permettrait pas de détendre leurs esprits préoccupés. « Tu viendras passer du temps ici pour le faire avec moi après les fêtes ? Ou je sais pas, tu pourras coudre à côté. » Toutes les excuses étaient bonnes à prendre pour s’assurer de la voir toujours plus souvent, comme un besoin viscéral qui s’imposait chaque jour un peu plus à lui depuis leurs retrouvailles. Shiloh saurait que la manière dont il jouait avec le tissu de satin qui trônait au milieu de la table indiquait toute sa nervosité. Inutile alors de continuer à la cacher, et c’était un regard timide qu’il avait relevé vers elle, avant de la rassurer sur ses propos suivants avec un sourire. « Je veux démarrer l’année avec toi, Shiloh. Je veux la passer avec toi, même. » Lewis était incapable de trouver le juste milieu entre toutes les choses qu’il mourrait d’envie de lui crier et sa volonté de ne pas aller trop vite, de ne pas la brusquer. Alors il était venu nuancer, comme il le faisait toujours, s’assurant d’analyser chaque expression de son visage pour ne jamais mal faire.  « Je suis vraiment content qu’on ait eu la chance de se retrouver durant celle-ci, c’est tout. » Et il s’était levé, venant lui embrasser les cheveux parce que c’était un geste qu’ils étaient capables de gérer, qui ne signifiait rien en apparence, mais qui signifiait tout. En revenant de la cuisine où il s’était absenté pour lui laisser le temps d’appréhender ces premiers indices qu’il glissait ici et là, Lewis en était revenu avec l’entrée, un cheesecake au fromage de chèvre et à la tomate qu’il n’était même pas sûr d’aimer. Il avait tout prévu selon ses goûts à elle. Le cocktail et l’entrée terminés, il avait montré des signes d’inconforts bien plus intenses que les précédents et avait dû se justifier. « Je sais pas si je te donne ton cadeau maintenant, moi. » avait-il demandé, conscient que lui offrir un bijou trahirait ce qu’il cherchait à lui dire.

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Elle a du mal à se dire qu’il a pris le temps d’organiser tout cela pour elle uniquement. Ce ne sont que des détails, mais de ceux qui ont leur importance. Il a dressé une table, organisé sa soirée, préparé un menu. Elle peut deviner dans la nervosité qui se dégage de sa silhouette que Lewis a voulu bien faire. Il a parfaitement réussi en ce qui la concerne. « T’es la première personne pour qui je fais ça. » Tournant la tête, elle l’observe par-dessus son épaule, lui adressant un sourire tendre. Quelque chose a changé dans la manière dont il se tient, dans la façon qu’il a de l’observer. Elle ne saurait mettre le doigt dessus, pas encore, mais pour la première fois depuis bien longtemps, Shiloh se dit qu’il serait peut-être temps de lâcher prise.

Elle aurait probablement pu attendre, il venait simplement de leur ramener un verre de cocktail, mais elle avait hâte de lui donner son cadeau et de voir sa réaction. Après la surprise, il s’était emparé du paquet tel un enfant impatient. Elle aurait aimé avoir son téléphone sous la main pour capturer l’instant, la façon dont son visage s’est illuminé à l’instant où il a reconnu la boîte et ce regard qu’il a relevé vers elle, provoquant des frissons dans sa poitrine. « Dobby ! Tu sais que je l’avais repéré ? » Un léger rire lui échappe alors qu’à nouveau le jeune homme observe la boîte entre ses mains comme s’il s’agissait d’une véritable merveille. « Je m’en doutais. » Il ne lui avait fallu qu’une seule visite dans la boutique Lego pour trouver le cadeau idéal. Petit clin d’œil aux films qu’ils se sont enchaînés au fur et à mesure des soirées qu’ils ont passées ensemble comme un symbole de leur complicité retrouvée. Elle savoure l’enthousiasme qui émane de chacune de ses réactions, son attention ne cessant de revenir aux détails inscrits sur la boîte. « Tu viendras passer du temps ici pour le faire avec moi après les fêtes ? Ou je sais pas, tu pourras coudre à côté. » Elle s’imagine sans mal la scène, installée sur la même table qu’il partage actuellement, avec un vinyle qui joue sur la platine du salon. Il y’a quelques semaines de cela, elle aurait simplement émis l’idée dans ses rêves les plus fous, mais ce soir, tout cela paraît presque concret, atteignable et surtout, moins effrayant qu’elle ne le pensait. « Ce serait avec plaisir. » Tout simplement. Le plaisir de partager un moment en sa compagnie, que ce soit pour participer à la construction de son Lego ou pour venir coudre dans cet appartement qui devient peu à peu un cocon à ses yeux.

Étrangement, ce soir, c’est Lewis qui paraît nerveux. Plus que les fois précédentes encore, comme s’il devait soudainement marcher sur des œufs. Pourtant, depuis la soirée d’Halloween, il n’y avait plus eu le moindre faux pas. Elle avait relevé tous les efforts qu’il cherchait à faire tout en lui avouant qu’elle n’avait pas su réagir ce soir-là et que cela ne devait pas empiéter sur leur relation. Les choses avaient changé, petit à petit, pour les amener vers ce moment si intime et singulier. « Je veux démarrer l’année avec toi, Shiloh. Je veux la passer avec toi, même. » Heureusement, elle venait de finir sa gorgée, sinon elle se serait probablement étouffée face à cet aveu. C’est un nouveau frisson qui s’anime dans sa poitrine alors que face à elle, Lewis paraît être en train de rougir de plus belle. Elle voudrait attraper sa main, le rassurer, mais reste figée sur place, à laisser découler la réalisation de ce qu’il venait de lui dire. « Je suis vraiment content qu’on ait eu la chance de se retrouver durant celle-ci, c’est tout. » S’il elle a la sensation de le voir pédaler vers l’arrière, elle sait qu’il prête simplement attention à elle. C’est elle qui a tendance à mal réagir dès qu’il lui démontre de l’affection. Non pas par dédain, mais parce que les mots de Lewis viennent réveiller des sensations que Shiloh pensait ne plus jamais avoir la chance de connaître. Elle se sent renaître sous son regard tendre et les battements de son cœur s’emballent alors qu’il se lève pour venir vers elle. Un instant, elle l’imagine franchir une limite qui la rend fébrile. Mais Lewis a compris, il sait que tout doit être fait avec un peu plus de lenteur. Lorsqu’il embrasse le dessus de son crâne, ce n’est plus un frisson qui la parcourt, mais une nuée tout entière de papillons qui viennent lui chatouiller l’estomac. Sans réfléchir, elle le retient en posant sa main sur son avant-bras, son regard cherchant les prunelles azur du jeune homme. « Moi aussi, je suis vraiment heureuse de t’avoir retrouvé. » Tout simplement. S’il avait le courage d’aller au bout de ses pensées, elle tirerait sur son bras, pour qu’il s’approche encore plus, pour qu’il se penche à nouveau au-dessus d’elle et que ce ne soit pas ses cheveux qu’il cherche à embrasser. Mais Shiloh craint d’imaginer des signes, de ruiner une amitié qu’elle chérit plus que tout, alors elle lui adresse un sourire et le laisse filer vers la cuisine.

Il l’impressionne avec le début du repas ; même si ce n’est pas de sa confection, elle réalise qu’il a cherché à faire en fonction de ses goûts. Et même si la nervosité de Lewis devient presque palpable, ils n’ont aucun mal à entamer la conversation. Ils ont beau se voir de plus en plus souvent, les sujets de conversation sont toujours aussi nombreux entre eux. Peu à peu, Shiloh arrive à se détendre, appréciant la nourriture et la compagnie. « Je sais pas si je te donne ton cadeau maintenant, moi. » Elle voudrait lui dire qu’elle s’en fiche, qu’il n’avait pas à lui offrir quoi que ce soit, que cela pouvait bien attendre, que le repas était déjà un cadeau suffisant, mais au milieu de toutes ses pensées divergentes, elle ne retient qu’une seule chose. « Tu as l’air nerveux. » Qu’elle souligne en lui souriant quelque peu. « C’est parce que mon cadeau était plus cool que le tien ? » Elle rougit en s’entendant parler ainsi, mais l’humour a toujours fait partie de leur dynamique et elle s’empresse de rire, s’étouffant à moitié avec sa salive dans la précipitation. Bien jouée, Shiloh. « Enfin, je veux dire, t’étais pas obligé, tu sais, tout ça… » Elle désigne la table dans un mouvement de la main. « C’est déjà parfait. » Voilà qu’elle devient aussi nerveuse que lui et cela finit par la faire rire à nouveau de manière bien plus douce. « Qu’est-ce qui nous arrive ? »

Recevoir son cadeau avait été une pause appréciable, lui qui souhaitait déjà atteindre la conclusion de la soirée alors que celle-ci ne faisait que commencer. C’était bien la première fois  qu’il voulait voir un moment avec elle s’accélérer, ayant toujours tout fait pour qu’il s’éternise. Lewis s’était mis à retourner la boîte dans tous les sens, cherchant à gagner quelques minutes pour reprendre son souffle bien plus qu’à analyser un jouet qu’il connaissait par coeur parce qu’il s’était souvent stoppé au dernier moment, s’empêchant de se l’offrir. Shiloh l’avait fait, et cela l’amusait d’imaginer qu’elle puisse lire dans ses pensées, et si elle avait pu le faire à ce moment précis, Lewis se demandait bien ce qu’elle aurait pensé de ce qu’il s’y tramait. « Je m’en doutais. » Il n’était pas étonné, et dans un élan de tendresse, il avait enfin osé tenir un discours éloigné de celui de la simple amitié. « Ce serait avec plaisir. » Il avait tenté de se dérober après son geste tendre et ses mots qui l’étaient tout autant et ce n’était pas parce qu’il la fuyait, mais qu’il s’imaginait qu’elle aurait besoin de quelques instants. A la place, elle l’avait surpris, s’accrochant à lui pour qu’il reste et plantant un regard qu’il aurait juré suppliant dans le sien. « Moi aussi, je suis vraiment heureuse de t’avoir retrouvé. » Se laissant uniquement le temps de reprendre son souffle, il s’était finalement éclipsé en lui souriant, non sans s’accorder quelques insultes mentalement d’avoir laissé filer cette opportunité. Etait-elle plus prête que lui ? L’idée lui facilitait la tâche, mais il voulait s’assurer de ne pas avoir vu des indices là où il n’y en avait pas, Shiloh étant peut-être toujours elle-même, douce et gentille avec celui qu’elle considérait comme son meilleur ami. Il était revenu après un court instant, profitant du repas pour revenir à un peu plus de légéreté jusqu’à, lui aussi, sentir l’envie irrépressible de lui offrir ce qu’il lui avait acheté. « Tu as l’air nerveux. » La réponse qu’il avait cherché à donner ressemblait plus à un bégaiement et une suite d’onomatopées qui ne voulait rien dire. « C’est parce que mon cadeau était plus cool que le tien ? » Lewis s’apprêtait déjà à courir dans la cuisine lui porter un verre d’eau quand elle s’était légèrement étouffée mais s’était contenté de rire en constatant que ce n'était que passager. La voir partager sa maladresse le rassurait, et il n’avait pas eu le temps de répondre que déjà, elle se reprenait. « Enfin, je veux dire, t’étais pas obligé, tu sais, tout ça… C’est déjà parfait. » « Ça me fait plaisir et tu le mérites. » Il s’assurait qu’elle en soit sûre, et qu’elle ne s’imagine pas que préparer tout ça avait été une corvée pour lui. C’était tout le contraire. Devant tant d’approximations, de rires gênés et de regards fuyants, Shiloh s’était mise à rire mais jamais il n’aurait pu anticiper la suite.

« Qu’est-ce qui nous arrive ? »
« Je sais pas. »

Il aurait pu en rester là, mais sa question n’était pas rhétorique, il l’avait bien compris à la manière dont elle le fixait, dans l’attente comme elle l’avait été juste avant, lorsqu’elle avait posé sa main sur son bras. « On a peut-être trop entendu qu’on formait un beau couple, ça doit nous perturber. »  Prononcer le tout dans un rire laissait planer le doute, mais il faisait de son mieux pour ne pas qu’elle pense à une moquerie. Lewis la testait, tâtonnant pour chercher l’approche qui risquerait le moins de la faire fuir, la dévisageant alors qu’il se sentait pourtant incapable de maintenir son regard. Il voulait que le moment soit parfait, parce qu’il serait peut etre celui dont ils se souviendraient durant leur vie entière. Voir si loin dans l’avenir lui donnait le vertige, accrocher son regard au sien l’empêchait de sombrer. Elle était son équilibre depuis si longtemps déjà qu’une partie de lui commençait à se détendre et à voir une certaine suite logique s’immiscer dans leur dynamique. Encore une fois, après des mots lourds de sens, il s’était échappé un instant pour lui laisser l’occasion de digérer sans se sentir mal à l’aise concernant ses propres réactions. Ils n’avaient pas encore mangé le plat, mais il refusait de se focaliser sur un programme établi qui n’était dérangé que par les signaux de plus en plus évidents que lui envoyait Shiloh. Attrapant le paquet soigneusement emballé par la bijouterie, c’était un Lewis dont la nervosité avait atteint son paroxysme qui l’avait tendu à Shiloh. Une chaîne à laquelle était élégamment accroché un pendentif en argent orné de quelques strass et d’une émeraude en son centre. «  Moi aussi j’ai de suite pensé à toi en voyant ça. »  Ou à ses yeux, plus précisément. À l’arrière Lewis y avait fait graver leurs initiales, comme un autre indice de sa volonté de les associer qu’il avait lui aussi élégamment mis en place. Attrapant délicatement le bijou dans l’écrin, il l’avait retourné avant de se replacer correctement dans sa chaise et d’observer ses réactions. « Je te le mets ? » Il ne se serait pas offusqué qu’elle refuse, mais ses yeux pétillants lui avaient donné l’autorisation de venir délicatement dégager sa nuque pour accrocher le bijou à son cou. S’il avait longtemps réfléchi à ce moment, il n’était pas convaincu qu’il se passerait exactement comme il l’aurait souhaité : Shiloh se levant pour aller observer le résultat dans un miroir, l’opportunité pour lui de se tenir ensuite devant elle et de profiter de l’instant parfait pour poser ses lèvres sur les siennes. Cette scène-là, il l’avait imaginée un nombre incalculable de fois, et dire qu’il osait encore prétendre ne rien ressentir d’autre que de l’amitié pour elle était l’un de ses pires mensonges. Elle ne s'était pour le moment jouée que dans son imagination, et il s'était ressaisi, se concentrant à nouveau sur la réalité. Entamant les quelques pas pour regagner sa place, il s'était arrêté, restant dos à elle. « Si j’attends encore, j’ai peur de plus réussir à parler, alors promets-moi d’au moins terminer le repas avant de fuir si je me lance, d’accord ? » Il aurait pu céder à une pulsion mais la respectait trop pour ne pas lui servir un préambule qui lui permettrait encore de l’empêcher d’aller plus loin, ou de décider de la propre direction qu’elle souhaitait donner à la soirée. C’était la sienne, et il ne comptait plus la diriger seul, fonctionner en duo était après tout son souhait le plus cher.

I've seen stars reborn in your eyes crédit gif - whtvrgifs shiloh & @lewis siede #117 dornoch terrace, west end

Chaque micro attention lui semble encore plus précieuse que la précédente. L’ambiance qu’il a voulu recréer chez lui, la sachant incroyablement fan de la période de Noël. Cette manière de faire attention à sa tenue, de choisir un cocktail sucré juste à son goût ou de sélectionner une entrée qui saura la ravir. Lewis a pensé à tout, jusque dans les moindres détails, et Shiloh cherche à se laisser porter par ce sentiment de plénitude qui l’envahit alors que son regard ne cesse de caresser les traits du visage du jeune homme. Il y’a encore de cela quelques mois, elle n’aurait sûrement pas été aussi attentive à la moindre de ses réactions. Ce soir, elle perçoit toute la nervosité qui émane de lui. De la manière dont son regard ne peut se poser plus de quelques secondes sur son visage avant de dériver, à la façon qu’il a de gigoter sans cesse sur sa chaise. Elle cherche à en rire, mais la tension ambiante fait naître un nœud dans le creux de son estomac. Il paraît presque évident que Lewis aimerait lui dire quelque chose, mais qu’il ne sait tout bonnement pas comment s’y prendre. Si une part d’elle prend sa prudence comme un signe de respect, une autre partie d’elle commence à laisser se dessiner des scénarios plus sombres. Tout se terminant avec un Lewis lui demandant de mettre de la distance au sein de leur relation devenue fusionnelle au fur et à mesure des dernières semaines. Secouant légèrement la tête, Shiloh cherche à se libérer de ses propres pensées néfastes, voulant plutôt se focaliser sur le garçon qui lui fait face. Lewis n’oserait jamais se moquer d’elle, pas vrai ? Il est vrai qu’il use souvent de l’humour comme d’une façade, mais jamais il n’oserait être cruel. Elle le sait, elle le sent. Et peut-être que cette fois, c’est elle qui use de l’humour pour tenter d’alléger l’atmosphère. Entre deux éclats de rire nerveux et des sourires qui trahissent une tension qu’elle ne saurait décrire, mais qu’elle ressent jusque dans ses os. « On a peut-être trop entendu qu’on formait un beau couple, ça doit nous perturber. » Il a ri avant de s’échapper, une fois encore, vers la cuisine, la laissant bouche bée et bien incapable de donner un sens à tout ce qui se déroule sous ses yeux.

Il s’agite alors que Shiloh reste ancré à sa chaise tentant de déchiffrer la tornade qui s’agite tout autour d’elle. Il est partout et nulle part à la fois. Entre un regard intense et un sourire aveuglant. Elle voudrait en rire, mais la nervosité de Lewis est en train de faire naître chez elle un sentiment d’angoisse qu’elle ne voulait pas inviter à cette soirée. Déposant sa serviette sur le coin de la table, elle l’observe se lever à nouveau pour aller chercher quelque chose au pied du sapin. Son cœur s’emballe lorsqu’elle remarque la boîte à bijou, et la sensation se décuple lorsqu’il laisse timidement apparaître le collier qu’il a sélectionné pour elle. « Moi aussi, j’ai de suite pensé à toi en voyant ça. » Dans un ballet frénétique, ses yeux alternent entre le pendentif et le visage devenu si tendre de Lewis. « Lewis, t’es fou… » Elle tend la main pour venir caresser de la pulpe de ses doigts, le pendentif qu’il a soigneusement choisi. Perdue dans ses pensées, émue par le geste, elle se contente de hocher la tête lorsqu’il lui demande : « Je te le mets ? » D’un geste, elle se redresse, et porte ses mains à ses cheveux pour mieux dégager sa nuque, le laissant accrocher le collier à son cou. De suite, ses yeux se baissent sur sa poitrine, cherchant à voir l’objet de plus près. « Il est magnifique. » Sa voix tremble légèrement, envahie par tout un tas d’émotions. Il avait pris le temps de penser à quelque chose, il avait dit avoir pensé à elle en le voyant. En douceur, son pouce vient effleurer la pierre couleur émeraude. « Je me sens un peu idiote avec mon Lego maintenant. » Qu’elle annonce sur un ton léger, cachant son émotion derrière un rire quelque peu tremblant.  

Elle aurait encore pu passer de nombreuses minutes à observer son cadeau tout en s’efforçant de calmer son cœur galopant qui cherchait déjà une signification derrière un tel geste. Mais c’est, une fois encore, l’attitude de Lewis qui la ramène à la réalité de l’instant. Lui qui se tient droit comme un piquet, lui tournant le dos subitement. « Si j’attends encore, j’ai peur de plus réussir à parler, alors promets-moi d’au moins terminer le repas avant de fuir si je me lance, d’accord ? » Elle a peur de comprendre, s’imagine bien des raisons sur ce qu’il voudrait lui dire, mais après ce début de soirée, Shiloh n’envisage qu’une seule direction pour cette conversation. Elle l’espère autant qu’elle s’en inquiète, mais refuse de laisser cette nervosité ambiante venir ronger les prémisses de ce qui promettait d’être une soirée dont elle se souviendra pour longtemps. « Lew… Assieds-toi s’il te plaît. » Elle ne cherche en rien à le brusquer, mais voudrait pouvoir voir son visage avant de poursuivre. Elle ne l’avait jamais vu ainsi et devine qu’il dévoue une véritable importance à ce qui semble le tarauder depuis qu’elle est arrivée chez lui. Dans un sourire, elle s’amuse à penser qu’il ressemble à un jeune homme à peine sorti de l’adolescence, se demandant quelle serait la bonne marche à suivre lors d’un premier rencard. Elle aimerait pouvoir qualifier cette soirée d’un rendez-vous galant. Le premier d’une longue liste ? Une fois encore, Shiloh l’espère avec une fébrilité qui lui laisse deviner que faire à nouveau confiance sur ce sujet ne lui sera pas aisé. Cependant, Lewis est la seule personne en qui elle aurait parfaitement confiance pour apprendre à nouveau. Et alors qu’il s’installe à nouveau sur sa chaise, elle rapproche la sienne, venant attraper ses mains dans les siennes. Elle sent ses doigts trembler dans la paume de sa main et finit par relever les yeux pour lui sourire de la manière la plus tendre qui soit. « Je vais pas partir, c’est promis. » Il l’avait vu s’éloigner une fois. Est-ce qu’il le redoute encore ? « Je partirais plus, je te le promets. » Elle ne fera plus l’erreur de le laisser alors qu’il a toujours su être présent pour elle. Lui qui accepte son passé sans jamais la forcer à s’en défaire, qu’importe ses réactions parfois étranges. Ses pouces dessinent des cercles lents sur le dos de ses mains, cherchant à apaiser la tension qui semble l’enfermer dans ses propres pensées. Un instant, son regard vient se perdre dans l’azur de ses prunelles. Quelque chose se trame. Des révélations qui pourraient changer la nature de leur relation. Elle s’en doute, elle en a peur dans le fond, mais Shiloh s’est promis de ne plus jamais laisser la peur gagner. « Je te fais confiance. » C’est probablement tout ce qu’il avait besoin d’entendre. 

A son tour de lui donner cette pièce qui avait attiré son regard dans la vitrine tant elle lui ressemblait, et d’assumer toute la signification qui y était associée. « Lewis, t’es fou… » Le commentaire l’avait obligé à rire, lui qui ne savait plus s’il en avait trop fait ou si ce commentaire indiquait qu’il ne devrait pas poursuivre. Durant un instant, il ne la comprenait plus, l’idée le faisant paniquer. Mais elle l’avait accepté, avait dégagée sa nuque avec son aide, et il respirait à nouveau. « Il est magnifique. » Comme toi, mourrait-il d’envie de répondre, tombant dans tous les clichés desquels il se moquait allègrement dans les films ou les séries. Shiloh faisait ressortir une version de lui qu’il ne connaissait pas, mais elle lui plaisait parce qu’il l’assumait pleinement à ses côtés. « Je me sens un peu idiote avec mon Lego maintenant. » « J’imagine, moi qui rêvais qu’on m’offre des boucles d’oreille avec un rubis… » Son cadeau était parfait, et il ne s’était pas hasardé à lui indiquer qu’il en attendait un autre. L’humour n’avait plus suffi à le calmer et bientôt, Lewis s’était retrouvé figé, dos à elle, craignant de faire ce saut dans le vide qui semblait devenir la chose la plus difficile qu’il n’ait jamais eu à faire. « Lew… Assieds-toi s’il te plaît. » A trop hésiter, Lewis ne se rendait pas service et, au contraire, transmettait toute sa nervosité à une Shiloh qui n’en avait pas besoin. Il réalisait peu à peu qu’il s’était tant focalisé sur sa vision de la soirée, ses attentes et ses craintes, qu’il en avait oublié qu’elle en était la protagoniste, elle aussi. Bien malgré elle, alors l’idée de ne pas pouvoir anticiper ses ressentis et ses réactions ne finissait pas de le bloquer. Shiloh avait pris ses mains dans les siennes, réussissant à lui rappeler que ce qui était en train de se dessiner était quelque chose de positif, peu importe l'issue. Quelque chose de beau, si elle se décidait elle aussi à leur laisser une chance.  « Je vais pas partir, c’est promis. » Une fois avait déjà été trop compliquée. « Je partirais plus, je te le promets. » Il la croyait, ses sentiments n’auraient pas eu la place de naître si ce n’était pas le cas, mais il se plaisait à l’entendre lui assurer, elle qui ne pouvait deviner ses intentions. « Je te fais confiance. » Ces mots-là étaient bien plus importants à ses yeux que tous ceux qu’elle aurait pu choisir de dire. Il la connaissait assez et en avait assez entendu sur ses propres craintes pour comprendre qu’ils n’avaient pas été utilisés à la légère. Au contraire, Shiloh les avait choisis pour une raison évidente, son impatience se lisant dans ses pupilles.

Il n’y avait probablement plus rien à dire, mais il voulait s’assurer que sa démarche soit comprise et que ce qui suivrait ne ressemblerait pas à un geste spontané et irréfléchi. « Excuse-moi, d’être aussi bizarre. » avait-il commencé, justifiant un comportement qui devenait pesant pour tous les deux mais qu’il ne contrôlait pas. Prenant une grande inspiration et fixant son regard au rouge vif du chemin de table, Lewis était venu entremêler ses doigts aux siens, le geste se voulant bien plus tendre que celui initié par Shiloh. « Je suis nerveux parce que tu comptes énormément pour moi et que je m’en voudrais de pas faire les choses correctement. » Il sentait son regard posé sur lui, incapable de relever le sien tant sa timidité avait repris le dessus. En cherchant ses mots, Lewis ressentait cette dose d’insécurité qui ne l’avait quittée que récemment. Il n’était pas sûr d’être capable d’aller jusqu’au bout, se sentant illégitime à demander l’impossible à une Shiloh qui méritait le meilleur. Mais elle lui faisait confiance et lui ne pouvait plus faire demi-tour ou tirer un trait sur des sentiments qu’il n’était plus en mesure de nier, alors il espérait qu’elle se contenterait de lui. De son envie de lui apporter tout ce dont elle aurait besoin, de continuer à l’aider à se réparer et de sa volonté d’être patient. « Je suis pas fou, au contraire, j’ai eu le temps de réfléchir. Longtemps.  » Depuis le lycée. Shiloh n’avait jamais quitté son esprit et il se trouvait là, sur le point de donner un sens à tout ça. Levant enfin le regard, c’était auprès d’elle qu’il devait puiser son courage, il le savait pertinemment. Peu importe la maladresse avec laquelle il s’exprimait, il avait le sentiment que Shiloh le comprenait. « C’est pas facile parce que j’ai beaucoup à perdre, du genre une amie en or, mais j’ai bien plus à y gagner et de toute façon j’arrive plus à le cacher. » Il avait haussé les épaules, s’était autorisé un rire puisqu’elle lui laissait le temps de parler et qu’elle respectait sa promesse. « Je sais pas comment formuler ça sans que ça te donne l’impression de devoir t’engager dans un truc que tu maîtriserais pas et je veux que tu saches que j’attends rien, absolument rien de toi en retour. Mais je peux pas continuer à te mentir, Shy. » Que devait-il lui dire ? Qu’il ressentait quelque chose de fort pour elle, alors que son coeur n’était peut-être plus en mesure de ressentir la même chose ? Qu’il voulait plus que leur amitié et risquer qu’elle s’imagine que ce n’était pas suffisant à ses yeux ? Tout semblait trop ou trop peu. Aucun mot ne semblait pouvoir exprimer tout ce qu’il souhaitait lui dire. « J’ai envie d’essayer autre chose que l’amitié, avec toi. » C’était sur cette phrase, qu’il aurait dû concentrer ses efforts, la répéter, la travailler et la rendre belle. Mais elle lui était venue de cette manière et il espérait qu’elle suffirait à introduire son geste. Lewis avait lâché les mains de Shiloh pour pouvoir se lever de sa chaise, contourner la table, se poster à côté d’elle et lui tendre la main pour l’inviter à se lever avec un sourire rassurant. Shiloh avait suivi son mouvement, et puisqu’il lui était impossible de ne pas comprendre ce qu’il était sur le point de faire, il savait qu’elle ne le repousserait pas. Il l’espérait, de toutes ses forces, au moment où l'une de ses mains avait de nouveau retrouvée la sienne pendant que l’autre s’était mise à caresser doucement sa joue, Lewis replaçant l’une des mèches de ses cheveux derrière son oreille. Si l’amitié qu’il ressentait pour elle s’était transformée en quelque chose de plus fort, Lewis bénéficiait encore de cette complicité qui n’avait jamais quitté leur duo. Se sentir si proche d’elle l’avait obligé à baisser le visage dans un rire à peine audible, qui cachait plutôt sa nervosité en réalisant ce qu’ils s’apprêtaient à faire qu’une toute autre émotion. Reprenant son sérieux en une seconde, il avait planté son regard dans le sien, sa main attrapant le bas de son visage pour le relever avec une délicatesse qui lui venait naturellement. Ses yeux s’étaient posés un instant sur ses lèvres avant de venir réclamer la dernière permission et de se clore, lui permettant juste assez de courage pour incliner le visage et venir presser ses lèvres contre les siennes. Brièvement, juste un instant, s’empressant de recueillir sa réaction en ouvrant les yeux. Ce n’était que lorsqu’il avait senti ses lèvres s’étirer en un sourire contre les siennes qu’il l’avait embrassée un peu plus longuement, se laissant l'opportunité de profiter d’un moment qu’il avait souhaité sans jamais oser le penser possible.

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Ces dernières semaines, elle s’était régulièrement surprise à rêver de ce que pourrait être une relation avec Lewis. Elle avait évoqué ses rêveries à Cleo qui lui avait gentiment rappelé qu’elle semblait avoir toujours eu un faible pour le Siede. C’est un fait qu’elle ne peut plus nier. Si longtemps Shiloh a préféré reléguer son attirance pour le jeune homme au second plan, désormais elle a bien du mal à cacher toutes les émotions qu’il fait naître chez elle. Longtemps, elle s’est imaginé que cela ne se jouait que dans sa tête, que Lewis se voulait attentionné et tactile dans le simple but de la rassurer, elle qui s’était montré bien moins avenante que par le passé. Il s’agit néanmoins d’une vérité qui ne colle en rien avec la personnalité du garçon qu’elle a toujours connu, et les récents moments qu’ils ont pu partager l’ont amenée à revoir sa façon de penser. Combien de fois lui a-t-il pris la main en soirée ? Et combien de câlins ont-ils partagé sous le prétexte d’un marathon de films ? Et puis il y avait eu la soirée d’Halloween où Lewis avait tenu à présenter un costume de couple et où de purs inconnus se sont persuadés qu’ils étaient ensemble simplement en les voyant interagir l’un avec l’autre. Elle n’avait pas rêvé tous ces moments et voilà que Lewis lui faisait un cadeau inestimable après lui avoir préparé toute une soirée pour célébrer les fêtes de fin d’année ensemble. Il n’avait pas invité Kendall, il n’avait pas transformé cela en un Noël entre amis et la nervosité dont il faisait preuve venait faire naître un espoir fou chez Shiloh. Celui d’être aimé en retour, pour ce qu’elle est réellement, malgré ses failles et ses blessures. Elle ne remerciera jamais assez Lewis de ne pas lui avoir tourné le dos, d’avoir pris en compte tout ce qu’elle lui avait difficilement confié et d’être d’une bienveillance sans faille. C’est parce qu’il est ainsi qu’elle se sent parfaitement en confiance à ses côtés. Beaucoup de choses l’effraient dans la perspective d’une nouvelle relation amoureuse, mais elle ne peut renier avoir retrouvé à ses côtés, des émotions qu’elle pensait ne plus pouvoir ressentir un jour. Et même si ses propres mains tremblent contre celle de Lewis, elle ne peut que lui affirmer avoir confiance en lui.

« Excuse-moi, d’être aussi bizarre. » Elle ne se serait jamais permise de le qualifier d’étrange, mais il est certain que la tension qui semble s’accroître entre ses épaules réveille une nervosité similaire chez elle. « Je suis nerveux parce que tu comptes énormément pour moi et que je m’en voudrais de pas faire les choses correctement. » Serrant à nouveau ses doigts autour des siens, Shiloh choisit le silence afin de lui laisser toute l’occasion d’aller au bout de sa pensée. Elle voudrait lui rappeler qu’elle a confiance, que même si parfois ils ont encore du mal à bien se comprendre, ils arrivent tout de même à échanger. La preuve lors de la soirée d’Halloween. Oppressée par l’ambiance, elle s’était laissée envahir par de vieux souvenirs qui avaient failli gâcher le début de leur soirée. Pourtant, ils avaient su communiquer et se laisser de l’espace pour mieux recommencer. « Je suis pas fou, au contraire, j’ai eu le temps de réfléchir. Longtemps. » Et pourtant, il paraît tourner en rond. Elle ne lui en veut pas, elle aussi avait eu bien du mal à se jeter dans le vide pour lui parler de son passé et justifier ses réactions au présent. « C’est pas facile parce que j’ai beaucoup à perdre, du genre une amie en or, mais j’ai bien plus à y gagner et de toute façon, j’arrive plus à le cacher. Je sais pas comment formuler ça sans que ça te donne l’impression de devoir t’engager dans un truc que tu maîtriserais pas et je veux que tu saches que j’attends rien, absolument rien de toi en retour. Mais je peux pas continuer à te mentir, Shy. » Soudainement, elle a presque peur de rêver. Pourtant, la chaleur des mains de Lewis ne lui a jamais paru aussi réelle contre sa peau, mais Shiloh attend le pire. Elle qui n’a connu que ça dans une relation. Les battements de son cœur s’accélèrent alors que Lewis bafouille encore légèrement face à elle. « J’ai envie d’essayer autre chose que l’amitié, avec toi. » Nerveusement, elle aurait envie de rire face à la candeur de cette affirmation. Cependant, aucun son ne s’échappe d’entre ses lèvres alors qu’elle observe Lewis se lever pour l’inviter à le suivre. Elle n’est pas certaine d’avoir parfaitement entendu. Elle voudrait se pincer pour s’assurer que tout cela est bel et bien réel, qu’il lui a dit ce qu’il venait de dire et qu’elle n’était pas en train de rêvasser au lieu de travailler. Il s’en charge pour elle en réalité, lorsque sa main trouve sa joue, Shiloh réalise qu’il n’a jamais été aussi proche d’elle. Et lorsqu’elle l’entend rire nerveusement, sa main serre à nouveau la sienne. C’est ce qu’elle aimerait aussi, qu’ils s’essayent à autre chose. Elle aimerait lui dire beaucoup de choses, mais Lewis semble si nerveux qu’elle ne peut que relever la tête pour venir à la rencontre de ses lèvres. La sensation se veut d’abord étrange, un rapide baiser empli de pudeur et d’hésitation. Un instant, Shiloh se recule, cherchant à croiser le regard de Lewis. C’est finalement une sensation électrique qui s’empare d’elle. Jamais personne ne l’avait regardé avec autant de tendresse mêlée à une nervosité qui trahissait son désir de bien faire, de ne rien lui imposer. Rassurer, enivrer par le désir de ressentir encore plus, Shiloh laisse sa main glisser sur la hanche du jeune homme pour mieux rapprocher leurs deux corps et s’embrasser à nouveau. Une part d’elle explose dans une euphorie inexplicable, une petite voix lui hurlant la réalité des choses. Lewis était en train de l’embrasser comme personne ne l’avait fait auparavant. Et s’il prenait un instant, elle est certaine qu’il pourrait entendre chaque battement erratique de son cœur qui galope sous les émotions. Un sourire se dessine sur ses lèvres alors qu’il prolonge le baiser dans un instant qui lui fait tourner la tête. A court de souffle, déstabilisé par tant d’émotions positives, Shiloh se recule d’un pas. Elle se sent rougir et finit par rire nerveusement, se dérobant de son regard en venant se blottir contre lui, posant son front contre son épaule. Il lui faut une seconde pour retrouver ses esprits et relever la tête à nouveau. « T’es pas fou. » Reprenant ses mots, elle lui adresse un sourire en coin alors que leur regard se croise à nouveau. Il n’est pas fou, parce qu’elle aussi avait peur de perdre une amitié si précieuse. Ils étaient sur la même longueur d’onde sans oser se le dire et, au fond d’elle, Shiloh sait qu’elle n’aurait probablement pas trouvé le courage de faire le premier. « J’ai souvent imaginé ce moment. » Elle l’avoue dans un murmure, profitant de la chaleur qu’il lui offre, alors qu’à son tour, elle glisse une main contre sa joue. Un instant, elle l’observe en silence, se noyant dans ce regard empli de tendresse qu’il lui offre sans cesse. Se dressant légèrement sur la pointe de ses pieds, elle vient à nouveau capturer ses lèvres dans un tendre baiser. Elle le sait déjà, c’est quelque chose dont elle aura du mal à se lasser, enivrée par les sensations que ce simple geste lui procure. Mais Shiloh a également conscience de ses limites et, quelque part, elle sait que Lewis également. « Je… Je sais pas à quel point je suis prête pour ça. » Entamer une nouvelle relation, faire pleinement confiance à un homme sur ce sujet. Ce n’est pas ce qu’elle cherche, pas encore, et ce n’est pas un point sur lequel elle a su travailler jusqu’alors. « Mais je sais que je peux pas te mentir en disant que je ne ressens rien pour toi. » Ce serait cruel et affreusement inutile alors qu’elle sait l’importance qu’il a su retrouver dans sa vie. « C’est une grande inconnue, tout ça. » Est-ce qu’il en a conscience ? Mais surtout, est-ce qu’il acceptera de tatillonner à ses côtés ? Elle l’espère, elle en est convaincue même, pourtant son regard trouve celui de Lewis dans l’attente d’une affirmation qui l’aidera à débuter un nouveau chemin de guérison.