HALSEY & CLYDE Don't leave me now Something must've gone wrong in my brain Got your chemical all in my veins Feeling all the highs, feeling all the pain

Univers alternatif #2 › Brisbane, 2020. Une fois de plus, les yeux de Clyde dérivent vers l’écran de son téléphone dans l’espoir d’y voir une minute, une heure supplémentaire s’y afficher. Il ne compte plus le nombre de regards qu’il a lancé à son horloge - habituellement d’une inutilité monumentale - ou à son téléphone, en attendant que l’attente terrible prenne fin et qu’Halsey l’appelle ou frappe à sa porte. Lorsqu’elle est partie la veille, il n’a pas jugé bon de l’accompagner au rendez-vous - car s’il se sent jusque-là capable d’affronter la nouvelle à ses côtés, ils ne sont pas de ce genre de couple collé l’un à l’autre en permanence. Ils ne sont pas un couple, point, et la simple idée de devoir répondre à cette question devant un médecin le rebute suffisamment pour qu’il ne souhaite en aucun cas se mettre dans cette position. Heureusement, la brune ne lui a pas demandé une telle chose, et quand bien même Clyde ne saurait dire si leurs opinions divergent sur le sujet, il n’a pas hésité à prendre la tangente sur ce point-là, dès lors que l’occasion lui en a été donnée. Alors, à défaut, il attend, regrettant presque de ne pas être informé le premier de ce putain de résultat qu’il attend comme le messie et qu’il redoute tout autant. A croire que leurs années passées à flirter avec les limites les rattrapent et reviennent les frapper en pleine gueule : ils sont humains, comme tout le monde, et ont des ratés, comme tout le monde. La réalisation est difficile pour le brun, qui d’une certaine manière s’est toujours considéré comme intouchable, comme si son style de vie le rendait imperméable à ce genre de problèmes qui n’arrivent qu’aux autres. Et pourtant, malheureusement ou heureusement, puisque c’est Halsey, il ne peut fuir comme son instinct lui crie de le faire depuis qu’elle a prononcé le mot ‘retard’. Alors il attend, encore et encore, les yeux dans le vide alors que le dossier sur lequel il bosse reste désespérément ouvert à la même page depuis quinze minutes.

Spoiler:

Il l’entend avant même qu’elle frappe à la porte, la brune, tant Clyde est resté presque figé depuis la veille dans l’attente de ce moment. Le moment de vérité, le vrai, celui qu’ils pensaient avoir alors et qu’il leur a filé entre les doigts. Si Clyde sait pertinemment que cette fois, la prise de sang est supposée ne pouvoir être remise en cause, il est pris d’un doute affreux - cela qu’une fois de plus rien ne fonctionne normalement entre eux. Que pour une raison obscure, le test n’ait pas marché, que le résultat soit faussé, qu’une autre raison les empêche encore de pouvoir retrouver le cours normal de leur vie. L’idée même de faire comme si de rien n’était, si le test s’avérait négatif, est quelque chose qu’il a du mal à concevoir après les montagnes russes qu’ils viennent de traverser, à la fois si proches et si éloignés. Si le test est positif, pourtant, c’est la page blanche qui s’affiche devant lui, bien incapable d’imaginer la suite de son histoire alors même qu’il ne sait pas ce qui a traversé l’esprit d’Halsey à ce sujet.

Pourtant, il s’empresse de lui ouvrir la porte pour faire face à cette nouvelle qui ne les laissera pas de marbre, peu importe la tournure des évènements. Il aimerait pouvoir discerner sur le visage de la brune le résultat et lire en elle comme dans un livre ouvert, mais il n’en a jamais été totalement capable et n’a jamais été moins sûr de rien qu’aujourd’hui. Alors il s’efface de l’embrasure, une main dans une poche et l’autre dans ses cheveux en bataille pour donner l’illusion durant un instant qu’il n’a pas passé la nuit entière à attendre et à penser à elle, à eux, alors que ses cernes parlent en réalité pour lui. "Salut.” Le ton est maladroit, peu assuré - tout ce qu’il n’est pas habituellement. “Ça a marché?” Le doute ne lui va pas au teint, à Clyde, et encore moins au cerveau, alors que ses priorités et ses questions se mélangent à nouveau.

Le sourire de la brune est trop franc pour être porteur d’une mauvaise nouvelle, pas après la manière dont elle a réagi la veille - du moins, c’est ce que Clyde se plaît à penser. Pourtant, il reste dans l’expectative d’une réponse claire et précise, celle qui mettra un terme à tous ces doutes auxquels ils ont été confrontés sans jamais y avoir été préparés, eux qui calculent toujours tout, pourtant. Halsey ne le lâche pas du regard avant de lui tendre une enveloppe que le brun fixe sans comprendre - il ne veut pas lire, il veut l’entendre d’elle, et la brune a intérêt à vite parler avant qu’il n’explose de toutes les émotions contenues depuis la veille. “Oui c’est bon, c’est négatif. Pour de vrai.” Elle est soulagée, cela se voit dans son sourire qui s’agrandit, là où celui du brun reste figé. “Ils m’ont assuré que la prise de sang ne mentait pas et que, comme tu l’avais dit hier, les tests avaient parfois tendance à jouer avec nos nerfs.” Sans le réaliser, Clyde lâche un soupir tandis que ses épaules voûtées se redressent, avant d’accueillir la brune qui vient se fondre dans ses bras sans qu’il ne s’y attende. Depuis quand doit-il y être préparé, depuis quand la sensation de la brune contre sa peau déclenche davantage en lui qu’un sentiment tout ce qu’il y a de plus naturel? Un frisson le parcourt et il tressaille, étonnamment mal à l’aise alors qu’elle relève les yeux vers lui. “Rassuré?” “Ouais.” Évidemment qu’il l’est, car la nouvelle fait redescendre toute la pression et la panique qui pesaient sur eux - et pourtant, quelque chose a changé sans qu’il n’arrive à mettre le doigt dessus. Alors il se détache de la brune, se passe une nouvelle fois la main dans les cheveux comme pour dissimuler son trouble. “J’étais pas prêt, là.” Il ne l’était pas hier mais ne l’est toujours pas aujourd’hui, comme il ne le sera pas demain. “J’espère que ça arrivera plus.” Et pourtant, le doute persistera toujours désormais, et l’idée suffit à le faire frissonner.

“T’étais pas le seul à pas être prêt.” Il hoche donc la tête comme pour lui confirmer qu’il n’a jamais remis une seule seconde en cause la situation de la brune, même si sa réaction première tient de ses pensées à lui. On ne se refait pas, et malgré toutes les années passées ensemble, Clyde en vient toujours à penser à l’impact sur sa vie, avant de penser à leur vie, ou du moins ce qu’ils en partagent. L’important reste que cela n’arrive plus, même si la journée de la veille l’a suffisamment perturbé pour qu’il soit encore figé dans ses gestes face à Halsey, ne sachant plus comment l’aborder maintenant qu’une épée de Damoclès a été agitée au-dessus de leurs têtes. Lorsqu’elle s’approche à nouveau de lui, son regard divague et il ne cherche pas à enfouir son visage dans ses cheveux, cette fois - au contraire, il la fixe sans être réellement convaincu. “Ça arrive les fausses alertes Wakefield et c’est la première fois sur presque dix ans, je pense qu’on s’en sort bien.” “Cette fois.” La pensée lui échappe, et il la regrette presque alors qu’Halsey vient pourtant de lui annoncer une bonne nouvelle, qui ne suffit pourtant à masquer la dure réalisation qu’il a eu au cours des deux derniers jours. Le couperet peut tomber d’un instant à l’autre, et il sait par avance que lorsqu’il s’agit de la brune, il n’est plus tout à fait maître de ses décisions. Alors, s’il devait advenir un jour où une réelle décision serait à prendre, il sait par avance qu’il sera départi de toutes les protections qu’il a érigées si durement autour de lui - et il est hors de question de prendre ce risque, pas maintenant qu’il en a conscience. “A voir ta tête, on dirait presque que tu es déçu.” “Ah non.” Les mots sifflent tandis que ses sourcils s’arquent - non pas qu’il veuille insulter Halsey en craignant une telle nouvelle, mais il n’en a pourtant pas le moins du monde envie. “C’est juste que…” C’est juste que ses pensées s’emmêlent, que ses peurs les plus infondées et les plus enfouies resurgissent et qu’il n’arrive plus à penser de manière raisonnable et sensée. “On fait comme si de rien n’était maintenant, c’est ça?” Il en est bien incapable, et son expression le trahit.

“Tu ne penses quand même pas qu’on va jouer à ça toutes les semaines?” Ses yeux suivent la main de la brune qui se lève brusquement vers la poubelle - cette même poubelle qu’il n’a pas eu la présence d’esprit de vider et qui contient encore l’arme du crime, ou du moins, ces fichus tests qui l’empêchent de penser clairement. “J’en sais rien moi.” Il ne sait pas à quoi s’attendre, après tout - qui serait en mesure d’affirmer qu’ils n’auront pas la malchance d’avoir une peur du genre le mois d’après ou le suivant? Il est loin d’être médecin, et loin de connaître les statistiques, mais tout ce qu’il en retient c’est l’existence d’un risque - et cela, c’est déjà trop à ses yeux toujours bien trop habitués à calculer minutieusement le moindre angle mort de chaque situation. Être pris au dépourvu, il déteste, mais le fait que la brune semble désormais prendre à la légère l’intégralité de ce qu’il vient de se passer suffit à l’agacer encore plus. Après tout, s’il y a bien une personne pour le comprendre et être aussi paniquée que lui à l’idée de risquer une réelle grossesse un jour, il s’agit bien d’elle, n’est-ce pas? Pourtant, elle semble tirer un trait sur la journée de la veille comme si toute cela n’avait été qu’un cauchemar désormais oublié. “Je comprends pas. Je t’annonce une bonne nouvelle et toi tu te braques.” Clyde fixe ses pieds un instant mais voit bien du coin de l'œil la brune qui lève les mains au ciel et tente de comprendre de quoi il en retourne, alors qu’une fois de plus leurs visions s’opposent. Ce ne serait pas la première ni la dernière, mais cette fois, il s’agit d’un sujet bien trop important pour que Clyde le rejette au loin sous prétexte que sa relation avec la brune prend le pas sur la plupart de leurs désaccords. “C’est pas ça, c’est une bonne nouvelle oui.” Oui, mais… “Je peux juste pas me sortir de la tête que ça pourrait vraiment arriver un jour.” Le bébé, le vrai, celui-là même qu’ils ne veulent pas mais qui ne serait pas qu’une simple épine dans le pied, malheureusement. “Je sais pas, je peux pas prendre le risque maintenant que j’y pense.” Il n’est ni heureux ni satisfait de ses mots, Clyde, mais il les pense et sa voix ne tremble pas alors qu’il achève sa phrase, avant de baisser les yeux à nouveau comme pour nier le fait qu’il vient d’asséner un coup à leur relation.

“Tu oublies qu’il y a un truc super qui s’appelle contraception. Et devine quoi, c’est sûrement grâce à ça que l’alerte est fausse.” Elle n’a pas tort, la brune, et Clyde tente de se rappeler cela alors qu’il hoche la tête comme pour lui signifier qu’il a compris - mais que malheureusement, ses peurs les plus profondes semblent resurgir au pire des moments. Il ne s’agit pas seulement d’eux, maintenant, mais de la réalité qui pourrait finir par les rattraper - et y seront-ils prêts un jour? N’est-ce pas une conversation qui mériterait d’avoir lieu, alors qu’ils ont toujours pris le parti de taire les sujets houleux et sensibles tels que celui-là? “C’est trop frais là, j’arrive pas à me le sortir de la tête.” Et contre toute attente, cela l’empêche de prendre la brune dans les bras comme il l’aurait habituellement fait, ou même de l’attirer dans ses draps - il n’en a même pas envie, et il s’agit là de l’indice le plus parlant. “Le risque tout court, ou le risque avec moi?” Il lui a fait l’affront de mentionner quelqu’un d’autre lorsque le test s’est avéré être positif, et maintenant elle lui retourne la question? “Arrête, y a personne d’autre.” Pas hier ni le jour d’avant, et sûrement pas demain - si seulement le chemin qu’ils commencent à emprunter ne réduit pas à néanmoins le semblant de relation qu’ils ont désormais. “Parce qu’est-ce que t’en sais Clyde, tu as peut-être des gamins disséminés au quatre coins de Perth, hein? Puisque ça semble si facile apparemment.” Il secoue la tête, refuse même d’imaginer la possibilité. “Dis pas ça.” Dire qu’il n’en aurait rien à faire d’un gamin qui apparaîtrait subitement dans sa vie serait faux, mais ce n’est pas le coeur du problème. “Les autres c’est pas toi.” En d’autres circonstances, ce serait un compliment ou même un aveu comme il en prononce rarement, mais il cherche désormais seulement à lui expliquer son cheminement de pensée. “Si ça arrive vraiment un jour, je pourrai pas partir parce que c’est toi.” Et parce que partir sans elle n’aurait pas le moindre sens.

“Je sais pas quoi te dire d’autre Wakefield, c’est pas comme si c’était jamais arrivé à personne avant.” Il dodeline de la tête, hoche les épaules, bien à mal d’avouer que lui aussi ne sait plus quoi dire, mais qu’il tente pourtant de se justifier par tous les moyens. Il pourrait partir, ou faire comme de rien n’était et vaquer au reste de sa journée comme si la boule au fond de son ventre n’existait pas, mais il n’arrive tout simplement pas à passer à la prochaine étape de sa vie. De leur vie, il l’espère. Sans doute qu’il est un peu trop pessimiste, le brun, ou un peu trop concentré sur le problème qui n’en est même plus un aujourd’hui, mais c’est plus fort que lui. Il voit bien que la brune s’agace et que ses yeux roulent alors qu’il vient de lui faire l’affront de lui faire croire que son problème, c’est elle - oui, c’est elle, mais pas comme elle le croit, car il n’y a plus personne d’autre désormais. Il ne se rappelle même plus de la dernière fois qu’il a foulé d’autres draps, tant l’évidence qu’il ne veut que frôler ceux de la brune a fini par s’imposer. “D’accord.” En d’autres circonstances ils en seraient rendus à s’avouer l’inavouable et à tomber dans les bras l’un de l’autre, et pourtant Clyde laisse désormais couler ses pensées comme s’il ne s’agissait pas là de ce qu’il a pourtant toujours gardé pour lui. Halsey se détend enfin, le regarde avec des yeux un peu moins durs et un peu plus doux, tandis qu’elle s’approche pas à pas de son corps toujours aussi tendu. “Je prendrais jamais aucune décision sans te consulter, je te ferais pas ça.” Il accroche son regard et se perd un instant dedans, toujours aussi indécis quant au comportement à adopter, alors qu’il se perd entre ses propres peurs et la peur de perdre la brune, sans savoir réellement où se positionner entre les deux. Alors il hoche la tête, car il espère bien là qu’elle est honnête - nuance, il a besoin qu’elle soit honnête, alors il la croit, même si la boule au fond de son ventre est encore bien trop présente. “J’espère, parce que je compte pas partir.” Plus maintenant, alors qu’il l’attire enfin dans ses bras et plonge son visage dans ses cheveux, tous les sens emplis de la présence de la brune qui lui est aussi vitale qu’elle est pourtant si fragile.

Son sourire illumine les traits d’Halsey et son esprit à lui tout à la fois, alors que l’odeur de ses cheveux et de sa peau le rassurent un instant durant lequel il se perd à la serrer contre lui plus fort que de raison. Il a besoin de la sentir là, physiquement, contre lui, de se persuader que ce contact signifie qu’ils ne se perdront jamais et qu’aucune raison ne saurait jamais les séparer. “Moi non plus, je compte pas partir. Pas sans toi.” Il ne quitte le creux de son cou que pour enrouler ses doigts autour des joues de la brune alors qu’elle se relève délicatement pour effleurer ses lèvres, quand il les scelle en l’attirant encore plus à lui. “Ok.” C’est une promesse qu’il sera là pour lui rappeler lors de la prochaine tempête et de la suivante, mais qui n’a pas besoin qu’il ajoute ne serait-ce qu’un mot de plus pour porter en lui l’espoir qu’elle s’y tiendra toujours.

Lorsqu’elle s’écarte d’un centimètre de trop, il laisse sa main collée à sa joue le temps de profiter encore du calme de cet instant suspendu au milieu de tous les autres. “Ça va mieux?” Sa tête dodeline doucement tandis que son sourire s’étire à son tour et qu’il se laisse aller à un deuxième baiser qu’il étire jusqu’à n’avoir plus de souffle, plus de peur, plus de doute, simplement le contact de la peau d’Halsey sur la sienne et les frissons sous ses doigts brûlants. Sa tête se relève alors qu’il s’imagine bien des choses et qu’une moue dépitée et pourtant irrémédiablement amusée s’inscrit sur son visage. “T’imagines si t’avais une fille?” Si on avait une fille. “Ils font des Louboutins pour enfants?” A se demander si la pensée l’effraie ou l’amuse davantage, en réalité.

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