Sofia est blonde, Sofia est triste, Sofia a l'air fatiguée et elle l'est. Et pourtant, que ce soit pour ses patients ou pour son investissement en tant que bénévole dans l'association « Ru for Judy », Sofia réponds toujours présente. Un sourire de façade qu'elle arbore depuis si longtemps qu'elle n'en a sans doute même plus conscience, qu'elle sourit sans sourire, sans joie. Elle est pourtant heureuse d'être là, de donner de son temps pour une cause qu'elle trouve noble et au moins au milieu des bénévoles elle ne se sent pas seule. Elle l'est pourtant mais elle remplit son temps, son emploi du temps pour éviter de ressentir cette solitude. Elle a pensé un temps voir une éclaircie dans sa vie. Le souvenir d'une soirée dont elle n'attendait rien, mais qui avait fini par lui redonner le sourire, par faire battre son cœur un peu plus vite, une soirée qui lui avait fait briller les yeux et le souvenir des centaines de lumières autour d'elle, de ce lieu, de ces glaces qu'elle n'a toujours pas fini de manger, et cette compagnie si agréable de Jackson. Elle a vu dans cette soirée un espoir, elle a cru vivre quelque chose de spéciale, mais la passion du moment s'est visiblement éteinte avec le départ du monsieur dans un autre Pays, un autre continent. Un baiser suivi d'un silence, une soirée suivie d'une absence, et elle se sent perdue désormais quand elle voit Jackson. Elle l'a cherché à la salle de sport, elle l'a cherché à l’hôpital pendant les journées consacrées à l'association, elle l'a cherché tout simplement pour comprendre, pour avoir des explications sur ce silence, sur cette distance, sur ce jeu auquel il a joué avec elle. Mais, rien et elle n'a plus envie de se battre, elle l'a trop fait par le passé. Se donner corps et âme dans une histoire, elle a déjà trop souffert, trop perdu de temps et elle a finit par arrêter. Arrêter d'essayer, arrêter d'y croire, arrêter même d'aller à la salle, arrêter d'y penser tout simplement. C'est ce qu'elle veut croire, elle se voile la face encore, elle est douée pour ça. Pour croire en des choses qui n'existent pas, pour déformer la réalité comme elle le voudrait, pour prétendre aller bien, pour prétendre que ça ne la touche pas, pour faire semblant tout simplement. Faire semblant que tout va bien, qu'elle n'a pas passé des nuits à se questionner en mangeant cette glace qui avait un goût à la fois doux et amère, tout comme le souvenir de cette soirée. Faire semblant que lorsqu'elle le voit elle ne se sent pas à la fois si bien et si mal. Faire semblant de ne pas avoir envie de venir se blottir dans ses bras, faire semblant de ne pas avoir envie de le frapper aussi pour lui avoir donner un moment de joie pour lui reprendre derrière. Il n'a rien promit, ils ne se sont rien promis, mais elle est comme ça Sofia. La soirée qu'elle a vécu a ravivé les rêves de la jeune femme qui ne l'est plus vraiment. L'amour a toujours su lui faire perdre la tête, lui faire perdre la raison aussi. Non, elle n'aime pas Jackson, elle n'est pas amoureuse de lui et pourtant elle est peut-être amoureuse de ce qu'il lui a montré, de ce qu'elle a cru voir ce soir là, de ce qu'elle a ressenti en sa compagnie et la déception, la douleur est présente aujourd'hui. Sofia sait faire semblant, elle sait prétendre que tout va bien quand elle va mal, mais elle ne sait définitivement pas se protéger.

Un début de matinée à travailler, à assurer les séances en chambre avec des patients post-op, une matinée épuisante mais c'est vers 10h son café en main, qu'elle a rejoins l'étage inférieure pour apporter son aide à l'association. Saluant les bénévoles et employés de l’hôpital qu'elle commence à bien connaître désormais, et elle jette un regard autour d'elle pour apercevoir Jackson et Judy, celle pour qui tout le projet a prit forme. Elle les regarde quelques instants avant de détourner son regard pour ne pas avoir à croiser celui de Jackson sous peine de perdre son sourire. Elle rit, elle sourit, elle plaisante avec des collègues et même avec quelques jeunes qui ont tenu à participer aux ateliers de confections d'objets en tout genre. Elle donne le change comme elle sait le faire et peu à peu dans l'ambiance elle n'a plus à faire semblant, elle prends du plaisir à être là. Son rire est plus sincère, plus franc alors qu'elle passe son temps à utiliser ses mains pour autre choses que des séances de kinés. Plusieurs fois, elle regarde en direction de Jackson, de Judy aussi, plusieurs fois elle a envie de se lever, d'aller le voir, de lui demander à quoi rime son comportement, mais elle ne fera pas de scène devant tout le monde, elle ne fera pas de scène tout court parce qu'elle s'en fout non ? Non c'est faux mais tu peux y croire Sofia. Et quand elle relève la tête une nouvelle fois, Jackson a disparu, et pourtant il n'est pas censé passer inaperçu Mills. Au contraire, il est de ceux qu'on remarque tout de suite dans une pièce, il a ce corps, cette prestance, ce charisme, cette force, qui attire le regard. Du moins celui de Sofia. Le cul de l'Australie, c'est pas d'elle mais elle ne pourrait pas réfuter ce surnom qui lui a été attribuée par certaines kinés de l’hôpital. Un cul qu'elle a pu voir de prêt plus d'une fois. Mais il n'est pas là, elle ne le cherche pas vraiment non plus et profite de ce moment pour aller saluer Judy. Elle aussi ça fait longtemps qu'elle ne l'a pas croisé et Sofia s'intéresse sincèrement à l'adolescente dont l'histoire a ému la kiné. En grande discussion avec Judy, les mains occupées à confectionner une couronne de Noël, Sofia relève les yeux et croise le regard de Jackson, juste là, devant elle ou presque. La tête levée vers le corps trop grand et trop musclé de Jackson, elle ne sait même plus comment réagir à cette proximité, à ce contact visuel qui n'a plus le même sens depuis cette fameuse soirée. « Je m'occupe de ça, prend ma place. » Sofia remarque le regard de Jackson, elle remarque le malaise aussi que cette situation crée, et elle baisse les yeux sur sa couronne qu'elle est en train de détruire à force de jouer avec. Silencieuse, elle a pourtant beaucoup de choses à dire, mais elle n'avait pas prévu cette situation. Mensonge ! Elle l'a longtemps prévu, pensé, espéré aussi sans doute. Elle a réfléchit à ce qu'elle voudrait lui dire, aux questions qu'elle aimerait lui poser, aux mots qu'elle voudrait lui dire mais elle ne dit rien. Le silence, elle l'a un peu subit, elle aurait pu le briser plus d'une fois, l'une demander des comptes, elle ne l'a pas fait et elle ne le fera pas aujourd'hui malgré le fait que les mots lui brûlent les lèvres. Ou peut-être qu'elles brûlent d'envie d'autre chose alors qu'elle se retrouve si proche de Jackson pour la première fois depuis la soirée qu'ils ont passé en tête à tête. « Hey. » Hey. Simple, froid, un hey qui sonne presque faux. « Salut. » Tout aussi simple, sans émotion, un simple salut amical, bien loin de l'intention qu'il y avait dans leurs échanges avant. « Tu bosses pas aujourd'hui ? » Voilà ou ils en sont arrivés. Parler de boulot, bientôt ils vont parler du temps, de la météo, de cette actualité dont on sait qu'ils se moquent tout les deux. Du moins pour Sofia. Parce qu'elle a tellement d'autres sujets de discussions à aborder. Tellement de questions à lui poser. « Si, si j'ai fais mes visites ce matin et j'y retourne tout à l'heure, je ne suis pas là très longtemps. » T'en fais pas, tu n'auras pas à supporter ma présence très longtemps. Elle pose sa couronne, tout les éléments qu'elle avait collé ont été arrachés nerveusement par ses doigts trop actifs et qui trahissent de ce sentiment qu'elle ressent. Elle ne saurait pas dire ce qu'elle ressent, mais il est loin ce sentiment de sécurité qu'elle ressentait dans ses bras. « Je me demandais si tu serais là aujourd'hui, j'ai l'impression que tu as disparu depuis quelques mois, même à la salle je ne te vois plus. » Depuis que tu m'as fait rêver, embrassé, depuis que j'ai cru voir en toi quelque chose de plus qu'un ami. Elle essaye de maintenir ses émotions, de garder ce qu'elle ressent en elle et que ça ne transparaisse pas dans ses prises de paroles, mais c'est compliquée pour elle. Elle évite le regard de Jackson, elle évite de montrer que sa présence la perturbe, elle évite de lui donner un quelconque avantage sur elle. « Si ma présence te dérange, c'est ton association je peux quitter les lieux. » Parce qu'elle en est venue à cette conclusion Sofia. Il l'évite, il ne veut plus la voir, et au lieu de lui expliquer, il a décidé de fuir, c'est lâche mais c'est un homme après tout et elle préfère qu'il lui dise si c'est le cas plutôt que de sentir cette gêne constante.

Elle se tient face à lui, une table qui les sépare, qui impose une distance physique entre eux qui rassure quelque peu la kiné. Parce qu'elle ne sait pas ce qu'elle pourrait faire s'il venait à s'approcher d'elle, s'il venait à vouloir la serrer dans ses bras. Ce n'est pas au programme, plus depuis les derniers mois de silence, mais pourtant, face à lui, elle se sent comme projeté en arrière de quelques mois. Quand dans ses bras elle se sentait en sécurité, quand dans ce lieu magique il lui avait redonné le sourire. Ce sourire elle ne l'a plus aujourd'hui et encore moins quand elle le regarde parce qu'il n'y a plus que des doutes, des questionnements alors qu'il est face à elle. Alors, qu'ils se parlent pour la première fois en tête à tête depuis que leurs langues se sont touchées, depuis que leurs lèvres se sont posées les unes sur les autres. Il n'y a pas de baiser, des salutations froides, et une discussion qui tourne autour de leur boulot, parce qu'il faut bien parler, parce qu'il ne peut pas l'ignorer même si elle fait 1m20 les bras levés, elle est là devant lui. « Ouais. J'ai repris le taff. Le planning est chargé en ce moment. » Elle a bien comprit que dans son planning chargé, il n'y avait pas de place pour elle, pas même de place pour un coup de fil alors à quoi bon vouloir s'accrocher à une histoire d'un soir. Au moins, elle ne fut pas un coup d'un soir qu'elle se rassure légèrement même si elle mentirait en disant qu'elle n'en a pas eu envie. « J'ai remarqué ça oui. » Une pointe de tristesse, de reproche aussi dans la voix, parce qu'elle aurait juste aimé qu'il ait au moins une soirée à lui accordé, mais il n'est pas le seul à blâmer. Elle non plus n'a pas cherché à faire les efforts pour obtenir les réponses à ses questions. Elle non plus n'a pas accordé du temps à cette histoire, mais elle l'a dit, elle ne veut plus se battre pour deux, elle a trop donné. De l'eau a coulé sous les ponts, et la marée a emmené avec elle les espoirs de la Shaw suite à leurs soirées. Ou du moins c'est ce qu'elle veut croire. Il ne veut plus la voir, le boulot, elle a déjà donné avec cette excuse et elle accepte l'idée que ce soit sa présence que Mills évite. « Quoi ?! » Elle est surprise, presque plus encore que les gens autour qui relèvent les yeux vers eux. La conclusion semble pourtant logique et elle s'apprête à lui expliquer mais il reprends la parole, plus doucement cette fois, il se penche vers la kiné et cette proximité perturbe Sofia. La dernière fois qu'ils ont été aussi proches, ils se sont embrassés, et si elle voudrait éviter de le regarder, elle n'y arrive pourtant pas. Elle est faible Shaw. Faible face à lui. « Dis pas de conneries, Shaw, j'veux pas que tu partes. » Elle secoue la tête, refusant de croire aux mots de Jackson, refusant de lui montrer que cette discussion la rends vulnérable autant que cette proximité entre eux. « Tu voulais pas que je vienne non plus, j'ai bien vu ta réaction avec Judy, tu n'avais pas l'intention de me parler non ? » C'est bien ce qu'ils ont fait ces derniers temps, s'ignorer, ne parler que pour l'association, ne surtout pas évoquer cette soirée. Et le silence s'installe à nouveau sauf que cette fois, elle n'arrive pas à s'éloigner de lui, même son regard reste coincé dans celui de l'agent. Elle se sent faible, vulnérable, dépassée par la situation et la présence de Mills fout un bordel monstre en elle. Elle lui en veut énormément, elle lui en veut de lui avoir donner un peu d'espoir et de rêve ce soir là, elle lui veut de ce silence, de cette distance, d'être entré dans sa vie et d'en être ressorti presque aussi vite. Elle lui en veut et pourtant elle ne se lève pas, elle pourrait partir, mais elle ne le fait pas et elle le regarde toujours, parce que finalement elle a besoin de réponses.

« Je sais que j'aurais dû t'appeler. » « Pourquoi tu l'as pas fais ? » La question est directe et témoigne du besoin de comprendre de la part de la kiné. Comprendre l'attitude de Jackson, comprendre ses intentions, comprendre ce que ça signifiait pour lui. « J'suis pas un prince, princesse. » Elle secoue la tête, pas convaincu par les mots de Jackson, et pourtant l'entendre l'appeler princesse ne la laisse pas indifférente et ça l'agace encore plus. « Je ne t'ai jamais demandé d'être un prince. » Elle chuchote ces mots elle aussi, osant lui parler, osant lui répondre alors qu'elle apprécie autant qu'elle déteste cette proximité. « C'est toi qui a organisé cette soirée, c'est toi qui m'a donné une raison de croire que tu pouvais être un mec bien, j'attendais rien de toi. » Avant cette soirée, avant ce baiser, avant qu'il ne l'a fasse rêver, elle n'attendait rien. Elle se contentait de rire avec lui, de ces jeux de regards, de défi entre eux. Elle se contentait de mater son corps avec le consentement du Mills qui en jouait aussi. Elle n'attendait rien d'autres jusqu'à ce qu'il la fasse rêver avec cette soirée, jusqu'à ce qu'il se la joue gentleman et prince charmant. « C'était qu'un jeu tout ça pour toi ? » Un jeu pour lequel il s'est pas mal donné lui aussi au vue de la soirée qu'il avait organisé pour elle, et il a tellement bien joué qu'elle a fini par y croire un peu elle, ou par oublié le jeu parce que tout semblait trop beau, mais elle ne lui laisse pas le temps de réponse, elle enchaine autant par peur d'entendre sa réponse que par besoin de s'exprimer elle aussi alors que le silence lui a été imposé par Jackson et qu'elle compte bien lui dire ce qu'elle pense. « J'ai compris que ça ne comptait pas, on s'est rien promit donc y'a pas de soucis, mais explique moi parce que je ne comprends pas pourquoi tu n'as pas été au bout de ton idée ? Tu n'as pas fais tout ça juste pour m'embrasser et m'éviter ensuite non ? » Une seconde, elle a pensé à lui demander pourquoi il n'avait pas baisé avec elle, pourquoi il n'avait pas été au bout de son idée, parce qu'elle est persuadée qu'il a fait tout ça dans ce but, mais il ne l'a pas fait et elle n'y comprends rien.

Une soirée de rêve et depuis des regrets, des questionnements, des doutes et un sentiment de gâchis qu'elle ressent et qui se renforce alors qu'elle se retrouve face à lui pour la première fois depuis que sa porte s'est refermée ce soir là. Elle d'un côté, lui de l'autre, un dernier baiser pour clôturer une soirée dont elle n'avait jamais osé rêver mais qu'il lui avait offert. Une soirée dépassant les frontières d'une amitié, d'un jeu auquel ils avaient prit l'habitude de jouer. Une soirée dont elle garde des souvenirs même si elle n'en sourit plus désormais. Il n'y a plus de sourires, de rires, de jeux de séduction, de défis entre eux, plus rien. Et même leur facilité à se taquiner, à se chambrer semble bien loin aujourd'hui. Il y a uniquement un silence qu'elle s'évertue à couper parce qu'elle a besoin de réponses. Il ne lui a fait aucune promesse, même si sous la lueur des lumières de ce lieu, elle a cru que peut-être leur lien allait changer. Mais, malheureusement pour elle, il a changé oui, mais pas comme elle s'est osée à l'espérer. La chaleur de leurs baisers a laissé place à la froideur de leurs silences, et aujourd'hui elle ne le regarde plus pareil, et lui non plus. Il se tait, et ça par contre, il l'a beaucoup trop fait aux yeux de Sofia ces derniers temps et elle décide de ne pas le faire, d'assumer d'avoir des choses à dire, d'assumer aussi d'avoir besoin de réponses. Elle doit comprendre pourquoi encore une fois elle semble avoir fait les mauvais choix, pourquoi encore une fois elle finit seule, pourquoi encore une fois elle se sent délaissée, pourquoi encore une fois elle a la sensation que l'on s'est joué d'elle. Il ne réponds pas à ses questions, elle ne lui en laisse pas vraiment le temps non plus, n'ayant guère envie de réaliser qu'elle n'a été qu'une marionnette avec laquelle il a joué. Elle est tellement facile à séduire, tellement facile à faire craquer Sofia qu'elle se sent bête d'avoir été aussi naïve, et pourtant elle n'arrive pas à totalement regretter parce que cette soirée fut la meilleure depuis des années, et c'est peut-être ça le plus triste pour elle. Ils ont joué, sauf qu'elle a oublié que c'était un jeu à un moment, et la seule chose qu'elle se demande, c'est pourquoi il n'a pas été au bout du jeu, pourquoi il n'a pas saisit cette occasion pour obtenir ce qu'il était visiblement venu chercher. Pas de l'amour mais une femme facile à séduire, déjà sous son charme, une femme qui aurait pu lui offrir la nuit sans réelle hésitation, mais il n'a pas été jusque là et si elle ne regrette pas de ne pas avoir couché avec lui aujourd'hui, elle ne comprends rien des gestes de Jackson. Elle ne comprends pas le comportement de Jackson, ni ce soir là, ni après, et elle a besoin de savoir. Le silence s'installe, lourd, pesant, froid aussi. Un silence qu'elle ne brisera pas à nouveau mais elle ne partira pas sans réponses et c'est avec son regard posé sur Jackson qu'elle lui montre qu'elle est bien déterminée à avoir la réponse à ses questions. Qu'il ne pourra pas s'enfuir. Enfin, techniquement il pourrait. Il pourrait se lever, lui tourner le dos et partir, il pourrait et elle ne pourrait rien faire parce qu'elle n'a aucun moyen pour l'obliger à s'expliquer et le lieu ne se prête pas à une scène de sa part. Elle n'a pas envie d'en arriver à là de toute manière mais elle espère qu'il ne fuira pas. Son pied tape au sol, pas de talons aujourd'hui, mais l'agacement de Sofia s’entend dans la manière avec laquelle sa jambe bouge sous la table. Le silence est trop long, il est aussi devenu trop courant entre eux et elle ne l'apprécie clairement pas. Elle commence à se résigner, à se dire qu'elle n'aura jamais de réponses, qu'elle ne comprendra sans doute jamais Jackson, mais elle n'a peut-être jamais réussi à comprendre les hommes de toute manière, alors qu'elle ne le comprenne pas n'a rien d'étonnant en soit. C'est frustrant. C'est agaçant. C'est même triste parce qu'elle l'apprécie Jackson, mais elle ne peut pas le forcer à parler même si elle a clairement envie de le faire, elle n'en a pas les moyens. Ni ses questions, ni son regard remplis de questionnements ne semblent faire d'effet, et elle soupire ; fatiguée de se battre pour des choses qu'elle est la seule à vouloir. « J'pense pas qu'on soit faits pour être plus qu'amis, toi et moi. » Il parle enfin, et là encore elle soupire, et cette fois ce n'est pas le silence, mais les mots qui entraînent ce soupir. Au moins il évite le fameux c'est pas toi, c'est moi. Mais elle n'est pas sure d'avoir envie d'entendre le fameux on reste ami? parce qu'elle est un peu déçue en ce moment. Mais les mots de Jackson ne répondent pas à sa question, elle aussi avant tout ça, elle pensait qu'ils n'étaient pas fait pour être plus que des amis, et ça lui allait, jusqu'à ce que ses lèvres goûtent à celles de Mills, son amitié lui allait, alors pourquoi il a organisé cette soirée ? « J'savais juste pas comment te le dire sans te blesser ... et me sentir minable. » Elle secoue légèrement la tête, pas convaincue par l'idée qu'il ne voulait pas la blesser. « C'était dur alors ? Au moins c'est clair maintenant, mais tu sais c'est le silence qui est blessant surtout. » Ce silence, cette distance, faire comme si rien n'avait existé, voilà ce qui a vraiment blessé Sofia. « Mais c'est bien tu l'as dis, tu as été honnête, ça nous aurait sans doute rendu service si tu l'avais comprit avant qu'on s'embrasse, avant que tu t'embêtes à organiser tout ça. » Elle dit que c'est bien, mais sa voix, son attitude prouve qu'elle ne trouve pas ça vraiment bien. « Mais rassures toi, je le pensais pas non plus. Qu'on soit faits pour être ensemble. »  Elle ment, enfin en partie et elle est loin d'être aussi bonne menteuse que lui, mais si elle s'en convaincs peut-être qu'elle pourra le convaincre aussi. Elle n'y pensait pas avant ce soir là. Elle n'y avait jamais cru avant qu'elle le découvre dans son costume, avant qu'elle vive cette soirée à ses côtés. Elle n'y avait jamais cru mais il lui avait donné un motif d'espoir et c'est ça qu'elle regrettait aujourd'hui. Sa propre faiblesse, plus que les actes de Jackson. « Au moins tu t'en ai rendu compte avant qu'on aille plus loin je pense que pour ça, je dois te remercier. » C'est qu'elle deviendrait presque sarcastique la blonde. Mais ce n'est pas tant à lui qu'elle en veut, c'est surtout à elle parce qu'elle aurait du voir, du comprendre qu'elle allait au devant d'une énième déception, elle le savait, elle a fermé les yeux au moment ou il lui a bandé les yeux, elle s'est laissée porter physiquement et émotionnellement, elle s'est laissée avoir par la beauté du lieu, par la beauté de son cavalier, par ses rêves qu'elle peine à faire taire. Elle se sait injuste de lui en vouloir, elle s'en veut autant à elle qu'à lui finalement, elle est aussi responsable que lui, c'est elle qui a rendu tout ça aussi étrange. « Tu voulais pas te sentir minable mais rassures toi, c'est moi qui suis minable parce que j'aurais pu craquer pour toi, j'aurais vraiment pu te donner tellement plus ce soir là et ça montre à quel point je suis minable, à quel point je m'emballe pour rien. Je suis nulle pour ce genre de chose. » Et le fait de l'avouer prouve aussi à quel point elle se sent conne, à quel point elle n'a que peu d'estime d'elle même alors qu'elle réalise qu'elle a eu tout faux. « Mais c'est bon j'ai compris que tout ceci ne représentait rien, mais un conseil d'ami à ami. » Elle insiste sur les mots amis. « Évites d'offrir ce genre de rendez-vous à des amies ça peut vraiment porter à confusions. » Elle s'emballe vite, elle rêve trop, elle le sait mais si de son côté elle s'est encore trompée, elle garde à l'esprit qu'elle n'a pas été la seule à envoyer des signaux dans cette direction et que toute cette soirée était sur mesure pour elle, pour la faire craquer, mais au moins il peut se réjouir d'avoir réussi à la cerner. Mais après ce n'est pas un grand exploit, c'est un livre ouvert Sofia et Jackson a des qualités naturelles pour cerner les gens.

Elle n'a jamais aimé les choses qui se terminent Sofia, et ce même si elles n'ont finalement jamais vraiment commencé. C'est dans sa tête, dans son esprit, dans ses rêves qu'elle se fait que les choses prennent vie, mais le retour à la réalité n'est jamais simple pour elle. Pourtant, elle en a connu des déceptions, mais elle n'est toujours pas capable de cacher ses émotions, de cacher sa déception aussi et encore plus en ces instants ou elle galère avec son moral et ses objectifs de vie qui semblent lui échapper. Encore aujourd'hui, face à Jackson, elle doit gérer cette déception, elle doit accepter l'idée qu'elle a été aveuglée par son envie de trouver l'amour, par son besoin de ne plus être seule sauf qu'elle s'est emballée et c'est Jackson qui doit gérer les reproches de la kiné alors qu'ils ne se sont rien promis, aucun engagement, aucune discussion, juste une soirée, quelques baisers et une ambiance qui a mit du baume au cœur et des étoiles dans les yeux de Sofia. Il l'a fait rêver, il a eu tord et aujourd'hui, il n'y a plus de lumières autour d'eux, plus de glace à déguster, juste un froid dans leurs échanges qui traduisent d'une discussion qu'ils ont trop attendu et des silences qui ont fait du mal. « Arrête. » Elle voudrait arrêter elle aussi, ou plutôt qu'ils n'aient jamais commencé ce jeu parce qu'elle ne sait pas jouer. Elle aurait le savoir, elle aurait du le prévenir. Elle ne sait pas faire semblant, elle s'engage, elle se projette, sans aimer, mais par besoin d'être lié à quelqu'un. Jackson ne le savait pas, Jackson n'a pas à subir alors qu'elle est la seule à ne pas savoir gérer ses émotions et ses rêves. Il est énervé lui aussi, dépité sans doute de devoir subir cette discussion qu'il ne voulait visiblement pas puisqu'il a longtemps évité ce moment. Mais Sofia a des choses à dire, beaucoup trop sans doute et lui n'a pas d'autres choix que d'écouter la blonde parler.

« Merci du conseil. » Elle soupire à la réponse de Jackson, baissant la tête et levant les épaules signe d'agacement. Elle lui a tout dit, peut-être trop, et elle se sent minable désormais alors qu'il semble montrer des signes d'agacement lui aussi. Qu'il semble aussi n'avoir aucune envie de parler plus de cette situation. Ils n'ont pas rompu puisqu'ils n'ont jamais été ensembles et pourtant Sofia se sent comme si elle venait d'avoir ce genre de discussion, celle dont on sait déjà la fin avant le début. Elle le savait aussi pour Jackson, le silence est parfois plus significatif que des paroles, mais pourtant elle ne peut s'empêcher d'être déçue, de ressentir un gros sentiment de gâchis et de honte aussi. Tu t'attendais à quoi Sofia ? Qu'il vienne combler le vide dans ta vie ? Qu'il te donne tout ce dont tu rêves ? Qu'il t'aime comme tu rêves qu'on le fasse ? Elle s'est trompée, et c'est loin d'être la première fois que ça lui arrive, tant pis pour elle, peut-être finira-t-elle par apprendre de ses erreurs, peut-être va t-elle enfin arrêter de croire que chaque histoire est la bonne ? « On s’parle encore ou tu préfères que j'te laisse tranquille ? » Elle a un hochement d'épaule qui s'ajoute à une grimace, elle redoutait cette fameuse phrase j'aimerai qu'on reste ami. Ils étaient amis avant tout ça, ils n'ont jamais été rien d'autres qu'amis finalement alors pourquoi ne le pourraient-ils pas être amis à nouveau ? « J'veux dire ... » Elle est en pleine délibération avec elle même à cet instant précis et Jackson la distrait un peu avec ses paroles. « Regarde-la. » Il attire le regard de la kiné sur Judy, celle avec qui ça a commencé, celle qui sans le vouloir, les a un peu rapproché. Des discussions sur l’association après les séances de kinés, les longues séances de sport pour préparer la semi-marathon de l'association, et aujourd'hui encore c'est grâce à l'association qu'ils se retrouvent. C'est pour elle et pour tout les enfants qu'ils sont la tout les deux et Jackson oblige Sofia à penser à tout ça. « J'veux pas rentrer dans une guerre froide. » Elle est heureuse Judy, et c'est bien la preuve que ça fonctionne, cette association, ce que Jackson a construit pour ces enfants et Sofia ne fera rien pour perturber cet équilibre et cette bonne ambiance indispensable au bon déroulement de toutes les activités faites pour les enfants. « Je ferai rien qui pourrait mettre en difficulté les enfants ou l'association. » Pourtant cette discussion, c'est pendant un temps dédié à l'association qu'ils l'ont donc ça part mal non ? « J'sais que j'assure pas sur le plan perso, mais ce qui s'passe ici n'a rien à voir avec nous. » Il n'y a pas de nous, c'est ce qu'elle veut répondre. Il a été clair la dessus, et elle s'est résignée à cette réalité, la seule qui soit vraie. Mais il a raison, il n'assure pas sur le plan perso, ou plutôt ils n'assurent pas tout les deux mais ce qu'il se passe à l’hôpital n'a rien à voir avec ça. « Tu n'es pas le seul responsable, j'ai pas assuré non plus. » C'est elle qui complique tout, elle qui s'est engagé seule alors qu'ils auraient du le faire à deux. « Il va me falloir un peu de temps mais ma priorité c'est les enfants et je sais que cette association te tient à cœur et tu assures, tu peux être rassuré, je ne gâcherai rien de ce que tu as construit et je veux pas me battre avec toi.. » Elle a besoin de digérer ses déceptions, mais elle sait le faire et ça lui passera. Ca finit toujours par lui passer, elle n'est pas rancunière Sofia, elle a juste besoin de tourner la page. D'oublier cette soirée, cette histoire et d'oublier le goût de ses lèvres et la sensation de sécurité qu'elle a ressenti ce soir là. Elle a juste besoin de temps pour oublier qu'elle aurait pu tomber amoureuse encore une fois. « De toute façon je n'aurais aucune chance face à toi. » Voilà la première blague de sa part, sans rire, mais c'est le mieux qu'elle puisse faire. « J'te présente des excuses. » C'est peut-être facile, mais c'est déjà ça et ça compte pour Sofia, voilà ce qu'ils auraient du se dire au tout début. Désolée d'avoir cru en un nous possible, désolée d'avoir déposé sur toi des sentiments qui n'étaient pas réciproques. Désolée d'avoir cru qu'on aurait pu s'aimer. « Merci d'avoir accepté de me parler, et moi aussi je m'excuse. » Une dernière fois elle lève les yeux vers lui, vers ses lèvres auxquelles elle ne goutera plus, vers cet homme dont elle ne s'autorisera plus à rêver, ni même à regarder. Elle va devoir apprendre à gérer ces moments à deux, réapprendre à rire avec lui sans rien de plus qu'une amitié, elle y arrivera. Peut-être ou peut-être pas mais aujourd'hui, elle a ses réponses et c'est tout ce qui compte pour elle.

Voilà, tout est dit. Tout est fini. Ou plutôt rien n'a commencé. C'est du pareil au même non ? Peut-être qu'elle aurait pu creuser un peu plus. Allez chercher à comprendre pourquoi il a fait volte face, pourquoi il a été distant après avoir fait le premier pas. Peut-être aurait-elle pu se battre pour cette histoire naissante, mais elle n'a été naissante que dans sa tête. Elle le sait, elle en est persuadée et elle en a finit des histoires comme ça. Celle ou il faut se battre pour deux. Celle ou il faut quémander de l'attention. Celle ou elle se sent délaissée et ou elle souffre de cette situation. Elle en a finit avec les histoires qui sont vouées à l'échec, et c'est bien ce que Jackson lui dit là non ? Ils ne sont pas faits pour être plus qu'amis, et elle sait qu'elle aurait du se contenter de ça. Un ami c'est mieux que rien non ? Un ami c'est tout ce qu'elle peut avoir en ce moment, tout ce que Jackson peut lui offrir et elle aurait du savoir s'en contenter pour éviter d'en arriver à cette situation. Note à toi même Sofia : ne pas saboter tes amitiés avec des sentiments merdiques. Elle se le note, elle se le garde en tête, pour autant ni elle, ni moi, n'avons confiance en elle pour se rappeler de ce conseil. Elle aime souffrir visiblement, autant qu'elle aime aimer, et l'un ne va pas sans l'autre mais ils ne vont pas l'un avec l'autre non plus. Deux sentiments que tout oppose, mais qu'elle connait que trop bien parce qu'elle est entière. Trop peut-être. Parce qu'elle s'engage. Trop vite sans doute. Parce qu'elle y croit. Même quand tout lui dit de ne pas le faire. C'est elle, et si aujourd'hui elle se déteste d'être comme ça, même si elle voulait renoncer à l'amour comme elle l'a déjà dit, elle sait que ce n'est pas possible et qu'à défaut de souffrir, elle ne sera jamais heureuse sans amour dans sa vie. C'est triste mais c'est une vérité qui lui fait mal, et aujourd'hui, c'est une vérité qui vient de mettre à mal sa relation avec Jackson.

Elle a ses tords, elle les accepte. La pilule peine à passer, la gorge serrée par ces minutes passées avec Jackson, à à penser à ce qu'il aurait pu être pour elle, et réaliser ce qu'il ne sera jamais. Et si elle peut soupirer, elle n'a guère envie de manger, mais c'est pourtant ce qu'il finit par lui proposer. « Mange avant d'y retourner. » Elle a encore pleins de glaces dans son congel qui n'attendent qu'à être mangé, elles aussi. Mais si elle y pense Sofia, elle ne partage pas sa pensée avec Jackson, parce qu'ils ont décidé de tourner la page, d'oublier cette soirée et d'oublier que c'est avec de la crème glacée qu'ils ont choisi de briser la glace ce soir là. Une distance rompue par un baiser, une danse blottis l'un contre l'autre, et c'est désormais une table qui sépare leurs deux corps. Une table pour mettre une distance physique alors que la distance émotionnelle finira par s'installer. Il le faut, pour elle, pour lui, pour ne pas souffrir plus d'une situation à laquelle ils n'avaient pas pensé alors que leur relation s'en tenait à se taquiner, à suer ensemble à la salle de sport. « Merci. » Voilà tout ce qu'elle est en mesure de dire quand il pousse son paquet de chips devant elle. Elle n'a pas faim, pas envie de manger alors qu'elle n'est clairement pas au top de sa forme, mais elle ne veut pas lui dire, elle ne veut plus lui faire part de ses émotions ou de ses états d'âmes. Il en a déjà supporté assez, alors, en grande fille qu'elle est, elle va attendre d'être seule dans son canapé devant un film triste pour lâcher ses émotions qu'elle refoule désormais pour ne pas paraitre plus pathétique qu'elle ne l'a déjà été. (Oui Sofia imagine les grandes filles faire ça parce que c'est ce qu'elle compte faire elle et en déplaise sa façon très enfantine de percevoir l'amour, c'est une grande fille, pas au côté de Jackson, mais elle n'aura plus à l'être. Elle n'aura plus à se sentir minuscule dans ses bras, elle n'aura plus à se sentir aussi en sécurité aussi dans ses bras.) Des pensées qu'il faudra qu'elle oublie et c'est en retournant travailler, qu'elle va tenter de le faire. Ne plus avoir le corps de Jackson face à elle. Ne plus avoir les souvenirs de cette soirée en tête, ne plus avoir ses lèvres à quelques mètres des siennes, ne plus avoir le regard de Jackson qui se pose sur elle et qui lui donne (donnait) le sourire. Elle a envie de passer à autre chose, d'oublier ses rêves insensés, oublier cette soirée magique, oublier qu'elle est de retour à la case départ, encore seule. Et pourtant entre deux patients, c'est la photo de cette journée, la photo de son chevalier qui vient la porter sur son dos jusqu'à la ligne d'arrivée qu'elle regarde, l'air triste. Elle hésite à plusieurs reprises à la supprimer de son téléphone, et pourtant elle ne peut s'y résigner. Ils étaient amis sur cette photo, amis, complices, peut-être qu'ils pourront retrouver cette amitié un jour. Elle arrive bien à être amie avec son ex-mari alors avec quelqu'un qu'elle a embrassé pendant une soirée, c'est possible non ? Seul le temps pourra lui dire, et c'est avec un autre patient qui arrive et à qui elle sourit, par courtoisie et parce qu'elle est comme ça Sofia. Sourire, faire croire que tout va bien au reste du monde pour finir par y croire elle aussi. Sourire c'est tout ce qu'elle sait faire, alors elle le fait et elle sait qu'elle saura sourire à Jackson plus tard aussi quand ils seront amenés à se recroiser.