Se sociabiliser, voilà qui est bien difficile pour la jeune Blackbird. En venant ici, six mois plus tôt, elle a tout plaqué, ses amis, sa meilleure amie Echo, son meilleur ami Andrew et même ses quelques amis qui lui restaient après qu'elle ait fui l'université. Fuir par amour. S'éloigner pour rejoindre un amour enterré. Qui aurait fait ça ? Elle, pour sûr. Mais elle assume bien le fait de pouvoir donner un nouveau départ à sa vie qu'elle trouvait triste et morne depuis qu'elle s'était aperçue qu'il ne reviendrait pas. Et grâce aux enquêtes de son enquêteur de meilleur ami, elle avait eu vent qu'il était venu s'installer à Brisbane en Australie. Alors, elle avait prit le jet que lui offrait gracieusement son meilleur ami pour son déménagement et elle avait atterri ici, en Australie. Le mal du pays l'avait gagné, mais elle avait réussi à s'acclimater au climat Australien et elle s'était découvert une passion pour le surf. Chose qu'elle n'aurait jamais pensé faire avant. Evidemment. Elle qui avait naïvement pensé qu'elle aurait fini sa vie à Paris, dans un appartement luxueux de la rue Montaigne, elle était en Australie. Célibataire. Et terriblement seule.

Dans ce bar qu'elle connaissait de nom, elle pouvait être elle-même, danser comme une petite folle sans que personne ne la pointe du doigt, elle pouvait laisser sa quête de directrice des lignes éditoriales de côté pour n'être que la jeune fille de vingt-sept ans qu'elle était habituellement. Fille de vingt-sept ans qu'elle détestait parce qu'elle était devenue comme une de ces filles qu'elle haïssait, la fille qui s'oublie dans les draps, dans les bras d'un autre pour pallier au manque de l'être aimé. Mais elle mettait un point d'honneur à ne plus être une de ces filles là, le temps de se recentrer sur ses priorités. Et danser sur cette piste était peut-être la meilleure des choses à faire après avoir bu un sex on the beach au bar. Un verre d'alcool, de la bonne musique et voilà, l'affaire est réglée. Alors qu'elle dansait comme une petite folle, elle ne faisait pas attention à la personne derrière elle, et elle bousculait ce brun qui ne semblait pas enclin à accepter ses excuses mais il l'embrasse sur la joue et ils continuent de danser un temps, s'accordant sur le rythme de la musique. Jusqu'à ce que l'inconnu l'attire jusqu'à une table libre. Bon. Il fallait qu'elle reste raisonnable, mais elle lui devait bien ça, après l'avoir bousculé. Elle s'installe en face de lui et elle sourit bêtement, naïvement

-Tu veux boire quoi ? Je te paye … Moi c’est Alejandro au fait et toi tu t’appelles comment ?
- Euh, je ne sais pas, un virgin mojito ! L'alcool j'en ai pas trop envie ce soir. J'ai envie de me rappeler de cette soirée. Et je m'appelle Solveig ! Enchantée. Mais tu n'es pas obligé de me payer mon verre tu sais.

Comme à son habitude, Solveig n'aime pas qu'on lui paye ses consommations, elle préfère ne rien devoir à personne, surtout pas à un inconnu qu'elle vient à peine de rencontrer. Ne sait-on pas ce qu'il a derrière la tête.

Comment avait-elle fait pour que sa vie change du tout au tout ? Elle qui se respectait, qui n'avait pas envie de se réveiller, la tête dans le brouillard, avec un inconnu à ses côtés, elle était devenue l'un de ses filles qu'elle déteste. Mais elle n'avait plus rien, plus d'attaches. Et c'était certainement le mieux pour prendre un nouveau départ. Et elle en avait eu besoin, de ce nouveau départ. De remettre sa vie sur les rails. De remettre le wagon sur les rails d'une vie totalement normale. Elle avait réussi en quelques sortes, en obtenant ce poste dans les bureaux du journal de la ville. Et elle était plutôt fière d'elle, elle espérait que sa mère était fière d'elle, de là où elle était. Sa mère lui manquait tant, et elle passait parfois ses nuits à se demander ce qu'elle lui dirait si elle était près d'elle, si elle était venue avec elle en Australie si elle n'avait pas eu cette putain de crise cardiaque qui lui avait mis les pieds dans le cercueil. Elle ne s'en était pas vraiment remise, mais elle vivait avec sa mère dans ses pensées et elle se disait qu'elle était sûrement mieux où elle était. Mieux là que dans un monde où son mari était devenu l'un des pires mafieux des Etats-Unis et qui avait voulu séparer sa fille de l'homme qu'elle aimait. Homme qu'elle avait fini par quitter de toutes façons.

Mais là, dans ce bar, elle se sentait elle-même, elle n'avait pas trop bu. Alors elle allait forcément se souvenir de sa soirée demain matin. Et elle n'était pas enclin à compter les mojitos qu'elle avait ingurgité, vu qu'elle n'en avait pas bu et que de toutes façons, elle n'avait bu qu'un seul et même cocktail. Jusqu'à ce que cet homme vienne l'accoster pour l'emmener à une table libre et lui proposer un verre. Elle n'avait pas refuser, elle ne voulait pas le faire, après tout les consommations gratuites ont meilleur goût que celle que l'on se paie soit même, c'est bien connu.

-Je ne me sens pas obligé mais fait comme tu veux je ne souhaite pas te forcer et je préfère moi aussi me souvenir de ma soirée afin de ne pas faire de bêtises

Il semblait être un homme respectable, et il fallait dire que cela ne courrait pas les rues. Elle n'était donc pas tombé sur l'un de ces types qui pensent avec le cerveau du bas et qui insulte les files quand elles osent leur dire non. Cela lui faisait du bien.

- C'est sûr que c'est mieux que de se réveiller le lendemain, avec une fille nue à ses côtés et se demander si on a commis l'impardonnable, l'irréparable sans s'en souvenir vraiment.

Cela ne lui était arrivé qu'une seule et unique fois, quand elle était encore aux Etats-Unis, et depuis qu'elle était ici, elle se souvenait de la plupart des hommes avec qui elle avait couché, bien qu'ils ne soient pas des plus nombreux. Elle commençait à s'ouvrir peu à peu, laissant tomber le masque, les protections qu'elle s'était obligée à revêtir pour ne pas tomber sur un connard fini.

-Enchanté de te connaitre aussi Solveig. C’est d’origine grec non ? Je suis désolé je suis perdu un peu là-dessus
- Non, c'est d'origine Scandinave ! Mais je ne pense pas que ma mère se soit soucié des origines de mon prénom quand elle a voulu me le donner

Un petit sourire plus tard, elle sentait ses joues qui étaient en train de s'empourprer et elle détestait cette façon qu'elle avait de rougir pour tout et rien. C'était l'une de ses caractéristiques physiques qui lui donnait envie de se claquer la tête contre un mur. Quand elle voit les consommations qui arrivent, elle a l'impression que son corps hurle à la soif. Elle attrape le verre que lui tend la serveuse et trinque avec son acolyte du soir.

-Santé et à nous !
- A nous !

Cela lui paraît étrange de prononcer cette phrase, mais elle s'en fiche un peu. Après tout, elle est bien là pour profiter et pas pour autre chose. Profiter de cette soirée qu'elle aurait trouvé ennuyeuse s'il n'était pas intervenu, certainement.

- Et, tu fais quoi dans la vie ? Si ce n'est pas trop te demander, et si ce n'est pas indiscret.

Après tout, elle aimait savoir avec qui elle discutait et elle était persuadée que l'homme en face d'elle était un peu le même genre de personne.

Quand on souhaite être respecter, il faut déjà se respecter soi-même. Si la jeune rousse pouvait avoir un crédo ce serait certainement celui ci. Après tout, quand quelqu'un ne se respecte pas, comment veut-il que les gens le trouve respectable ? Ca pourrait faire un bon sujet de philosophie ça. Toujours est il que la jeune rousse ne veut pas que les hommes la voient comme une fille facile, une fille qui couche sans se faire payer et qui est facile à avoir. Même si parfois, quand elle en a marre d'être bien sur elle, elle couche plus aisément, en ce moment, elle n'en a pas envie. Elle a envie que les gens la respectent pour ce qu'elle est. Et puis même, comment Dean prendrait le fait de savoir qu'elle s'est fait sauter par la moitié de la ville ? Déjà qu'avant, il avait mal prit le fait qu'elle ait comblé son absence avec l'un de ses amis à elle, alors qu'il n'était même pas ensemble. Elle n'osait pas s'imaginer ce qu'il en serait aujourd'hui. Elle n'est pas non plus du genre à imaginer de quoi sa fin de soirée sera faites et c'est peut-être mieux comme ça, c'est toujours mieux de ne pas savoir, de vivre avec la peur -ou non- de l'inconnu. A sa réflexion sur le trou noir des lendemains de soirée, Solveig peut voir qu'il rigole et elle ne peut s'empêcher de rire à son tour. Elle était tellement bon public qu'elle avait peur qu'il la perdre pour une dinde qui riait à la première blague.

-Oui c’est clair, mais ça ne m’est jamais arrivé contrairement à ce que l’on pourrait penser. Et ne me dis pas que tu ne le pensais pas car c’est souvent le genre de chose que l’on se dit lorsqu’on me voit. Malheureusement mon physique parle pour moi et pas tout le temps en ma faveur …
- Figure toi, que je ne me disais rien en te voyant. Pas même un "wahouuu il est trop canon celui-là." Non, vraiment. Enfin ! Je ne dis pas que tu n'es pas beau hein, ne te méprends pas !

Elle devenait un vrai moulin à paroles quand il lui posait des questions sur les origines de son prénom vantant les mérites de sa défunte mère. Elle souriait quand il lui parlait d'elle, mais elle ne prenait pas la peine de répondre, même si elle était décédée depuis deux ans, elle n'arrivait toujours pas à en parler sans avoir l'impression que sa terre s'arrêtait de tourner. Puis le moment gênant du rougissement arrivait et elle ne savait pas vraiment où se mettre, le silence était gênant, la conversation n'avait pas pris une tournure où elle pouvait se raccrocher à ses derniers mots comme à une bouée de sauvetage, alors elle se décidait à lui demander ce qu'il faisait dans la vie. Ils apprenaient à se connaître non?

-Non ne t’en fais pas ce n’est rien. Et bien je suis coach sportif dans ma propre salle de musculation et toi qu’est ce que tu fais ? Parle moi un peu de toi ça m’intéresse

Devait-elle mentionner Dean ? Non. Elle le ferait fuir, et elle passerait pour la fille encore accrochée telle une moule à son rocher à son ex. Alors non, elle parlerait simplement des choses qui la rendaient heureuse en dehors de Dean. Buvant une gorgée de son cocktail en posant ses yeux un peu partout dans le bar, elle recentrait son regard sur le jeune homme qui lui faisait face, le détaillant quelque peu avant de se mettre à répondre

- Et bien, je suis journaliste. Plus précisément directrice des lignes éditoriales, mais j'écris des articles aussi. Puis je tiens un blog à côté, ça me permet de me faire un petit complément de salaire. Et en dehors de mon boulot, je m'occupe de mon chien, Clyde et de mon chat Peluche. Les deux amours de ma vie.

Elle parlait de ses animaux comme ci c'était la prunelle de ses yeux, et c'était un peu le cas. Elle avait rabattu l'amour qu'elle avait eu le temps de quelques semaines pour l'enfant qu'elle portait sur ses animaux et elle savait qu'elle leur devait une fière chandelle. Même si peu de personne la comprenne, elle savait qu'eux la comprenait.

- Je me permet !

En riant, elle attrapait doucement la bière de son compatriote de la soirée et elle en buvait une gorgée, avant de reposer le verre et d'ajouter simplement

- ça va, t'as de bons goûts en bière !

Il ne faut jamais se fier à sa première impression et heureusement que sa mère lui avait appris cela parce que sinon, elle n'aurait jamais daigné discuter avec ce jeune homme qui semblait avoir un potentiel intéressant. Pas dans le sens, qu'elle pourrait le mettre dans son lit, non, mais plutôt dans le sens où elle se doutait qu'il avait des sujets de conversations plutôt intéressant et qu'il  n'était pas du genre à parler de foot ou de sexe à tout bout de champ -vive les clichés-. Non elle se mettait à penser qu'il était assez intelligent pour pouvoir parler de tout et de rien sans avoir à étaler sa culture comme un imbécile peut étaler de la confiture sur une tartine.

-C’est cool, je préfère que ça soit comme ça, et ne te justifie pas c’est pas grave. Tu ne me dois rien et tu penses ce que tu veux de moi à tous points

Et le fait qu'il se mette à rigoler, lui fait devenir un peu plus à l'aise sur le sujet, sur la suite de cette conversation qu'elle trouvait intéressante malgré tout. Elle n'aimait pas se justifier ce qui tombait agréablement bien et heureusement qu'il l'autorisait à ne pas le faire. Cela l'aurait bien embêter.  Et oui, jusqu'à preuve du contraire, elle pouvait encore penser ce qu'elle voulait. Même si elle était forcée de constater qu'elle devait paraître sociable et civilisée, elle n'aimait pas vraiment parler d'elle. Elle n'aimait pas se dire que les gens la connaissaient et qu'ils pouvaient se servir de ce qu'ils savaient d'elle pour lui porter préjudice. La paranoïa était un état d'esprit qu'elle détestait mais elle était forcée de constater que les gens pouvaient être mesquins et fourbe quand il s'agissait de descendre une personne.

-Journaliste c’est intéressant, j’ai toujours aimé ce monde là bien que parfois agaçant pour les concernés. Donc peut être que tous les matins je te lis sans m’en rendre compte. C’est pas beau tout ça ? Et j’aurais aimé avoir des animaux moi aussi, mais malheureusement personne ne m’aime … Tu penses pouvoir le faire ?
- T'aimer ? Je pense pouvoir t'apprécier déjà et crois moi c'est un bon point.

Non, elle ne pouvait aimer personne. Son coeur était épris de la plus belle et douce des façons par Dean, même si rien n'était comme avant, elle ne se voyait plus conjuguer sa vie à la deuxième personne du pluriel avec une autre personne, une personne qui n'était pas Dean. Elle se décomplexait tout de même en lui piquant son verre de bière pour en boire une gorgée. Elle qui n'aimait pas spécialement la bière, elle la tolérait. Elle le laissait attraper sa boisson après tout, ele venait bien de faire la même chose.

- Je ne suis pas fan de mojito mais peut être que boire après toi ça va changer les choses
- Peut-être qui sait !

Elle trouvait sa réflexion complètement absurde mais elle ne disait rien. Comme si cela pouvait changer certaines choses. On aura tout entendu, mais elle ne prêtait pas attention à cela, elle s'en fichait un peu à vrai, il l'occupait plus qu'il ne la dérangeait. Visiblement, il ne tolérait pas le mojito. Tant pis. En même temps, il n'y avait pas d'alcool dedans, vu que c'était un virgin mojito mais elle avait tenté.

-J’aimerais bien dire l’inverse mais je ne te laisserai pas choisir mon cocktail. Mais je ne doute pas que tu as d’autres talents

Oula, cette conversation devenait franchement gênante pour la jeune rousse, mais elle ne montrait pas son mal-être. Enfin, sa gêne, plutôt. Elle déglutissait difficilement. Elle se trompait peut-être sur ses intentions. Quoique.

- Mes autres talents ? Je cuisine trop bien paraît-il, ma spécialité c'est les lasagnes de légumes. Après j'ai du talent pour la peinture, j'ai même tenu une galerie d'art en parallèle de mes études quand j'étais aux Etats-Unis, j'écris aussi. Après je ne pense pas être la plus talentueuse de la ville, ça se saurait.

Elle souriait alors, reprenant sa paille pour avaler quelques gorgées de son liquide non-alcoolisée. Elle n'aimait pas parler d'elle, mais elle n'aimait surtout pas les allusions qu'il proférait. En temps normal, cela ne l'aurait pas déranger, mais là, non. Elle n'arrivait pas à les supporter. Peut-être qu'elle n'était pas dans la bonne période. Sûrement.

Elle qui ne sortait quasiment jamais quand elle était aux Etats-Unis, elle avait fait un grand pas dans sa vie en s'ouvrant un peu plus aux autres en arrivant en Australie. Elle avait gagné en assurance et n'était plus le petit oiseau enfermé dans une cage de quand elle était jeune, ou même quand elle était encore étudiante deux ans plus tôt. Elle pouvait se féliciter elle-même d'avoir osé un de ces soirs sortir alors qu'elle n'en avait pas envie, trop occupée à noyer son désespoir dans la crème glacée et les séries télévisées.

Elle se sentait un peu bête de se dire qu'il la draguait alors que c'était peut-être tout le contraire. Elle n'arrivait pas encore tout à fait à discerner les paroles des hommes vu que la plupart du temps quand elle sortait, elle avait dans l'optique de rentrer accompagnée, mais pas ce soir, pas en ce moment, elle n'en a pas envie, elle veut juste un peu de compagnie le temps d'une soirée.

-Non mais par aimer je voulais dire apprécier. Je te connais à peine donc bon …
- Désolée, je ne voulais pas dire ça, j'ai un peu de mal à me faire comprendre et j'ai surtout un peu de mal à comprendre les paroles des hommes en ce moment, c'est de ma faute.

Voilà qu'elle s'excusait maintenant, encore une grande première, elle ne se serait pas excusée dans d'autres circonstances, mais il faut croire qu'elle avait vraiment envie de cette compagnie ce soir. Peut-être pour ne pas ruminer l'autre soirée avec Dean où ils semblaient si proche mais à la fois si éloigné. Leurs esprits en communion mais leurs corps distants. C'était sûrement cela. Mais après les excuses, elle tentait de s'ouvrir un peu plus en lui piquant sa bière et en lui offrant son cocktail, cocktails qu'il ne semblait pas apprécier à sa juste valeur. Tant pis pour lui et tant mieux pour elle, elle en aura beaucoup plus. Lorsqu'il lui parlait de ses talents, elle ne comprenait pas le sens de sa question mais en profitait pour faire l'éloge de sa cuisine et de sa peinture. Chose qu'elle n'avait pas faites depuis un moment, une nouvelle fois.

- Trop bien carrément ? Tu n’as qu’à faire un concours de cuisine. Tu passerais à la télé et tu pourrais t’ouvrir à une autre carrière et te faire connaitre dans tout le pays. Tout ce qui est au rapport artistique en fait tu as une certaine facilité si je comprends bien. Pour ma part mon âme d’artiste s’est éteinte très tôt.
- C'est, c'est mon ex qui me disait ça quand je cuisinais pour lui. J'aimerais bien tenter un concours de cuisine mais je pense que cela ne me plaîrait pas autant que je ne le pense ! Ah oui ? Tu sais l'âme d'artiste elle est toujours la, dans un coin de la tête. Si tu veux, tu pourrais passer chez moi un de ces soirs pour peindre ! J'ai des toiles vierges à mon appartement, et si c'est plus le dessin ton truc, j'ai pleeeeins de matériel pour que tu puisses dessiner convenablement.

Elle lui souriait, ça lui plairait d'avoir un peu de compagnie autour que Clyde et Peluche. Mais elle ne savait pas comment il pourrait interprété cela.

- Enfin, si tu veux, je ne te force pas la main !

Et un nouveau sourire, à croire qu'elle avait branché sa vie sur le mode sourire automatique

L'amour ça te prend à la gorge, ça te donne des papillons dans le ventre quand tu sais que la personne t'aime, ou alors ça te donne l'impression d'avoir de la glace pilée dans l'estomac quand tes nuits se combinent à des insomnies assassines qui te donnent envie de réfléchir au sens de la vie, à ton futur et ton passé, laissant ton âme qui vagabonde à travers des images que tu te répètes en boucle. C'est ce qu'elle fait la jeune rousse, quand elle ne parvient à trouver le sommeil, quand Morphée n'est pas décidé à l'accueillir dans ses bras. Elle pense, encore et toujours à la même personne et elle ne trouve pas le sommeil, alors elle se lève, elle écrit ou elle peint. Peinture teintées de couleurs sombres, couleurs qui lui rappellent que le bonheur ce n'est sûrement pas pour maintenant. Couleurs qui lui rappellent inlassablement qu'il faudrait qu'elle songe à tourner la page une bonne fois pour toute. Qu'elle referme le livre une bonne fois pour toute.

Des spécimens difficiles à cerner ? Peut-être, et c'est sûrement vrai. Elle ne se comprend pas elle-même alors elle ne peut que valider ce qu'il vient de dire, cependant, elle ne le valide pas à voix haute et se contente simplement de lui offrir un grand sourire pour lui dire qu'elle acquiesce ses dires, les gestes, les mimiques du visage sont bien aussi pour se faire comprendre. La proposition de faire un jeu télévisé, un concours culinaire ne la tente pas plus que ça, elle sait qu'elle n'aimerait pas que les caméras soient braqués sur elle. Déjà lorsqu'elle exposait de temps à autre, elle ne supportait pas que l'attention lui soit toute réservée alors, faire une émission devant des milliers de téléspectateurs, merci mais non merci.

-Je ne mets pas sa parole en doute ne t’en fais pas. Tu n’aimerais pas l’ambiance ? Le fait qu’il y ait trop de pression et compétition ce qui pourrait te casser dans ton plaisir de cuisiner ? Ah oui ? Dans ce cas chez moi elle est vraiment bien enfouie car je t’assure que c’est le néant total
- Non je ne pense que pas que cela me plairait de me dire que je suis épiée par des milliers de téléspectateurs, et même, je n'aime pas trop les caméras. Je suis sûre que le néant total reviendra une fois que tu seras devant une feuille vierge ! Parole de peintre et d'ancienne galeriste !

Elle parle trop la rousse, elle n'attend même pas qu'il réponde à sa proposition et elle se demande si son silence n'en dit pas trop sur ses intentions, peut-être qu'il va refuser, après tout c'est son droit. Elle continue de sourire, un petit sourire franc et sincère et elle remarque qu'il sourit aussi. Peut-être qu'il fait exprès d'attendre pour la faire le supplier, poireauter ou quoi ou qu'est-ce. Elle trouve le silence gênant jusqu'à ce qu'il finisse par répondre.

-Non mais vraiment pourquoi pas et je pense que ça ne me fera pas de mal et qui sait peut être que grâce à tes aides précieuses je deviendrai le futur Picasso des temps modernes … enfin ne nous emballons pas trop non plus.

Elle tape alors frénétiquement des mains en riant avant de rétorquer :

- Trop chouette ! Et si jamais un jour je réouvre une galerie d'art, je t'exposerais en premier ! promesse de Solveig !

Elle continue de rire avant de finir son cocktail d'une traite, comme si elle avait soif et elle le voit qui dépose sa bière au milieu. Est-ce une invitation au partage ? Sûrement. Elle attend quelques secondes avant de déposer sa main sur le pichet et elle sent la main chaude de son interlocuteur qui est sous la sienne. Elle rougit alors, cette capacité de rougir si facilement l'ennuie terriblement et elle met quelques minutes avant de réaliser et de retirer sa main et de la poser à plat sur la table. Main qui ne tarde pas à être rejointe par celle du brun, ce qui accélère stupidement les battements de son coeur.

-Je t’en prie prends et fais toi plaisir va

Elle ne peut s'empêcher de sourire, encore et toujours en lui prenant quelques gorgées de sa bière avant de jeter un oeil autour d'elle, elle ne prend pas assez le temps d'analyser les endroits où elle se trouve, et elle ne s'était pas rendu compte que le bar était encore plus bondé que tout à l'heure.

-Tu veux aller danser ? Ou fumer ?

Elle plonge son regard dans les yeux du jeune homme avant de passer une main dans ses cheveux. Elle ne fume pas, du moins, elle ne fume plus alors la seule proposition reste la danse. Mais elle a mal aux pieds avec ses talons. Bon. Tant pis. Elle lui attrape alors la main et l'entraîne sur la piste de danse, se collant à lui sans vraiment trop le faire, gardant une distance raisonnable entre leurs deux corps pour qu'il ne pense pas à mal. Rapprochant son visage de l'oreille de son partenaire de danse elle se permet de rajouter

- Je ne fume plus pour informations, alors je préfère danser et il paraît que c'est un de mes talents, mais je danse mieux quand je fais le ménage. C'est plus marrant.

Et elle attrape alors la main d'Alejandro pour faire le tour d'elle-même, se retrouvant alors son dos contre son torse, se déhanchant sur le rythme endiablé de la musique qui est diffusé dans ce bar qui devenait au fur et à mesure de la soirée, un de ces endroits préférés.

Parler de Dean avec un inconnu ne lui fait plus de mal. Elle qui avait bien du mal à prononcer son nom ou son statut, elle a l'impression d'être guérie. Six mois plus tôt, elle aurait même parler à demi-mots de lui, elle aurait eu cet éternel pincement au coeur mais désormais, ce n'est plus le cas. Et elle est assez heureuse de se dire qu'elle a fait son petit bonhomme de chemin toute seule sans l'aide de personne. Elle s'est rendue compte que cela ne servait à rien de se rendre malade pour quelqu'un et elle était assez heureuse du chemin qu'elle avait parcouru. Elle était tellement fière d'elle, qu'elle aurait pu le crier au monde entier.

-C’est vrai que ce n’est pas évident d’être filmé. Je te fais confiance mais si jamais c’est une catastrophe et que tu te moques de moi, je t’assure que je me vengerai à ma façon
- Ah oui ? J'aimerais bien voir cela tiens !

Elle qui était assez douée en matière de vengeance, elle aimerait bien voir ce qu'il ferait. Elle a toujours de la suite dans les idées quand il s'agit de se venger des gens qui lui ont fait du mal. A première vue, on pourrait ne pas penser qu'elle est comme ça, mais pourtant oui. Elle peut-être très mauvaise quand il s'agit de vengeance. Mais elle s'adoucit forcément quand on parle d'art et elle pourrait en parler des heures durant, la nuit ou le jour, qu'importe.

-Dans ce cas si j’ai ta parole ça me va … mais me déçoit pas car tu pourrais le regretter de me voir afficher dans la galerie du rival
- La galerie rivale ? Personne ne rivalise avec moi monsieur !

Un peu de prétention ça ne fait pas de mal, et elle sourit pour lui montrer qu'elle n'est pas sérieuse, elle ne veut pas qu'il la prenne pour quelqu'un de snob, quelqu'un qu'elle n'est pas. Puis vient le moment de la gênance totale quand elle dépose sa main sur celle du jeune homme et qu'il pose la sienne par la suite sur celle de la jeune rousse. Bon, y'a pas mort d'hommes non plus, mais elle trouve cela extrêmement gênant mais elle n'en fait rien. Peut-être que ça ne se reproduira pas. Heureusement que l'instant gênant ne dure pas mille ans et qu'il lui propose de danser parce qu'elle n'aurait pas su aligner deux mots. Solveig et la gêne ne fait pas bon ménage. Pas bon ménage du tout. Lorsqu'elle se retrouve sur la piste de danse, elle tente de montrer ses talents de danseuse et l'image d'une soirée endiablée avec Dean lui revient en mémoire mais elle l'efface assez rapidement.

-Je ne fume pas moi mais je ne savais pas pour toi. Je préfère danser et j’espère que tu vas me montrer ça dans ce cas. Il parait que je me débrouille plutôt bien aussi alors pourquoi ne pas danser ensemble ?
- Dansons ensemble alors.

Et c'est parti, les pas s'enchaînent, elle collée à lui, dansant lentement mais au rythme de la musique sans vraiment avoir d'arrières-pensées, elle ne pense à rien, tout simplement. Juste au son de la musique qui émane des enceintes et elle ferme les yeux pour s'imprégner de la musique. La main d'Alejandro sur sa hanche ne la dérange pas le moins du monde, et quand elle sent les lèvres du jeune homme contre son cou, elle ne dit rien, mais s'arrête un millième de secondes avant de recommencer à se trémousser doucement contre lui.

-C’est vrai que tu danses bien … je confirme
- Je te remercie, tu es un partenaire assez doué !

Elle continue en se retournant doucement, entourant la nuque du jeune homme de ses bras. Elle n'est plus vraiment maîtresse d'elle-même mais elle préfère ne pas penser que des gens peuvent la regarder. Elle veut simplement être celle qu'elle est d'habitude, qu'importe ce que les gens peuvent penser, qu'importe ce que les gens peuvent dire.