Anecdotes

God Bless the Queen.
For the Kingdom of God.
Too young to be old.
Happy New Year (2024).
Love is Love.
For better or worse.

Campagne Gibson

Cette campagne publicitaire est constituée de 4 supports :
- Un spot commercial, court, grand public et diffusé dans les cinémas ainsi que sur les chaînes de télévision internationales afin de promouvoir la nouvelle guitare de la marque.
- 3 clips, version longue, compilés en édition DVD collector et parus sur Youtube en même temps que la sortie du dernier album d'Hurtwave.
Carmine en est le réalisateur.

#.1 - La légende. - 25 novembre 2023
#.2 - Le mythe. - 2 décembre 2023
#.3 - L'homme. - 25 décembre 2023

Moodboards

The Gentleman.
Cavendish London.

Carmine traversait la pièce, son habituelle tasse de thé à la main, lorsque l'annonce lui tomba dessus, pour ainsi dire littéralement. Le téléviseur du salon, laissé allumé par Connor avant que ce dernier ne parte prendre sa douche dans la salle de bain, fut le messager de la triste nouvelle. En attendant le flash info, l'anglais laissa choir sa boisson dans un bruit de porcelaine éclatée au sol. Le mannequin à la démarche parfaite venait de vaciller sous le choc. « Connor ! » Avait-il appelé à travers la villa, incapable de digérer seul cette bombe médiatique. « CONNOR ! » Il était rare d'entendre Carmine crier. Un Cavendish ne crie pas, il sait se faire écouter. Seuls les rustres ont besoin d'élever la voix.

Son cousin le rejoignit d'un pas précipité. Il était en peignoir, avait les cheveux humides ainsi qu'un air inquiet. Que pouvait-il bien arriver pour que Carmine se montre aussi fébrile, chaviré dans le canapé tel un bateau à la dérive, une main sur le cœur et le teint pâle ? « Elisabeth ... » Sanglota le Britannique, ravalant ses larmes pour sauver la face tandis que son doigt pointait l'écran. « Sa majesté ... » Dévasté, incapable d'en dire davantage, il tendit les bras en direction de Connor. Un câlin ; il lui fallait au moins ça pour surmonter l'horreur : La Reine d'Angleterre n'était plus. Vive le roi.

Lorsqu'il vit le premier ministre s'avancer pour sa prise de parole, Carmine se retint d'écarquiller les yeux. Le bleu de cette cravate, terne au possible, se confondait avec le noir de son costume pas assez ajusté au niveau des hanches. Une véritable catastrophe. La preuve s'il en fallait encore que les politiciens de ce monde n'avaient rien à faire au sein de l'Abbaye dont ils encombraient les chaises du premier rang, cachant la vue sur la tenue d'apparat ô combien plus élégante que portait Charles pour l'occasion. Debout dans le coin réservé aux invités non officiels, le mannequin et son mètre quatre-vingt dix surplombaient l'assemblée.

Fin 2022, après la disparition tragique de la reine, Carmine avait convaincu son père d'envoyer très humblement les croquis de ses dernières inspirations à Buckingham. L'anglais était certain que les talents de visionnaire de Calum retiendraient l'attention du futur roi. L'idée d'ajouter à la couronne destinée à la reine consort les diamants d'Elisabeth en hommage à la défunte ne pouvait qu'être bonne et le choix de la monarchie lui avait donné raison : Le croquis Cavendish avait fait l'unanimité. Ainsi, Carmine et sa famille furent invités au couronnement durant lequel il s'avéra impossible pour le mannequin de retenir une larme. Tourner définitivement la page du règne d'Elisabeth était un véritable crève cœur pour lui qui avait grandi à son contact, quand bien même il avait souri sur les photos et fait bonne figure face à la foule de curieux venus par millions pour tenter d'apercevoir le nouveau roi.

Lors du pique-nique protocolaire, partie intégrante des festivités royales, Carmine s'était isolé un instant afin de texter sa soeur :

C.
Tu manques à ce couronnement comme Sunak manque de classe.

Puis il était retourné discuter avec les différents invités internationaux, gratifiant les premières dames de compliments attentionnés sur leurs tenues ou leur choix de parures tandis que ses traits d'esprit firent rire quelques présidents. Cavendish n'était pas roi d'Angleterre, mais il trônait fièrement en tête de liste des invités ayant marqué les esprits à la fin de la journée. Son comportement exemplaire et sa classe de gentleman n'avait échappé à personne, certainement pas à Camilla qui, discrètement, s'était approchée de lui lorsqu'il faisait ses au revoir. « Votre père a mentionné votre participation active à ce projet de couronne. » Le mannequin acquiesça humblement, révérencieux envers sa souveraine. « L'Australie vous plait ? » Une question derrière laquelle s'en cachait en réalité une autre que l'anglais n'eut aucun mal à saisir, habitué à ce genre de dialogues dont le sens profond se lisait entre les lignes. « Moins que notre belle Angleterre, mais suffisamment pour me convaincre d'y défendre nos couleurs auprès des séparatistes, votre Majesté. » La nouvelle reine le toisa en silence. Carmine savait qu'on le jugeait, il recoiffa sa mèche, imperturbable de flegme et de standing dans son costume bleu roi. « Il va sans dire que vous représentez notre culture et nos valeurs dans ce qu'elles ont de plus perfectionniste, Carmine. Continuez. » D'un hochement de tête, Cavendish s'engagea à poursuivre sa propagande médiatique.

De toutes les manières de faire rayonner la monarchie à travers le monde, le mannequin avait choisi la mode. Élégance, charisme, désirabilité ... Un angle peu commun quand il était question d'empirisme et particulièrement insidieux. Parfait pour passer incognito tout en restant sur le devant de la scène. Parfait pour le si parfait Carmine.

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Pour le commun des mortels, la journée aurait été parfaite.

Carmine avait reçu des cadeaux en provenance du monde entier. Rolex, évidemment, mais aussi Lagerfeld, Burberry, Alexander McQueen, Balenciaga, Chanel ... Ses collaborateurs et confrères n'avaient pas oublié la date, tout comme ses fans dont les commentaires avaient fait exploser les pages de son compte instagram. Des centaines de cartes manuscrites s'empilaient dans le couloir du loft. Sa boîte vocale débordait de messages chaleureux.

Le matin, le mannequin avait brunché avec son cousin. En début d'après-midi, Mabel s'était libérée afin de partager un thé et quelques potins, puis il s'était présenté à l'entraînement de rugby du soir ou même ses coéquipiers - Asher au premier rang - avaient eu la délicatesse de lui chanter un joyeux anniversaire. À 22 heures, pourtant, on le retrouvait allongé sur le canapé, roulé en boule sous un plaid, entouré du service en porcelaine offert par Buckingham dont le raffinement ne suffisait pas à le consoler. L'arrivée des cadeaux londoniens avait souffert du décalage horaire, tant et si bien que cette excellente journée se finissait en véritable drame ... Sur la table basse, à côté de la carte signée Camilla, vomissait d'une boîte élégamment estampillée Sighbury un pull en cachemire que l'anglais avait visiblement laissé tomber immédiatement après l'en avoir sorti. D'un bleu de Yale profond, le pull disposait de pièces plus sombres au niveau des coudes et de minuscule diamants brodé autour du col. Carmine s'était vu défaillir en découvrant le vêtement. Alors ils en étaient rendus à ce genre de mesquineries ? D'abord les pièces aux coudes et puis viendraient les cardigans, voire les pulls en tweed ! Pensait-il, déprimé par la symbolique de ce cadeau empoisonné.

39 ans.
Ses parents lui passaient un message clair.
Carmine n'avait plus qu'à profiter de ses 12 derniers mois de trentenaire, car, à compter du 1 er juin 2024, le fils prodigue basculerait officiellement dans la gamme " mature " de la marque. De quoi le remplir d'effroi et justifier ces larmes qu'il ravalait en silence, profitant de l'absence de Connor pour se noyer dans son thé et dans sa peur de vieillir.

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Chaussures noires, semelle rouge. Seul le bruit du gravier se fait entendre. Les pas s'avancent jusqu'à rencontrer l'extrémité d'un tapis cousu d'or. Premières notes de musique.


Depuis le haut de l'escalier de marbre, on regarde s'avancer Carmine. Derrière lui, le soleil se couche sur les jardins Le Nôtre. Une caméra embarquée dessine la courbe de ses épaules puis capture l'éclat des boutons de manchette sur lesquels sont gravées les initiales Cavendish tandis que des mains anonymes ouvrent les portes du palais.

Versailles.

Dans la galerie des glaces, un hommage à la marque : toutes les Gibson y sont. Accrochées aux murs, elles remplacent les portraits de la monarchie Française. Certaines sont signées des plus grands noms de la musique que des zooms savamment introduits présentent au spectateur. L'ombre de l'Anglais s'étire sur les parquets et se déforme le long des colonnes magnifiques de la charpente. Le silence en guise de narration. Les paroles de la chanson suffisent. Tout est dans l'attitude du mannequin, dans le choix des plans. Ses doigts pianotent, hésitent, réfléchissent ...

Puis elle apparaît. La nouvelle guitare dont Cavendish s'empare comme si elle était une évidence. Un sourire discret, une caresse sur le bois scintillant de l'instrument. Sa Majesté a choisi.

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L'aube déchire la nuit de ses premières nuances bleu-vert. Tout est calme. À l'horizon, des montagnes endormies pointent le bout de leur nez. Seule la silhouette solitaire d'un ranch se détache du paysage aride, désertique. Premières notes de musique.


La caméra remonte le long d'une silhouette endormie, immortalisant le relief des plis du drap sur le corps dénudé. Carmine ouvre un œil. Les contours de son anatomie se fondent dans le clair obscur de la chambre une fois ce dernier levé. Il enfile négligemment un jean, passe le pas de la porte puis traverse une cuisine d'aspect rustique. Sur la table, les restes d'un repas solitaire suggèrent la vie recluse d'un homme isolé du reste du monde.

Des travelings font défiler les meubles du salon au sommet desquels sont posées des photos poussiéreuses. Serait-ce Big Ben que l'on aperçoit sur l'un clichés ? À travers les volets fermés filtre la lumière mordorée du matin. L'Anglais se déplace. L'objectif suit ses hanches tandis qu'il s'avance jusqu'à l'entrée. T-shirt blanc, guitare noire, il ne lui faut rien de plus pour investir le perron tandis qu'au loin le soleil dépasse enfin les Snowy Mountains.

Gros plans sur les mains du musicien. Ses doigts pincent les cordes avec justesse, accompagnent les accords de la musique tandis que des vues aériennes dévoilent enfin la beauté du paysage. Elle est à couper le souffle. L'Australie dans sa pureté la plus sauvage.

Avec la fin du morceau revient l'attention de la caméra sur Carmine dont le silence semble méditatif. Il a gardé l'instrument sur les genoux et recoiffe sa tignasse désordonnée. La barbe de plusieurs jours témoigne du temps passé dans cet état sauvage. Pieds nus, sa Majesté observe l'horizon. On n'entend plus que le grincement discret de la chaise à bascule quand le plan se coupe et qu'apparaissent sur fond noir les mentions du clip :

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Des plans se succèdent, petits morceaux de vie volés. Embarquée à l'épaule, la caméra les suit tout au long de la journée tandis que joue en fond sonore les enregistrements des répétitions. On entend AJ se chauffer la voix, Johnny pratiquer ses accords. Des plans séquence défilent en accéléré : le montage de la scène ; l'installation du matériel. Les techniciens s'affairent à la vitesse de fourmis hyperactives : ceux de l'aéroport sortant les instruments de la soute ; ceux du bar effectuant les branchements, les videurs contrôlant les identités à l'entrée de l'établissement ...

Espionnés à travers l'entrebâillement d'une porte ou capturés dans des angles suggérant qu'ils ne se savent pas filmés, les membres d'Hurtwave et Carmine interagissent. Leurs lèvres bougent, ils se parlent, rient, se chamaillent, mais les dialogues sont étouffés par le grésillement des larsens et le brouhaha d'un public impatient. Tout est suggéré : les sons n'illustrent pas les images, les images n'accordent pas les sons. On perd le spectateur dans les coulisses de ce qu'est un concert quand, tout à coup, un flash de lumière déchire l'écran. Le volume explose.


La foule saute, entrainant avec elle l'objectif dont les zooms tentent de suivre AJ en transe. Immersion totale au cœur de l'action. L'ambiance est survoltée. Dans les jeux de lumières, tandis que tout semble tanguer autour de lui, Carmine, immobile, se démarque par son calme. Il regarde Hurtwave jouer puis la caméra tourne sur elle-même, mélangeant le sol et le plafond dans une perte de contrôle artistique et calculée, ouvrant sur une escalade. De flash en flash, les plans se succèdent. La musique s'énerve, la voix du chanteur aussi. Les visages des fans se superposent à ceux des musiciens. Parfois, on perçoit la course d'une main s'emparant du manche d'une guitare. Ce n'est pas une Gibson. La déferlante d'informations va crescendo jusqu'à ce qu'AJ pousse son cri le plus poignant.

C'est à ce moment précis que le profil de Carmine se découpe sur fond blanc, guitare brandie au-dessus de la tête, sa mèche reconnaissable entre mille. L'action se fige, place au ralenti. À l'instant où l'instrument touche le sol, la vision passe en 4K. Le zoom révèle le fracas des éclats de bois que des effets spéciaux viennent planter dans l'écran.

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23h20

Les rues de Manhattan étaient bondées. C. qui pourtant n'aimait pas la foule, se surprit à ressentir une étrange impression de sécurité en son sein. Aucun photographe, aucun journaliste n'aurait pu prétendre le retrouver à travers les centaines de milliers de personnes agglutinées dans l'attente du décompte. Ses grandes jambes le portaient à vive allure à travers la marée humaine, sa grâce lui permettant de slalomer sans encaisser de coups d'épaules. Des odeurs de fast food, d'alcool et de cigarette se mélangeaient au point de lui donner la nausée, mais il gardait le cap, désireux de rejoindre son perchoir avant que tout le monde ne se mette à hurler et à danser.

À l'entrée de l'immeuble, sa Majesté consentit à retirer la capuche du sweatshirt le temps de prouver son identité. Le gardien contrôla la liste des réservations ainsi que son passeport présenté ouvert à la page d'introduction. On le laissa passer sans faire de commentaire sur sa tenue en décalage total avec le prix délirant que coûtait la privatisation d'un rooftop le soir du nouvel an en plein cœur de la grosse pomme. Cavendish n'était pas un Américain. Afficher sa fortune de manière ostentatoire n'était pas une norme, seulement une nécessité ponctuelle allant de pair avec son image de marque. Cette nuit, le Britannique recherchait avant tout la discrétion et c'est ce qu'il trouva lorsqu'il arriva sur le toit après avoir emprunté l'ascenseur.

Dominant la foule, seul contre la rambarde, le mannequin observait les lumières de Times Square. Mieux valait ne pas être épileptique pour se promener sur cette place incontournable d'Amérique du Nord. Derrière lui, trois immenses chauffeuses entouraient des canapés eux-mêmes disposés autour d'une table basse sur laquelle champagne et toast attendaient d'être dégustés. L'ambiance chaleureuse de ce petit coin privatif tranchait avec la solitude de sa Majesté. Il y avait à boire et à manger pour quatre personnes : AJ, Johnny, lui et ... Carmine tâta subitement la poche arrière de son pantalon. Les rebondissements de la soirée avaient complètement chassé de son esprit le cadeau de Noël de Buckley ! Il se hâta de sortir son téléphone portable afin d'essayer un ajustement de dernière minute.

À minuit moins dix secondes, C. leva son verre face au décompte affiché sur Times Square. L'appareil photo de son portable immortalisa les chiffres lumineux à travers les bulles de champagne. 3 ... 2 ... 1. Il pressa la touche envoi. En Australie, il était 3 heures de l'après-midi et Kwanteen devait probablement le haïr. 2024 souriait aux innocents entassés à ses pieds. Rarement Carmine s'était senti aussi seul dans sa tour dorée.

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Mi-janvier 2024

Carmine poussa une expiration brève et sonore, ses lèvres formant un " O " bien rond tandis qu'il chassait de son être le stress parasite. Rares étaient les occasions de le voir nerveux à ce point, mais rares étaient aussi celles où le fils prodigue désobéissait ouvertement. C. paierait pour cette insolence et ne pouvait prétendre l'ignorer. Cela ne l'empêchait pourtant pas de vouloir aller jusqu'au bout de son initiative. Aussi pressa-t-il le bouton " live " du compte Instagram à sa gloire. Ce geste lui permit de surprendre ses millions de fans avec l'apparition d'une notification les avertissant que leur idole était en direct. Instantanément, le compteur de connections se mit à grimper, donnant le vertige au mannequin dont le regard fixait l'écran du smartphone. L'appareil, en mode selfie, se trouvait face à lui, maintenu par un trépied, lui-même placé au centre d'un cercle lumineux. L'intensité de l'éclairage rendait les yeux de Carmine si bleu qu'ils semblaient irréels. L'Anglais s'était coiffé et habillé pour l'occasion, plus britannique que jamais, si lisse et si parfait qu'une poupée n'aurait pas fait mieux. Il incarnait à la perfection son avatar, cette chimère, ce fantasme collectif qu'était l'Homme by Cavendish. « Bonjour et bonsoir à tous. » C. s'adressait à une multitude de fuseaux horaires. « J'ai longuement réfléchi avant de m'exprimer et souhaite commencer par un message de soutien à mon ami AJ Buckley. » Était-il connecté, lui aussi ? Sighbury en doutait, mais ce qu'il avait à dire à AJ pouvait l'être en privé. Le choix de s'exprimer publiquement était stratégique et visait davantage à interpeler les auditeurs qu'à communiquer avec l'Australien. Chaque chose en son temps, une chose à la fois. « J'aimerais saluer le courage de cet homme qui, malgré les traitements inacceptables endurés au cours des deux dernières semaines, trouve la force de s'émanciper et de s'assumer pleinement. » C. marqua une pause de circonstances avant de reprendre. « Cet acte de bravoure soulève toutefois un problème. Aucun individu, quel que soit son sexe, son genre ou ses préférences affectives et sexuelles, ne devrait avoir à se justifier de la sorte, encore moins sous la pression de harcèlements physiques et moraux. Tout un chacun est en droit d'exiger le respect de sa vie privée. Tout un chacun dispose de son corps et de l'usage qu'il en fait. » Des armées de smileys s'affichèrent à l'écran dans un flot torrentiel, empêchant sa Majesté d'identifier la prédominance des réactions à ses propos. « Nos actions définissent qui nous sommes. En tant qu'ami, en tant qu'homme et parce qu'il m'est inconcevable que le nom Cavendish puisse être associé d'une quelconque manière que ce soit au laisser-faire face à des comportements aussi inexcusables, je tenais à passer un message clair : Love is Love. » Carmine redressa le menton. Impérieux, il rayonnait de ce charisme dont parlaient les personnes ayant croisé son chemin ou collaboré avec lui. Le mannequin mettait toute la puissance de son influence dans cette affirmation, toute la force de sa conviction. Et parce qu'il savait que les attitudes moralisatrices portaient bien moins leur fruit que les analyses rationnelles auprès de certains publics, il se racla la gorge, prêt à s'adresser à la partie la moins convaincue de son auditoire. Celle qui, probablement, ruait déjà dans les brancards sur le méridien de Greenwish. « Notre responsabilité collective dans la construction d'une société sécuritaire, inclusive et respectueuse ne peut se cantonner au rôle d'observation. Il est de notre devoir d'agir à la portée de nos moyens. » Des moyens, la portion de son auditoire à laquelle étaient adressées ses dernières phrases n'en manquait pas : « La liberté est un luxe. Nous ne méritons pas moins qu'elle. Merci pour votre écoute. À bientôt. » C. tendit le bras. D'une pression de son index contre l'écran, il mit fin à la retransmission. Un long soupire fébrile lui échappa. Les dés étaient lancés ...

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Avril 2024

Carmine traversait le salon en robe de chambre, prêt à aller se coucher. Ce soir encore, Connor était absent, parti courtiser on savait quelle demoiselle que Sa Majesté croiserait peut-être au petit matin, avant que sa canaille de cousin ne la mette à la porte. Cavendish avait repris un rythme de travail normal, délaissant ses veilles de nuit au Lola's pour un retour à des horaires de bureaux conventionnelles. Archie et lui avaient trouvé un terrain d'entente : la hache de guerre était enterrée sous une épaisse couche de déni ; tant et si bien que le mannequin pouvait désormais revenir à sa vie d'avant en prétendant que rien de toute cette histoire ne s'était passé. Ils étaient partenaires. Point. La tempête médiatique de janvier avait fini par s'essouffler, libérant de l'espace pour plus de vie privée et de soirées en compagnie d'AJ. Londres ne s'était pas manifesté suite à son live sur Instagram, ce qui avait incité son Altesse à croire au statu co. En bref, la situation se stabilisait et Carmine pouvait dorénavant le dire : il se sentait mieux.

Jusqu'à ce qu'il ne reçoive le message de sa sœur.

BSE (best sister ever)
They dared. I did my best to stop it.
So sorry C.
PS : Call her, she doesn't know.

À peine eut-il terminé la lecture du message qu'une notification glissa depuis le haut de l'écran. Sur la prévisualisation de cette dernière, on pouvait lire :



« What's the Hell ? » Marmona-t-il, sourcils froncés, incapable de connecter les différentes pièces du puzzle.

La marque familiale venait de se manifester au moment où le Britannique ne s'y attendait plus. Comme c'était à prévoir, le retour de bâton était à la hauteur de l'affront. Pour avoir osé défier l'hétéronormativité de son clan, C. venait de se faire passer la corde au cou.

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