Nerveuse, Sunny ne tenait pas en place sur sa chaise. Elle tentait de se contenir pour ne pas stresser les autres personnes présentes qui attendaient leur tour, mais la tâche s’annonçait un peu plus difficile que prévue. Ses jambes bougeaient, et elle n’avait aucun contrôle sur celles-ci, tandis que ses yeux ne parvenaient pas à décider sur quoi se poser. Elle tentait de se concentrer sur sa respiration, mais force était de constater que ces derniers temps, cela ne suffisait pas à la calmer. « Oui ! », lâcha la jeune femme en se levant d’un bond en entendant son nom. Le stress monta encore d’un cran. Ça y est, elle allait se faire transpercer par une aiguille, et elle allait se faire retirer du sang. Certes, c’était pour la bonne cause et la question de le faire ou non ne s’était même pas posée, mais cela n’empêchait pas Sunny d’angoisser. « Mais… Je vous reconnais ! Vous êtes ma serveuse préférée ! », s’exclama la blonde en écarquillant les yeux, amusée et surprise de voir Meryl ici. Sunny ne la connaissait pas très bien, mais elle la voyait très souvent au café où elle passait se prendre de quoi tenir la journée, et le courant passait plutôt bien. Sun’ ne s’était même pas posé la question de savoir si elle était encore en études, ou si elle travaillait simplement au café faute de mieux, ou juste par passion. « J’avoue qu’une petite perf’ de café ne me ferait pas de mal ces derniers jours, mais je ne pensais pas que c’était possible. », plaisanta Sunny en souriant à son infirmière du jour. Avec les événements de ces derniers jours, la Goldsmith avait subi (comme tout le monde) un stress énorme. Elle avait prié fort pour que sa maison tienne le coup, que le refuge aussi, que les locaux des associations tiennent le coup, que les animaux errants parviennent à se mettre en sécurité… En plus de toute cette agitation, et des préparatifs pour éviter que le cyclone fasse le moins de dégâts possibles un peu partout où elle travaillait, les vents violents l’avaient empêché de fermer l’œil, l’angoisse que quelque chose l’avait tenue bien éveillée. Son taux d’anxiété était très élevé, et le fait de se faire tripoter le bras pour en retirer une certaine quantité de sang ne l’aidait clairement pas. La petite blague de Meryl la fit sourire, et la rassura un peu. « Ouf ! », souffla la jeune femme en guise de réponse, bien que pas du tout inquiète sur ses compétences et les raisons de sa présence ici. Meryl avait l’air aussi gentille qu’au café, malgré le fait que ses deux jobs étaient aussi stressants l’un que l’autre, même si pas du tout exercés dans le même milieu.

Sunny secoua doucement la tête en s’installant sous les consignes de l’infirmière « Alors non, ce n’est pas ma première fois. En revanche, ça fait un sacré moment que je n’ai plus fait don de mon sang… », avoua un peu honteusement la petite blonde. Ce n’était évidemment pas une chose dont elle était fière, surtout qu’elle ne manquait normalement jamais une occasion d’aider son prochain, mais elle avait une ‘bonne raison’ à cela. En tout cas, quelque chose qui la bloquait sacrément, et qui rendait les dons et prises de sang très compliquées (inexistantes, même, plutôt). « Pendant la campagne de dons de l’an dernier, j’ai eu une mauvaise expérience, et depuis je suis tétanisée à l’idée de voir une aiguille vers moi et de parler de mon sang… », la Goldsmith se crispa et frotta machinalement le bras en question, soufflant de manière saccadée tant l’angoisse l’envahissait à l’idée d’avoir à nouveau mal « Disons que j’ai eu l’impression que j’étais à la boucherie, et que mon bras allait être mis à la découpe, en fait. Donc j’ai très peur, là… », conclut la jeune femme avec un sourire crispé.

@Meryl Strange

« Oh. C'est vrai qu'avec tout ce monde, il y a du travail et ça ne vous laisse pas le temps de faire de pause... », regretta la jeune femme en faisant la moue. Elle reprit, pour plaisanter et essayer de dédramatiser ce qui pourrait être une réalité « Si je sors d'ici et que je n'ai pas fait de malaise ou de crise d'angoisse qui me ferait oublier, je vous en apporterais un avec plaisir ! Au pire, vous me le rappellerez. ». Sunny fit un sourire à Meryl, mais elle ne resta pas souriante et confiante bien longtemps. Elle expliqua à l'infirmière sa phobie depuis une expérience malheureuse lors d'une autre prise de sang, sentant ses émotions commencer à la dépasser. Meryl lui demanda si elle pouvait l'appeler par son prénom. Sunny acquiesça, les sourcils toujours un peu froncés, inquiète. La suite ne put que la rassurer davantage. Elle connaissait déjà à peu près Meryl, savait qu'elle était une personne gentille et aux petits soins, qu'elle était également quelqu'un qui avait le cœur sur la main -allez devenir infirmière et serveuse si vous détestez les gens-, mais avec ses paroles, Sunny en eut la confirmation: Meryl était adorable. Qu'est-ce que cela lui faisait du bien d'entendre cela. « C'est vraiment gentil de me dire ça. Merci... », souffla la jeune femme, touchée de ne pas être jugée car incapable de faire des dons du sang aussi régulier qu'elle le souhaiterait. Sunny donnerait sa veste à quelqu'un ayant froid par moins un degrés, son parapluie pendant qu'un torrent d'eau s'abattait sur elle, partagerait sa dernière gorgée d'eau dans le désert avec quelqu'un ou quelque animal assoiffé... En bref, elle donnerait ce qu'elle a à quelqu'un dans le besoin sans y réfléchir deux fois. Alors ne pas réussir à être utile pour une cause aussi importante la peinait. Surtout pendant que sa santé le lui permettait encore, et qu'un simple et stupide mauvais souvenir lointain l'en empêchait. Elle qui travaillait beaucoup sur ses peurs, angoisses, et ses maux pour ne pas se laisser manger toute crue par ce qui la rongeait intérieurement, aucune méditation ni infusion, ni aucun truc magique un soir de pleine lune ne semblait avoir fonctionné. Elle était là, dans ce fauteuil, et elle avait peur. Peur de cette toute petite aiguille et de ce qui allait prendre son sang. « D'accord, ok. », répondit doucement Sunny en soufflant pour se calmer afin de se ressaisir et de ne pas faire trop attendre les autres. Il ne faudrait pas que les donneurs s'impatientent, ni qu'elle fasse perdre son temps à Meryl qui était sûrement fatiguée et qui n'avait qu'une hâte: que cette journée se termine pour aller se reposer. En revanche, il était hors de question de faire machine arrière maintenant qu'elle était là, installée dans le fauteuil. Le plus dur avait été de mettre les pieds ici, de remplir les formulaires, et de patienter sans prendre ses jambes à son cou au bout de deux minutes. C'était ça, le plus dur en fin de compte. Maintenant, il suffisait de souffler un bon coup et une fois la piqûre faite, ça allait être du gâteau. Pas vrai ???

Ecoutant Meryl parler, Sun' se mit à secouer doucement la tête. « C'est trop gentil. Mais... Oooh non, si je regarde, je pense que ça va être encore pire. Il faut qu'on le fasse maintenant, sinon ça va me sembler encore plus difficile... », la voix de Sunny tremblait légèrement, sa gorge se nouait. Même si elle n'était pas du genre à avoir honte de ses émotions, il fallait avouer que là, elle se sentait un peu bête, et faisait tout pour ne laisser transparaître que son stress, mais pas les grosses larmes qui avaient envie de se frayer un chemin sur ses joues pâlies par la peur. « Ou alors on peut simplement discuter un peu. Je suis douée pour parler de tout et de rien, n’en déplaise à mon collègue. », la blonde détourna le regard pour le poser sur le collègue en question, dont la réponse arracha un sourire à la blonde « Ca tombe bien, moi aussi ! », répondit-elle fièrement. Elle riait légèrement en entendant l'infirmière lui proposer un bonbon. Sunny retombait en enfance -bien qu'elle ne soit pas vraiment le genre d'adulte dont l'âme d'enfant s'était tristement éteinte-. « J'ai la récompense avant même l'effort, mon enfant intérieur jubile. », plaisanta Sunny en riant un peu. C'était quand même sympathique de se faire offrir un bonbon avant même que le supplice ne commence. La blonde fut quand même un peu gênée de piocher dans la réserve personnelle de Meryl, sachant que c'était sûrement son petit plaisir de la journée et surtout: son carburant. Elle était déjà en manque d'énergie et de caféine, si en plus on lui piquait ses sucreries... Pour ne pas être malpolie, et appréciant le geste, Sunny prit un Skittles en faisant un petit signe de tête pour la remercier. Après l'avoir fourré dans sa bouche en moins de temps qu'il ne fallait pour dire Skittles, elle colla son index et son pouce pour les passer rapidement devant sa bouche, mimant la fermeture d'un zip pour garder le secret du paquet de bonbons. Sun' en profita pour prendre bonne note de sa prochaine mission: apporter un café à Meryl, et des sucreries. Puis à son collègue aussi, accessoirement.

« Vous avez bientôt terminé, ou vous allez rester ici toute la journée ?? Ca fait longtemps que vous êtes ici, à faire des prises de sang ? Vous avez quand même des collègues qui prennent la relève pour que vous fassiez des pauses ? Ca doit être long et difficile de faire ça pendant des heures... Vous êtes une habituée des tâches longues et pénibles. », dit Sunny en souriant un peu, faisant allusion à son travail au café et à son métier d'infirmière. Il est vrai que le second était nettement plus gratifiant et valait les journées difficiles, mais tout de même. Sunny souffla un coup et serra les poings à plusieurs reprises, histoire d’essayer de faire passer cette sensation de déjà avoir un garrot sur le bras. Il fallait qu’elle continue de papoter pour faire descendre la pression et pouvoir vite commencer : Meryl n’avait pas que ça à faire, et les autres donneurs non plus.

@Meryl Strange