Lena avait accepté de partir en croisière avec son père et sa nouvelle compagne juste parce qu'il lui avait promis un certain nombre de cadeaux pour la remercier de sa gentillesse, une fois qu'ils seraient rentrés. Si elle avait su à quel point cette croisière allait sombrer en l'espace de si peu de temps qu'un dîner et un discours du capitaine, elle aurait évidemment refusé. Ils en étaient pourtant là, et on peut dire que la jeune femme avait totalement lâché la rampe. Ignorant où était passé son père, qui était bel et bien décidé à sauver le monde d'une manière ou d'une autre, elle était partie de son côté, espérant trouver un coin tranquille ou attendre la fin de cette misère - ou la mort. Alors que dans les couloirs intérieurs d'horribles atrocités étaient en train de se dérouler, il semblerait que le pont extérieur vive un instant de calme avant la tempête. Lena avait compris que tous risquaient leur vie en restant sur la Narelle, mais elle n'avait que peu d'espoirs pour ceux qui avaient tenté de sauver leur vie en sautant à l'eau, surtout avec la tempête qui s'approchait dangereusement. Le vent s'était déjà levé, les vagues frappaient le navire avec une certaine violence, mais les nuages menaçants qui approchaient ne laissaient rien présager de bon pour la suite de cette nuit cauchemardesque. La blonde, une bouteille de vin volée au passage en mains, attendait patiemment que les choses se règlent d'elles même : elle n'allait certainement pas se mettre à la recherche d'un crâne et partir à l'aventure ; les autres finiraient bien par régler le problème. C'est en divaguant sur la promenade qu'elle observait un homme qui semblait prêt à sauter à l'eau. Après s'être assurée qu'il n'agissait pas comme ces zombis sous le contrôle des monstres, elle s'approchait. Je ne suis pas certaine que se pencher comme ça par dessus bord soit vraiment une très bonne idée. Ça l'était dans son état à elle, en tout cas, puisqu'elle avait bu un peu trop de vin. Alors je ne suis pas la seule qui ne cherche pas ce foutu crâne ?

Embarqué à bord du Narelle afin d’obtenir le plus rapidement des papiers à jours pour rester sur le territoire, l’italien n’avait jamais imaginé une seule seconde que sa venue en Australie aurait pu être pire que de rester en Italie. Il n’avait rien compris de ce qu’il se passait à bord de ce navire. Il n’avait pas compris pourquoi, soudainement, tout le monde s’était mis à paniqué. Il se trouvait dans les cales, à transporter du charbon quand soudainement, l’ambiance avait changé sur le bateau. Tout était devenu bien plus glaciale, un de ses camarade matelot avait complètement perdu la boule et s’en était pris à un autre, lui sautant à la gorge. C’était l’un ou l’autre, ils étaient prêt à s’entretué et rien ne pouvait arrêté cet homme possédé si ce n’était une mort certaine. Il avait fini par se prendre un coup de pelle sur la tête, pour le calmer, quand sa victime avait décidé de le terminer en l’étranglant, s’assurant qu’il ne pouvait absolument plus respirer. Un autre homme de l’équipage était arrivé dans la cale, totalement paniqué, en ordonnant à tous les hommes de monter sur le pont. Nino avait lâcher son poste, sans se faire prier, lui qui détestait l’odeur du charbon. Il était vite remonté à l’air libre, par les couloirs réservés aux membres de l’équipage. Une fois sur le pont, il constata les dégâts, des hommes et des femmes qui se jettent contre les rambardes et par-dessus bord, des corps inertes au sol, une pluie battante, du vent qui soufflait fort et un bateau qui tanguait. Il n’y comprenait rien. Il se pencha alors au-dessus de la rambarde et fronçait les sourcils en tentant de distinguer ce qui nageait dans l’eau. Il n’avait jamais vu pareilles créatures. « Je ne suis pas certaine que se pencher comme ça par dessus bord soit vraiment une très bonne idée. »  il se redressa, s’éloignant d’un pas, devant bien reconnaitre que la jolie blonde avait raison. « Alors je ne suis pas la seule qui ne cherche pas ce foutu crâne ? » fronçant à nouveau les sourcils n’ayant aucune idée de quoi elle parlait.  « de quel crâne tu parles ? » il remarqua rapidement la bouteille qu’elle avait dans la main, il fit un mouvement vers elle pour lui dérober et boire une gorgée. Dire que l’alcool ça réchauffe.

Elle ne savait plus dire si elle était trempée par la pluie ou par l'eau de mer que les vagues envoyaient toujours plus régulièrement sur le pont. Ce que Lena savait, c'était qu'elle aurait tout donné pour ne monter sur la Narelle, et que si elle sortait vivante de cette croisière, elle ne mettrait plus les pieds sur un bateau. Alors que son regard se perdait dans le vide, elle s'était approchée d'un autre passager qui semblait vouloir sauter à l'eau. Après s'être assurée qu'il n'était pas possédé lui aussi, elle entamait la conversation comme pour passer le temps, s'occuper pour ne plus trop penser à toutes les possibilités qu'elle avait de mourir ce soir. De quel crâne tu parles ? Elle s'était demandé une seconde si sa réaction était une blague. Ou si c'était toute cette situation qui l'était, comme une effroyable farce dont elle serait le dindon, et qu'on avait juste oublié de mettre au courant ce passager là. Quoi que tout paraissait trop réel pour que ça ne le soit. Aussi, elle penchait plutôt pour l'option qui voulait que l'inconnu ne savait vraiment rien des évènements en cours, ce qui était un poil inquiétant malgré tout. Elle le laissait prendre sa bouteille de vin des mains pour en partager le contenu. Tu sors d'où pour ne rien avoir entendu de ce qu'il se passe ? Entre les cris, les morts qui jonchaient le sol, les grognements bestiaux et la horde de ces bunyip qui tournaient autour du navire, il était difficile d'ignorer la situation catastrophique qui se déroulait. Aussi dingue que ça puisse paraître le bateau est en proie à une attaque de monstres qui veulent récupérer ce crâne. Alors il y a une chasse aux trésors en ce moment même. A laquelle elle en participait pas, évidemment.

« Tu sors d'où pour ne rien avoir entendu de ce qu'il se passe ? » il avait l’air de sortir d’où ? Dans son uniforme de marin qui n’était même pas à sa taille. Il avait un polo trop grand pour lui et un pantalon trop court, qui laissait apparaitre ses chevilles à tout moment. Il n’avait même pas eu de paire de chaussettes neuves, celles qu’on lui avait donné étaient toutes trouées. Mais il n’avait jamais rien dit, trop reconnaissant qu’on lui laisse sa chance dans ce nouveau pays. Son but était d’aller au bout de ce voyage et ensuite, on lui donnerait ses papiers et il serait un citoyen comme un autre. Sauf que ce soir, il se demandait quel genre de citoyen il allait être s’il finissait comme d’autres, mort sur le pont. « J’étais en train de travailler, au charbon… un homme est devenu complètement cinglé et puis… » il regarda autour de lui, ca semblait être suffisant pour expliquer qu’ensuite, il avait atterri ici. L’italien n’avait aucune explication sur ce qui pouvait bien se passer. La blonde semblait être au fait, quant à elle. « Aussi dingue que ça puisse paraître le bateau est en proie à une attaque de monstres qui veulent récupérer ce crâne. Alors il y a une chasse aux trésors en ce moment même. » il ne savait pas s’il devait rire, se moquer d’elle ou alors avoir peur d’elle. « Est-ce que toi aussi, tu vas devenir complètement tarrée et me sauter dessus pour me tuer ? » après tout, peut être que c’était elle qui avait tué ces gens autour d’eux. « T’as l’air beaucoup trop tranquille pour quelqu’un qui sait c’qu’il se passe ici. Pourquoi tu fais pas la chasse aux trésors ? » ca semblait légitime comme question, si c’était une chance pour tout arrêter. « Hors de question que j’crève ici. » il secoua la tête, fit deux pas en avant puis s’arrêta. « Il est où ce foutu crâne ? »

J’étais en train de travailler, au charbon… un homme est devenu complètement cinglé et puis… Il faisait partie de l'équipage ; elle aurait pu le deviner avec sa tenue. Inutile de préciser qu'il avait dû manquer le discours du capitaine, les premières frayeurs dans les couloirs, et l'instant où les passagers avaient réalisé la nature mystique des évènements. Bizarrement, il avait l'air de prendre plutôt bien la nouvelle. Est-ce que toi aussi, tu vas devenir complètement tarrée et me sauter dessus pour me tuer ? Elle haussait les épaules avant de secouer la tête par la négative. Qui sait ? Je suis incapable de garantir le contraire. Qu'elle lançait, accompagné d'un petit rire. En réalité, personne ne pouvait prévoir s'il allait tomber sous le contrôle de ces monstres. Mais pour l'instant je ne ressens pas de folie meurtrière. Rends moi ça pour qu'on s'assure que ça ne change pas. Qu'elle lançait en désignant la bouteille de vin avant de la lui reprendre pour boire deux gorgées du liquide. T’as l’air beaucoup trop tranquille pour quelqu’un qui sait c’qu’il se passe ici. Pourquoi tu fais pas la chasse aux trésors ? Elle qui fixait un point éloigné pour ne pas se sentir mal avec la houle se retournait à nouveau vers le brun. Je ne vais sûrement pas jouer à cache cache avec les monstres. Il y a bien assez de monde qui est à la recherche du crâne. Et si je dois mourir ici, tant pis. Ses mots étaient clairement impactés par l'alcool qui coulait dans ses veines et qui commençait à prendre le contrôle de son esprit. Hors de question que j’crève ici. Il est où ce foutu crâne ? Si quelqu'un le savait, on ne serait pas dans cette situation. Et les choses seraient vraisemblablement déjà réglées. Mais t'en fais pas, quelqu'un finira bien par le trouver pour nous. J'irais sûrement pas me frotter à ces monstres dans le couloir. Au moins, à l'extérieur, ils restaient tranquillement dans l'eau à surveiller - et dévorer - ceux qui sautaient à l'eau.

« Qui sait ? Je suis incapable de garantir le contraire » L’italien ignorait s’il pouvait faire confiance en cette passagère mais ce qu’il savait, c’est qu’il ne pouvait rester là sans bouger une seconde de plus. Quiconque serait sans doute étonner de le voir s’inquiéter pour la survie des gens sur ce bateau, mais il ne pensait pas aux autres, il pensait avant tout à lui. Et il était hors de question d’avoir traversé le monde entier et d’avoir pris autant de risque pour sauver sa vie, pour finir déchiqueté et avalé par ces bêtes sanguinaires. Les cris raisonnaient dans ses oreilles et perçaient son tympan, ça en était insupportable. « Mais pour l'instant je ne ressens pas de folie meurtrière. Rends-moi ça pour qu'on s'assure que ça ne change pas. » il lui rendit alors sa bouteille, ne voulant prendre aucun risque de la contrarier, au cas où, de son mètre douze, elle décide de l’attaquer.  « Je ne vais sûrement pas jouer à cache cache avec les monstres. Il y a bien assez de monde qui est à la recherche du crâne. Et si je dois mourir ici, tant pis. » Le bateau ne cessait de tanguer et il faisait de son mieux pour rester en équilibre. Le pont était trempé par la pluie battante et bientôt, lui-même allait être totalement mouillé. La blonde, d’ailleurs, n’avait plus un centimètre carré de tissus sec sur elle. C’était risible. Il valait mieux se mettre à l’abris. L’avantage du brun, c’est qu’il connaissait ce bateau par cœur, à force de le traverser par les passages réservés à l’équipage. Il connaissait les raccourcis, et s’il n’avait aucune idée par où commencer, ils pourraient au moins éviter la foule et de croiser des passagers complétement hystériques.  « Si quelqu'un le savait, on ne serait pas dans cette situation ». elle avait beau être bien éméchée, elle avait encore la lumière à quelques étages. « Mais t'en fais pas, quelqu'un finira bien par le trouver pour nous. J'irais sûrement pas me frotter à ces monstres dans le couloir. » Il saisi la main de la blonde et la traina à l’interieur vers une cabine de l’équipage. Finalement, son discours n’était pas si incohérant. Quelqu’un finirait bien par trouver ce crâne et tout finirait par rentrer dans l’ordre. « On va rester planquer ici alors. » il ferma à double tour la porte de la pièce où ils se trouvaient quand, lorsqu’il retira la clé, quelque chose faisait du bruit derrière eux. « C’est quoi ça bordel ? » il se retourna et vit comme une longue queue pleine d’écaille sortir de derrière un meuble. « Putain » dans un sursaut, il fit tomber la clé au sol et avec les mouvement du bateau, celle-ci se glissa sous un meuble en bois massif. «  bouge de là ! » il lance à la blonde, la poussant en même temps, tentant de bouger le meuble, impossible.