the tortured poets department
@Nicholas Hurley (crédit gif/padmeamiidalas)

"T’es venue." "Tu m’as invitée." Le rire de gorge qui fila d’entre les lèvres de Baz, il n’était rien d’autre que sardonique. Mavis le savait mieux que quiconque pour être capable d’en lâcher des comme ça, elle aussi. Tous les deux, ils n’ignoraient pas qu’elle se fichait de son webzine ; elle se fichait moins de ce qu’il écrivait dans ses récits inspirés de faits réels, elle en était persuadée, et c’était peut-être bien pour cette raison que ce soir, elle avait fait l’effort de venir à cette fête organisée en l’honneur de l’anniversaire de son bébé. Il était déjà éméché, elle pouvait le sentir à l’odeur qui se dégageait de lui et à l’éclat vitreux de ses yeux d’un bleu profond, si différent des siens "T’aurais pu faire un effort de présentation. T’as l’air de sortir d’une ruelle." lui fit-elle remarquer presque en se pinçant le nez, trifouillant dans son sac après lui avoir accordé un regard de long en large, un sourcil arqué pour bien marquer sa désapprobation. Il ne lui répondit pas, balayant le grand hall de ses locaux des yeux en s’appuyant nonchalamment par l’épaule sur une colonne en métal qui supporterait son poids le temps de quelques instants silencieux, malaisants, durant lequel sa petit soeur continua de fouiller dans son sac par convenance, y dénichant enfin ce qu’elle convoitait. Elle lui balança un rouleau entier de pastilles à la menthe qu’il rattrapa à la volée "Ça t’empêchera de dégobiller et ça arrangera ton haleine." "T’as une façon bien particulière de me dire que tu m’aimes, soeurette." s’amusa le jeune homme en ne rejetant pas les pastilles, en engouffrant deux d’un coup dans sa bouche avant de la quitter sans plus de cérémonie, lui balançant tout de même un "Profite du buffet." qu’il lui donna en pivotant sur ses pieds pour lui retourner ses pastilles de menthe qu’elle rattrapa avec la même souplesse que lui, mais à une main, plus vive, plus sobre aussi. Minable, s’entendit-elle penser en le regardant s’avancer comme un pantin désarticulé au milieu de ses invités qui l’acclamèrent comme le roi qu’il prétendait être. Ça lui fit secouer la tête de droite à gauche, retenir une sorte de sourire douloureux qui se perdit sur son visage poupin sur lequel se reflétait la lumière tamisée de l’endroit qu’elle se mit à explorer sans grande conviction, présente pour une seule et unique chose, au fond.

"Hey. Je savais que tu serais là." fit-elle à Nicholas en arrivant à proximité de lui. Dans son dos, elle remarqua une équipe qui n’était pas composée des gens qui gravitaient autour de lui habituellement, mais ça ne la contrariait pas tant que ça. Nicholas évoluait dans une sphère où les va-et-vient étaient fréquents et où les amitiés se faisaient et se défaisaient en un rien de temps. Elle les salua tout de même d’un signe de tête poli, s’inquiéta brièvement de quelque chose qu’elle exprima à voix haute "Pas de Vance ce soir ?" Lui en revanche, c’était étrange de ne pas le voir avec son cousin. Peut-être qu'il était plus loin, à sociabiliser comme eux ne savaient pas très bien le faire, sortis du même moule quand il s’agissait de montrer qu’ils savaient être autre chose que des bourreaux de travail. Accordant un sourire à Nicholas, elle regarda un peu l’installation du coin de scène de fortune que Baz avait daigné mettre en place pour accueillir son cousin ce soir, et ne le trouva pas si mal. Seulement, elle ne s’y connaissait pas tellement dans ce genre de choses, si ça se trouvait, Nicholas trouvait ça à peine potable pour se produire et regrettait d’avoir accepté de rendre ce service à Baz qui gardait un oeil sur eux au loin, elle le sentait. Marchant doucement jusqu’à un synthétiseur sur son support, elle activa deux touches au hasard, laissant froids les invités qui étaient occupés à autre chose. Elle fit à Nicholas en relevant la tête "Comment Baz t’a convaincu de venir animer sa soirée ?" Elle savait déjà plus ou moins ce que Nicholas lui répondrait — que quand ça concernait la musique, il n’avait pas besoin d’être convaincu —, mais c’était la seule vraie entame de discussion qu’elle avait trouvé, ajoutant dans un léger rire tout en remontant la bretelle de son sac qu’elle portait toujours à son épaule "J’espère que t’es bien payé au moins."