Il s'éclipsait, pour la bonne cause, du moins dans sa tête, il le voyait comme tel. En réalité, il avait juste envie de sauter sur les cartons et s'amuser avec ses figurines pendant que Jessalyn travaillait pour deux. Cela lui rappelait le temps où Seymour était encore là et abattait tout le boulot alors que le brun blablatait dans le vide jusqu'à l'épuisement général de la clientèle. Oui, il fut un temps où il était encore plus bavard qu'il ne pouvait l'être à l'heure actuelle mais Elwyn avait beaucoup perdu ces derniers mois et il ne savait plus franchement où il en était. Mine de rien, en une bonne année, il avait eu le temps de se forger un équilibre, d'avoir une vie à peu près normal avec Nea qui lui courait après pour le faire ranger ses chaussettes propres dans ses tiroirs. Du jour au lendemain, il n'y avait plus eu personne à l'appartement, juste lui. On leur avait retiré le neveu de Nea d'abord lorsque ses grands parents en avaient obtenu la garde au forcing et tout cela avait été un déchirement total pour tout le monde. Puis, la brune l'avait suivi quelques temps après, apparemment incapable de lui adresser la parole sans que leur conversation ne tourne à vide, comme s'ils étaient devenus des étrangers l'un pour l'autre. C'était parfaitement l'inverse qui s'était produit mais Cadburry n'avait pas compris, comme toujours, dès qu'il s'agissait d'émotions humaines, ce cher Elwyn ne comprenait plus vraiment qui il était et ce qu'il faisait là. Alors, délirer tout seul en s'inventant un sabre laser en courant à gauche puis à droite, écoutant d'une oreille distraite Oxton qui s& dépatouillait avec le client, c'était devenu sa normalité. Rien que qui que ce fut puisse comprendre, rien qui laissait présager qu'il apprivoiserait le bonheur un jour ou l'autre. Elwyn était trop différent du reste des gens pour s'en sortir sans la moindre égratignure et un jour ou l'autre, il le paierait cher, pourquoi pas de sa vie même? Il n'avait pas envie de voir jusque là à l'heure actuelle, tâchant de reprendre une contenance alors que la sonnette de l'appel à la casse retentissait. Il avait du mal à respirer de tant d’activité physique au cours des minutes qui venaient de s'écouler mais le quarantenaire encaisse la client avec un sourire aux lèvres, lui offrant une révérence de départ avant de se tourner vers Jessalyn, son casque toujours bien accroché à ses oreilles. "Je savais que t'étais faite pour ce job! Bon... Par contre, mauvaise nouvelle, on va devoir ranger la réserve avant ce soir parce qu'on peut plus circuler jusqu'à la table de compta'..." On se demandait bien qui était en faute dans l'affaire alors qu'il se raclait la gorge et courait de nouveau vers la seconde pièce avec cette rage de vivre qui ne présageait rien de bon pour la personne qui devrait le supporter durant les heures à venir. Pauvre Jessalyn.

luck's a revolving door, you just need to know when it's your time to walk through.
 

D'un point de vue totalement extérieur, on pourrait croire qu'elle a fait ça presque toute sa vie. Elle a toujours eu le contact facile, Jess. Et quand elle parle d'un sujet qui lui tient à cœur, ça se voit. Ses yeux brillent, ses gestes sont trop grandiloquents, mais c'est bien le dernier de ses soucis. Dans ce cas particulier, elle parle avec une passion non dissimulée du manuel de campagne qui semble intéresser Jared. Un peu à la manière d'un professeur qui réussi à captiver l'attention de ses élèves en mettant son âme et son énergie dans ses cours, Jess retransmet tout son amour dans le produit que l'autre veut acheter. Une chose est certaine, si jamais Oxton tombe sur quelqu'un qui lui vend quelque chose (n'importe quoi à vrai dire) et qui en parle avec une telle ferveur, elle achète tout de suite. Quitte à se retrouver avec un objet dont elle n'aura aucune utilité. Ou un truc complètement encombrant qui ne rentrera jamais dans son appartement. Comme un château gonflable, par exemple. Jess est bon public, c'est pas nouveau. Un peu pigeonne sur les bords aussi. En tout cas, le regard du Jared quand il se décide finalement à prendre l'objet en dit long sur la réussite de la musicienne dans son entreprise de vente. Qui sait, elle a peut-être du potentiel dans le commerce. Certes, elle est loin des caméras auxquelles elle comptait se dévouer corps et âme jusqu'à la fin de sa vie, mais c'est pas si mal au final. Quand elle appelle Elwyn pour l'encaissement, il sort tout naturellement avec son casque sur la tête. Cette fois c'est décidé, Jess veut le même pour exposer chez elle. Quand elle aura mis assez d'argent de côté, elle y songera sérieusement. D'ici là, il va lui être difficile de ronger son frein, d'autant plus en côtoyant chaque jour des objets du genre. Dire qu'elle est heureuse d'entendre Elwyn approuver est un doux euphémisme. Mais qu'importe encore une fois. Elle sourit et hausse légèrement les épaules. Pour le moment, elle est trop heureuse (et bouffie d'orgueil d'avoir réussi son entreprise du jour) pour rechigner à la tâche, aussi pénible soit-elle. « Dans c'cas va falloir s'y mettre. » La grande question étant : combien de temps cela allait-il leur prendre ? Parce qu'elle a pu voir la tendance d'Elwyn à s'éparpiller à bien des reprises. Mais le pire dans tout ça, c'est qu'elle n'est pas beaucoup mieux en vérité. A chaque fois qu'elle se promet de trier ou ranger ses affaires, ça se termine en redécouverte de trésors enfouis depuis des âges immémoriaux ou en essayage de vieilles fripes oubliées par le monde entier. Après un regard vers la boutique pour s'assurer qu'aucun potentiel client ne soit en attente de quelque chose, elle suit Elwyn vers la zone sinistrée qu'est la réserve. En relativisant, le bordel présent n'est pas pire que ce qu'elle a fait dans le box qui sert de stockage au groupe. Le danger ici étant de s'égarer avec tous les produits dérivés et de perdre toute notion du temps au lieu de faire quelque chose de réellement productif. « Franchement... Merci pour la chance que tu m'offres, tu me sauves la vie t'as pas idée. » qu'elle le remercie du fond du cœur tout en commençant à ramasser les premiers vestiges de bordel qui traînent au sol et empêchent l'accès à la table de compta-lit-ping pong.

@Elwyn Cadburry