ego talking
Cassie Edwards & @Lena Edwards
crédit/harley

Les dernières semaines ont été longues et il s’est passé tellement de choses que c’est difficile de faire le point et de tout synthétiser. Ambrose est parti, tu retrouves ta liberté de mouvement et c’est clairement un soulagement sur bien des points, mais ça veut aussi dire gérer les retombées médiatiques de votre séparation et surtout les appels incessants de ta mère qui a commencé à jurer par tous les dieux qu’elle allait lui faire la peau s’il s’était mal comporté, le Constantine. T’as eu beau tenter environ mille fois de lui assurer que non, vous vous êtes quittés en des termes plus que cordiaux, qu’il n’y a pas d’histoire sordide à raconter, pas de coeur brisé non plus et finalement, vous vous êtes juste rendu compte que ce futur mariage, ce n’était pas ce que vous vouliez.
L’excuse de “maman, on est encore jeunes, on a le temps de changer d’avis” était toute trouvée. A ça, il a suffit d’ajouter un “mieux vaut s’en rendre compte maintenant plutôt qu’une fois la bague au doigt” et mentionner un potentiel divorce scandaleux pour plus ou moins convaincre la mère de famille et ainsi l’empêcher de sauter dans le premier avion direction Brisbane. Surtout que toi, t’as prévu de retourner quelque temps en Ecosse sous peu alors ça serait contre-productif au possible. Puis dès qu’ils insistent, tu sors la carte de “j’ai besoin de me retrouver” et on te fiche la paix.
Au milieu de tout ça, il y a Lena avec qui cette distance froide n’a cessé de se creuser depuis que t’as foutu les pieds en Australie. Ça a toujours été particulier, avec elle. Ça a oscillé entre relation tendue et relation inexistante, le tout sans jamais trop savoir comment se définir. Depuis quatre ans que tu vis ici, tu n’as eu que des rencontres sporadiques avec ta demi-soeur, rien qui n’arrange la situation mais rien non plus qui la dégrade ; vous vivez votre vie chacune de votre côté, ne demandant rien à personne et n’attendant pas grand chose de l’autre. Même le vieil Edwards s’en moque, si toi tu as des messages réguliers de sa part, il ne demande jamais de nouvelles de son aînée et t’es même pas certaine qu’elle ait le droit à un simple “bon anniversaire” venant de sa part.
Un événement plus ou moins récent a eu lieu et ta nature curieuse a forcément refait surface. Son mec, le Tomlison, a jugé bon d’en venir en main avec Midas. Tu connais suffisamment le chanteur pour savoir qu’il n’est pas du genre à démarrer les hostilités et c’est ce qu’il a affirmé, mais l’autre, tu n’as aucune idée de ce dont il est capable. Sans doute qu’elle saura, ou qu’elle t’enverra chier, qui sait.
Sous couvert de bonnes intentions, de vouloir rattraper le temps perdu, d’avoir une bonne nouvelle à annoncer et toutes les banalités habituelles qu’on peut sortir entre frangines, t’as proposé à Lena de se voir, for old time’ sake, d’aller boire un verre ou prendre un café, d’aller se faire un resto ou qu’importe, mais, sans réponse claire de sa part, t’as carrément décidé de t’inviter et comme l’a un jour chanté Doris Day, Que Sera, Sera. Son adresse, tu ne sais même plus comment tu l’as eue, ça fait un moment qu’elle traine sur un postit collé dans ton carnet d’adresses et il est peut-être temps de s’en servir.
Mardi soir, y a de la lumière aux fenêtres et tu sonnes à l’interphone armée de tes meilleurs arguments pour la faire sortir de chez elle ce soir ou pour carrément t’y inviter, ça dépendra d’elle. Ca bipe, une seconde, deux, trois, un peu trop, et toi tu te mets bien en évidence devant la caméra. A l’instant où ça répond, tu te munis de ton plus beau sourire. « Heeey, désolée de débarquer comme ça à l’improviste mais je passais dans le quartier et j’ai pensé à toi. » T’as beau être une excellente actrice, personne ne croit à ce genre d’accroche. « Bon, pas vraiment en fait. Mais heu, vu que c’est compliqué de t’avoir au téléphone j’me disais que j’allais m’arrêter histoire de prendre des nouvelles et tout, ça fait longtemps. » Pas sûre que la carte sensible fonctionne mieux en vérité. « J’ai une bouteille de Ruinart à la main, m’oblige pas à rester à la rue, s’il-te-plaît. » Bon, c’est un champagne correct mais on est loin du prix du Ruinart, c’est surtout histoire de ne pas monter les mains vides.

Se faire oublier, c'était la mission que Lena s'était confiée et celle qu'elle avait entreprise depuis plusieurs semaines déjà. Elle qui voyait ô combien il était difficile de se créer une réputation et de faire grandir une communauté sur les réseaux voyait à présent qu'il était encore plus compliqué de passer sous les radars une fois cela fait. Et bien que sa pause des réseaux lui faisait un bien fou, elle commençait à se rendre compte que cette part d'elle la définissait bien plus que ce qu'elle n'aurait voulu. Avoir cessé de poster autant qu'avant ne l'empêchait pas pour autant de passer un temps fou sur son téléphone, et c'est d'ailleurs ce qu'elle était en train de faire au moment où la sonnerie de l'entrée retentissait. « Oui, allo ? » Elle s'était levée pour répondre sans même décrocher les yeux de son téléphone. « Heeey, désolée de débarquer comme ça à l’improviste mais je passais dans le quartier et j’ai pensé à toi. » La voix qu'elle avait bien vite reconnue parvint à faire bouger ses yeux de l'écran de son téléphone à celui de sa caméra d'entrée. « Oh, salut Cassie. » Jamais Lena n'aurait pu penser qu'une telle chose arriverait mais elle n'était pourtant pas en train de rêver. « Bon, pas vraiment en fait. Mais heu, vu que c’est compliqué de t’avoir au téléphone j’me disais que j’allais m’arrêter histoire de prendre des nouvelles et tout, ça fait longtemps. » Et à dire vrai, la benjamine avait vraiment essayé de faire des efforts pour qu'elles se retrouvent ; elle en faisait encore à cet instant. « J’ai une bouteille de Ruinart à la main, m’oblige pas à rester à la rue, s’il-te-plaît. » Lena avait clairement mis un bon moment à réagir sans ouvrir, mais c'était simplement par surprise et pas parce qu'elle comptait refuser à Cass de monter. « Vas-y, tu peux entrer. C'est au 4e. » Ce qu'elle ressentait vis à vis de Cassie était difficile à expliquer et en même temps, elle avait perdu l'envie d'y mettre des mots. Définir les choses n'avaient pas le pouvoir de les rendre plus simples. Elle avait finit par se rendre à l'évidence : elles avaient beau se ressembler sur un bon nombre de points, elles ne seraient jamais proches. En même temps, Lena en était déjà arrivée à ce constat bien des années auparavant. Elle aurait dû tout simplement s'y tenir et ne pas s'imaginer qu'un échange cordial autour d'une rencontre hasardeuse allait enclencher entre elles une relation fraternelle solide, d'autant qu'elle n'avait mis aucune énergie à essayer de se rapprocher de sa demi sœur. Les quelques rares sms envoyés ne risquaient pas d'aider non plus mais clairement, elle n'arrivait pas à y mettre une réelle bonne volonté. Alors ce qui était certain, c'est qu'elles étaient loin d'en être au stade des visites surprises tout à fait anodines. Le temps qu'elle ne la rejoigne, Lena était partie chercher de quoi s'attacher les cheveux avant de la rejoindre à la porte du loft. « J'avoue que je m'attendais à tout sauf à voir ta tête sur l'écran de mon interphone. Avec une bouteille, en plus. » Difficile de dire s'il s'agissait de pure politesse ou si une raison plus profonde l'avait amenée à prendre avec de l'alcool. Elle se décalait d'un pas pour l'inviter à entrer. « T'es venue m'annoncer officiellement tes fiançailles ? Ou ta rupture ? » La pique était sortie toute naturellement et elle avait regretté ses propos immédiatement. « Euh pardon, laisse tomber, j'ai vu personne de la journée je suis en mode asociale. Pardon. » Et râleuse par la même occasion. Les filles avaient beau ne pas être proches, Cass ne méritait pas totalement de se faire accueillir de cette façon. Lena n'avait pas eu droit à une annonce digne de ce nom lors des fiançailles de sa soeur avec Ambrose, mais elle ne pouvait pas lui en vouloir vu leurs pauvres échanges habituels. « Tu veux boire un truc ? Ça, ou autre chose ? » Il était peut-être un peu tôt pour ouvrir une bouteille de champagne et se la vider à deux mais bizarrement, elle avait la sensation que ça pourrait être nécessaire selon les vraies motivations de Cassie.