Je ne saurai dire si je m’étais perdue ou retrouvée dans ses bras puissants. Mais il avait déclenché quelque chose en moi. Quelque chose de merveilleux. Alors que mon regard chercha le sien, je sentis presque le déclic en moi alors que je parvins à toucher les étoiles du bout des doigts, métaphoriquement parlant. Car ils étaient liés à ceux de Zeke comme mon regard qui ne se détachait pas du sien. Je pus percevoir son trouble dans sa poigne, dans ses iris chocolatées alors que le mien était un livre ouvert. Mes lèvres cherchèrent les siennes, les bécotant avec une intensité toute nouvelle pour moi. Comme s’il avait réalisé une sorte de transfert en moi. Car Ezechiel Blythe était la définition même de l’intensité. Je pouvais la voir briller dans ses yeux alors que je partis telle une fusée, rasant tout sur son passage. Tous mes muscles se tendirent, tressautèrent devant la beauté alors que je ne pus retenir un petit gémissement strident, l’étouffant contre sa peau. Mon cœur était parti, il se trouvait désormais bien loin. Je déglutis, peinant à reprendre ma respiration avant d’oser relever le visage pour faire face à Zeke, tout aussi essoufflée que moi. Ma main vacante caressa sa joue du bout de mes doigts, dégageant ses cheveux pour mieux le voir. Les mots étaient devenus superflus mais je ne pus retenir un gémissement plaintif cette fois-ci alors qu’il se couchait sur le côté, s’éloignant de moi. La lumière se répercutait sur nos corps, le mien étant couvert d’une fine couche de sueurs, signe que l’effort accompli était assez inédit pour moi. J’en regrettais presque le soleil car je voulais capturer avec ma rétine les milles et un reflets de ses cheveux ébènes que j’aimais tant. J’osai cependant tourner mon corps vers le sien, venant caresser sa jambe de mon pied comme marque d’affection alors que nos regards se retrouvèrent après un très court laps de temps. Comme si j’étais hypnotisée par l’aura qu’il dégageait à cet instant précis. "Comment tu te sens?" Sa voix m’enveloppa toute entière, plus rauque, plus chaude que précédemment. Je m’autorisai à lui offrir un petit sourire mutin avant de venir de nouveau caresser sa joue. Ma main vacante se referma sur son poignet pour venir poser sa paume sur mon corps. Je n’osai ciller, essayant de lui faire passer le message. « Bien. Très bien. Je crois que… » Mon corps n’avait cessé de trembler depuis que j’avais décollé quelques minutes plus tôt. N’osant le dire, mes joues s’enflammèrent cependant. Je hochai donc la tête comme pour lui affirmer. Oui, j’ai touché le bonheur du bout des doigts alors qu’un éclat de rire sortit d’entre mes lèvres, plus éraillé que les précédents. Je m’approchai de lui pour venir déposer un baiser dans son cou, enfouissant ma tête dans sa nuque. « Je t’aime, murmurai-je à son oreille. » Un murmure pour lui seul, chuchotement d’une femme, éternelle adolescente à ses côtés. J’avais l’impression de vivre cette jeunesse qu’on m’avait volé, m’ouvrant comme une délicate petite fleur afin qu’il puisse me cueillir. Ayant une foi aveugle en lui car il pouvait le sentir, mon corps, mon cœur et mon âme ne vibraient que pour lui.

Son rythme cardiaque allait mettre un certain temps à s'en remettre, assurément, mais Ezechiel se sentait bien. Dans une bulle. Comme s'il était fait de coton. Quelque chose s'était passé là, quelque chose qui dépassait tout entendement, ou en tout cas, tout ce qu'il avait compris de son monde en trente six années de vie. Il avait fini par connaître la routine, Zeke, voyant s'enchaîner les journées sans plus aucune surprise, plus aucune émotion nouvelle et il avait réellement eu la sensation d'avoir tout vécu. Comme s'il était mort en étant vivant. Il n'aurait pas su décrire cette impression et de toute manière, il n'en aurait jamais eu l'envie car le tout semblait être à conjuguer au passé maintenant qu'il avait ressenti tout ce que Eve avait fait naître en lui. Cette tornade émotive n'en était sûrement qu'à ses balbutiements, Zeke ayant encore une marge de découverte à faire mais il voulait surtout penser à l'instant présent, à ce qu'il pouvait saisir maintenant que son cerveau était apparemment de retour dans sa boîte crânienne. Certes, il n'était pas encore tout à fait opérationnel, pas après quelque chose d'aussi intense mais il s'entêtait vite à connaître les sentiments de la petite blonde parce qu'il avait toujours peur qu'elle ne se trouve pas bien avec lui. Qu'elle s'ennuie. Qu'elle se perde dans quelque chose de trop silencieux et qui ne lui plaisait pas. Pourtant, Ezechiel capta son fin sourire en caressant ses cheveux alors qu'elle attrapait son poignet pour le poser sur son corps. Son flanc était chaud et Blythe réussit à percevoir les tressaillements qui duraient à l'intérieur de son corps et il dût comprendre le message vu le sourire qui prit possession de ses traits. Le retour de l'innocence sur son visage dans une simple expression alors qu'il n'était pas en mesure de rougir tant il était déjà essoufflé par l'exercice effectué. Il espérait simplement que Eve comprendrait qu'il était content de savoir qu'elle avait pu dépasser sa peur, ce traumatisme d'antan qui lui avait fait oublier tout ce qu'il pouvait y avoir de véritablement beau dans un instant charnel. Zeke ne s'y connaissait pas très bien évidemment mais il avait l'air d'avoir compris l'essence de ce que c'était, l'intérêt au delà d'un simple plaisir physique momentané. Eve se rapprocha finalement de lui, ses lèvres se portant jusqu'à son cou alors que le bras puissant d'Ezechiel se porta autour d'elle. Il ne voulait plus bouger de là, son regard se tournant vers elle une fois qu'il eut entendu les trois mots que la jeune femme osa prononcer. Il frotta son nez contre le sien, sans rien répondre, rien qui ne fut transmissible avec des mots, un doux baiser venant voler jusqu'aux lippes de sa blonde. Son regard se perdait dans celui d'Eve et comme d'habitude, aucun mot n'était plus nécessaire. "Tu veux manger ou boire cette fois? Ou juste rester comme ça un petit peu?" Il ne savait pas franchement comment l'après était censé se passer. Y avait-il au moins une seule règle sur le sujet? Zeke commençait à comprendre que tout ce qu'il pensait n'était qu'illusion, l'amour n'était pas unique, il y en avait des variétés multiples, qui s'exprimaient tous différemment. Avec Eve, c'était le corps qui parlait, toujours, et ce fait contentait amplement un Ezechiel qui lui sourit subtilement. "Merci." De lui avoir fait confiance sûrement, de ne pas avoir attendu de lui la perfection. Simplement, de lui avoir donné sa chance quand tous les autres lui avaient refusé, les yeux ébène du brun brillants plus vivement après cet aveu. Imperceptible émotion du géant Blythe.

je pense que si je me réincarnai en animal, je serai à coups sûrs un animal hyperactif. Une lapine, une souris, mais quelque chose qui bougeait dans tous les sens. Incapable de se poser plus de trente secondes, de rester tranquille et de dormir. Ou même me nourrir car cela demandait de s’asseoir sur une chaise, prendre du temps et cuisiner. Je sais cuisiner. Mais pour les autres. Cependant, car oui il y a un cependant, au contact de Zeke, des changements s’opéraient dans mon comportement. Je me surprenais à dormir correctement en sa présence (et seulement en sa présence), à avoir un peu faim. Et pas seulement de la peau ambrée de l’Australien. Des petites différences infimes de l’avant-après. Quoique cet abandon dont j’avais fait preuve quelques instants plus tôt démontraient encore une fois qu’Ezechiel contribuait à mon épanouissement personnel. Raison pour laquelle mes sentiments se renforcèrent encore plus. Toujours plus. Perdue contre lui, j’étais bien alors qu’il caressait distraitement mes cheveux en bataille, affreux. Cette tignasse que je n’arrivai pas à discipliner même après tous les efforts du monde. Mes doigts couraient sur son avant-bras qui ne bougeait pas, mon regard restant suspendu au sien, n’osant l’en détourner. Zeke était mon mirage, un ange ténébreux qui a su apparaître au moment de ma vie où je m’apprêtais à abandonner. Croire en l’amour ? Pourquoi faire ? Il n’était que douleur et désolation. Puis, il est arrivé. L’inattendu. Et il était comme l’eau. Calme comme de l’eau, silencieux. Et pourtant, il suffisait que je plonge dans le noir d’encre qui caractérisait ses iris pour comprendre que ce n’était qu’une façade. Je le laissais avoir la réponse de lui-même, encore trop réservée pour lui dire que j’avais fait ma souris. Ma souris écrasée. Je me pinçai la lèvre, cachant mon trouble avant de venir me perdre dans son cou. Mon corps était encore échaudé, la température peinant à se baisser. Je déposai une myriade de baisers contre sa peau avant de venir murmurer quelques mots. Trois. Cachant mon visage qui devait être rouge coquelicot alors que ma main continuait de courir sur son épaule dénudée. Je sentis la tête d’Ezechiel se tourner vers moi alors que je relevai le visage, rosissant d’avantage alors que son nez effleura le mien. Cette fois-ci, je devais ressembler à une écrevisse. "Tu veux manger ou boire cette fois? Ou juste rester comme ça un petit peu?" Je baisse les yeux avant de venir battre des cils. Une, deux, trois fois. Je pense qu’il avait dû comprendre que ce toc était vindicatif de ma réflexion intérieure. « Si on reste là, on va recommencer, murmurai-je troublée, donc je dirai nourriture. » Et voilà que les rouages de mon cerveau se mettent en marche. Mon hyperactivité pointant le bout de son nez, ne prenant pas ma médication. Je laissais mes doigts effleurer ses boucles ébènes avant de passer ma langue sur mes lèvres, la coinçant entre mes dents avant de réfléchir à ce que je pourrais lui servir à manger. Je levai mon regard si grand, mes yeux immenses vers le sien avant répondre à son sourire. "Merci." Un, deux, trois battements de cils. J’ai fait quoi ? Et pourtant, je lisais dans son regard qu’il était pour le moins troublé. Je m’approchai donc de lui, venant coller ma poitrine à la sienne alors que sa chaleur m’enveloppa et que je déposai un chaste baiser sur ses lippes tentatrices. « Je ne sais pas ce que j’ai fait mais de rien, meine Liebe. » Je me redressai avant de venir passer une main dans ma tignasse et froncer le nez. « Je dois ressembler à un paillasson. Après la nourriture, je pense que j’irai prendre une douche. » Je dardai mon regard azuré vers le sien en venant passer mes doigts le long de sa jambe. « Tu voudras venir avec moi ? On a pas eu l’occasion de le faire à la ferme la dernière fois. » Vu qu’il y avait ses parents, ça avait pas mal limité les démonstrations d’affection. Par pudeur, je n’avais pas osé le prendre par la main pour l’emmener à ma suite. Je me mis debout avant de quitter la pièce pour revenir avec sa chemise que je mis sur mon dos, la boutonnant partiellement. « Sérieux, ça me fait une robe, dis-je en tournant sur moi-même, une toile de tente. » Je lui montrai mes bras où pendouillaient les manches. Je devais avoir l’air ridicule au possible mais on ne me referait pas. J’avais cette faculté à passer d’une chose à une autre. Ou plutôt un TDA. Mais ça, je lui en parlerait plus tard.
Ou pas.

L'ambiance restait chaleureuse, elle le serait probablement toute la nuit maintenant qu'il avaient passé un nouveau stade de leur relation, se connaissant ainsi beaucoup mieux et ce, sans avoir eu à discuter très longuement. De toute façon, Zeke n'aimait pas spécialement avoir des conversations à rallonge, tout avoir à narrer sur leur passé respectif, les joies comme les peines, tout cela pouvait se dire d'une toute autre manière. Il suffisait d'écouter, vraiment écouter, ce qui ne voulait pas dire juste tendre l'oreille et accepter un flot de paroles, non, pour Ezechiel, écouter prenait une toute autre tournure, quelque chose de beaucoup plus profond. Lorsqu'il écoutait, il prenait le temps de capter toutes les réactions de la personne en face de lui, d'un simple éclat de rire à un regard singulier, il interprétait ainsi chaque mot non prononcé et il avait l'impression de mieux cerner les individus qui passaient un peu de temps en sa compagnie. Avec Eve, la connexion était devenue encore plus intense après que leurs corps se furent liés de la sorte: maintenant, il arrivait à discerner tout ce qu'elle avait essayé de lui cacher, par appréhension qu'il l'apprécie moins pour sûr. Elle était une jeune femme qui avait énormément souffert à cause des hommes de son passé, de la disparition d'un compagnon à celui qui s'était ouvertement moqué d'elle. Zeke comprenait donc pourquoi elle restait sur ses gardes mais elle n'avait pas pu tenir le cap jusqu'au bout, pas avec lui car elle s'était totalement abandonnée, c'était ce qu'elle était venue lui souffler à demi mot, apportant toutes les réponses nécessaires au grand Blythe. Il n'avait pas besoin de savoir quoique ce fut d'autre: il était juste heureux de savoir qu'il avait pu lui apporter une once de bonheur dans cette vie, peu importe si ce n'était que ce soir-là, peu importe si la suite ne pouvait pas être aussi belle, il aurait eu moins l'honneur de porter Eve aux nues cette unique fois. Clairement, le grand brun se contentait de peu de choses, n'osant jamais rêver trop fort, de peur de tout perdre et d'être fauché en plein espoir. Il tâchait de garder les pieds sur terre en caressant doucement la peau d'Eve, voyant bien qu'elle ne pourrait pas rester bien en place de son côté. "T'as même pas pensé à l'option dormir." Ce qui était très indicatif du mode de vie de la belle Zimmer, elle qui devait se reposer encore moins que lui et c'était déjà fort peu avec Ezechiel. Il en souriait de voir qu'il avait éveillé son appétit et déjà, elle se levait, bougeant dans tous les sens alors que Blythe se posta seulement sur ses coudes, heureux de la regarder faire. "Je te suivrai où tu veux." Très éloquent avec Ezechiel qui ne se séparait pas de ses yeux brillants en la regardant quitter la pièce pour revenir à peine quinze secondes plus tard, fermant quelques boutons de la chemise qu'elle avait fait quitter au grand homme quelques temps auparavant. "Moi, je te trouve belle comme ça." C'était grand certes, très grand mais elle était jolie sa petite blonde avec sa chemise sur le dos alors que Zeke s'extirpait du lit à son tour, lentement, sans se brusquer, se rhabillant en dessous de la ceinture. Puis, il s'approcha d'Eve, passant ses bras autour d'elle en calant le dos de la jeune femme contre son buste encore chaud. "Doucement, Eve. Pas trop d'énergie. Il y a le temps." Il la berça délicatement en caressant son ventre par dessus le tissu de sa chemise, venant déposer un court baiser dans son cou, se détachant seulement après cela, direction la cuisine, sans se presser.

J’avais onze ans quand on a compris que je ne resterai pas assise derrière un bureau. Il faut dire que les sœurs étaient très à cheval sur nos résultats scolaires et les miens ont toujours été très moyens. A vrai dire, il n’était pas rare que mes professeurs aient le commencement d’une phrase pour finalement avoir un autre cheminement en plein milieu d’une narration. Pas une grande romancière aussi. Donc, je resterai sans doute avec mon métier manuel qui me permettait de bouger dans tous les sens, d’occuper mes nuits et ma vie. J’aimais reconstituer des œuvres, aller les chercher, voir leur beauté malgré leurs défauts. Et Zeke serait sans doute mon œuvre la plus aboutie si on ne comptait pas mes enfants. J’ai pu déceler quelques-unes de ses blessures notamment le fait qu’il se dévalorise sans cesse ne sachant pas lire. Avec l’ère actuelle, il y avait d’autres moyens que de lire. Les messages vocaux -bénédiction pour les gens bavards- le facetime, Siri. Mais je ne lui exposerai pas les faits ce soir. Pas alors que les battements de mon cœur peinaient à recouvrer leur rythme normal (déjà pas endiablé lorsque j’étais en situation banalisée) et que mon épiderme ne se départissait pas de ses tremblotements. Mon esprit commençait peu à peu à se remettre en marche et se repassait le film que nous avions précédemment conçu -dans nos têtes- dans mon cerveau déluré sous la version cartoon. Je me visualisai comme un personnage de ce genre de dessin-animé car j’ai tendance à être trop intense dans mes émotions. Et dans mes gestes aussi car me voilà incapable de rester une nano-seconde sans bouger, sans le caresser. Mon amour. Une forme d’amour que je ne pensais plus vivre, qui me semblait interdit étant devenue veuve à l’aube d’une vie d’adulte. Je le regardai en exposant un futur programme qui semblait me convenir. "T'as même pas pensé à l'option dormir." Je me tournai vers Zeke, le regardant avec mes grands yeux clairs trop expressifs. « Je dors jamais. » J’eus un haussement d’épaules, signe que je me fichai de ma santé comme d’une guigne. « Je crois que je peux rester trois-quatre jours sans dormir. Mais bon, c’est pas trop grave. Je m’occupe. En ce moment, je refais une fresque qui date de l’ère gréco-romaine donc soit je passe mes nuits à chercher les différents dessins, significations ou alors je joue en ligne ou alors je fais le ménage. » Je me sentis rougir car encore une fois, j’avais parlé sans réfléchir. Ma constitution frêle était d’ailleurs en frein à mon tempérament hyperactif. Car souvent, je tombais quand j’étais trop fatiguée et je me « reposai » pendant une journée avant de reprendre ma course contre la montre. « J’ai bien dormi avec toi, cependant. T’éloigne les cauchemars. » Sans y dire plus, je me mis debout pour quitter la pièce presque en sautillant. Pour une fois que mes jambes ne s’apparentaient pas à des cannes. Et que je finisse au sol comme une flaque. En même temps, il suffisait que je pose le regard sur mon compagnon pour que je finisse en œuf sur le plat. "Je te suivrai où tu veux." Je lui souris, tout simplement, dévoilant mes dents de devant. Puis, j’enfilai sa chemise trois fois trop grandes pour moi. Elle tombait sur mon corps comme un rideau alors que je tournai sur moi-même avant de lui montrer les manches qui pendouillaient. "Moi, je te trouve belle comme ça." Je me mis à rougir jusqu’aux oreilles avant d’avoir une petite moue alors qu’il se levait pour aller se rhabiller. Maintenant que nous n’étions plus dans l’euphorie du moment, je pouvais me permettre de le regarder. Penchant légèrement la tête sur le côté. « T’as un corps magnifique, dis-je plus pour moi que pour lui. Bon ton visage aussi est beau mais t’as un corps superbe. Genre comme les dieux grecs ce qui est assez… » Ezechiel vint me saisir me coupant dans mon raisonnement pour coller son torse contre mon dos. "Doucement, Eve. Pas trop d'énergie. Il y a le temps." Je fixai le vide alors qu’il me berçait tendrement, caressant mon ventre par la même occasion. « ça ne se voit pas mais je suis une flaque. » Ma main se posa sur la sienne alors que j’eus un petit frisson alors qu’il déposait un baiser dans ma nuque. Un petit cri de cochon d’inde monta dans ma gorge alors qu’il s’éloignait pour aller dans la cuisine. Prenons le temps d’admirer ses fesses. « J’ai jamais eu le temps, dis-je en le suivant, je suis complètement hyperactive. Genre, c’est vrai. J’ai même des cachets mais je les prends pas car ils me rendent toute molle. Comme votre espèce de gelée là. Je sais pas faire. Comment on fait pour prendre le te… » Sans réellement comprendre, je me pris les pieds dans un jouet qui trainait pour finir par basculer en arrière et me retrouver sur le sol du salon. Je retire ce que j’ai dit pour les jambes qui fonctionnent correctement. « Je vais rester par terre et attendre la mort, ça m’évitera d’être ridicule, murmurai-je en venant cacher ma tête avec son immense chemise. » La honte jusqu’au bout des orteils quoi.

Il restait toujours calme, peut être trop finalement puisque Zeke n'avait jamais fait un geste de travers, même quand on agissait de la mauvaise manière envers lui. Au fond, il s'en fichait relativement qu'on puisse se moquer de lui, le détester et l'insulter, c'était lorsqu'on touchait aux gens qu'il aimait que le grand brun pouvait sortir de ses gonds. Ce n'était pas arrivé très souvent certes parce qu'il était un pacifiste dan l'âme et que fuir était toujours un choix plus simple et qui économisait pas mal d'énergie. Zeke se tuait à la tâche dans son travail oui, mais pas avec les autres êtres humains. Il n'avait jamais cherché à garder une relation intacte avec quiconque, sûrement que tout cela n'en valait pas le coup selon lui. En fait, Ezechiel avait surtout peur de souffrir car on l'avait souvent considéré comme un bon moyen de passer le temps mais rarement rien de plus. Il s'y était habitué avec le temps mais cela n'avait pas empêché la douleur de s'immiscer dans ses veines et de se transformer peu à peu en frayeur tenace. Maintenant, il devait voir au delà de cette bien étrange angoisse car Eve faisait partie de sa vie et il comptait bien la garder à ses côtés, peu importe ce qu'il en coûtait. C'était un risque, il en avait conscience mais le grand homme avait déjà plongé de toute évidence, le moment qu'il venait de vivre en compagnie de la blonde en était une preuve supplémentaire. Bien entendu, il n'avait aucun regret, souriant à la jeune femme alors qu'elle se lançait de nouveau dans son mode moulin à paroles habituel. Zeke écoutait plus qu'il ne répondait, on retrouvait les bonnes vieilles méthodes apparemment, pour l'un comme pour l'autre. "Rien que ça." Il avait vite compris que Zimmer était encore pire que lui en termes de manque de sommeil mais peut être qu'elle allait un peu loin. Elle ne dormait pour ainsi dire plus du tout en vue de ce qu'elle narrait au brun et il fronça les sourcils, sans rien dire pourtant, se disant qu'il allait devoir faire attention avec elle puisque Eve était en train de s'épuiser. Elle le rassurait cela dit, lui assurant qu'elle dormait mieux lorsqu'il était présent et les joues de Zeke rosirent, d'une teinte très légère certes mais l'effet était visible. Pour lui, c'était un compliment, pas moins que cela. Maintenant, Ezechiel était vêtu un minimum et il continuait de suivre le fil des pensées d'Eve, non sans venir la perturber dans son discours, passant ses bras autour d'elle pour la bercer, le plus naturellement du monde. "Un dieu grec, t'exagérerais pas un peu?" Lui, en tout cas, était fort loin de se voir ainsi, se rapprochant plus de la Bête que d'un Apollon. Enfin, c'était ce qu'on lui avait répété à l'école le plus souvent mais cette époque était loin. Il pouvait apprécier les petites joies de la vie et les petites attention aussi en se dirigeant vers la cuisine pour cet instant gastronomique essentiel pour se remettre en route. "Hyper-quoi?" Avant même qu'il ait le temps d'en dire plus, il entendit un gros boom caractéristique d'une chute de Zimmer sur le sol. Zeke accourut bien vite, la soulevant à bout de bras et la portant même jusqu'à la cuisine avant de l'asseoir sur une chaise, moins de risque qu'elle se blesse ainsi. "Rien de cassé? Tu veux quoi? Je vais m'en charger, ça a l'air plus sûr." Effectivement, Ezechiel ouvrit le frigo et commença à préparer une salade à Eve, lui n'avait pas tellement faim mais il était hors de question qu'elle tombe à nouveau, pas d'hypoglycémie en tout cas. Il prit deux assiettes et servit le plat avant de s'asseoir à côté d'Eve, avec un fin sourire sur les lippes. "Je vais te coucher de force après la douche." Il valait mieux sinon elle allait faire une nuit blanche et s'épuiser. Hors de question.

J’ai toujours été trop active. Je peinais à rester assise, à croiser les jambes, les bras et laisser les autres faire. A vrai dire, j’étais une femme d’action même si je parlais énormément. Mes professeurs ont rapidement compris que je ne resterai pas en place. Si bien qu’une chaise n’était jamais près de moi, je me contentai de prendre mes cours debout. Au fond de la salle, toujours. Pas trop sociable et pourtant j’avais ma bande d’amis à Paris. Celle qui m’a épaulé à Paris, qui m’a permis de me relever de mon premier coup dur. Je me rappelle encore la sensation de froid qui a envahi mon cœur alors que j’étais posée sur le lit de ma chambre étudiante. Mes cheveux étaient plus longs et Victoria me tenait la main. Victoria qui est maintenant décédée qui par sa mort m’a permis de retrouver Jacob. Elle était celle qui me tenait la main alors que nous croisions Pierre sur le campus. Celle qui savait. Qui savait que j’étais toujours dans la lune et que je ne voulais pas m’ancrer dans la réalité, qui ne la supportais pas. Je voulais la fuir, je le faisais assez bien avec ma tendance à m’imaginer les pires scénarios. Les meilleures aussi. Puis qu’aux côtés de Zeke, je trouvais une stabilité que je n’avais effleuré que du bout des doigts et un calme intérieur qui n’était pas visible à l’œil nu. Je me remis rapidement debout, en route vers mes songes, vers mes gestes qui étaient trop précipités. "Rien que ça." Je me tourne vers lui, haussant les épaules. « Je ne sais pas prendre soin de moi. Et je trouve que dormir ou manger, c’est une perte de temps. Et du temps, je n’en ai pas. Ou pas beaucoup. » Je sautillai d’un pied à l’autre avant d’ajouter que je dormais bien en sa présence. Il m’enveloppait de sa chaleur, de sa délicieuse odeur de bois qui me calmait instantanément. Je pourrais me faire à la vie dans une ferme avec lui à mes côtés. le regarder taper ses meubles pendant des heures alors que je tenterai de capturer son essence avec un dessin. J’avais déjà commencé. Mon carnet étant secrètement noirci de son visage, de la silhouette qui pour une fois ne me tournait pas le dos. J’avais l’habitude de dessiner les gens dos à moi. A part Caleb mais l’amour que je lui vouais était platonique. Je me détendais en sentant les bras musclés autour de ma taille, posant ma tête sur son torse en ronronnant presque. "Un dieu grec, t'exagérerais pas un peu?" Je secouai la tête avant de venir me retourner, restant contre lui avant de caresser distraitement sa joue. « Non. Pour moi t’es le plus bel homme qui m’ait été donné de voir. Plus beau qu’Orlando Bloom. » Et je faisais pas du tout une fixette sur le beau Will Turner. Puisque j’avais un calendrier à son effigie dans ma cuisine. Je laissais mes doigts imprimer les contours de sa mâchoire. Puis, je lui souris. « La beauté n’est pas seulement physique tu sais. Elle émane aussi de l’âme. Et tu as la plus belle âme que j’ai croisé. » J’avais murmuré tout ça d’une petite voix intimidée alors que le moment nous appartenait un peu. Je le laissais m’échapper avant de le suivre jusqu’à la petite cuisine. Il paraissait si massif dans mon tout petit chez moi. "Hyper-quoi?" Je grimaçai mais il ne pouvait pas le voir. « Hyperactive. En gros, je peine à rester calme comme toi. Je dois sans cesse être en activité et ça dépasse les gens normaux. J’ai aussi un trouble de l’attention. Cette fois-ci, je n’arrive pas à rester sur un même sujet pendant une conversation. Je passe sans cesse du coq à l’âne. Mon cœur bat plus vite que vous et c’est pour ça que je suis aussi impulsive » M’étant perdue dans mes explications, je me ramassais au sol en glissant sur une petite voiture, atterrissant lourdement sur la moquette. Un gémissement monta de ma gorge alors que Zeke fut plus réactif. Je m’autorisai à caler mon corps contre le sien, rouge de honte. Mes bras ballotant dans le vide alors qu’il me posa sur une chaise. Je posai ma tête sur le comptoir avant de cacher mon visage. Comme une enfant prise en faute. "Rien de cassé? Tu veux quoi? Je vais m'en charger, ça a l'air plus sûr." Ma jambe commença à s’activer. La jambe folle. Je ne pris pas la peine de relever la tête. « Regarde ma jambe. Syndrome de la jambe sans repos. Encore dû à mon hyperactivité. » Cette dernière peinant à se remettre en bonne marche, à demeurer calme pendant quelques minutes. Je pris une profonde inspiration avant de relever le visage. « Non ça va. Ce n’est pas la première fois que je tombe et pas la dernière fois. J’ai dû tomber au moins cinq fois de l’escabeau le mois dernier. T’apprends à tomber avec ça. » J’eus un petit rire avant de le regarder s’activer dans la cuisine pour nous faire à manger. Mes grands yeux bleus enregistraient chacun de ses gestes. Sans doute les coucherais-je sur le papier pendant une nuit d’insomnie ? "Je vais te coucher de force après la douche." Je fronçai le nez avant de dodeliner de la tête. « Tu peux essayer, amour, mais je cours très vite. » Je m’autorisai à lui tirer la langue avant de venir prendre un chouchou et d’ôter les cheveux que j’avais dans le visage pour venir les attacher en demi-queue, étant trop court pour une ponytail. « Merci, murmurai-je en inclinant un peu la tête, d’avoir bien voulu que je reste. Dans ta vie. Je te l’ai dit Zeke, je ne suis pas un cadeau. » Et c’était vrai. Troublée, je tournai la tête avant de laisser mes doigts pianoter sur la table, consciente que j’étais trop émotive. Un vrai fardeau.

Ezechiel était patient, parfois trop sûrement, vu le nombre d'heures qu'il pouvait perdre à attendre qu'un événement se passe. Il ne savait pas demander, encore moins affirmer parce qu'il avait toujours cherché les approbations des autres face à quelques initiatives qu'il avait pu avoir par le passé. Au fond, le grand homme avait surtout peur de gêner. C'était ce qu'il avait toujours eu l'air de faire: à l'école déjà, outre les moqueries évidentes parce qu'il ne savait pas lire, Ezechiel était le géant de la classe, celui qu'on ne pouvait pas louper malgré une envie évidente de ne pas avoir envie de croiser sa tête dans chaque couloir. Le traumatisme avait été fracassant pour un homme qui aurait aimé se faire tout petit mais il n'avait jamais pu et drame de son existence, il ne le pourrait jamais. Alors, Blythe n'avait plus qu'à vivre avec cette étonnante carrure, continuant encore et toujours à la travailler plutôt que de se transformer petit à petit en un homme fluet qui n'aurait pas envie de se faire apercevoir dans l'immensité d'un de ses nombreux champs. C'était peut être aussi une bénédiction quelque part que Zeke fut cet homme là, comment Eve l'aurait-elle remarqué sinon? Il n'était pas passé inaperçu au refuge avec sa grande taille, sa tendance à vouloir jouer aux héros alors qu'il n'arrivait déjà pas à se gérer lui-même. L'affaire s'était déroulée pour le mieux au final, il en était le plus heureux des hommes depuis, s'autorisant à s'épanouir peu à peu en compagnie d'une boule d'énergie qui n'avait vraisemblablement jamais appris à canaliser tout ce qu'elle avait dans la tête. "T'es jeune. Et on va changer ça, toi et moi." Comme si Ezechiel allait la laisser faire, se détruire peu à peu en ne se nourrissant plus ou en ne dormant pas suffisamment. Il n'était pas le mieux placé en la matière pour sûr mais il essayait toutefois de conserver un minimum de sérieux pour ne pas ruiner sa santé pour si peu. En attendant, il restait l'homme montagne, celui qui souriait malgré tout car Eve n'arrêtait pas de déblatérer et il ne comprenait pas tout, forcément, en vue de son manque de culture et d'intérêt pour tout ce qui reportait à un écran. "C'est qui Orlando truc? Je sais pas tu sais, je communique pas tellement avec mon âme." C'était peu dire, vu le peu de mots qu'Ezechiel pouvait indiquer à autrui, comment envisager qu'il puisse en prononcer pour lui-même? Il faisait du mieux possible néanmoins, s'inquiétant avant tout des autres, du moins de Zimmer à l'heure actuelle qui avait bien failli se briser le coccyx sur le sol froid de l'appartement. Alors, Zeke prit les choses en main, se décidant à la cuisiner une salade, refusant sûrement d'aller vers une autre activité tant qu'elle n'aurait pas terminé son assiette. "T'as des médicaments?" Question simple, aucun commentaire, jamais avec Ezechiel alors qu'il observait effectivement sa jambe folle. Lui restait posé sur son tabouret très calmement en finissant son assiette sans faire aucun bruit, du Blythe tout craché. "Peut être mais j'ai de la force." Et il trouverait les arguments pour la garder au lit, il en était convaincu. Ses joues rosirent légèrement alors qu'Eve le remerciait une nouvelle fois, il ne méritait pas autant de palabres, à son sens. "Essaie pas de me distraire et mange, va. Et tu pleures pas non plus. Je t'ai à l'oeil." Il lui fit un clin d'oeil amusé avant de venir déposer un baiser sur sa joue, inconsciemment, à croire que le geste devenait normal. Enfin. "Tu veux faire quoi demain?" Retour aux banalités, aucune gêne, Ezechiel, sommaire à souhait.

On m’a souvent qualifié d’être amoureuse de l’idée même d’aimer. Je n’ai jamais réellement compris ce que cela voulait dire. Pour cause que je n’aime pas tout le monde à tort et à travers. Je ne déteste personne en soi. Pour cause que la disparition prématurée de mon mari m’a appris qu’il ne fallait pas perdre son temps, la vie est trop courte. Si j’avais rencontré Ezechiel avant Jacob, je ne pense pas que j’aurai été aussi entreprenante et aussi impulsive envers lui. Pour cause que je me suis étonnée moi-même à lui courir après de la sorte. J’ai toujours eu un tempérament plus ou moins timide, assez effacée. Comme je l’ai dit à Zeke, mon ambition dans la vie était de devenir invisible. Mais je ne saurai expliquer ce qu’il s’est passé cette journée là si particulière. Où je me suis retrouvée bousculée dans le grillage, portée par un géant inconnu que j’ai rapidement qualifié d’ami pour venir l’embrasser dû à je ne sais quelle magie. Car il ne pouvait s’agir que de ça. Je n’ai jamais cru dans les coups de foudre et pour cause que cela pouvait s’éteindre aussi vite que cela s’embrasait. Et je ne voulais pas que tout s’arrête. Nous étions encore à l’aube de notre histoire lui et moi. Nous apprenions à nous connaître sous toutes les dimensions qu’elles soient intellectuelles, physiques et j’en passe. Je prenais mon temps, suivant les conseils que l’on m’a prodiguée quelques jours auparavant. Mettant ainsi de côté toutes les pensées néfastes qui survenaient dans ma tête à chaque fois que je me retrouvais seule. Me coupant le sommeil et l’appétit. Venant me confier sur ce souci de santé que je ne trouvais pas très important en soi. "T'es jeune. Et on va changer ça, toi et moi." Sa phrase m’arracha un sourire car il me parlait comme un vieux sage. Je me garderai bien de le comparer à Gandalf ou encore à Dumbledore car il ne saisirait pas la référence. Ce grand homme qui ne connaissait rien du monde qui l’entourait et qui vivait dans sa ferme sans se soucier du monde extérieur. "C'est qui Orlando truc? Je sais pas tu sais, je communique pas tellement avec mon âme." Qu’est-ce que je disais ? Il ne se préoccupait vraiment pas de tous les sujets qui intéressaient les gens normaux. « Orlando Bloom, c’est un acteur. Et moi je le sais. Ton âme a parlé avec la mienne. Bon la mienne est encore en cours de réveil, ajoutai-je en riant, donc faut pas lui en vouloir si elle n’est pas très bavarde. » Il valait mieux éviter la dévalorisation. Mes gestes le font assez pour moi. Puisque je me retrouve bien vite au sol comme d’habitude. Après tout, Eve qui ne tombe pas quatre fois par jour, ce n’est pas une bonne journée. Non, je mange plus le sol que des légumes. Et pourtant vu ma frêle constitution, j’en avais clairement besoin. La preuve, Zeke pourrait sans doute me porter d’une main alors que je l’admirai dans ma petite cuisine en train de nous faire une salade pour venir près de moi. "T'as des médicaments?" Je dardai mon regard vers le sien avant de hocher la tête. « Depuis que j’ai l’âge de sept ans. Lisa et moi avons le même traitement. Car oui, c’est héréditaire. » Mes enfants n’avaient pas tiré le gros lot avec moi. Tous les trois malades de différentes manières. Après, on pouvait décemment vivre avec un TDA. J’y suis parvenue et Lisa était très bonne à l’école quand elle ne choisissait pas ses matières ou qu’elle ne se battait pas dans la cour de l’école « J’en ai un aussi pour l’anxiété. Je fais pas mal de crises d’angoisse depuis que je suis ici… » Disons plutôt qu’il est mort. Je regardais devant moi en piochant dans mon assiette pour mastiquer les feuilles de salade comme le cochon d’inde que j’étais. « … ça va un peu mieux depuis que t’es là. Sans doute parce que je me suis remise à avancer et plus faire du sur place. » Je n’osai tourner la tête vers lui, écarlate. Mon cou nu démontrait que j’étais désormais prête à refaire ma vie. Avec lui. Je savais que Zeke ne l’avait pas remarqué car il n’était pas homme à faire attention à tous les petits détails ou alors il était trop discret pour le mentionner sous peur de faire une gaffe. "Peut être mais j'ai de la force." Il m’arrache un éclat de rire alors que je bascule la tête en arrière, manquant de tomber. « Et moi j’ai des arguments qui te feront plier, beau géant brun. » Je fis la moue avant de battre des cils comme une biche. Ce regard que je lui avais fait le premier soir mais qui signifiait autre chose aujourd’hui. "Essaie pas de me distraire et mange, va. Et tu pleures pas non plus. Je t'ai à l'oeil." Il me sert un clin d’œil et je sens que je pourrais fondre sous cet air enjôleur de mon compagnon. Je m’apprête d’ailleurs à répondre lorsque je sens ses lèvres sur ma joue. Aussitôt, je rougis avant de venir me tourner complètement vers lui. « j’ai fini. » Doucement, je laisse ma jambe venir caresser la sienne. « Si j’avais voulu te distraire, amour, je m’y serai prise autrement. » Mon pied est désormais au niveau de son coude et c’est à mon tour de lui glisser un clin d’œil avant de me mettre debout pour débarrasser la table en vitesse. "Tu veux faire quoi demain?" Je m’approchai de lui par derrière avant de venir nouer mes bras autour de son cou pour y déposer un baiser avant de venir murmurer à son oreille. « C’est une surprise. » Tu parles d’une surprise, elle est bien nulle. Mais s’il voulait se montrer joueur, je pourrais l’être tout autant. Doucement, je m’éloigne avant de venir faire passer sa chemise par-dessus ma tête et lui lancer. Puis sans ajouter un mot et avec un regard enjôleur, je me dirige vers la salle de bain pour y faire couler l’eau. L’atmosphère avait changé cette fois-ci. Presque joueuse. Encore une nouveauté.

Ezechiel était sûrement une exception au sein de ce monde parce qu'il pouvait parler en long, en large et en travers de tous les types de bois sur lesquels on pouvait travailler le plus efficacement mais à côté de cela, il était parfaitement incapable de citer une célébrité. Le pauvre Blythe ne suivait pas toutes ces épopées culturelles qui faisaient des émules car il n'aimait pas regarder la télévision et de toute manière, il n'aurait pas eu assez de réseau à la ferme pour pouvoir suivre quoique ce fut. Il ne savait pas lire non plus alors son champ d'actions était relativement réduit mais il ne le vivait pas si mal, Zeke vivait principalement dehors, peu importe la météo et les horaires et le tout lui convenait idéalement. Il tenait son potager, s'occupait de tous les animaux et ne demandait rien à personne, sa spécialité. Il avait toutefois croisé le chemin de Zimmer au détour du refuge et désormais, sa vie était en train de changer, doucement mais sûrement. Le grand homme désirait tout de même prendre son temps car il savait à quel point les événements pouvaient s'enchaîner, souvent d'une façon peu agréable d'ailleurs, en témoignait son frère derrière les barreaux. Zeke y pensait forcément, même s'il se devait de chasser tout cela au plus vite s'il ne pouvait devenir encore plus taciturne qu'il ne l'était à l'accoutumée. Est-ce que quelqu'un y verrait une différence, néanmoins? Ce n'était pas certain vu le peu de mots que le grand homme prononçait en une journée, qu'il y en ait encore moins n'était pas une grosse révélation en soi. "Je regarde pas la télé." Et donc, par conséquent, il n'avait aucune idée de qui était cet homme apparemment magnifique qui créait tout un tas de réactions chez les femmes comme Eve. Il n'était pas jaloux ni possessif donc le bûcheron le vivrait très bien. Rester silencieux, c'était ce qu'il y avait de mieux à faire, raison pour laquelle il ne proposa pas la surenchère au monologue d'Eve: leurs âmes pouvaient très bien ne pas être bavardes durant un temps, ce n'était pas cela qui allait déranger Blythe. Il trouvait le tout bien paisible et c'était dans ce genre de contextes où il s'épanouissait le plus, lorsqu'on ne le brusquait pas. "J'espère que ça continuera à aller mieux, alors." Que dire de plus? Il n'y connaissait rien à tout cela, que ce fut les troubles de l'attention ou l'anxiété, Zeke ne pouvait pas y être confronté en vivant en autarcie mais ce qui comptait pour lui désormais, c'était l'état de santé d'Eve, y prenant garde sans qu'elle n'y fasse franchement attention. Il était discret, Ezechiel, et c'était peut être un plus dans ce genre de cas. "Moi aussi, madame." Ce n'était pas les mêmes argument, bien évidemment, entre un tas de muscles et des yeux de biche, il y avait un sacré fossé mais Blythe avait envie d'y jouer lui aussi, non sans terminer sa petite flexion des biceps par un léger sourire. "Hum, je vois. Et j'en doute pas." Il capta son regard enjôleur et il en était heureux parce qu'elle se libérait peu à peu de son mal être, Evie, même s'il fallait du temps. En attendant, leurs jambes se frôlaient et Zeke la laissait agir, la jeune femme débarrassant les assiettes en continuant les hostilités, si on pouvait appeler l'affaire ainsi. En effet, elle ôta la chemise du brun avant de lui jeter au visage, Ezechiel la récupérant au vol en hochant la tête, silencieux. Qu'aurait-elle pu répondre sur le moment tant il était surpris? Pas grand chose et puis, elle était déjà partie vers la salle de bain. Le fermier suivit sa trace et passa derrière elle, la toisant du regard, bras croisés en s'adossant au lavabo pendant qu'elle allumait le robinet d'eau de la douche. "Et si je veux connaître la surprise, moi?" Bien sûr, son regard voyageait sur la silhouette de sa petite blonde parce qu'il ne pouvait qu'être intéressé par sa taille fine et légère, elle lui avait tant fait découvert et lui, maintenant, ne désirait plus que continuer sur se chemin. Peu importe ce qui s'y trouvait, il savait que ce serait à la hauteur de ses attentes.