Rp libre : 31/10/2023, aéroport d'Adélaïde, vol à destination de Brisbane


Kendall venait de boucler ses valises et c'est avec beaucoup de nostalgie qu'il regardait l'appartement désespérément vide. Il avait vendu presque tous ses meubles et même le cadre du salon qui était un de ses rares éléments de décoration. Il l'avait vendu avec la photo, cette dernière qu'il n'avait même pas choisie puisqu'il s'agissait de la photo d'origine. La personne qui lui avait acheté le cadre avait même demandé "il est très beau votre chien, mais vous ne voulez pas garder la photo ?" Ken, qui ne se souvenait même plus que le cadre contenait la photo d'un chien -qui n'était pas le sien- fut pris de court. Il répondit "oh vous savez, il est mort". Il adorait mettre un malaise entre lui et des inconnus, un genre d'humour qui ne faisait pas toujours l'unanimité. Face à cette fille qui ne savait pas quoi répondre à ça il ajouta avec un petit sourire moqueur "je plaisante, j'ai pas de chien". Elle était partir juste après lui avoir tendu un billet, visiblement l'humour avait été à sens unique ce soir-là encore. L'appartement, qui lui appartenait -contrairement au chien de la photo-, n'allait cependant pas rester vide très longtemps.  En effet, il allait accueillir des locataires qui ne connaîtraient bientôt là joie de vivre dans ce loft à la vue imprenable sur la plus belle place de la ville.

Plus tard dans la journée il se mit en direction de l'aéroport après avoir remis les clés à l'agent immobilier en charge de la gestion de la location de son loft. Il était en avance, ce qui était un véritable atout au milieu d'un appartement bondé. Ken observait silencieusement la foule, surpris de voir autant de monde le jour d'halloween. Son vol était retardé de deux heures, comme si l'univers aussi cherchait à retarder ce moment. Après avoir pris un café et une part de gâteau, l'heure était venue pour lui d'embarquer. Les passagers du vol à destination de Brisbane sont priés de se rendre en porte 1, embarquement imminent". Le panneau au-dessus de sa tête indiquait "porte 30". Il était donc très loin du but. Il soupira en marmonant un "fait chier". Revenir à Brisbane était déjà quelque chose qu'il faisait à contre cœur, mais si en plus l'univers s'évertuait à lui mettre des bâtons dans les roues ce voyage serait d'autant plus pénible. Il tirait sa valise tout en se dirigeant vers la porte, se demandant à chaque pas qui le rapprochait de l'avion s'il ne ferait pas mieux de rester à Adélaïde. Il adorait cette ville, contrairement à Brisbane qu'il ne supportait plus. Ou plutôt les habitants de cette ville. Plus précisément les blondes aux yeux bleus de la brigade criminelle. Ken était réaliste, il savait qu'un jour où l'autre il allait devoir croiser Charlie, et ce constat l'ennuyait profondément. Il commençait à la connaître, elle allait sûrement l'insulter, lui dire qu'il était inadmissible qu'il soit revenu pour elle, que c'était c'était harcèlement. Et le bouclé n'avait aucune envie de discuter avec elle, de rassurer son imagination débordante ou de lui expliquer les raisons de son retour à Brisbane. Ça ne la regardait pas un point c'est tout. Ken revenait par force, parce que son père était grandement malade et qu'il était de son devoir d'être aux côtés de sa famille. Il n'y avait donc aucun sourire sur son visage, mais plutôt un soupir quand l'équipage de bord initia l'embarquement. Il s'installa à sa place, côté hublot et écouta d'une oreille distraite les consignes des stewards. Le nez à la fenêtre il fut tiré de ses pensées par une annonce au micro "décollage immédiat". Il s'apprêtait à se remettre dans sa bulle quand il sentit une main attraper la sienne et la serrer fort. Il fronça les sourcils avant de se retourner contre la personne assise à sa droite. "Vous faites quoi ?" Il demanda en retirant instantanément sa main. En l'observant rapidement, Ken pu remarquer de l'anxiété sur son visage. Le passager.e avait l'air crispé, ses lèvres articulaient silencieusement des prières et son pied tambourinait sur le sol. "Encore un.e phobique de l'avion, génial." pensa-t-il. Son.sa voisin.e de siège était tour pâle, ce n'était pas bon signe mais Ken ne savait pas vraiment comment réagir. "Euh ça va ?" Il se tenait prêt à appeler une hôtesse si la situation dégénérait trop.

Prendre l’avion est quelque chose que Kendall a toujours apprécié. Avec ses parents il a beaucoup voyagé, enchaînant les destinations plus exotiques les unes que les autres. Il a vu beaucoup de pays, passé de longues heures dans les avions alors les vols ne l’angoissent pas, il y est parfaitement habitué. Le confort des sièges en business, places qu’il choisit toujours aident à rendre le voyage encore plus agréable. Et rendre ce vol retour pour Brisbane il en a bien besoin. L’avion n’a pas encore décollé qu’il songe déjà au moment où il demandera à une hôtesse un verre. Retourner à Brisbane est une punition, y revenir parce que son père est mourant est une malédiction. Pourtant Kendall n’a qu’à regarder sa voisine de siège pour comprendre qu’il ne pourra pas passer le trajet tranquillement. Celle-ci est particulièrement agitée et elle lui attrape même la main. « Bordel de merde ». Il la retire en fronçant les sourcils et en lui demandant ce qu’elle est en train de faire parce que c’est très dérangeant. « Fallait pas prendre autant de place sur mon accoudoir. » Une remarque qui fait prendre conscience au bouclé qu’il est tombé sur la casse pied de service. Mais pour qui se prend elle ? Elle ne peut pas simplement s’excuser comme tout le monde ? Il a l’intuition que le trajet en sera d’autant plus long et pénible, il aurait peut-être mieux fait de prendre un siège en classe économique. Il préfère l’ignorer, il n’a aucune envie de débattre avec une Karen, tout ce dont il a envie c’est qu’on le laisse tranquille, peut-être même de dormir un peu. Ken ignore donc sa voisine jusqu’au moment où il jette un coup d'œil furtif et la voit toute pâle. On dirait qu’elle a vu un fantôme ou qu’elle est au bord du malaise. « Putain... » Il ne sait pas trop comment réagir, venir en aide à quelqu’un qui lui a manqué de respect comme ça juste avant ça le fait chier. Mais en même temps il n’a pas envie qu’elle s’écroule sur lui à cause d’un malaise. Il demande donc maladroitement si elle va bien. « Hmmm non. Ouais... Nan ça va pas. Je déteste l'avion, bordel. Quel con s'est dit que c'était une bonne idée de foutre des gens dans une cage en acier à un milliard de pieds de la terre ferme. ». Sur tous les passagers de l’avion, il a fallu que Ken tombe sur la phobique de l’avion, génial. Il n’a aucune envie de jouer les psychologues mais il sent bien qu’elle ne va pas se calmer comme ça s’il l’envoie sur les roses tout de suite. “C’est le moyen de transport le plus sûr. Vous avez plus de chance d’y rester en prenant votre voiture qu’en avion.” C’est quelque chose qu’il a lu une fois dans un article de presse. Il ne se souvient plus des chiffres précisément mais les accidents en avion bien que spectaculaires sont extrêmement rares. L’avion prend de la vitesse et s’élance sur la piste de décollage, dans quelques secondes nous prendrons de l'altitude. A chaque instant qui passe, sa voisine perd des couleurs, elle va tomber dans les pommes c’est sûr. « Si vous avez une deuxième main à briser, je la veux bien. » L’idée qu’elle lui broie encore la main ne l’enchante pas, mais alors pas du tout. Mais il n’a aucune envie qu’elle s’écroule sur lui à cause d’un malaise s’il ne lui file pas un coup de main. Et il faut dire qu’elle est plutôt jolie, alors il se décide à faire un effort. “Evitez de trop la broyer quand même, j’en ai besoin.” L’avion continue d'accélérer et juste avant qu’il décolle, le bouclé ajoute. “Prenez de grandes respirations, tout va bien.” Elle lui serre très fort la main, à tel point que celle-ci devient blanche. Elle en a de la force la petite brune. Impossible de bouger ses doigts face à la pression de la main de sa voisine. L’avion prend de l’altitude mais le décollage est passé. “Vous voyez, tout va bien.” Sous-entendu : lâchez ma main maintenant. “Vous vous sentez mieux ?” Ou est-ce qu’il doit appeler une hôtesse pour qu’elle gère sa crise d’angoisse ou qu’elle mette un somnifère dans son verre pour la calmer ? Ken vient de faire sa bonne action mensuelle et il n’a pas forcément envie de jouer le thérapeute pendant tout le vol.

@Zelda Rivera

« Ouais, on a plus de chance d’avoir un accident de voiture, m’enfin selon la gravité, j’ai une chance de survivre en voiture…Là, si on tombe, c’est PAF ou PLOUF et ciao avocado. Barbecue terrestre ou festin pour les crabes. » Elle est complètement tarée se dit le bouclé. Des phobiques il en a croisé dans sa vie, des personnes peu à l’aise avec l’avion mais là elle est complètement hystérique. Le vol s’annonce long, très long. Ce vol retour sur Brisbane est déjà assez pénible comme ça et il n’a ni envie de jouer le sophrologue ou le psychologue. Mais où sont donc les stewards ?  C’est à eux de gérer ce genre de situations habituellement. Ces derniers, au fond de l’avion sont donc un peu trop loin pour être interpelés. Ken n’hésitera pas à les appeler si la phobique fait une trop grande scène.  « On peut aussi prendre une douche, glisser et paf plouf ciao avocado comme vous dites. Y a une part de risque partout. » Peut-être pas franchement rassurant comme discours mais c’est bien connu, dans le dictionnaire à la définition de « tact » ou « délicatesse » il n’y a pas la photo de Kendall. Qu’est-ce qu’il pourrait bien dire de plus de toute façon ? Il pourrait lui dire n’importe quoi elle est trop apeurée pour réfléchir de manière rationnelle. Les statistiques c’est donc la meilleure carte du bouclé, selon lui c’est un bon moyen de relativiser, mais bon ce n’est pas l’avis de tout le monde visiblement. « J’vais nous porter la poisse, faut que je la ferme. » La poisse Kendall n’en sait rien, mais si elle pouvait garder le silence pour la tranquillité du policier ou des autres passagers de la première classe, ce serait très appréciable. Le bientôt trentenaire a envie de calme, de silence pour pouvoir ruminer tout seul sur son retour forcé à Brisbane. Pourtant, la passagère ne le laisse pas tranquille et face à son anxiété, Kendall se dit qu’il n’a pas le choix, s’il veut être tranquille il va devoir jouer le passager de soutien émotionnel. Il accepte donc qu’elle lui broie la main. Le policier ne peut pas s’empêcher de légèrement grimacer, les phalanges de sa voisine sont blanches à cause de la pression qu’elle exerce sur la main de Ken. Une fois le décollage passé il lui demande si elle se sent mieux, traduction : est-ce que tout ce cirque est terminé ? « Ah oui, j’vous la rends . » Le bouclé détend sa main comme il peut, elle lui a bien fait mal.  « En tout cas vous avez de la force, vous devriez participer à des concours de bras de fer. » Les émotions fortes décuplent la force, ce n’est donc pas très surprenant. « Ouais, mais attendez de me voir à l’atterrissage. » Le malaise est palpable, le bouclé est déjà agacé à l’idée de devoir refaire la même chose dans quelques heures. Puis elle éclate de rire, Ken se met à rire aussi, rire jaune tout de même mais il est soulagé qu’elle plaisante. Enfin elle plaisante maintenant mais il y a sûrement une part de vrai, ça ne le surprendrait pas qu’elle soit aussi terrorisée pour l’atterrissage. « Ha ! Je déconne. Prenez de grandes inspirations, tout va bien. » Il demande à voir, en tout cas -sous réserves de turbulences- il devrait être tranquille pour plusieurs heures. Il espère qu’il n’est pas tombé sur le genre de voisine qui passe tout le vol à parler, sinon cela s’annonce très très long. « Ca me fout un peu les nerfs, mais je j’vous en dois une. Merci. » Il hoche la tête, pour le bouclé c’est sa bonne action du mois pour ne pas dire du trimestre.    « Avec plaisir. » Il n’en pense pas un mot. « Si vous me filez vos coordonnées, je paierai pour votre séance de kiné ou d’ostéo. Ou les deux, vu le choc.  » Est-ce qu’il a envie de donner son numéro à quelqu’un comme ça ? Non, absolument pas. Il cherche donc un moyen de refuser sans la vexer pour autant. « Oh j’en ai vu d’autres, vous en faites pas ça ira. » Il lui répond avec un petit sourire gêné. Il espère qu’elle n’insistera pas davantage, sinon il sera obligé de la refouler de manière moins délicate et il n’a aucune envie de faire ça. « Moi c’est Zelda. Zelda Rivera, du coup. Si vous voulez demander à ne plus jamais voler à côté d’un passager de ce nom ça peut vous servir.  » Elle n’a toujours pas l’air décidée à le laisser tranquille, une situation qui le désespère un peu. «Kendall. Vous prenez souvent l’avion ? Ou c’est la première fois ? » Si elle fait le coup à chaque vol ça doit être assez pénible. En tout cas et même s’il ne compte pas prendre l’avion avant un moment, Kendall espère ne pas se retrouver à nouveau dans une situation comme ça. Il n’a pas forcément envie de lui faire la conversation, c’est plus une manière d’estimer sur les chances qu’ils se recroisent sur un vol un jour sont nulles ou existantes.