When all has been said and all has been done (Raeleah#2)

When all has been said and all has been done
Raelyn Blackwell & @Leah Baumann

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Leah avait à mes yeux ce défaut exaspérant d’avoir toujours besoin d’en faire des tonnes et d’exagérer. J’ai compris que ce n’était pas cool de glisser un comprimé de MDMA dans ton verre sans te prévenir, j’ai compris que c’était un peu un peu de trop de passer mon temps à te piquer publiquement, que c’était un peu violent de congédier sans cérémonial des filles qui gravitaient autour de nous parce qu’elles m’ennuyaient et de les surnommer Dumb et Dumber, et j’ai compris que tu n’avais pas réellement apprécié ma façon de prendre les choses en mains quand ton petit ami avait choisi mon canapé comme endroit pour pousser son dernier souffle. Oui, je veux bien admettre que je n’étais pas la jeune femme la plus délicate et prévenante du monde, et peut être que je ne gagnerais pas le trophée de l’amie de l’année – elle non plus cela dit – mais j’avais géré les choses lorsqu’elle en était incapable, nous évitant à tous de mauvais moments en perspective, puisque nous avions tous les trois consommés de la drogue. Alors oui, je ne l’avais pas fait par altruisme, pour tirer Shawn et Leah d’un mauvais pas, je l’avais fait pour me protéger moi et personne d’autre, mais bon sang est-ce que j’avais demandé à me réveiller avec le cadavre encore chaud de Tobias dans mon salon ? Est-ce que c’est moi qui lui avait glissé de force des comprimés dans la drogue ? Non, j’aurais aimé qu’elle soit capable de le reconnaitre, surtout à l’époque. Ma façon de gérer les choses avait été la seule que nous pouvions envisager, eux comme moi. L’adorable Leah aurait-elle préféré voir les flics débarquer chez elle pour enquêter sur les circonstances de la mort de son presque petit ami ? « Pour lui dire quoi exactement ? Que j’ai aidé à dissimuler un corps et que je me suis abstenue de reporter les circonstances du décès de mon ami il y a près de sept ans ? Je suis pas certaine des limites du fameux secret professionnel alors… On va éviter, hein. » Parmi mes nombreuses qualité ne figure pas celle de savoir retenir une pique lorsqu’elle me brule la langue, quelles que soient les circonstances, désolée Leah. « On ne peut pas réellement dire que t’as aidé à dissimuler un corps, c’est pas comme si t’avais filé le moindre coup de main. » Moi non plus à vrai dire, mais ça elle ne le savais pas. Je me fichais de savoir comment l’homme de main de Mitch avait réglé les choses, tant qu’il faisait disparaître le corps sans vie de mon appartement. L’aider à le trimballer et mettre en scène la parfaite petite overdose à son appartement aurait été inutile, Erik savait ce qu’il faisait et moi, je n’avais aucune envie d’abimer ma manucure. Peut-être qu’il n’était pas nécessaire que je précise ce dernier point à la brune. Bon le psy en tout cas oublions, c’était pour temps une idée qui me faisait sourire.

« C’est ce que tu t’es dit pour faire passer la pilule ? » Je hausse un sourcil, pas prête à avouer que si aujourd’hui je me fichais d’elle autant que de ce que j’avais mangé la veille au petit déjeuner, mon égo avait pris un coup lorsque je m’étais faite ignorée, lorsqu’elle avait fait la morte. Air détaché perfectionné avec les années je finis par hausser les épaules, comme si tout ça n’avait pas la moindre importance. Pas autant en tout cas que la nouvelle aventure dans laquelle Leah Baumann semblait s’être embarquée : la maternité. Mère célibataire de surcroit, belle vie de merde à mes yeux. « Moi aussi. » Si elle voulait allumer un cierge tous les dimanches en souhaitant que je n’élève jamais la moindre progéniture, j’étais prête à la payer. Enfin un point sur lequel nous étions parfaitement alignées. « Qui te dit que je prévois de l’élever seule ? Tu penses ça parce que tu as eu une enfance malheureuse ? On appelle ça un transfert tu sais, peut-être que je suis pas la seule qui devrait consulter en fin de compte. » Un air amusé, presque un air de défi se peint sur mon visage. Elle peut dire ce qu’elle pense, j’ai senti son trouble quand je lui ai demandé si quelqu’un l’attendait, tout comme j’avais interprété à mon sens correctement quand j’avais dépeins son potentiel conte de fée, maison à la campagne et Golden Retriever. Elle n’avait rien de tout ça, j’étais prête à y mettre ma main à couper. « On sait toutes les deux que j’ai visé juste Baumann. » Comme souvent en fait, parce que s’il y a quelque chose que je sais faire c’est lire les gens. Et la fermer lorsque je ne suis pas certaine de ce que j’avance. Et là j’en suis certaine, le géniteur de ce gamin ne fait plus partie du paysage amoureux de la brune. Pour mon plus grand malheur elle n’a pas tort non plus la godiche. Pas pour le transfert, mais j’ai bel et bien grandi au sein d’une famille monoparentale, mon père s’étant tiré avant que je ne sois en âge de me souvenir de quoi que ce soit le concernant. « Si tu parviens à t’en convaincre, tant mieux pour toi. » Je n’ai rien à prouver à la demoiselle, et me contente donc de lui renvoyer un sourire éclatant. Je n’ai pas ce besoin qu’ont beaucoup de femmes de trouver un homme avec lequel partager leur vie. Je ne l’ai plus en tout cas, et je préfèrerais me couper une main que d’admettre que j’ai été rêveuse et naïve en amour il y a bien des années, chose que j’ai payée au centuple à la mort d’Aaron. Aujourd’hui je me complais parfaitement dans ce mode de vie décadent et frivole, quand j’arrive à faire taire cette crainte qui sommeille en moi, celle d’un jour me retrouver seule. « C’est touchant de voir à quel point tu t’en fais pour moi en tout cas. » Mais tout le monde n’a pas besoin d’avoir une créature qui lui grandit dans l’abdomen pour se sentir femme, pour se sentir entière. Je n’ai jamais fait partie de ces femmes-là. « Ni l’un ni l’autre. Pourquoi tu t’obstines à croire que ma vie est destinée à être aussi foireuse que la tienne Raelyn ? C’est pas très sympa. » Et elle s’attendait à quoi au juste en me connaissant ? A ce que je lui organise une baby-shower, une gender reveal avec des ballons de couleurs bleue ou rose, que je lui offre le cadeau le plus cher sur sa liste de naissance et lui tienne la main le jour de l’accouchement ? Allons Leah, tu me connais pourtant mieux que ça. Être sympa ne fait pas partie de la longue liste de mes merveilleuses qualités, pas plus que de mon vocabulaire. « C’est pas la peine d’essayer de me convaincre que ta vie est formidable blanche neige, je te connais assez pour savoir quand tu mens, et tu transpire la détresse. » Je lui jette un regard teinté de dédain, le genre dont j’ai toujours été la spécialiste. « Rends toi un service et rends un service à tout le monde, débarrasse toi de ce gosse tant qu’il en est encore tant. Le monde compte assez de névrosés comme ça. » Avec une mère comme elle, que pourrait-il devenir d’autre ? Je lui adresse un grand sourire, l’observant de haut (et étant donné la taille que je mesure, heureusement qu’elle est accroupie, pour un plus bel effet.)

Elle semble pressée de mettre fin à ce délicieux intermède, et qu’elle se rassure je n’ai pas prévu de passer la nuit avec elle non plus. Mais dans une dernière volonté de la torturer – je ne pensais pas prendre un tel plaisir à la voir au bord de la crise d’angoisse, mon amie claustrophobe – je repousse le moment où non chemin se sépareront. « J’ai toujours mieux à faire quand il s’agit de toi. » Je prends mon plus bel air effaré pour lui répondre. « Et moi qui pensais que tu aurais au moins la politesse de chercher à devenir ce que je deviens. » Je n’ai pas réellement changé en fait, je me bonifie simplement avec le temps, comme un bon vin.

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Leur petite joute verbale continuait, Leah s’obstinant à chercher à faire comprendre sa logique à une Raelyn dénouée des mêmes émotions qu’elle – ou d’émotions tout court, d’ailleurs. Elle aurait beau s’évertuer à lui ouvrir les yeux sur ce qu’elle avait vécu cette nuit-là, elles n’avaient définitivement pas la même vision de cette histoire. La blonde se voyait comme une héroïne les ayant tous sauvés d’un aller simple vers la prison tandis que Leah avait tout simplement vécu un des évènements les plus traumatisants de sa vie, sous l’œil indifférent de son amie de l’époque. Leurs versions étaient opposées et plus rien ne viendrait changer ça après sept ans, il fallait qu’elle s’y fasse. Son interlocutrice ne se lassait pas de la regarder avec amusement, continuant à la provoquer ouvertement tout en suggérant qu’un passage chez le psychologue s’avérait peut-être nécessaire compte tenu de sa difficulté à tourner la page sur cet évènement. Secouant la tête, la brunette lui rétorqua les raisons évidentes qui l’avait amenée à éviter de demander de l’aide – car avouons-le, elle en aurait vraiment eu besoin – tout en levant les yeux au ciel, comme si elle implorait le tout-puissant de lui venir en aide en rétablissant le courant, ou alors en frappant Raelyn par la foudre. La dernière option, de préférence. « On ne peut pas réellement dire que t’as aidé à dissimuler un corps, c’est pas comme si t’avais filé le moindre coup de main. » Un soupir s’échappa des lèvres de la jeune femme qui commençait à perdre patience, à l’instar de Rae qui gagnait en assurance et qui semblait même se complaire dans cette situation. « C’est bon ne joue pas sur les mots. Au pire je suis complice, et c’est pas beaucoup mieux. » Lâcha-t-elle finalement en passant une main fatiguée sur son visage, lassée par cet échange stérile. Continuant dans les railleries, la blonde embraya sur un sujet qui s’avérait plus sensible à son égard puisque cela devait probablement être la première fois qu’elle se faisait ainsi plantée par une personne qu’elle considérait comme inférieure à elle. Oups. Elle ne l’avouerait jamais, mais elle avait été vexée ; Leah en était certaine. C’est d’ailleurs avec cette pensée en tête qu’elle ne put s’empêcher de souhaiter à voix haute que Raelyn ne se décide jamais à procréer, histoire d’éviter la propagation de la peste sur terre. La pique glissa sur son interlocutrice qui semblait assez d’accord avec cette idée finalement. La future maman commençait à manquer d’idée pour lui faire fermer son clapet une bonne fois pour toute, d’autant que Rae semblait avoir décelé son trouble sur sa propre grossesse, s’engouffrant dans la brèche avec une aisance déconcertante. « On sait toutes les deux que j’ai visé juste Baumann. » Oui elle avait visé juste ; elles se rencontraient à un moment difficile de sa vie, et Leah n’était pas vraiment en état psychologique de se défendre face à l’agressivité de son ancienne amie, manquant cruellement de confiance en elle en cet instant précis. « Si ça te permet de faire de beaux rêves ce soir, crois ce que tu veux. C’est quand même ce que tu fais toujours. » Répliqua-t-elle finalement sans lâcher son téléphone des yeux, espérant sans cesse y voir apparaître une barre signifiant qu’elle captait à nouveau. Malheureusement, la chance n’était pas de son côté ce soir. « C’est touchant de voir à quel point tu t’en fais pour moi en tout cas. » Leah releva les yeux vers elle, regrettant la position assise qu’elle avait désormais adopté sous peine de tomber dans les pommes en présence de la seule personne sur terre qui ne lui viendrait probablement pas en aide si tel était le cas. « Tu me connais, toujours là à m’inquiéter pour les petits déchets de l’humanité… » Ironisa-t-elle avec un sourire en coin, s’efforçant de garder le rythme sous peine de se faire dévorer par la petite blonde qui lui faisait face. Cette dernière appuyait là où ça faisait mal, enfonçant davantage le couteau dans la plaie béante qu’était sa rupture récente avec Stephen en dépit de cette grossesse qui la troublait plus qu’elle ne la réjouissait réellement. « C’est pas la peine d’essayer de me convaincre que ta vie est formidable blanche neige, je te connais assez pour savoir quand tu mens, et tu transpire la détresse. Rends toi un service et rends un service à tout le monde, débarrasse toi de ce gosse tant qu’il en est encore tant. Le monde compte assez de névrosés comme ça. » Leah accusa le coup, déglutissant difficilement alors que Raelyn la mettait face à la crainte qui la tenait au ventre depuis qu’elle avait vu que son test de grossesse était positif : la peur d’être une mauvaise mère, de ne pas être à la hauteur. A cet instant précis, elle sentit ses nerfs lâcher tandis qu’un sentiment de haine s’abattait sur elle comme un tsunami violent d’émotions négatives. « QUE VEUX TU QUE JE TE DISE ? OUI JE VIENS DE ME FAIRE PLAQUER PAR LE PÈRE D’UN ENFANT DONT JE VOULAIS MÊME PAS. C’EST CA QUE TU VOULAIS ENTENDRE ? » La voix et les mains tremblantes, ses yeux lançaient des éclairs en direction d’une Raelyn au visage satisfait. Elle regretta immédiatement ses paroles, mais il était trop tard. Tant pis, au moins elle la lâcherait avec ça maintenant qu’elle avait confessé être dans l’exacte situation qu’elle lui prêtait. « Fous moi la paix. » Ajouta-t-elle en serrant les dents, ignorant son sourire narquois et en se disant que peut-être la technique de l’autruche fonctionnerait peut-être dans ce cas précis. « Et moi qui pensais que tu aurais au moins la politesse de chercher à devenir ce que je deviens. » Apriori, fermer les yeux ne faisait pas disparaître la voix agaçante de la jeune Blackwell, et c’était bien dommage. A court d’idée, la brunette ouvrit un œil et laissa tomber sa tête contre la paroi en métal tout en faisant un geste en direction de la jeune femme. « Excuse-moi. Vas-y je t’écoute, qu’est-ce qu’il s’est passé de beau dans ta vie en sept longues années ? Ça m’intéresse. » Ironisa-t-elle une nouvelle fois, se disant que si elle allait dans son sens elle se lasserait peut-être finalement.

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« C’est bon ne joue pas sur les mots. Au pire je suis complice, et c’est pas beaucoup mieux. » Voilà qu’elle voulait se faire passer pour plus dure à cuire qu’elle ne l’était. Il fallait qu’elle arrêter de rêver Baumann, tout ce qu’elle avait fait c’était pleurnicher en venant me tirer d’un sommeil bien mérité, pleurnicher une fois de retour au salon, et pleurnicher quand Erik avait débarqué pour nous tirer de la regrettable situation dans laquelle nous nous étions fichus. Les souvenirs de cette nuit n’étaient plus assez nets pour que je me souvienne de ce qu’il s’était exactement passé entre Tobias et la brune, mais si elle avait pleurniché après l’acte également, cela avait dû être une bien triste dernière soirée pour lui. Le genre dernier repas du condamné, mais en beaucoup moins drôle et réussi. Elle avait pété un câble, et si les mots exacts qu’elle avait employés ne me revenaient pas je me souviens qu’elle avait frôlé l’hystérie avant de quitter l’appartement telle la drama queen qu’elle était. Non, complice, le mot la mettait trop en valeur, lui donnait trop de crédit – d’après mes standards et mon esprit dérangé. Shawn n’avait pas été mieux cela dit, puisqu’il était resté tétanisé, comme un gamin qu’il m’avait fallu prendre pas la main. Avec lui au moins j’avais eu la certitude que rien de tout ce qu’il s’était passé ne sortirait de l’appartement, parce que je savais l’emprise que j’avais sur le jeune homme. Pour Leah j’avais eu des doutes, j’avais hésité à lui rendre visite pour m’assurer qu’elle garderait sa si grande bouche bien fermée, et les jours et semaines avaient passé et personne n’était jamais venu frapper à ma porte pour demander de comptes quant à la mort de Tobias. « Soit. Je dois bien te reconnaître ça, t’as fermé ta gueule. J’avoue que si j’étais à peu près certaine que Shawn le ferait, j’avais des doutes en ce qui te concernait. Tu veux une médaille ? » Pour avoir fait ce que toute personne censée aurait fait à sa place ? Je lui avais offert l’occasion de se sortir de cette histoire, de ne rien avoir à gérer et de ne plus jamais se retourner sur cette nuit, elle avait beau faire la fine bouche aujourd’hui, elle l’avait saisie cette opportunité. Elle n’avait rien demandé par contre, ni médaille ni reconnaissance, mais je suis bien incapable de retenir mes piques quand elles me viennent. « Si ça te permet de faire de beaux rêves ce soir, crois ce que tu veux. C’est quand même ce que tu fais toujours. » Je hausse les épaules, simplement et d’un air détaché. Oui, j’ai toujours été bornée et entêtée, et si je m’intéresse aux individus qui m’entourent c’est avant tout pour mieux les comprendre et savoir les manipuler, pas pour connaitre leurs points de vue. Le mien m’avait toujours plutôt bien réussi. J’ai raison, et le fait qu’elle ne m’alimente plus en arguments pour me contredire me le prouve. Un sourire étire mes lèvres alors qu’elle me répond, cherchant toujours à tirer son épingle du jeu, à jouer dans la cour des grands, à jouer un rôle de femme de caractère qui décidément ne lui va pas du tout. « Tu me connais, toujours là à m’inquiéter pour les petits déchets de l’humanité… » J’ai bien envie de lui demander si c’est pour ça qu’elle tournait autour de Tobias, et parvient presque à m’en empêcher. Presque. Mais je suis une sale gosse, je n’ai jamais changé même si j’ai gagné en maturité alors je lève un sourcil, et ne perds pas mon air amusé alors que pour une fois, je la regarde de haut, dans tous les sens du terme. « Je me suis toujours demandé ce qui te plaisait chez Tobias, je suppose que j’ai ma réponse. » La phrase est encore plus cruelle à l’oral qu’elle ne l’était dans mon esprit : c’est parfait, et je ne peux empêcher un air fier de s’accrocher à mon visage.

Avant de la piquer, une fois de plus, sans faire réellement attention aux mots que j’emploie, à la violence de mes paroles. Mais vraisemblablement il s’agit de la pique de trop pour la brunette, dont les nerfs lâchent alors qu’elle se met à hurler. « QUE VEUX TU QUE JE TE DISE ? OUI JE VIENS DE ME FAIRE PLAQUER PAR LE PÈRE D’UN ENFANT DONT JE VOULAIS MÊME PAS. C’EST CA QUE TU VOULAIS ENTENDRE ? » C’est exactement le genre de genre que mon esprit dérangé voulait entendre, effectivement. Le genre de chose qui me fait sourire, mais je ne m’attendais pas à une réaction aussi vive de la part de Leah, et finalement je reste silencieuse quelques secondes, étudiant ses paroles et les différentes émotions qui passent sur son visage. J’ai visé juste, et j’ai touché une corde sensible de toute évidence. C’est ce qu’il me fallait pour être satisfaite, ce qu’il me fallait pour mettre fin à ce jeu pervers et malsain : gagner. Lui faire perdre son sourire suffisant, lui rappeler qu’elle m’est inférieure. « Fous moi la paix. » Son manque de répartie n’est rien de moins que la cerise sur le gâteau, et j’accroche son regard quelques secondes avant de hausser les épaules, comme si elle m’avait parlé de la pluie et du beau temps, comme si était en train de me dire que je ne devrais pas sortir aussi peu couverte sous la pluie, et pas de m’annoncer que sa vie est en miette. Je suis une insensible chronique, je l’ai toujours été, même lorsque nous nous connaissions. « Du coup je suppose que ma suggestion n’étais pas si idiote ou inappropriée que ça. » Celle de mettre fin à sa grossesse pour éviter à ce gosse de finir bourré de névroses. Il me semblerait vu son état actuel que j’ai été de bon conseil finalement. Je pourrais poser une main sur son épaule, reconnaître sa peine et sa douleur, je pourrais m’excuse même si j’étais une toute autre personne. Mais ce n’est pas le genre de la maison, et la violence dont j’ai fait preuve à son égard : je ne la regrette pas une seule seconde. Mais satisfaite je ne m’amuse plus autant, et discrètement je jette un œil à mon téléphone pour taper un message à l’amant que j’ai laissé en plan, celui qui habite dans l’immeuble de la brune, pour le prévenir de la situation, pour qu’il s’occupe de nous faire sortir de là. Dommage, je ne m’étais pas autant amusée depuis des siècles. « Excuse-moi. Vas-y je t’écoute, qu’est-ce qu’il s’est passé de beau dans ta vie en sept longues années ? Ça m’intéresse. » Je verrouille à nouveau mon téléphone pour relever les yeux vers la brune, avant de hausser les épaules. « Non. » Je marque une pause, fronçant le nez. « Je ne m’amuse plus. Et tu ne l’as pas mérité. » Finalement je viens croiser mes bras contre ma poitrine. « Jolie tirade. On dirait presque que tu t’es trouvé un caractère en sept ans. » Et c’est peut-être la phrase que j’ai prononcée qui se rapproche le plus d’un compliment, à mes yeux.

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Leah s'évertuait à se donner ce rôle de complice, car c'était bien ce qu'elle avait été, pas vrai? Pour quelle autre obscure raison se serait-elle tue au sujet des circonstances de la mort de Tobias si ça n'avait pas été pour se protéger, hein? C'était ce dont elle s'était persuadé durant toutes ses années, se convainquant qu'il s'agissait là de la meilleure chose à faire pour elle. Et le simple fait que Raelyn ne sape cette image qu'elle s'était construite au fil des ans la désarçonnait, car cela remettait tout en question. Affronter le regard des parents de Tobias n'avait pas été facile, mais elle s'était persuadée que c'était la chose à faire. Pour les soutenir de loin. Ou alors était-ce pour brouiller les pistes? Elle n'en savait plus rien. Les pensées qui lui traversaient l'esprit à l'époque étaient désormais floues et Leah regrettait de se trouver dans une posture qui l'obligeait à ressasser tout ça. « Soit. Je dois bien te reconnaître ça, t’as fermé ta gueule. J’avoue que si j’étais à peu près certaine que Shawn le ferait, j’avais des doutes en ce qui te concernait. Tu veux une médaille ? »Evidemment qu'elle n'allait pas aller dans son sens, ça lui écorcherait la bouche de le faire. Blasée et à court d'arguments, Leah se contenta une nouvelle de hausser les épaules. Shawn l'avait appelée en paniquant une fois, lui faisant part de ses doutes quant au bienfondé de leur comportement. Et c'était Leah qui lui avait dit de la fermer et de ne plus jamais parler de cette histoire, alors... Est-ce que Raelyn se doutait une seule seconde que son précieux Shawn n'était qu'une petite nature de plus dans son univers impitoyable? Elle en doutait très fort. "Non, ça ira." Elle se plongea ensuite dans l'observation minutieuse de sa main qui lui paraissait cent fois plus intéressante que la perspective de continuer cette conversation avec la blonde qui commençait à vraiment la gonfler avec son air suffisant. Les piques s'enchaînaient, les unes après les autres, et la brunette se demandait encore pourquoi elle continuait à lui donner satisfaction en lui répondant. Car c'était bien ça qui l'amusait; ces affrontements puérils. Elle n'avait sans doute que ça dans sa pauvre vie, et depuis le temps elle devait tomber à court de partenaires avec du répondant. « Je me suis toujours demandé ce qui te plaisait chez Tobias, je suppose que j’ai ma réponse. »Cette énième réplique fit grincer des dents la brune qui n'appréciait toujours pas le fait d'insulter les morts de cette façon, surtout ceux de qui elles avaient été proches même si Raelyn s'évertuait à agir comme si ça n'était pas le cas. Elle s'abstint de répondre, sentant une nouvelle fois ses nerfs atteindre une limite qu'elle ne voulait pas découvrir. Et malheureusement, ce fut tout de même rapidement le cas. La situation dans laquelle elle se trouvait, cette impression d'être enfermée et de ne plus jamais savoir ressortir, tout ça provoquait une sensation d'angoisse chez la brunette qui se sentait défaillir à mesure que les paroles de la blonde l'atteignaient avec de plus en plus de facilité et de violence. Elle laissa donc les vannes s'ouvrir, lui hurlant au visage ces vérités qu'elle désirait tant entendre de sa bouche. Oui, elle était enceinte et seule, car le père ne voulait plus entendre parler d'elle. Elle détourna le regard, évitant le sourire satisfait qui ne tarderait pas à s'afficher sur le visage machiavélique de Raelyn en entendant à quel point sa vie était désormais pathétique. Le silence survint, salvateur à souhait, mais ne dura que l'espace de quelques secondes, sans doute le temps qu'il avait fallu à la blonde pour trouver quoi dire pour l'enfoncer définitivement. « Du coup je suppose que ma suggestion n’était pas si idiote ou inappropriée que ça. » Et voilà. Ce qui faisait le plus mal était probablement le fait que cette idée avait germé dans son esprit bien avant que Raelyn ne lui fasse cette suggestion, et qu'elle avait vraiment considéré cette option. Elle la considérait encore, d'ailleurs. "Pour une fois que tu dis quelque chose d'intelligent." Répliqua-t-elle en haussant les épaules, le regard obstinément tourné vers l'écran de son téléphone qui lui annonçait toujours que le réseau n'était pas revenu. Blasée au possible, Leah décida de prendre sur elle en faisant semblant de s'intéresser à la vie de son interlocutrice, persuadée que cela restait sans doute la meilleure façon de passer le temps - au vu des circonstances, en tout cas. « Non. Je ne m’amuse plus. Et tu ne l’as pas mérité. » Oh seigneur. Serait-ce l'heure de la délivrance? « Jolie tirade. On dirait presque que tu t’es trouvé un caractère en sept ans. » La brunette fronça le nez d'un air mauvais, jetant un oeil vers le téléphone que Raelyn avait en main. "Tu faisais quoi là?" Elle fronça les sourcils, persuadée de l'avoir vue écrire quelque chose.

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Je le sens, que la conversation touche à a fin. Qu’il va falloir que je prenne la décision de nous sortir de là (une fois de plus), que j’avoue avoir toujours eu un peu de réseau, suffisamment en tout cas pour appeler à l’aide. Il évident que je pourrais prétexter le retrouver d’un coup, mais ainsi j’échapperais au courroux de Leah, et ça c’était hors de question. Je voulais voir le mépris sur son doux visage lorsqu’elle comprendrait qu’une fois n’est pas coutume, je m’étais foutue de sa gueule. Après tout, autant rendre nos retrouvailles mémorables non ? Cette conversation touche à sa fin parce que nous ne sommes pas des amies, ni même des connaissances pouvant prendre des nouvelles de l’autre à bâtons rompus. Ce qu’elle semble nourrir à mon égard depuis pas mal d’années c’est de la haine, quand moi je n’ai jamais rien fait d’autre que jouer avec elle. Mais nous avons passé l’âge de jouer, toutes les deux, et si je me suis autorisée à la faire le temps d’une parenthèse, coupées du monde dans un ascenseur, j’ai d’autres chats à fouetter et Leah a surement envie de pouvoir rentrer chez elle est fondre en larmes, casser quelque chose ou je ne sais quoi pour calmer ses nerfs. Je ne savais pas la demoiselle claustrophobes si bien que si j’avais dû orchestrer des retrouvailles, je n’aurais pas fait mieux que celles que le destin venait de nous offrir.

Sachant cela je la pique encore, et ces courts instants auront au moins eu le mérite de lui faire exorciser ce qu’il s’était passé ce soir-là. Peut-être pas complètement, on ne cicatrise pas de ce genre de traumatisme en une demie heure, mais je mettrais ma main à couper que c’est la première fois en sept ans qu’elle peut parler librement des événements de 2012. Qu’elle me prenne comme coupable au fond je m’en fiche, des choses à me reprocher j’en ai, des morts sur la conscience aussi, mais celle de Tobias n’a jamais pesé bien lourd. « Non, ça ira. » Je hausse les épaules. Notre vision des choses est de toute façon bien trop différentes pour que l’une ne puisse convaincre l’autre, et je pense que la fin du monde arrivera avant que nous nous rabibochions. Ce n’est pas vraiment une perte et je ne verserai aucune larme, je n’ai pas besoin d’une future maman dépressive dans mon entourage. Elle m’amusait à l’époque, mais je me suis lassée de ces jeux de sale gosses. Quand je joue maintenant c’est pour détruire, briser, plus de barrières de sécurités. J’aurais détruit la jeune Leah, celle qui avait à peine vingt ans, si je l’avais rencontrée aujourd’hui. La preuve en est qu’en quelques dizaines de minutes j’ai réussi à la mettre hors d’elle, mais une fois cet objectif atteint je ne m’amuse plus autant, j’ai eu ce que je voulais, maintenant je suis lassée, comme je me lasse de tout. « Pour une fois que tu dis quelque chose d'intelligent. » Sa pique ne m’atteint pas et lui renvoie simplement un sourire radieux, tapant sur mon téléphone alors qu’elle est focalisée sur le sien. Il est temps de délivrer la pauvre colombe, avant qu’elle ne me claque entre les doigts et ne puisse ajouter sa mort ou celle de la chose qui grandit à l’intérieur de son ventre aux choses qu’elle me reproche. Elle est blanche et je me demande si elle ne va pas finir par tourner de l’œil. « Tu faisais quoi là? » Verrouillant à nouveau mon téléphone je crois mes bras en dessous de ma poitrine avant de relever les yeux vers elle. « Pourquoi t’es ma mère ? » Bon courage dans ce cas. « Peut-être que je vérifiais simplement si j’avais du réseau, Einstein. J’ai pas encore de sixième sens pour le deviner. » Elle sent le coup fourré venir, finalement elle me connait encore un peu. Pas assez pour avoir deviné plus tôt que je me foutais de sa gueule, mais assez pour savoir que je suis capable de ce genre de surprise. Alors je me pare de mon plus bel air innocent et je hausse les épaules, comme si je ne voyais vraiment pas où elle voulait en venir. Elle n’a pas le temps de me sauter à la gorge cependant que la lumière se rallume, et l’ascenseur se met à bouger. Je lève la tête un instant, au fond soulagée moi aussi qu’il n’y ait aucune complication supplémentaire. Finalement la cabine se stabilise, et je n’ai le temps que de prendre un sourire radieux et de tourner une dernière fois la tête vers la brune pour une dernière pique, avant que les portes de s’ouvrent. « Où alors j’envoyais un message pour nous sortir encore une fois de la merde. On dirait que tu m’en dois deux. » La silhouette de mon amant se dessine, et à côté de lui celle d’un homme qui doit surement être le concierge de l’immeuble. C’est ce dernier qui prend la parole en premier. « Tout va bien les filles ? On est descendus au compteur, l’orage avait fait sauté un fusible et disjoncté l’alimentation de l’ascenseur. Vous savez ces vieilles machines, ce sont des veilles dames capricieuses ! » Je lui adresse un sourire hypocrite avant de quitter la cage d’ascenseur déposant mes lèvres dans le cou de mon amant du soir alors qu’il passe un bras dans mon dos. Il lève un sourcil, surement devant l’air épuisé et à vif de la brunette. « Tout va bien ? » Je me retourne vers la demoiselle, haussant une dernière fois les épaules. « Oui, Leah et moi sommes de vieilles connaissances. Quelle sotte, j’ai pas réalisé plus tôt que j’avais assez de réseau pour te prévenir. » Il me connait assez pour savoir que cela sonnait faux, et que je n’ai rien de l’ingénue que je semble bien décidée à jouer. « Sans rancune ? » Je m’adresse à brune une dernière fois avant de sentir une pression dans mon dos, le bras du jeune homme qui m’entraine pour rejoindre son appartement. Par les escaliers cette fois.

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When all has been said and all has been done .

La brunette commençait vraiment à être à bout, et elle était arrivée à un stade où elle ignorait si c’était à cause de la panne d’ascenseur ou simplement de la présence de Raelyn dans ledit ascenseur. Probablement un savant mélange des deux, dans tous les cas ses nerfs étaient à vif et elle n’avait désormais même plus le courage de rétorquer aux innombrables piques dont la blonde avait le secret. Sept longues années s’étaient passées, et en dépit de tout ça, les choses n’avaient pas changé d’un iota. Elle était toujours la même jeune femme qui s’amusait au dépend des autres tandis qu’elle restait éternelle à elle-même, bien trop à fleur de peau que pour que ses insultes lui glissent dessus. La conversation – si on pouvait appelé cet échange de cette façon – commençait à s’essouffler, et Leah s’en fichait bien. Encore un mot de sa bouche et elle ne tarderait pas à lui sauter à la gorge pour l’empêcher de parler ; bébé ou pas. Il y avait des limites que la brunette avait déjà atteint depuis quelques minutes et à ce stade, il ne lui suffisait de plus grand chose pour partir en vrille et montrer à Raelyn ce qu’elle pensait de ses bassesses. Et apriori, cette dernière semblait de toute façon s’être lassée de leur joute verbale puisqu’elle était entrain de pianoter à toute vitesse sur son portable – un fait qui n’échappa pas à la jeune femme qui ne put s’empêcher de lui demander ce qu’elle faisait, le tout en plissant des yeux avec un air inquisiteur. Est-ce qu’elle envoyait un message ? Cela voudrait donc dire qu’elles avaient de nouveau du réseau ? Un rapide coup d’œil à son écran lui indiqua que ça n’était toujours pas son cas, mais une lueur d’espoir s’alluma dans son regard qui regardait pourtant obstinément en direction de Raelyn ; il y avait quelque chose de louche. « Pourquoi t’es ma mère ? » Dieu merci, la réponse était non. Elle s’abstint pourtant de répondre, ne voulant pas gâcher la moindre perspective de se sortir de cet espace confiné. Le plus vite serait le mieux. « Peut-être que je vérifiais simplement si j’avais du réseau, Einstein. J’ai pas encore de sixième sens pour le deviner. » Hein hein. Peu importe, tant qu’elle en avait et que le SOS était lancé. Leah ouvrit la bouche pour lui répondre, mais l’ascenseur choisit cet exact moment pour se remettre en route. Si la brunette n’avait pas suffisamment pleuré durant les dernières heures, elle se serait probablement mise à fondre en larmes de soulagement. « Où alors j’envoyais un message pour nous sortir encore une fois de la merde. On dirait que tu m’en dois deux. » Ajouta finalement Raelyn avec un petit sourire en coin, comme pour aménager un effet supplémentaire alors que les portes de la cage d’ascenseur s’ouvrait, dévoilant deux silhouettes masculines. Encore une fois, elle se posait en sauveuse alors qu’elle n’y était sans doute pour rien. « Tout va bien les filles ? On est descendus au compteur, l’orage avait fait sauté un fusible et disjoncté l’alimentation de l’ascenseur. Vous savez ces vieilles machines, ce sont des veilles dames capricieuses ! » Leah s’extirpa de l’ascenseur avec son aide, relevant un air renfrogné dans sa direction. « J’aimerais que ça soit la dernière expérience de ce genre que j’aie à vivre Gary, ou alors que quelqu’un vienne plus tôt, parce que là... » Elle jeta une œillade rapide en direction de la blonde avant de se reconcentrer sur son interlocuteur. « … J’allais pas tarder à commettre un meurtre. » Elle dévoila ses dents blanches avant d’observer pour la première fois l’homme qui avait réceptionné Raelyn ; sans doute l’amant dont elle lui avait parlé. « Tout va bien ? » La brunette hocha simplement la tête, peu désireuse de s’attarder plus que nécessaire en compagnie de la jeune femme. « Oui, Leah et moi sommes de vieilles connaissances. Quelle sotte, j’ai pas réalisé plus tôt que j’avais assez de réseau pour te prévenir. » Leah serra les dents, constatant qu’elle s’était joué d’elle une fois de plus. « Sans rancune ? » Lança-t-elle avec un air innocent tout en se dirigeant vers les escaliers, ce à quoi Leah ne prit même pas la peine de répondre. Elle n’allait pas lui accorder une énième satisfaction, il en était hors de question. L’ignorant avec superbe, elle souhaita une bonne soirée au concierge de l’immeuble avant de prendre le chemin de son appartement, bien décidée à oublier l’existence de Raelyn Blackwell une bonne fois pour toute.

RP TERMINE.

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