An unexpected encounter

Ça y est, ma fille est devant un écran et je peux donc me permettre d’aller courir. Sauf que j’ai à peine mis le pied dehors que je reçois un sms de Sohan -lu par mon casque- qu’il ne pourra pas venir ce matin. Quelle horreur ! Je vais devoir courir seule avec tous les étrangers autour. Ok, on fait demi-tour et on prend la bombe au poivre. Je ne suis jamais trop prudente. Surtout depuis mon agression. Je fais super gaffe. J’allais à la salle où je retrouvai mon copain John et je tentai d’oublier ce mauvais moment. Je me stoppe donc pour mettre de la musique dans mes oreilles et repartir de plus belle. J’adapte ma foulée à ma respiration avant de tourner vers Brisbane River. Je prends une bonne bouffée d’air frais et les odeurs de café viennent de chatouiller mes narines. Lukà allait réussir à me rendre accro à la caféine. Je commence à courir plus vite pour y échapper. Je risquai de craquer, d’en acheter un deux ou trois et de tous me les enfiler. Heureusement que je ne retournai plus au bureau car j’aurai pu foutre sur la tronche de mon enfoiré de patron. J’attendais que mon livre soit sorti pour lui foutre un doigt d’honneur -dans sa tronche- digne d’un maléfuck et de me casser sans demander mon reste. Qui plus est, l’héritage n’allait pas tarder à être débloqué puisque j’ai fait ma part du boulot et j’allais pouvoir m’acheter une belle maison. Pour être honnête, j’ai commencé à regarder les petites annonces quelques jours auparavant et à part des taudis, je ne trouvais pas grand-chose. Je verrai avec Lulu s’il avait des bons plans. Perdue dans mes pensées, je continuai de courir avant de… BOUM. Rentrer dans quelqu’un pour finir projeter sur les fesses et manquer de me cogner la tête … dans une poubelle ? Ah bah serai-je bonne à jouer aux ordures à cause de ma vieillesse ? Je me relève avant la dame pour me masser le popotin et me tourner vers la jeune dame. J’espère que je ne lui vais pas fait mal. J’ôte mon casque avant de venir courir vers lui pour lui tendre la main mais la demoiselle m’ignore. Urgh. Bonne ambiance. « Je… » J’ai peur de toi, madame. On dirait que tu vas me couper en petits dés comme Hannibal Lecter et me faire revenir à la poêle comme des dés de patates. « Je suis dé… désolée, je n’ai pas vu où j’allais. » Ne pas chialer, ne pas chialer. J’aime pas les gens qui agressent les autres sans raisons. Gens mauvais. Socialisation ? Qu’est-ce que c’est ? Ça se mange ? « B… B… Bon, je vous embête pas plus longtemps. » Et je me la joue comme bip bip et je me barre en courant de suite ou j’attends qu’elle me fusille avec les rayons lasers à la place des yeux ? je sens que je me ratatine sur place avant de la regarder avec des gros yeux d’enfant effrayé. Chose facile quand on fait un mètre cinquante. Ici, Shay au pays des géants désagréables.

An unexpected encounter

Je n’aimais pas trop les gens revêches. J’en avais peur. Car ça me rappelait sans cesse mon agression. Ma première pensée fut de lui dire d’aller se faire cuire un œuf. Mais comme je ne voulais pas commencer ma journée en ayant un échange toxique, je pris sur moi. sans doute ma condition de mère avait-elle pris le pas sur ma nature de femme forte ? Je faisais pourtant des arts martiaux et j’envoyai bouler tous les mecs qui me parlaient. Enfin tous sauf Lukà mais il semblait différent. Mais je ne le connaissais pas donc je pouvais me tromper. Je me relevai sans mal pour inspecter les dégâts. Une main légèrement éraflée, j’allais avoir un bleu sur les fesses mais en somme j’allais mieux que la femme que j’avais percuté. Je pris soin de la regarder en bégayant comme une gourdasse. Elle avait un certain charme atypique. Pas un physique qu’on pouvait voir partout. Un nez qui pourrait faire rougir Cléopâtre et de grands yeux en colère. Des yeux qui me fusillaient du regard. Comment lui en vouloir ? Je lui avais fait mal sans le savoir. Je vins vers elle pour lui tendre une main tremblante alors qu’elle m’ignora superbement. Je n’appréciai pas trop les femmes dans ce genre. On dirait des chiens enragés qui mordent la main qui les nourrit. Je me pinçai les lèvres alors qu’elle me demanda de me calmer. Mais bien sûr. J’ai l’impression d’être le grain de maïs oublié dans la boite. Je déglutis avant de lui faire un petit sourire en hochant la tête. Que répondre à ça ? Je passe une main dans mes cheveux avant de froncer les sourcils tandis que la demoiselle vient à me tendre la main pour demander mon aide. Je pensais qu’elle était indépendante. Deux choix s’offraient à moi. Soit je la laissais au sol comme punition pour son comportement désagréable, soit je l’aidais. Signe que je passais l’éponge sur sa réaction disproportionnée. J’optai pour la seconde option avant de venir saisir sa main -plus petite que la mienne- et mobiliser mes muscles pour la relever. L’avantage de faire énormément de sport. « Vous avez mal où ? Demandai-je d’une toute petite voix en la regardant. » Elle était tellement svelte que j’en étais jalouse. J’ai tellement eu du mal pour perdre du poids. « Je m’appelle Shay. Au cas où… ça vous intéresse. » Même si j’étais certaine que non.

An unexpected encounter

Je ne supportais pas les gens désagréables. Certes, je l’avais bousculé mais on avait l’impression que je l’avais giflé voire même insulté. Alors que je lui tends la main pour l’aider à se relever et après un refus, elle accepte. Une fois debout, je me rends compte qu’elle n’ait pas aussi intimidante qu’elle en a l’air. Au contraire, elle semble avoir ma taille, de beaux cheveux décolorés mais des yeux remplis de colère. Naturellement car je suis un être humain et donc dotée de compassion, je lui demande où elle a mal. Nulle part. Réponse crachée telle du venin sur moi alors que je n’ai rien fait. Je serai tentée de lui dire d’aller se faire foutre. C’est ce que j’aurai fait avant mais mes cours de yoga m’ont aidée à prendre sur moi. Je ferme donc les yeux pour mon inspiration et expirer longuement. Je constate qu’elle fait des étirements afin de vérifier si elle a mal quelque part. Décidément, plus cette femme ouvre la bouche, plus elle en devient insultante. Je fronce les sourcils sans répondre. A quoi bon alimenter un conflit ? Elle avait l’attitude d’une femme qui semblait vouloir chercher le conflit avec tout le monde. Je croise donc les bras sur ma poitrine sans lui venir en aide alors qu’elle claudique jusqu’au banc. Elle pourrait toujours se brosser. Je prends le temps de lui dire mon prénom et je peux voir d’ores et déjà que je l’agace. Raelyn donc, me crache son prénom au visage avec un air dégouté et j’ai un petit sourire avec limite un rire. Je me retiens, c’est difficile. Déjà que le tutoiement me gênait pas mal mais ses paroles inquisitrices me donnent l’air d’être le plus gros monstre de l’univers. « Et toi que faisais-tu ? Parce que tu crois être toute blanche et que je suis la seule responsable. » Je passe une main dans ma nuque avant de venir murmurer des paroles incompréhensibles en ourdou avant de ramasser mon téléphone qui était tombé au sol durant la chute. « Je me suis excusée pour ça. Toi non. J’allais même te proposer un café mais tu sais, va cracher ton venin ailleurs. » Je la détaille de haut en bas avant de faire une mine dégoûtée. « Et démerde-toi avec ta cheville. Si t’as des soucis de colère, tu fais comme tout le monde et tu vas à la salle de boxe. Inutile de faire une putain d’affaire d’état pour quelque chose qui n’est qu’un accident. » Puis, je l’abandonne là. Ma compassion a des limites. Il n’était même pas huit heures et j’avais des choses à faire. Je me dirige vers le petit food truck qui vend des cafés pour me prendre un thé et aller m’asseoir à une table avant de sortir une feuille de ma poche et un crayon. La règle numéro une d’un écrivain : toujours avoir une feuille sur soi au cas où l’inspiration viendrait à nous prendre.