we didn't start the fire
Jo Carter & @Charlie Fawcett (crédit gif/wifeymakesgifs)

Proposer des plans à Jo et récolter un non franc et massif c’était l’assurance de la voir débarquer tout de même parce qu’elle avait un esprit de contradiction aussi aiguisé que l’arrondi de ses ongles qu’elle passa lascivement dans la masse de ses longs cheveux dénoués, rallongés par une longueur d’extension qui scintillaient sous les lumières de l’aéroport qu’elle quitta en trottinant. C’était une bonne chose, que le trajet Brisbane-Sydney soit aussi court en avion, non ? Alors qu’elle avait quitté l’une en 2022, elle avait atterri dans l’autre en 2023, et ce sans devoir se coltiner la corvée de présenter ses voeux à qui que ce soit ce qui, soyons honnêtes, représentait une félicité non-négligeable pour la mère-grincheuse qu’elle était, allergique à la bienveillance et aux accolades hypocrites.
Il était tard, en cette nuit du premier de l’an, le prime de The X Factor de la veille avait été comme tous les autres, et son esprit avait vaqué au projet qui l’attendait une fois que sa place serait assurée par la volonté des téléspectateurs à la faire rester. Jo, elle était populaire, ça restait quelque chose dont elle était fière malgré l’impression qu’elle avait qu’évoluer seule lui pesait plus sur le coeur qu’elle n’essayait de le faire croire, mais plutôt crever que de jouer le jeu de la production après qu’elle se soit prise le bec avec Midas. Pour la énième fois. Parce qu’elle n’était pas capable de fermer sa gueule, parce qu’il lui tapait sur les nerfs, parce qu’elle était aussi frustrée d’être si proche de lui tout en ayant le sentiment d’être beaucoup trop loin en même temps — est-ce qu’elle avait dit qu’il lui tapait sur les nerfs ? Peu importait. Elle avait décampé rapidement ce soir-là, son avion l’attendant pour la ramener à la maison, là où elle passerait les deux prochains jours sans supervision "Le Fortitude Music Hall. J’ai pas l’adresse exacte, mais tu sais te servir d’un GPS, je crois?" fit-elle à son chauffeur assigné à chacun de ses retours sur Brisbane. Il lui fit un clin d’oeil par-dessus son siège, accueillant son arrivée comme il le faisait très souvent, c’est-à-dire par une oeillade dans le rétroviseur et un "Bonsoir, petite." qui lui faisait rouler des yeux et grogner sans en avoir l’air. Il était assez professionnel pour la boucler après ça cependant, et c’était une bonne chose qu’il ne lui présenta aucun voeux ce soir. Elle n’avait pas envie de parler, Jo. Elle avait juste envie de profiter d’un moment offert par Nicholas et Vance.
Bien sûr qu’elle s’était foutue de leur poire quand elle avait su pour leur gig du Nouvel An,  les traitant d’amateurs tout juste capables de faire dans le spectacle de kermesse, mais il ne fallait pas s’attendre à mieux avec elle, quand bien même elle était fière et heureuse de cette opportunité qu’on leur offrait. Elle avait dit à Nicholas qu’elle ne viendrait pas parce qu’elle n’en aurait pas le temps, ce qui n’était pas un mensonge au demeurant, mais le temps, elle avait fait en sorte de le retrouver simplement pour échapper à sa chambre d’hôtel et aux propositions des autres candidats de sortir pour célébrer la nouvelle année. Si elle faisait des efforts, de gros efforts, pour sociabiliser, elle n’avait pas envie de voir davantage leurs sales gueules, alors tant pis pour la planète et son bilan carbone, mais sa bataille, elle l’avait choisie depuis longtemps, Josephine.

Elle se fit déposer presque devant l’entrée de la salle de concert, là où s’étendait un cordon de sécurité dispersé qu’elle n’aurait pas besoin de contourner quand bien même sa petite notoriété le lui permettrait sans aucun mal — c’était ça le vrai avantage de passer à la télé. Il s’agissait d’un concert gratuit pour lequel elle n’aurait besoin que d’un bracelet fluorescent pour se frayer un chemin dans la foule, ne la craignant pas malgré le fait que son nombre de followers augmentait de jour en jour, et que ses passages réguliers sur le petit écran la rendait tributaire de l’attention de ceux qui avaient assez de jugeote pour savoir qui elle était "Je t’appelle quand je veux rentrer. Et bonne année au fait." fit-elle tout de même en descendant de sa voiture aux vitres teintées, ses paroles faisant naître un petit sourire sur les lèvres de son chauffeur qui quitta la place sitôt qu’elle fût descendue.
Glissant ses cheveux sur un côté de son épaule dénudée, n’ayant toujours pas appris à enfiler une veste correctement et laissant une bonne partie de ses bras visibles aux oeillades curieuses, sa robe lui descendant à peine au-dessus des genoux, elle pêcha son téléphone portable dans son décolleté pour envoyer un ça a intérêt de valoir le coup à Nicholas — qui ne comprendrait sûrement rien parce qu’il était deux de tension, mais ce n’était pas important finalement. Elle était là, et elle s’avança sur ses baskets, plus confortables lorsqu’elle prenait l’avion, qui la rendaient cependant beaucoup trop petite pour qu’elle ne se sente véritablement à son aise, ainsi à une drôle de hauteur, mais elle savait bien faire semblant. Filant jusqu’à l’entrée embouteillée pour une raison qui la fit souffler si fort qu’elle en eut quelques mèches qui voltigea sur sa droite, c’est ce côté vers lequel elle choisit de tourner la tête pour supporter l’attente, et croiser le regard d’une blonde — Charlie en l’occurence, cette radasse — qu’elle ne salua même pas, persiflant juste entre ses dents lorsqu’elle détourna la tête "Bonne putain d’année à toi, Jo."

Le Fortitude Music Hall. Ce n’est pas le meilleur endroit où elle aura passé le nouvel an, mais cela reste bien moins pire que le sous-sol chez Jimmy, en 2009, où ses parents venaient voir toutes les quinze minutes si personne n’était mort et, surtout, vérifier que personne ne s’amuse. C’était très important, et surtout très réussi. Alors oui, le Music hall est au moins devant ça, même si c’est en prenant de l’âge que Charlie se rend compte que ce genre de chose ne l’amuse peut-être plus autant qu’avant et qu’elle n’aurait pas dû insister à ce point pour échanger son soir de travail avec un collègue et libérer son 31. Elle n’aurait rien raté. Les verres sont hors de prix, la musique pas si bonne que ça, et Cameron n’est même pas à ses côtés, ce qui veut dire qu’elle se sent terriblement seule, même auprès de ses amis qu’elle pourra toujours embrasser par dépit à minuit. C’était le plan, et ça l’est longtemps resté, jusqu’à ce qu’elle reconnaisse à ses côtés une tête brune qui aurait tout l’air d’avoir quinze ans, si on s’en réfère uniquement à sa taille. "Bonne putain d’année à toi, Jo." Du Jo dans toute sa splendeur: délicieuse, avenante, encourageante, et d’une éternelle bonne humeur à toute épreuve.

C’est bien elle, cela ne fait aucun doute, et Charlie ne craint même pas d’être tombée sur sa jumelle perdue et échangée à la naissance à la maternité: un caractère comme ça, il ne peut y en avoir qu’un dans ce monde, sinon il aurait déjà implosé. “T’étais pas à la télé ce soir, toi ?” Non pas qu’elle regarde l’émission. Mais si, oui, un peu. A moitié pour dire à ses amies qu’elle a vu Midas tout nu, et à moitié pour dire que Jo est une sacré connasse (qu’elle n’a même pas vu toute nue). “T’as encore quelques minutes avant de revoir ton discours et me souhaiter plein de bonnes choses pour cette année.” Son sourire est aussi immense qu’il est faux, l’amertume quant à leur dernière discussion (si on peut encore l’appeler comme ça) étant omniprésente. “T’es venue seule ?” Mais Charlie restera toujours Charlie, à s’accrocher à des espoirs impossibles, à momentanément oublier qu’elle a maintenant un petit-ami qu’elle aime, à chercher à faire changer une Jo qui ne semble certainement pas le vouloir ni même en être capable. Elle s’accroche à des espoirs impossibles parce que c’est à peu près tout ce qu’il lui reste, puisque Jo est une véritable tornade qui détruit tout sur son chemin à la seconde où elle la croise déjà à nouveau, que ce soit voulu ou non. Ce soir, elle le jure, elle ne savait pas qu’elle serait là. Si tel avait été le cas, elle se serait bien moins plainte du choix de salle et elle aurait attendu les derniers coups de journée avec moins d’impatience - ou bien plus, justement. “Faut qu’ils se calment sur les rouges à lèvres foncés, ça rend pas bien à la télé.” Et si elle n’a que quelques secondes avant que Jo recommence à la traiter de tous les noms, autant commencer par le plus important.

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"T’étais pas en train de faire des passes à l’angle de la rue y a encore une heure, toi ?" En même temps, c’était facile de le faire démarrer, Jo. Elle en était de plus en plus consciente, et peut-être que travailler sur cette capacité affolante qu’elle avait de sauter à la gorge de quiconque serait la seule bonne résolution qu’elle prendrait pour l’année qui venait de débuter, allez savoir.
En attendant, elle se détourna très vite du regard de Charlie pour ravaler le reste de sa phrase et se passer en boucle les préceptes bouddhistes de Cathy, sa "nounou" à The X Factor, qui avait appris à gérer les élans dramatiques de sa pouliche avec une certitude ancrée en elle : elle ne le faisait pas exprès, d’être comme ça. Lorsqu’elle dépassait le stade de l’ébullition, elle réussissait même à être une crème, une observation que Cathy défendait avec bonne volonté auprès de ceux qui la jugeaient simplement comme une sale petite gamine mal élevée.  Et c’était vrai, qu’elle ne le faisait pas exprès. Au moins une fois sur deux en tout cas, et si elle se tortilla un instant pour faire mine de chercher quelque chose dans la poche de sa veste quand Charlie lui conseilla de revoir son discours de bonne année, ce fût seulement pour faire la maline et lui dire en même temps "Oh attends, j’ai justement un truc pour toi dans ma poche." La majeur de sa main droite dressée à la sortie brusque de la poche de sa veste, elle le présenta à Charlie comme le seul bon voeu qu’elle lui souhaiterait jamais, et elle devrait sans contenter.

Parce qu’elle ne comptait pas lui adresser davantage la parole que ça, parce qu’elle ne comptait pas non plus se laisser dicter la marche à suivre par son incapacité à gérer sa colère et à monter sur ses grands chevaux à cause de ses lacunes émotionnelles. Elle avait déjà fait assez de dégât comme ça. Elle s’en mordait les doigts à mesure que les primes passaient et qu’elle sentait un noeud dans son estomac qui l’empêchait de considérer tout ça comme une réelle opportunité à saisir, lui faisant davantage regretter la signature de son contrat qu’autre chose. À cause de sa brouille avec Midas principalement, la honte de s’être comportée comme une vraie peste et d’avoir touché un nerf sensible lors de l’ouverture de la saison étant une raison valable pour se faire toute petite — ça, ce n’était pas si difficile — et mesurer ses propos.
Un rien déclencherait un incendie de son côté, elle en était aussi sûre qu’elle se connaissait par coeur et que Charlie faisait partie des combustibles qui la faisaient exploser plus souvent qu’à son tour. Encore plus depuis qu’elle savait pour elle et Midas. Elle eut un soupir, du genre las qui fit frémir ses narines et fermer très brièvement ses yeux, faisant papillonner la longueur factice de ses cils, puis très vite envisager de se tailler sans même voir Nicholas et Vance jouer. Seulement, la question que Charlie lui posa, elle la fit rester pour lui répondre l’air de rien, un regard en coin posé sur elle avec l’une de ses mines les plus dédaigneuses empruntée pour lui faire entendre qu’elle lui tapait sur le système, elle aussi "Il est pas là si c’est ça le sens de ta question." Que ça le soit ou pas, elle s’en carrait pas mal de choses sur l’instant. Respire profondément, Jo, que lui aurait susurré Cathy à l’oreille  — et c’est ce qu’elle fit à cet instant-là, la chanteuse. Sentant sa trachée lui brûler quand des mots raisonnables sortirent de ses lèvres brillantes de gloss, elle s’entendit dire à la blonde "Écoute, je suis pas là pour ça." Lorsqu’elle fit une remarque sur les rouge à lèvres sélectionnés par ses maquilleuses pour la mettre en valeur — comme si elle avait une notion du style impeccable, elle. Dans la foulée, elle remonta d’un coup d’épaule la veste qu’elle portait sur elle pour dissimuler sa nudité partielle aux yeux de ceux qui l’entouraient, affirmant ses yeux sur le profil de la jeune femme à qui elle continuait de s’adresser comme si elle ne s’était pas interrompue, droite sur ses baskets et campant sur sa volonté fragile de ne pas trop se faire remarquer ce soir "C’est pas le moment, c’est pas l’endroit." Elle ne ferait honte à personne, c’était quelque chose qu’elle refusait de faire sous le prétexte qu’elle était en colère, frustrée, et elle ne savait quoi encore. Ses yeux trouvèrent ceux de Charlie, ses sourcils se froncèrent avec détermination, mais sans agressivité — ô miracle "Tu fais ta vie, je fais la mienne. Je crois que c’est un deal qui a fonctionné jusque-là, hm ? Autant poursuivre sur cette voie." C’était le moment des bonnes résolutions à prendre après tout.

"T’étais pas en train de faire des passes à l’angle de la rue y a encore une heure, toi ?" Elle la trouve attendrissante, Jo et ses centimètres manquants. C’est en sa direction que Charlie dépose déjà ses yeux clairs à nouveau, un sourire au coin des lèvres. Elle est prévisible et en même temps, elle ne manque jamais d’originalité dans la façon d’insulter autrui. "Oh attends, j’ai justement un truc pour toi dans ma poche." Un majestueux doigt dressé, voilà ce qu’elle a exactement pour elle, et voilà ce que Charlie s’attendait aussi à voir. Elle ne feint même pas l’étonnement mais ne cherche pas non plus à cacher son ennui, sans doute déjà fatiguée d’avoir le même genre de discussion qu’elle aurait pu avoir à quinze ans. Comme si de rien n’était, et presque imperturbable, la blonde continue à lui parler et à lui poser des questions, passant outre les doigts en l’air et autres insultes. Venant de Jo, cela veut sans doute dire ‘bonsoir, tu m’as manqué Charlie’. Cela ne peut être que ça, de toute façon, pas vrai ? "Il est pas là si c’est ça le sens de ta question." - “Il est un grand garçon dont je me moque des allées et venues.” Il était enivrant pour un temps et, déjà, Charlie est passée à autre chose - sans que cela semble pourtant être le cas de Jo, de toute évidence. Elle lui demandait si elle avait des amies dans les environs - et oui, bien sûr qu’elle se posait aussi la question pour Midas, de toute évidence, mais elle ne l’avouera pas.

"Écoute, je suis pas là pour ça. C’est pas le moment, c’est pas l’endroit." Ça ne sera jamais le lieu, et ça sera encore moins le moment. Peu importe quand et où Charlie tente à nouveau, ce ne sera jamais bien. Elle le sait, tout comme elle sait qu’elle a bien cherché ce qui lui arrive désormais, mais ce n’est pas pour autant qu’elle aime ça. "Tu fais ta vie, je fais la mienne. Je crois que c’est un deal qui a fonctionné jusque-là, hm ? Autant poursuivre sur cette voie." - "Ça a vraiment fonctionné ? Tu vas vraiment me regarder droit dans les yeux en me disant ça ?” Charlie tourne enfin pleinement son buste en sa direction pour, de son côté, effectivement la regarder dans les yeux. A ses yeux, c’est loin d’être un deal qui a fonctionné. Pas le moins du monde, même, parce qu’elle ressent encore la terrible sensation qu’il lui manque quelque chose. Une toute petite part d’un quelque chose sur laquelle elle n’arrive pas à mettre de mot, mais qui lui manque sincèrement pour se sentir complète, ou même heureuse. “Je suis avec quelqu’un. Je toucherai pas à…” A Midas, oui, bien sûr qu’elle parle de Midas ; tout comme elle se rend compte qu’elles sont au milieu de la foule, qui a des oreilles curieuses un peu partout. Et aucune d’elle n’a envie d’alimenter un feu déjà bien assez grand. “A lui.” Elle comprendra, et c’est tout ce qui importe, quand bien même elles semblent parler en code. “Plus de blague non plus. J’ai compris. Je vous laisse jouer à touche-pipi.” Ils sont tous les deux des grandes gueules à ce sujet, mais leur histoire semble faire un pas en avant et deux en arrière pour ce qu’en comprend Charlie (c’est à dire pas grand chose, parce qu’elle ne veut justement rien savoir), et quand bien même le terme ne fera pas plaisir à entendre, c’est celui qu’elle estime être immuable. Elle ne fera pas d’excuses, et elle ne se censurera pas non plus, ce qui risque de rapidement leur faire rencontrer une impasse. “C’est bon, j’ai ton attention pour trente secondes sans que t’aies envie de m’insulter ?”

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Jo Carter & @Charlie Fawcett (crédit gif/wifeymakesgifs)

Concernant Midas, et ce comme très souvent lorsqu’il était mentionné, elle ne dit rien de plus, Jo. Elle n’avait pas envie de parler de lui avec Charlie, elle n’avait pas envie de parler de lui avec grand-monde en toute honnêteté, et ce pour des raisons moins évidentes que celles qu’elle incombait à la jeune femme postée à ses côtés. Si elle se mettait à réfléchir un peu plus à cet instant-ci, sa ligne de conduite du soir se désagrégerait d’un coup d’un seul pour revenir sur ce qu’elle avait laissé coulé lors de leur précédente discussion — à l’image du milk-shake qu’elle lui avait envoyé à la gueule. Jo n’avait pas rétorqué à ce moment-là, elle l’avait laissée partir sans tenter de la retenir, de gré ou de force, et c’était parce que, malgré tout, elle avait assez de considération pour la blonde pour ne pas vouloir la démolir, seulement elle ne devait pas trop la tenter non plus.
Alors, assez sobrement quand on connaissait le personnage qu’elle était, elle choisit de ne pas faire preuve d’ironie pour lui faire remarquer qu’après avoir bien foutue la merde, elle s’en moquait, ouais. Non, elle secoua simplement la tête, sa queue de cheval marquant son geste en bringuebalant pour effleurer sa propre la nuque. Jo revint à ses principes, aussi éphémères qu’ils le seraient avant que sa nature profonde reprenne le dessus, puis elle dériva ses yeux pour les poser devant elle en priant elle ne savait quel entité pour que Nicholas et Vance se soient échinés à mettre son nom sur une quelconque liste de privilégiés et qu’on viendrait la chercher fissa pour échapper à ce qu’elle sentait poindre de Charlie qui se tourna entièrement vers elle lorsqu’elle, elle argua qu’il valait mieux qu’elles restent chacune à leur place.

Elle s’entendit expirer par les narines quand Charlie reprit la parole pour la mettre face à ses paroles et lui soutirer, quoi, des regrets ? Jo n’en avait pas, pas la concernant en tout cas "Tu me manques pas, Charlie." qu’elle lui fit en tournant ses yeux dans sa direction, soutenant les siens pendant qu’elle haussait les épaules comme si elle venait de prononcer l’évidence même. Et c’était un peu vrai, qu’elle ne lui manquait pas, s’entêtant à ne pas penser aux fois où elles avaient réussi à s’entendre assez bien pour passer de bons moments sans prétendre être autre chose que de bonnes amies qui s’embrassaient juste parce que c’était agréable, parfois "C’est ça que je dois te dire pour que tu me foutes la paix ? Alors je te le dis : tu me manques pas, Charlie." répéta-t-elle en espérant que ce serait assez convainquant pour que ça la blesse et qu’elle retourne à ses occupations du soir, les siennes revêtant une parure différente tandis qu’elle s’obstinait, la blonde.
Ce qu’elle ajouta, Jo dut l’assimiler en deux temps ; d’abord, elle s’arrêta sur ce qui la fit ricaner juste assez fort pour que naisse le sarcasme, celui qu’elle lui décocha en la regardant de nouveau de haut en bas, un sourcil arqué "Ça, c’est déjà trop tard, nan ?" Elle avait déjà touché à Midas, à moins d’une faille spatio-temporelle, elle ne pourrait pas revenir dessus, et quelque chose lui disait dans tous les cas que si l’occasion lui était donnée de réparer ça, elle n’en ferait pas grand-chose — et Jo le comprenait, elle n’argumenterait pas sur l’idée que c’était grisant s’avoir l’attention du jeune homme, quand bien même ce n’était pas celle qu’à elle, il accordait. Mais peu importait. Ne surtout pas s’arrêter sur ce qu’elle s’imaginait quand elle devait accepter l’idée que Charlie avait été proche de lui d’une autre façon qu’elle, passer vite à la pensée suivante pour ne pas déroger à sa résolution ; elle en secoua la tête pour se remettre sur le droit chemin, revenant en même temps sur la manière dont elle avait entamé sa promesse, et qui eut le don de la laisser plus froide que le reste parce qu’il fallait s'y attendre, non ? Charlie n’attendait qu’une chose de ceux qu’ils l’entouraient : qu’ils l’aiment "Je croyais que t’étais pas intéressée ?" Une question à laquelle elle n’attendait pas tellement de réponse à dire vrai. Pour autant, ça la faisait bien marrer ; il y avait de ça quelques mois à peine, elles passaient un pseudo-pacte qui les mettait à l’abri du simple fait de se laisser conter fleurette par quiconque.
Elle rit de nouveau, juste un peu moins lorsqu’elle l’entendit résumer sa relation avec Midas à un jeu d’enfants. L’air de rien, ça lui fit carrer les mâchoires, mais ne rien dire, et surtout ne rien faire, de plus. Elle croisa seulement les bras sur sa poitrine moulée dans un décolleté à la profondeur de sa réputation, avançant d’un cran dans la file quand elle objecta à sa requête "Même si tu l’as, qu’est-ce que tu comptes en faire ?" Le regard porté devant elle, Jo continua, les traits de son visage toujours parés de son maquillage du soir s’animant en même temps qu’elle parlait "J’ai pas envie de parler avec toi pour que tu me dises ce que j’ai pas besoin d’entendre. Passe à autre chose." Ça lui serait salvateur, d’autant qu’elle ajouta, dans une oeillade rapide qu’elle posa sur elle plus par habitude que pour autre chose "T’as quelqu’un maintenant, ça devrait être suffisant."

"Tu me manques pas, Charlie." Et ça fait mal à entendre, parce que l’inverse n’est pas vrai. Jo en est consciente, de toute évidence, mais Charlie ne saurait pas dire si elle parle en toute et simple honnêteté ou si elle lui dit ça en sachant les dégâts que ces simples mots causeront. Au fond d’elle, elle penche pour une hypothèse bien pire encore: que les deux soient exactes. "C’est ça que je dois te dire pour que tu me foutes la paix ? Alors je te le dis : tu me manques pas, Charlie." - “Au risque de te décevoir, on est pas dans un escape game où tu dois trouver un code pour sortir.” Mais si tel avait été le cas, elle n’en serait vraiment, vraiment pas loin. Jo a ce don de remettre en perspective la liste des personnes qu’on peut détester, juste parce qu’elle est incroyablement douée pour se faire une place au sommet, même alors que Charlie semble encline à passer l’éponge sur tous ses faits et gestes, sans nul doute à outrance.

Alors, sans que ce ne soit aucunement une bonne idée, Charlie persiste. Elle sort les arguments, elle explique qu’elle est avec quelqu’un, elle souligne le fait qu’elle ne compte plus s’approcher de Midas - pour l’heure, du moins, parce qu’elle a tout de même son numéro d’enregistré. "Ça, c’est déjà trop tard, nan ?" Ajoute l’enfant blessé, laissant la blonde rouler des yeux. Elle se pensait rancunière, mais bon sang, c’était avant de se rendre compte de ce qu’il en est pour Josephine. “Tu peux pas black lister toutes les filles qu’il a sauté.” Si, elle le peut, et elle serait capable de tenir un putain de carnet avec les noms. Voilà un exemple concret du simple fait que Jo Carter ne connaît que peu de limites, et certainement pas le terme de “raisonnable”. "Je croyais que t’étais pas intéressée ?" Elle revient dans un second temps sur l’information qui la prend sûrement de court: Charlie est en couple. “Je l’étais pas. C’est pas comme si je m’étais inscrite sur Tinder.” Mais elle mentirait si elle disait ne pas avoir tourné autour de Cameron pendant un certain temps avant qu’il ne le remarque, enfin. Ce ne sont pas des informations qu’elle transmettra à Jo, de toute façon, à commencer parce qu’elle ne veut pas les entendre, et aussi et surtout parce qu’elle trouvera le moyen de faire de Charlie la méchante de l’histoire, que ce soit justifié ou non. “Tu l’étais pas non plus de toute façon, ça devrait pas te poser de problème.” Elle était bien heureuse de l’idée qu’elles puissent s’embrasser sans conséquences, alors elle n’a pas intérêt à s’en plaindre maintenant que Charlie a réussi à concrétiser et pas elle.

"Même si tu l’as, qu’est-ce que tu comptes en faire ? J’ai pas envie de parler avec toi pour que tu me dises ce que j’ai pas besoin d’entendre. Passe à autre chose." Passe à autre chose, dit celle qui lui reproche encore d’avoir vu son pas petit-ami, des mois après les faits. T’as quelqu’un maintenant, ça devrait être suffisant." - “Enlève toi de la tête l’idée que je veux te baiser.” Qu’elle soit en couple ou non ne change rien au fait qu’elle a envie de retrouver Jo, un tant soi peu, et de passer du temps avec elle, même s’il y a de fortes chances que ce dernier soit ponctué seulement de disputes. “T’es quand même culottée de me demander de passer à autre chose alors que t’es un putain de disque rayé à propos d’un coup d’un soir dont j’ai aucune intention de te rabâcher les oreilles avec.” Elle l’a fait, oui, d’accord, mais c’est juste parce que Jo l’avait cherché. “A moi tu me manques. Même si tu casses les couilles.” Et elle déteste déjà ces mots, parce qu’elle ne peut que se douter qu’ils ne trouveront par leur cible ou, tout du moins, qu’elle ne lui répondra pas ce qu’elle attend.

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Jo Carter & @Charlie Fawcett (crédit gif/wifeymakesgifs)

Tu veux parier ?, c’est l’énergie que renvoyait le petit sourire carnassier qui releva l’une des pommettes de Jo lorsque Charlie reprit la parole pour souligner qu’elle ne pouvait pas black lister tout le tableau de chasse de Midas. Ses épaules se haussèrent lorsqu’elle retrouva une posture plus humble, dans le sens de la file d’attente, le regard fixement posé devant elle quand elle mûrissait secrètement sa certitude ; bien sûr que si qu’elle était capable de faire ce genre de choses, et bien plus encore. Elle finit néanmoins par ajouter "Peut-être pas. Par contre je peux black lister toutes mes amies qui se vantent de l’avoir fait." Pas qu’il y en avait toute une rangée. Quoique. Qu’est-ce qu’elle en savait.

Elle aurait dû suivre son propre conseil et passer à autre chose. Mais non, il fallait qu’elle torde cette histoire dans tous les sens avant de se dire que ce n’était qu’une anecdote, le genre qu’on se raconte en sirotant en milk-shake et en se fendant la poire. Dans un autre univers probablement qu’elle en était capable, mais dans la présente I’ll get over it, I just need to be dramatic first resterait sa ligne de conduite.
Comme si Charlie ne savait pas que, dans sa grande fierté, Jo ne lui laisserait jamais obtenir le dernier mot à ce sujet — comme sur tous les autres à dire vrai, elle n’était pas du genre à prioriser ses combats lorsqu’il s’agissait de mauvaise foi "Et je le suis toujours pas", intéressée "alors tant mieux pour toi." Elle ne pouvait pas être plus sincère à ce moment-là, ne voyant aucun problème au fait que Charlie se soit trouvé un gus pour palier à son besoin constant d’amour et d’attention. Ça la faisait juste sourire sous cape de la voir monter sur ses grands chevaux en se figurant sans doute qu’elle essaierait de quoi, la faire change d’avis alors qu’elle la savait foncièrement réfractaire au simple fait de s’engager ? Chacun ses problèmes. Jo en avait déjà assez pour vouloir ressentir rien d’autre que de l’indifférence à cette annonce, l’attachement qu’elle ressentait vis-à-vis de la jeune femme n’étant pas assez fort pour qu’elle ressente un quelconque sentiment de jalousie à l’idée de l’imaginer avec quelqu’un d’autre. Grand bien lui faisait, c’était tout ce qu’elle en pensait.

Elle était prête à reprendre tranquillement sa vie. Mais il fallait dire ce qui était, Charlie était au moins aussi têtue qu’elle. Un léger rire lui échappa à Jo lorsqu’elle lui conseilla de se retirer les idées qu’elle se faisait de la tête et de nouveau, elle tourna son regard vers elle juste pour la fixer sans ciller pendant que sa voix dégringolait en intensité pour se changer en un léger murmure "Ha ouais ? Ça aurait été quoi ta prochaine requête quand t’en aurais eu marre de prendre des milkshakes et de me rouler des pelles ?" Parce qu’elles n’étaient plus des adolescentes qui se cherchaient sur le plan de leurs envies et de leurs désirs et que c’était le petit talent de Charlie d’en demander toujours un peu plus, il y aurait eu un palier qu’elle aurait pris plaisir à surmonter, c’était aussi clair que ses yeux qu’elle ne lâcha pas des yeux une seule seconde à ce moment-là. Jo arqua un sourcil et ce en poursuivant comme si elle ne s’était pas interrompue "Je suis pas née de la dernière pluie, bien sûr que tu veux me baiser, et je te le reproche pas", décidément, ce n’était pas son point fort la modestie "je te dis juste de passer à autre chose parce que ça arrivera pas, maintenant ou plus tard." Point final. Elle aussi devait s’enlever de là toutes les idées qui lui passaient par la tête.
"Ça aussi c’est déjà trop tard." Elle lui avait déjà rabâché les oreilles avec ce fameux coup d’un soir qui méritait sûrement qu’on le cite par son prénom — ce que Jo ne ferait plus à partir de là à dire vrai, et ce uniquement pour se distancer de l’idée que ça lui faisait du mal de l’associer à la blonde qu’elle en avait en face d’elle. Une main levée devant son propre née plus tard dans un signe de balayage-express du tour que fit son sang dans ses veines, et elle fit un pas en plus dans la file, mettant un terme aux paroles de Charlie avec les siennes "Tu sais quoi, t’aurais juste pu fermer ta gueule. J’aurais mieux géré que tu fasses tes coups en douce plutôt que tu viennes exprès me trouver pour me raconter toute cette histoire ; tu savais que ça me ferait du mal." Ou pas, ça ne changerait pas le fait qu’elle avait eu cette impression, et qu’elle ne la quitterait pas tant qu’elle aurait terminé d’être dramatique à ce propos. Tout en croisant les bras sur sa poitrine, elle laissa filer ce qui aurait dû être ses dernières paroles "Et c’est le cas. Heureuse ? T’auras au moins gagné cette satisfaction là à défaut de m’avoir fait jouir." Connasse, qu’elle aurait pu compléter, mais elle ne le fit pas, serrant les dents assez fort pour que la requête qu’elle lui fit juste après, elle soit agressive et menaçante, encore plus quand elle se tourna complètement vers elle dans la manoeuvre "Arrête. Tout de suite." D’essayer de la prendre par les sentiments en semant les graines du manque. Et si la forme n’était pas la bonne, rarement capable de douceur, Jo restait néanmoins authentique au point de laisser filer la possibilité, malgré ce qu’elle lui avait quelques instants plus tôt, et ses yeux s’accrochant aux siens pour qu’elle puisse y lire ce qu’elle voudrait, qu’elle lui manquait peut-être un peu aussi "Je suis sérieuse. J’ai pas envie de dire ou de faire un truc que je vais regretter, alors arrête tes conneries maintenant."

"Peut-être pas. Par contre je peux black lister toutes mes amies qui se vantent de l’avoir fait." Et c’est pathétique qu’elle se retrouve à souligner avec un certain soulagement qu’elle est une amie, ou qu’elle l’a au moins été, à un moment donné. C’est mieux que rien, et elle prend, même si elle choisit de ne pas revenir sur le fait que Jo n’aurait aucune honte à la black lister et la rayer de sa vie une bonne fois pour toutes. "Ha ouais ? Ça aurait été quoi ta prochaine requête quand t’en aurais eu marre de prendre des milkshakes et de me rouler des pelles ?" - “J’imagine qu’on le saura jamais.” Elle répond donc, aussi simplement que cela. Elle aimait bien jouer à l’enfant, Charlie, et les milkshakes autant que les baisers volés, ça lui allait très bien, elle le jure. Elle pourrait ajouter qu’elle pouvait toujours coucher avec Midas à côté pour répondre à ses envies, mais elle n’a pas besoin de mettre de l’huile sur le feu pour que Jo s’énerve toujours un peu plus à chaque nouvelle seconde écoulée. Charlie se contente de le penser très fort et, telle une enfant, ça l’amuse ; parce qu’elle a l’impression d’avoir gagné et d’avoir eu le prix que Jo convoitait, simplement en claquant des doigts et l’exigeant. Jo aurait pu l’avoir il y a bien longtemps, si elle n’était pas aussi têtue et imbuvable.

"Je suis pas née de la dernière pluie, bien sûr que tu veux me baiser, et je te le reproche pas je te dis juste de passer à autre chose parce que ça arrivera pas, maintenant ou plus tard."
“Personne va te baiser et tu vas baiser personne. On l’a compris, Jeanne d’Arc.”

C’est l’hôpital qui se joue de la charité, voilà ce qu’elle en pense, et voilà ce sur quoi elle est fatiguée de toujours argumenter, parce que ni elle ni Jo n’est prête à bouger de ses positions. "Tu sais quoi, t’aurais juste pu fermer ta gueule. J’aurais mieux géré que tu fasses tes coups en douce plutôt que tu viennes exprès me trouver pour me raconter toute cette histoire ; tu savais que ça me ferait du mal." Et à nouveau, Charlie sourit dans le vide, froidement. Plus rien ne semble exister autour d’elle, et elle s’en moque bien que quelqu’un puisse reconnaître Jo et se délecter de sa dispute avec la blonde, tout en tentant d’y comprendre quoi que ce soit. “T’aurais mieux géré de rien du tout.” C’est simplement plus facile à statuer ici et maintenant alors que le scenario n’existera jamais. Tout le monde peut refaire le monde avec des si et Jo semble avoir à cœur de faire croire à qui veut bien l’entendre que non, il n’y a aucun problème dans le fait d’avoir touché à son précieux, précieux Midas. Tellement précieux qu’elle n’y touche même pas de son côté, mais que [i]ça lui fait du mal qu’on le fasse à sa place. “Baise-le une bonne fois pour toutes et personne n’y touchera plus, t’es vraiment pas croyable à faire des histoires alors que ça pourrait être simple.” Parfois, Charlie se dit qu’elle aurait dû naître homme, parce qu’elle se retrouve à penser comme eux. Qu’elle marque son territoire, Jo, et enfin elle sera légitime de montrer les crocs si quelqu’un fait des yeux doux à Midas.

Elle ressemble à un Chihuahua mal éduqué dès que Charlie ose énoncer l’idée qu’elle lui ment. Quiconque connaît un minimum les chiens sait que ce sont les petites bestioles les plus hargneuses et dangereuses. "Arrête. Tout de suite. Je suis sérieuse. J’ai pas envie de dire ou de faire un truc que je vais regretter, alors arrête tes conneries maintenant." Elle ne veut pas discuter de Midas de près ou de loin, elle ne veut pas parler de leur pseudo-amitié-envie-de-baise, elle ne veut pas entendre d’excuses. Elle ne veut rien entendre et tout ce qu’elle fait, c’est montrer les dents. Charlie serre les poings alors qu’elle est en réalité bien plus triste qu’autre chose, incapable de trouver comment réparer les choses. “Pas envie de montrer que t’en as quelque chose à foutre, au fond ?” Ce n’est pas ce qu’elle sous-entendait, bien sûr, mais c’est ce que Charlie veut voir et entendre. Elle veut lui faire comprendre qu’elle n’a pas à monter sur ses grands chevaux avec elle, pas alors qu’elle l’a déjà observée dans des situations difficiles et qu’elle n’a pas pour autant une image différente de sa personne. “C’est parce que je suis têtue que j’agis comme une connasse, mais c’est aussi parce que je suis têtue que je compte pas te laisser tomber.” Même si Jo sera la première à crier au harcèlement, elle et toute son objectivité et ses nuances.[/i]

we didn't start the fire
Jo Carter & @Charlie Fawcett (crédit gif/wifeymakesgifs)

"Tu devrais peut-être suivre mon exemple, ça t’éviterais de te retrouver dans ce genre de situation ou d’avoir à élever deux gosses à même pas 30 ans." Si elle voulait la traiter de prude, ça lui ferait une belle jambe. Jo n’avait jamais prétendu enchaîner les conquêtes, elle était relativement raisonnable pour quelqu’un qu’on accusait une fois sur deux d’être une pute sous le prétexte qu’elle portait des robes raz la salle de jeux. Pour autant, elle pouvait attaquer aussi fort si on remettait ses moeurs en cause, et ce en appuyant exactement là où ça ferait mouche.
"Ça doit être tellement facile de penser comme toi." Elle eut un petit rire caustique Jo, secouant la tête en se sommant de ne pas la regarder plus longtemps et continuant comme si elle ne s’était pas arrêté "De parquer les gens que tu rencontres dans la catégorie de ceux que tu baises ou de ceux que tu baises pas." A croire qu’elle ne pensait qu’à ça "T’as vraiment le chemin de pensées d'un ado attardé, putain." Et elle pensait bien d’un ado au masculin. Charlie, elle ne voyait pas plus loin que le bout de son nez, ou quand elle le faisait, c’était pour se demander combien de temps exactement il lui faudrait pour se glisser dans les sous-vêtements de celui ou celle qu’elle avait sous le nez.

Si elle avait été un peu honnête sur la question, si elle avait essayé de creuser vraiment pour raccorder les fils de la relation que Jo entretenait avec Midas, elle aurait peut-être compris à quel point ça ne pouvait pas être aussi simple, non. Seulement, elle avait utilisé la nuit qu’elle avait passé avec lui pour le faire, essayant de provoquer une réaction chez Jo. Et alors qu’elle était arrivée à ses fins, elle venait chouiner sur l’idée qu’elle préférait désormais maintenir ses distances avec elle, non seulement pour se protéger du mal que ça lui faisait d’avoir la preuve directe que le jeune homme avait continué sa vie, mais surtout qu’elle de son côté avait inconsciemment attendu pour le faire, nourrissant espoirs et illusions tout en essayant de se convaincre qu’elle le haïssait. Rien que ça, ça prouvait que ça ne pouvait pas être aussi simple qu’elle le sous-entendait.
A partir du moment où Charlie avait démontré une certaine fierté à avoir remué quelque chose en elle, Jo avait décidé que tout ce qu’elle aurait pu lui dire à ce sujet, elle le garderait pour elle. Elle ne lui faisait pas confiance à ce propos, c'était aussi simple que ça, et là où elle ferait toutes les confidences du monde à Megan, elle réfléchirait à au moins dix fois avant de partager ses secrets du genre avec Charlie. Alors, elle en tirerait les conclusions qu’elle voulait, elle continuerait à croire que ce que Jo couvait n’était pas grand-chose d’autre qu’une envie passagère dont elle se départirait une fois qu’elle aurait réussi à sauter le pas — ce n’était pas ça le problème, le pas elle pouvait le sauter maintenant, elle n’aurait même pas besoin de faire davantage d’effort que ça tant elle savait au plus profond d’elle-même que Midas n’attendait que ça, lui aussi. C’était autre chose qui la poussait à ménager ses effets, l’accumulation de choses, de situations, de non-dits, d’impressions et de six putains d’années que la blonde ne serait jamais capable de comprendre parce qu’elle ne faisait pas partie de l’histoire, et que jusqu’à preuve du contraire, elle n’en ferait jamais partie.

C’était frustrant, d’être confrontée à quelqu’un d’au moins aussi têtu qu’elle, et c’est parce qu’elle n’avait pas envie de faire d’esclandre cette nuit que les yeux de la jeune femme se remplirent de larmes sans qu’elle ne puisse l’anticiper ; ou parce que Charlie énonçait quelque chose de vrai, qui savait vraiment. Dans tous les cas, Jo se retrouva à détourner la tête pour regarder devant elle sans ciller, sa langue marquant sa nervosité dans sa bouche fermée en balayant sa rangée de dents du haut tandis qu’elle s’obstinait à ne pas moufter.
Jusqu’à ce que Charlie termine sa phrase et qu’elle se tourne de nouveau vers elle pour lui dire, les dents serrées, l’index pointé sur elle "Je te le pardonnerai jamais." C’était excessif, tout l’était avec Jo "Pas d’avoir couché avec lui, j’en ai rien à foutre dans le fond, c’est même pas ça le problème." Ça en était un, mais ce n’était pas celui qui lui faisait plus de peine — elle aurait été bien sotte de croire à l’abstinence de quelqu’un comme Midas, qui pouvait claquer des doigts pour obtenir tout ce qu’il voulait "Le problème c’est que tu t’es servie de lui pour provoquer quelque chose chez moi, et que maintenant que t’as réussi, tu me reproches d’en faire tout un plat. C’est facile de me faire passer pour la connasse de service quand t’as crée ce qui est en train de se passer." Elle en avait assez d’endosser tous les travers de ceux qui se servaient de son impulsivité pour les dissimuler. Passant d’un oeil à l’autre de la blonde, ceux de Jo brillants sous l’éclairage de la salle de concert devant laquelle elles attendaient, elle ajouta en faisant un pas en arrière, son doigt se baissant, et le cordon de sécurité lui permettant de marquer une limite distincte entre elle et la jeune femme à qui elle dit pendant qu’on lui passait un bracelet au poignet "C’est ça que je te pardonnerai pas, de l’avoir utilisé pour me faire du mal. Tape-le toi tant que tu veux. Tu me dois rien, lui non plus… vous êtes grands, faites-vous plaisir." D’accord, ça sonnait faux, mais le fond relevait d’une vérité assez douloureuse pour que, les mains levées devant elle, Jo cherche à se soustraire du regard de Charlie à qui elle tourna de nouveau le dos pour rejoindre l’endroit qu’on lui indiqua enfin.

"Tu devrais peut-être suivre mon exemple, ça t’éviterais de te retrouver dans ce genre de situation ou d’avoir à élever deux gosses à même pas 30 ans." Après avoir marqué la négation de sa tête, bien plus par réflexe que par envie de passer le moindre message, Charlie souffle quelques mots sans entrain. “J’ai aucune envie de suivre ton exemple pour avoir une vie comme la tienne.” Peu importe si ça lui vaut ce genre de situation ou deux bambins sur les bras. La vérité, c’est que la vie de Josephine ne lui fait pas le moins du monde envie, tant au niveau privé que familial ou même professionnel. Le constat est fait avec une certaine tristesse qu’elle ne cherche même pas à cacher, ses mots n’ayant pour une fois pas vocation à provoquer une quelconque réaction chez la jeune femme. Elle n’est jamais la première à suivre les conseils d’autrui, c’est un fait premier, mais elle risque encore moins de vouloir suivre ceux de Jo, surtout si c’est pour en arriver au même point qu’elle. Même sa popularité, elle n’en voudrait pas. "Ça doit être tellement facile de penser comme toi. De parquer les gens que tu rencontres dans la catégorie de ceux que tu baises ou de ceux que tu baises pas." Et puisqu’il faut bien ranger tout un chacun dans des cases, Charlie n’en voit pas le problème. La tâche en serait d’autant plus facile pour Jo, sûrement. “Te plains pas, tu pourrais caser tout le monde dans “baise pas”, toi.” Ce serait rapide, au moins. "T’as vraiment le chemin de pensées d'un ado attardé, putain." Elle rejette cette idée en bloc et la trouve profondément injuste, ce qui s’aligne parfaitement avec l’immense majorité des paroles de Jo à son égard, que ce soit pour ce soir ou depuis bien longtemps. Des coups ont été donnés et rendus de chaque côté. “Tu revis ton foutu X-Factor parce que ton ego d’adolescente a toujours pas digéré la défaite, viens pas me parler de ça.” Jo est la seule à être coincée des années auparavant, et Charlie ne veut pas entendre autrement. Le passé ne peut pas être réécrit sous couvert qu’il ne lui plaît pas, et elle ne peut pas non plus accuser Charlie d’être bloquée au stade de l’adolescence uniquement parce qu’elle est bien plus douée en relations humaines que la chanteuse ne le sera jamais.

Et si Charlie n’a aucun mal à discerner les émotions que Jo tente de lui cacher, elle ne fait pas véritablement de pas vers elle, pas même pour les éloigner de la foule ou tenter de rendre le processus moins difficile. Tout ça, à ses yeux, n’est rien d’autre que la faute de Jo et si ça résulte en une photo dramatique dans la presse à scandale, alors elle aura au moins une excuse pour pleurer entre les bras de Midas. "Je te le pardonnerai jamais." L’index levé, elle annonce la sentence, sans que cela n’ait plus grand chose d’une surprise. "Pas d’avoir couché avec lui, j’en ai rien à foutre dans le fond, c’est même pas ça le problème." C’est pas ça le problème, mais c’est quand même leur seul sujet de discussion depuis des mois. Peu importe. "Le problème c’est que tu t’es servie de lui pour provoquer quelque chose chez moi, et que maintenant que t’as réussi, tu me reproches d’en faire tout un plat. C’est facile de me faire passer pour la connasse de service quand t’as crée ce qui est en train de se passer." Elle fustige, fulmine, et Charlie doit puiser dans tout ce qu’elle a appris à l’école de police pour ne pas en faire de même. De toute évidence, ce n’est pas l’envie qui lui manque non plus. “T’es la connasse de service de beaucoup d’histoires, et ça te met pas la puce à l’oreille ? Que c’est peut-être toi le problème, Jo, et pas tous ceux que tu croises ?” La seule réponse pour laquelle il arrive plus ou moins à rester à ses côtés, outre le fait qu’elle l’affectionne de façon assez évidente, c’est qu’il soit un véritable Labrador capable d’oublier toutes les disputes dès qu’on lui présente un os à ronger. Et ça, Jo sait très bien le faire.

Jo met de la distance entre elle, se préparant à rentrer sans que la blonde ne la suive aucunement. De toute évidence, ce n’est plus dans le même endroit qu’elle qu’elle souhaite passer la soirée. "C’est ça que je te pardonnerai pas, de l’avoir utilisé pour me faire du mal. Tape-le toi tant que tu veux. Tu me dois rien, lui non plus… vous êtes grands, faites-vous plaisir." La finalité de leur discussion est à nouveau semblable, au milieu des mensonges et des regards noirs. Si l’une ou l’autre avait eu un verre en main, il aurait tâché les habits de la seconde, bien entendu. Charlie s’agace et s’impatiente, elle s’énerve de ses talons qu’elle fait claquer contre le sol, sa taille la laissant simplement observer Jo se frayer un chemin jusqu’à la scène. Elle n’aurait jamais dû tenter d’initier le moindre dialogue et plutôt se contenter d’envoyer des messages à Midas sans la moindre subtilité pour lui demander de passer la soirée avec lui. C’est tout ce qu’elle aurait dû faire, quitte à ne plus rien pouvoir sauver de leur pseudo-amitié. Au moins, elle en aurait profité, à défaut que sa vie intime avec Cameron soit du même acabit. Lorsqu’elle se retourne, elle fait face au regard interloqué de toutes les oreilles indiscrètes ayant assisté à la scène. “Putain de pétasse.” qu’elle se contente de murmurer, ses doigts déjà occupés à dérouler le répertoire de son téléphone pour trouver un nom qui la distraira assez pour oublier l’incident de la soirée.