Mon expression faciale présume très probablement de mes futurs mots lorsque Noor s'étonne de l'existence d'un code vestimentaire pour se rendre au cinéma. N'était-il pas une règle non écrite de se vêtir un minimum correctement lorsqu'on sort de chez soi ? Ou alors, cela faisait partie des rares impératifs martelés par ma mère et qui sont désormais indélébiles en moi. « Y'en a une pour à chaque fois que je sors de chez moi, » je révèle ainsi à mon interlocutrice. « Tu peux pas être en sous-vêtement au cinéma. » J'ajoute avec une pointe de malice sensuelle. Si Noor favorisait le confort technique qu'offrait un cinéma, je votais pour le casanier bien-être et la liberté des gestes qu'il offrait quitte à avoir en contrepartie un bien plus petit écran et du son de moins bonne qualité. « Tu peux pas aimer indécemment ta copine au cinéma. »

Un rire se dérobe de mes lippes lorsque l'architecte se juge capable de modifier mon point de vue sur les voyages - qui, encore une fois, rivalise avec le confort chéri de mon quotidien bien rodé. « Si tu le sais au fond de tes tripes, alors, il faudra que je te donne l'occasion de me le démontrer, » je soumets sur une pointe de défi, joueur.

Même si notre relation est jeune, les paroles de futur de Noor sonne telles des mélodies à mes oreilles. Si mon tempérament initialement méfiant doublé de ma dépréciation pour toutes formes d'amour et de romantisme me guideraient à ne pas m'abreuver des sous-entendus de la brune, il est bien trop délicieux de se prêter à ces échanges tout comme à ces songes. Qui sait, peut-être détiennent-ils malgré tout un réel potentiel, un pouvoir de prédiction ? Et même si seul un mur nous attend, peut-être que la route vers celui-ci vaut l'occasion d'être savourée pleinement ? Je presse mes lèvres contre celle de la dénommée princesse-architecte qui promet au-delà d'une appétence pour les voyages un royaume. « J'aimerais beaucoup voir la princesse à l'ouvrage, » j'avoue. La vision d'une Noor cheffe de projet m'enthousiasme autant que me séduit. Patronus paraît adhérer également à ce projet d'envergure, vu comment il s'étale de tout son long sur nos genoux, nous liant tous trois d'une nouvelle manière. « Des choses que sa majesté le Prince veut dans son futur chez lui ? » « Toi, » je glisse avec avidité, accompagnant mes paroles en prenant possession des lèvres de la trentenaire dans un baiser dardé de davantage d'engouement. Mes doigts, quant à eux, se faufilent contre la joue hâlée de Noor. « Et sans doute une cuisine assez moderne pour combler les papilles des majestés du royaume, » je complète en plaçant ma main libre au-dessus de la hanche de la Guerrero, consolidant ainsi notre étreinte, les ronronnements du félin imperturbable en bruits de fond.

Un sourire nuancé de malice et de satisfaction étirait la commissure de mes lippes tandis que Noor levait les yeux au ciel, un rictus amusé dominant son portrait. Puis, son regard se déversait allègrement sur ma silhouette, pour la complimenter de sous-entendus tendancieux. « C'est vrai, » je reconnaissais vis-à-vis de ma contradiction sur ma tenue et notre emplacement actuel. « Est-ce que tu vas me donner une amende ? Un blâme ? » Je défiais, joueur.

Je plissais les yeux, considérant mon interlocutrice pendant que le débat se poursuivait sur les règles de bienséance afférente au cinéma. Apparemment, Noor était prête à contourner quelques notions de savoir-vivre en société, dépendamment de quelques circonstances précises ; situation pour laquelle je quémandais tout de même le rôle de témoin. « Est-ce qu'être prise en flagrant délit d'amour t'excite ? » J'osais interroger, intéressé.

La tête et le coeur froids, je m'estimerais souverainement insensé de discuter futur, dont maison commune, avec Noor, que je fréquentais depuis peu sur l'échelle d'une vie. Pourtant, il y a de ces évidences, de ces convictions, qui me poussaient à me lancer et altéraient indéniablement mon comportement. Noor, elle était comme ces jeunes clients que je défendais bec et ongle même si d'autres avocats ne croyaient pas en leur cause ; j'avais un feeling spécial pour elle, un instinct que je ne savais taire. Certes, l'idée de domicile pouvait paraître saugrenue, mais passé la trentaine et avec la bonne personne, l'idée germait spontanément dans mes méninges. Aussi, Noor possédait des qualificatifs que je recherchais chez une conjointe : une indépendance et une autosuffisance. Du moins, pour une majorité des volets du quotidien. « Tu m'inviterais dans ta baignoire ? Dois-je l'ajouter aux lieux à inaugurer avec le cinéma ? » Je taquinais, frisant l'idéo-discordance tandis que mes lèvres se glissaient sournoisement dans le cou de la brune et remontaient jusqu'à son lobe qu'elles vinrent délicatement titiller.