Le sourire qui vint s’étirer sur les lèvres d’Auden ne passa pas inaperçu aux yeux d’Ezra. Bien sûr qu’il remarqua directement que son compliment déguisé - que de simples paroles répétées - lui fit plaisir. Mais en réalité, il était simple de lui faire plaisir au Williams. Un simple mot placé intelligemment pour redorer son égo, et il était le plus heureux des hommes. Alors, étant donné que l’intention du jeune homme n’était pas là à la base, lorsqu’il vint se retourner pour accéder à la salle de bain, il pensait réellement que l’italien allait s’en aller du côté de la cuisine pour lui préparer un plat digne de ce nom pour raviver ses papilles - à défaut de raviver la flamme, pourtant déjà bien présente. Mais Auden vint adopter un comportement tout à l’opposer de ça, et suivit Ezra jusque la salle de bain. Ce dernier fut étonné qu’il ose en venir jusque là - littéralement pour le coup -, et vint hausser un sourcil en arrêtant sa course à mi-chemin. Si Auden vint s’appuyer contre l’encadrement de la porte, le Beauregard vint lui croiser les bras sur son torse déjà nu. « Et si le meilleur cuisinier d’Italie te demandait de l’épouser ? » Vous voyez les passages dans les dessins animés où la mâchoire du personnage vint s’étirer jusqu’au sol ? C’était exactement l’image parfaite pour représenter Ezra également. Il s’attendait à tout, en ce jour, en voyant Auden sur le pas de sa porte. Il s’attendait à beaucoup de choses insensées et au delà de l’entendable. A tout, réellement - sauf à ça. « Pardon ? » De l’épouser ? Lui qui voulait le faire glisser dans la douche quelques instants auparavant, dans un but bien précis de finir par lui ôter la vie, devant de lui demander de l’épouser.

Et là, un petit rire, bref mais présent - quelque peu nerveux et moqueur sur les bords -, vint s’échapper d’entre ses lèvres. « De m’épouser ? » Il n’en croyait pas ses oreilles. Oh, certes, il comprenait parfaitement les fonds des intentions du jeune homme. Il ne niait pas que quelque-chose entre eux s’était développé d’une façon qu’il n’aurait jamais pu prédire. Mais il n’avait pas imaginé non plus qu’il irait jusque là. Auden venait de lui demander sa main, et le sourire qu’il affichait désormais, bien que toujours bien trop satisfait à son goût, semblait presque sincère. « Attends, t’es sérieux là ? » Le sérieux ne leur ressemblait pas, mais c’était ce qui semblait être de mise présentement - ou était-ce lui qui se fourvoyait à se retrouver avec le rythme cardiaque bien plus accéléré qu’il n’aurait voulu d’admettre ? Venant décroiser ses bras de sur son torse, il vint effectuer les quelques pas lui permettant de réduire la distance entre Auden et lui, de venir se planter devant cet homme qu’il avait pendant longtemps uniquement regardé de loin - pour sa propre survie -, de venir plonger son regard dans le sien, de venir sonder son âme à la recherche tout autant de la vérité que de la blague. « Tu viens vraiment de me demander de t’épouser ? » Si quelqu’un avait dit six mois plus tôt à Ezra, qui s’apprêtait à demander Ginny lui-même en mariage, qu’on viendrait lui poser la même question à ce moment là et que qui plus est, ce serait Auden qui oserait franchir ce cap, il aurait pris les gens pour des fous. Il prenait Auden pour un fou, et semblait perdre la tête à son tour.

Spoiler:

Le « Pardon ? » dans un premier temps ne le désarçonne pas. Pas plus que le « De m’épouser ? », énoncé dans un second temps alors que les bras du bras se dénouent petit à petit, sa musculature pourtant toujours apparente. Il ne cille toujours pas lors de la troisième manœuvre un, « Attends, t’es sérieux là ? » qui ne fait que confirmer le sourire amusé - et ô combien sérieux - qu’il porte sur le bout de ses lèvres. Ils jouent au jeu du chat et de la souris alors que les rôles sont échangés à chaque secondes sans qu’eux même ne soient au courant, c’est ce qu’il y a de plus grisant dans cette rencontre, cette histoire - Histoire. Les mots n’ont jamais été calculés, encore moins prédits mais ils ne seront jamais plus assumés qu’ils le sont en ce moment. Il ne sait pas dans quelle aventure Auden est en train de s’embarquer mais ce n’est pas pour autant qu’il compte faire machine arrière ou douter un seul instant de ses choix de vie. Sa vie, justement et jusqu’à preuve du contraire, est entièrement sienne et repose entre ses mains seules. Si Ezra le désire alors un jour, elle reposera au bout de son annulaire aussi, fier symbole de leur union atypique, sceau indéfectible et inviolable preuve de leur union éternelle. Rien que ça. Un simple oui et leur histoire sera déjà écrite et ils apprendront à regarder ensemble dans la même direction plutôt que de lancer des éclairs dans celle de l’autre.

« Tu viens vraiment de me demander de t’épouser ? »

S’il n’avait pas une fierté à en crever le plafond, l’Italien aurait appuyé ses paroles par un genou ployé et des yeux tournés en la direction du bel Australien. Le fait est que son ego lui empêche de telles choses, lui qui jamais ô grand jamais ne viendra à s’agenouiller devant qui que ce soit et ce peu importe la raison. Même un mariage n’y suffit pas. Même un mariage avec Ezra, cet Ezra, le Ezra ne semble pas accorder son corps et son esprit. Ce n’est pas l’envie qui manque, pourtant, et une fois aussi bas devant lui alors il pourrait le menacer de lui couper le tendon des chevilles si jamais il venait à lui refuser cette requête. Une pierre deux coups, vous voyez. Si seulement il n’avait pas eu l’idée d’enlever ses chaussures (et la folle envie d’enlever ses vêtements avec) alors il aurait pu utiliser l’excuse des lacets. Une partie de son cerveau se dit que cette excuse sera réutilisable pour plus tard ; l’autre partie sait que jamais personne dans son existant ne saurait ni ne pourrait remplacer le Beauregard, sous aucun de ses aspects. Pour cette raison comme pour des milliers d’autres, les mots sortent avec naturel de sa bouche. “Ezra Bordel De Beauregard, épouse moi.” Il n’y a pas de question à poser puisque la possibilité d’une refus de sa part est totalement inenvisageable. “Si tu me fais répéter parce que t'as rien entendu, par contre, va consulter et si c'est grave contracte une assurance vie.” En tant que son mari, il devrait confortablement s'en sortir en cas de décès prématuré.

Il n’en revenait pas, et pourtant, la scène était belle et bien en train de se dérouler sous ses yeux. Auden lui demandait de ne pas lui accorder qu’un simple instant, mais bien le reste de ses jours, de venir mêler de façon pérenne et définitive son destin au sien. Il ne faisait pas l’idiot, là, Ezra, à se tenir devant lui et à répéter une fois de plus et une autre dernière pour être sûr qu’il avait bien compris la question qu’Auden venait de lui poser. Non, il voulait simplement s’assurer qu’il était sérieux et que ce n’était pas un énième tour pour se payer sa tête - car il le savait capable d’être aussi cruel pour arriver à une fin qui serait, à ses yeux, bien hilarante. Et, in fine, s’il lui demandait de venir réaffirmer ses dires avec autant d’hésitation, c’était parce-que le sang du Beauregard n’avait fait qu’un tour en entendant ses mots.

Et que, désormais, la seconde de surprise passée, une partie de lui avait déjà commencé à imaginer ce que pourrait devenir la vie à ses côtés. « Ezra Bordel De Beauregard, épouse moi. » Oh, qu’il fut doux le long frisson qui vint parcourir l’échine et tout le reste du corps d’Ezra en entendant ces quelques mots. Il était donc sérieux, Auden, dans ses mots et dans ses intentions. Il était sérieux au point même de ne plus ajouter la marque de questionnement à la fin de ses paroles mais bien de venir, en quelques sortes, imposer la situation au jeune homme. Etait-ce si mal d’admettre qu’Ezra se complaisait présentement, dans cette configuration, en réalité ? « Si tu me fais répéter parce que t'as rien entendu, par contre, va consulter et si c'est grave contracte une assurance vie. » La blague, elle, n’était pas obligatoire mais Auden étant Auden, il ne s’attendait pas à moins en réalité. Et Ezra étant Ezra, il ne pouvait pas réagir autrement dans un premier temps - ou un second temps vu le temps qu’il prenait pour venir répondre à la première question posée - que par un lever d’yeux au ciel qui mériterait de rentrer dans le livre des recors.

Un soupire, bien sur, vint s’ajouter à ce tableau. Mais pour une fois, ce dernier vint se parer d’une étrange satisfaction. Parce-qu’il n’y avait qu’une seule réponse à émettre dans tout ça. Même si elle venait défier toute logique et toute prédiction, même si des éléments restaient certainement à déterminer, à ajuster. Une seule réponse valait le coup d’être mise en avant - pour aujourd’hui et pour toujours. « Je prendrai l’assurance vie mais seulement si c’est ton nom qui y figure dessus à la fin. Et le nom de personne d’autre. » Oh, il aurait simplement pu lui répondre oui, je veux t’épouser Auden, mais il ne pouvait pas non plus répondre à tous les désirs de monsieur, se plier de nouveau devant lui rien que pour s’assurer que son égo soit toujours en parfait état. Des concessions, il se sentait déjà prêt à en faire. Celle la serait cependant la dernière sur la liste.

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