what could have been
@Joaquin Bates & Jenna Caldwell

23 septembre 2023. La journée avait été paisible. Un dimanche tranquille à la galerie. Tu n’avais pas servi à grand-chose, passant la quasi-totalité de l’après-midi dans une chaise mais le fait d’être là, dans cet endroit que tu avais créé de toute pièce était important pour toi. Chelsea était celle qui s’occupait des clients même si tu t’étais levée à plusieurs reprises, notamment à l’arrivée de certains clients que tu connaissais bien. La galerie n’avait pas encore un an mais certains clients passaient régulièrement, qu’ils achètent quelque chose ou non, cela te faisait toujours plaisir. Ta grossesse touchait à sa fin, ton terme était prévu pour dans deux semaines et malgré les supplications d’Edison, tu avais refusé d’arrêter de te rendre à la galerie. Tu le faisais en taxi ce qui te semblait être une concession suffisante. Tu n’avais pas encore passé le pas mais tu savais d’ores et déjà qu’il te faudrait une voiture une fois que le bébé serait là. N’ayant pas conduit depuis plusieurs années, il ne te tardait pas de reprendre le volant voilà pourquoi tu repoussais la recherche d’un véhicule le plus possible. Pour l’instant, ce n’était pas le sujet. Grâce à un regain d’énergie que tu avais senti dès le milieu de l’après-midi, tu avais prêté main forte à Chelsea pour t’assurer que tous les clients avaient réponse à leurs questions et vous aviez réalisé quelques ventes. Ce n’était pas énorme mais c’était déjà ça et tout client qui achète une fois et se trouve satisfait de l’œuvre achetée reviendra très probablement. C’était sur cela que tu comptais en tout cas. En fin de journée, après avoir fermé la boutique, Chelsea s’était afférée à nettoyer les sols. Vous le faisiez tous les dimanches soirs mais là, tu ne pouvais pas aider. Pour la remercier et parce qu’il ne restait vraiment rien à faire à part éteindre les lumières et fermer la boutique, tu laissais la jeune femme partir. Elle t’avait dit qu’elle retrouvait des amis, c’était bien mérité après le travail qu’elle avait fourni.

Une fois Chelsea partie, tu pris le temps de naviguer d’une œuvre à l’autre. La dernière sélection était vraiment magnifique, tu en étais persuadée. Ces jeunes artistes avaient beaucoup de talent et tu espérais qu’ils seraient bientôt repérés à leur juste valeur. Après une dizaine de minutes à déambuler, tu sentis ton dos te tirer. Tu passais ta main en bas de ton dos en respirant profondément. Pas de doutes, cela allait passer. Tu allais donc éteindre les lumières de l’arrière-boutique, celle de la pièce principale étant près de l’entrée, derrière le comptoir. Ton dos te tirait et il te tardait de pouvoir rentrer chez toi pour t’allonger. Plus que la lumière et tu pourras appeler un taxi. Passant une main dans tes cheveux, tu essayais d’oublier ton dos qui te faisait mal quand soudain, tu sentis un liquide chaud couler le long de tes jambes. Tu t’arrêtais net, sur place alors que les pièces du puzzle s’assemblaient dans ton esprit. Une fois assemblées, c’est comme si tu donnais la permission à ton corps de commencer le travail car sans prévenir, la première contraction fit son apparition. La deuxième mit plusieurs minutes à arriver mais tu n’avais pas la présence d’esprit de les chronométrer. La peur s’empara de toi. Seule, tu étais complètement seule à la galerie, tous les commerces aux alentours étaient fermés. Tu mis instinctivement une main sur ton ventre alors qu’une nouvelle contraction arrivait. La peur et les contractions faisaient que tu n’arrivais pas à bouger. Pourtant, il fallait faire quelque chose, tu ne pouvais pas rester comme ça. Les mains tremblantes, tu composais le numéro des urgences. Alors que tu attendais d’être mise en relation, tu marchais doucement vers une des chaises de la partie salon de thé. La personne qui te prit en charge nota tous les renseignements que tu lui donnais entre deux grandes respirations et la douleur qui faisait que tu n’avais pas tous tes esprits. Elle te garantit que des pompiers n’étaient pas loin et allaient passer te chercher pour t’amener jusqu’à l’hôpital. Tu raccrochais tout en gardant le téléphone près de toi. Tu trouvais le contact d’Edison et tu l’appelais avant de lui laisser un message lui disant que c’était le moment, qu’il devait te retrouver à l’hôpital au plus vite. La seule chose qu’il te restait à faire désormais, c’était d’attendre. Les contractions se rapprochaient doucement mais tu étais toujours incapable de donner leur fréquence alors que ton dos te tirait et que tu sentais encore un peu de liquide couler le long de tes jambes. Des sirènes se firent entendre et les gyrophares éclairèrent brutalement la pièce. Instinctivement, tu mis une main devant tes yeux et plusieurs voix t’entourèrent. Alors que ton regard s’habituait à la lumière, un visage étonnement familier vint se présenter à toi. « Joaquin ? » C’était presque un murmure que tu prononçais. Cela faisait des années que tu ne l’avais pas vu et tu devais certainement te tromper, la douleur te faisait dire n’importe quoi. « Ahhh ! » Le cri s’échappa de ta bouche alors que tu posais instinctivement ta main sur ton ventre. « Bien que j’adore ma galerie, je préfèrerai accoucher à l’hôpital si tu veux bien m’y amener. » Dis-tu à l’homme en face de toi, incapable de penser pour l’instant au fait qu’il y avait de grandes chances pour que ce soit Joaquin. Gosh, combien d’années cela faisait exactement ?

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Ton accouchement, tu ne l’attendais pas aujourd’hui. C’était idiot parce que tu savais que tu pouvais accoucher à tout moment à partir de la mi-septembre. Les nouveau-nés n’attendent pas toujours le terme comme ils le devraient. Mais il est évident que tu ne t’y attendais pas ce soir. Cela aurait été bien plus facile si Chelsea était dans les parages, tu aurais pu lui demander de t’amener à l’hôpital. Mais toi, tu n’avais pas de voiture et tu ne savais pas où était Edison. S’il était dans son local, le temps qu’il reçoive le message et qu’il arrive, il serait trop tard. C’est donc les pompiers que tu avais appelés. Tu n’avais jamais eu à le faire par le passé. Ta fausse couche était arrivée sans prévenir, un jour où tu étais dans la maison. La douleur avait été terrible mais Louis avait été là pour t’amener à l’hôpital. Aujourd’hui, tu étais seule. Et malgré la présence d’Edison dans cette grossesse, il n’avait pas la place dans ta vie qu’avait pu avoir Louis. Alors il fallait que tu t’habitues à t’occuper de toi seule. Focalisée sur les contractions qui étaient une sensation nouvelle pour toi, tu n’as pas reconnu le pompier qui s’approchait de toi tout de suite. Cependant, une fois que tes yeux se focalisèrent sur son visage, il n’y avait plus de doutes. Lui aussi te reconnut mais il n’eut le temps de rien te dire car une contraction vint t’arracher un cri. « Apportez la civière ! » La présence d’autres personnes que Joaquin était nouvelle pour toi mais tant mieux. Cela rendait cette expérience moins solitaire. Les yeux fermés, tu sentis la main de cet homme qui avait été ton amant pendant plusieurs nuits se poser sur ton cou. Tu suivis ses gestes sans résister. La douleur et l’anxiété par rapport à cette dernière étape de ta grossesse t’empêcher de penser à autre chose que tout faire pour que cette naissance se passe au mieux. « Couches-toi, on va t’emmener à l'hôpital. » Tu le fais sur le champs et pousse un léger soupir alors que tu n’as plus à marcher. Les collègues de Joaquin te transportent jusqu’au camion qui n’attend que toi pour démarrer. Tu donnes les clés de la galerie à un des hommes qui t’a transportée pour qu’il puisse fermer le local. Il ne manquerait plus que tu sois victime d’un cambriolage en plus. Une fois les portes refermées derrière lui, il ne reste plus à l’arrière du camion que Joaquin et toi. « Donc t’es enceinte ! » Tu hoches la tête, ne répondant pas car la situation pour le coup parle d’elle-même. Tu comprends que cette situation soit étrange, elle l’est pour toi mais elle doit l’être pour Joaquin également. Il attrape des outils et commence à prendre ta tension entre autres. « Tes constantes sont bonnes, faut que tu me donnes la fréquence des contractions. » Tu le regardes attraper le formulaire et tu te sens réellement bête. Parce que tes contractions, tu étais trop paniquée et apeurée pour en mesurer la fréquence. « Je n’en sais rien. Je … J’essayais de ne pas trop paniquer. Elles ont l'air régulières mais pas trop trop rapprochées. » Tu passais ta main dans tes cheveux, nerveuse à l’idée que Joaquin puisse te juger car tu n’avais pas eu la présence d’esprit de mesurer tes contractions. Ces dernières n’avaient d’ailleurs pas disparues et tu fis une grimace en serrant les dents alors qu’il te demandait : « Tu t’appelles toujours Caldwell ? 30 Juillet 1984 ? 39 ans si je compte bien ? Pardon. Je prépare ton dossier pour l’entrée à l'hôpital et faciliter les démarches. » Tu eus un pincement au cœur car il se souvenait de ta date d’anniversaire. Tu hochais la tête avant d’ajouter : « C’est exact. Et oui, c’est toujours Caldwell. » Tu ne savais pas où en était Joaquin dans sa vie aujourd’hui mais il devait avoir trouvé la bonne personne. Toi, ta vie n’était qu’un enchainement d’évènements qui en faisaient un chaos total. La question suivante aussi tu aurais dû l’attendre mais tu n’étais pas en capacité et penser normalement dans cette situation. « Il y a quelqu’un à appeler ? Si oui, j'aurai besoin du numéro. » Ca tu avais eu la présence d’esprit de le faire. Principalement parce que tu savais qu’Edison vivrait mal de ne pas assister à la naissance de son fils et aussi parce que tu lui devais bien ça. « J’ai déjà contacté le papa mais tu trouveras son numéro sur mon portable. Je ne sais pas où il est mais il fera au plus vite. » Dis-tu en désignant ton sac à main qu’ils avaient eu la gentillesse d’attraper. Tu n’avais rien à cacher, peu importe la nature de ta relation avec Edison. « Tu as des enfants ? » Après tout, vous ne vous étiez pas vus depuis plus de dix ans, c’était une question légitime à tes yeux au vu de ta situation actuelle.

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Au cours de tes mois de grossesse, il avait été difficile pour toi de te projeter au moment de l’accouchement. C’était un évènement que tu savais qui arrivait, tu t’y étais préparée grâce à des ateliers et des sessions dédiées mais c’était toujours resté une vague idée, quelque chose qui se passera un jour. Là, à cet instant précis, ce n’était vraiment plus une hypothèse ou quelque chose de lointain. Tu comprenais soudain pourquoi ce n’était pas une promenade de santé. Dans cette épreuve, c’est Edison qui aurait dû se trouver à tes côtés mais à la place, tu te retrouvais dans l’ambulance avec Joaquin. Tu n’arrivais pas à savoir qui de lui ou de toi était le plus gêné de cette situation. Joaquin faisait parti de la longue liste de personnes avec qui tu avais manqué à tes devoirs. Cela ne se faisait pas que de disparaître de la vie de quelqu’un du jour au lendemain sans donner de nouvelles. Pourtant, c’était ce que tu avais fait. Pas parce que tu n’appréciais pas Joaquin, bien au contraire mais parce que la possibilité d’un peut-être plus avait pointé le bout de son nez. Pas au bon moment car tu traversais une période difficile à ce moment-là. Mais ce n'était pas une excuse, Joaquin ne méritait pas ça. « Dit moi quand tu as une contraction, je compte. » Tu allais ouvrir la bouche quand une contraction se rappela à toi, pas besoin de faire de traduction pour le pompier qui avait compris le message. C’était attendrissant de voir qu’il se rappelait de pleins de détails sur toi malgré plus de dix années qui s’étaient écoulées. Il avait été attentif et tu n’avais pas su l’apprécier à sa juste valeur à ce moment-là. Aujourd’hui, tu lui étais pleinement reconnaissante de faire une partie de cet accouchement avec toi, cela t’évitait d’être toute seule. D’ailleurs, tu finis par lui demander s’il avait eu des enfants. « Non, je n’ai pas eu d’enfants… Mais j’ai assisté à pas mal de naissances. » Tu pouvais lire des regrets dans sa voix. Ce n’était pas par choix qu’il n’avait pas eu d’enfants, il avait dû se passer quelque chose. Cela ne doit pas être pareil d’assister à des naissances et d’assister à la naissance de son bébé. Si c’était un souhait qu’il avait, tu espérais qu’il pourrait le réaliser. « Si tu en veux, j’espère que tu auras la possibilité d’en avoir. Il paraît que ça change la vie, je te dirai ça dans quelques mois. » Dis-tu en caressant ton ventre où une nouvelle contraction ne tarda pas à se déclencher. C’était un miracle que tu arrives à maintenir un niveau correct de conversation vu la douleur que tu ressentais dans ton dos et ton ventre. « C’est une bonne nouvelle que tu aies pu avancer dans ta vie. Ma vie ne me permet toujours pas de me poser. » Avancer … Avais-tu vraiment avancer ? Professionnellement oui mais personnellement, c’était une autre histoire. Tu n’étais pas aujourd’hui là où tu aurais aimé être. Ce bébé ne naissait pas dans les conditions qui auraient dû entourer sa naissance mais au moins oui, tu n’étais pas restée figée dans le passé. « Je suis sûre que tu pourrais te poser si tu en avais envie. » Dis-tu à Joaquin avant de fermer les yeux quelques instants. C’est le genre d’excuse que l’on se trouve quand on en a pas d’autres sous la main. « Ma vie n’est pas parfaite mais j’ai fait ce que j’ai pu. Ce bébé n’était pas prévu, il n’aurait jamais dû naître d’une aventure sans lendemain mais j’ai saisi ma chance parce que c’est la seule manière d’avancer, même quand rien n’est parfait. » Tu aurais aimé que cela le soit, vraiment tu aurais aimé mais tu n’avais jamais eu peur de faire face, de prendre des décisions de manière impulsive et ensuite de t’y dédier à cent pourcent. Tu laisses le silence s’installer pendant plusieurs secondes, seulement brisé par la nouvelle contraction qui vient à un rythme régulier. « Je suis désolée. » Dis-tu ensuite à Joaquin. « D’avoir disparu du jour au lendemain. » Il fallait que tu lui dises, tu lui devais au moins cela. Quand tu étais rentrée à Brisbane il y a plus d’un an, tu avais enchaîné les excuses. Mais là, pour une fois, tu avais réellement l’impression de recommencer à zéro.

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Tu étais bien consciente que la situation était tout sauf évidente. Brisbane n’était pas une ville aussi grande qu’elle paraissait l’être, c’était une leçon que tu avais apprise à ton retour de New York. Pas que tu cherchais à éviter Joaquin mais tu t’étais dit qu’il y avait peu de chance que vos chemins se croisent de nouveau. Une chose était sûre, tu ne pensais pas qu’ils se croiseraient dans cette situation. Alors que tu découvrais ce que signifiait une contraction, tu essayais de te concentrer sur la conversation que vous étiez en train d’avoir. Tu ne savais pas si tu reverrais l’homme en face de toi, il n’avait aucune raison de te revoir alors tu avais décidé de sauter le pas et d’aborder le sujet qui fâche. Ce sujet, c’était celui de ton départ. Quand tu avais pris la décision, tu savais que tu allais lui faire du mal mais pour toi, c’était un mal pour un bien. Il valait mieux lui faire du mal quand vos sentiments étaient naissants plutôt que par la suite, parce que tu t’étais faite prendre ton propre jeu. Tu en profitais également pour clarifier le fait que ta vie n’avait rien d’une histoire parfaite qui se terminerait bien. Il y avait tellement d’inconnues que tu ne savais plus vraiment où donner de la tête. Et la plupart du temps, tu décidais de laisser ça de côté pour ne pas te retrouver dans une anxiété permanente qui te transformerait en dépressive. Après tes paroles, le silence s’installa dans l’ambulance alors que Joaquin mesurait la fréquence de tes contractions. Et finalement, il se décida à te poser la question à laquelle tu t’attendais. « Pourquoi t’es partie ? Si t’étais pas heureuse ou que t’avais pas développé de sentiments, on aurait pu en discuter et la relation se serait terminée sans soucis… » C’était en effet ce que toute personne bien dans sa peau et pas marquée au fer rouge par son ancienne relation aurait fait. Tu essayais d’oublier la Jenna que tu avais été à cette époque mais tu te souviens vaguement que tu étais au fond du trou. Ta relation avec Rhett s’était terminée, tu cherchais à te prouver que tu pouvais intéresser quelqu’un mais tu n’avais pas envisagé rencontrer une personne comme Joaquin. L’idée n’avait jamais été de faire de mal à personne. « Je t’ai pardonné depuis longtemps, j’ai tourné la page sur tout ça, mais c’est la seule chose qui me travaille encore… » Tu peux comprendre qu’il se soit posé des questions. Tu aurais fait pareil si la situation avait été inversée. Maintenant que tu prenais un peu de recul sur ta vie, tu voyais sans souci que la fuite était ta manière à toi de régler un certain nombre de situations, laissant tes proches seuls et face à un mur de questions. A choisir, tu aurais préféré t’expliquer autour d’un café plutôt que dans une ambulance entre deux contractions. « Je suis partie parce que je n’aurais pas pu te donner ce que tu attendais de moi et j’étais incapable d’affronter le mal que cela te ferait de l’entendre de ma bouche. » A défaut de lui épargner quoi que ce soit, tu étais honnête. Tu n’avais plus assez de cellules cérébrales disponibles pour inventer des bobards. « J’étais encore marquée par une rupture, je n’étais pas remise psychologiquement et j’ai eu besoin de parcourir un long chemin avant de l’être. » Tu n’avais pas honte de dire que tu avais fait une thérapie. La première de ta vie mais pas la dernière. Il avait fallu remettre ça à New York mais ça, Joaquin n’avait pas besoin de le savoir. « Je suis désolée que tu aies été un dommage collatéral de ma destruction car tu ne le méritais pas. » Les moments que tu passais avec Joaquin étaient toujours de bons moments. Pas de prise de tête, vous profitiez juste l’un de l’autre. Si seulement tu l’avais rencontré quelques années plus tard, cela aurait tout changé … « Et du coup le père va faire partie de vos vie, malgré le contexte ? » Tu hausses les épaules parce que tu n’en es pas sûre. Edison a toujours été là, jusqu’ici mais l’arrivée du bébé pouvait changer beaucoup de choses. Surtout quand il se rendra compte de l’impact que cela va avoir sur sa vie sociale et sur son portefeuille. Il est encore très jeune, tu pourrais comprendre qu’il n’ait pas envie de renoncer à tout cela. Donc tu espères qu’il tiendra parole mais tu n’en es pas certaine à cent pourcent. « Il m’a assuré que oui et jusqu’ici, je ne peux rien lui reprocher. Mais il est jeune, ce bébé va chambouler sa vie sociale, ses activités, toute sa vie en fait et j’ai peur que le choc avec la réalité soit plus violent que prévu. » Surtout qu’il venait d’ouvrir son bar/club de musique il y a une dizaine de jours … « Dans tous les cas, je peux compter sur ma famille et mon entourage. Je ne serai pas la seule mère célibataire de Brisbane. » Dis-tu avec un timide sourire qui cachait mal que cette perspective t’angoissait plus qu’autre chose. Mais ce bébé, tu l’avais voulu au plus profond de ton être et une fois qu’il sera là, il était hors de questions de l’abandonner.

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Ce bébé, il avait changé beaucoup de choses pour toi. Il t’avait permis de faire le point sur beaucoup de choses et de dépasser certains traumatismes que tu avais pourtant pensé derrière toi. Et encore une fois, il remettait sur ton chemin une personne qui t’avait été chère mais à qui tu n’avais jamais laissé la chance de devenir plus. Du gâchis ? Certainement mais à l’époque, ce n’était pas aussi simple d’analyser la situation. Que Joaquin cherche des réponses, tu trouvais cela normal. Malgré le fait que votre relation éphémère remonte à de longues années, il y a toujours des questions que l’on se pose. Alors tu essayais de répondre au mieux mais tu n’étais pas certaine que toutes tes phrases fassent sens car tu te battais également contre des contractions toujours plus régulières qui te laissaient peu de place pour une longue réflexion. « Merci. J’aurais compris, mais j’entends que ça a été difficile de me l’avouer à l’époque. » Comment être sûre qu’il aurait réellement compris ? Ce n’était pas le moment de se poser ce genre de question, c’était évident. Donc tu te contentais de lui répondre : « A l’époque, je ne me comprenais pas moi-même donc il était difficile d’imaginer que je puisse être comprise. » Cette époque te semblait si loin, si éloignée de ta situation aujourd’hui. Tu passais une main sur ton front couvert de transpiration en prenant des respirations aussi profondes que possible. Tes entrainements de yoga portaient enfin leurs fruits. Que les questions de Joaquin se portent vers le père de ton enfant n’était pas du tout une surprise. Le rôle d’Edison dans ta vie était encore à définir mais il t’assurait qu’il serait là, qu’il ne comptait pas se défiler dans son rôle de père. C’était difficile pour toi de savoir à quel point le croire, surtout avec ses nouveaux projets professionnels mais seul l’avenir te donnera raison ou tord. « Oui, c’est sur, tu ne sera pas la seule mère célibataire de Brisbane. Il y a pleins de groupes qui permettent une entraide également et … Si jamais tu as besoin, t’as qu’un numéro à composer. » Tes yeux s’écarquillent quand il te tend un papier avec son numéro de téléphone écrit dessus. S’il a bien une chose à laquelle tu ne t’attendais pas, c’était celle-là. Pourquoi est-ce que Joaquin ferait une chose pareille alors que tu ne le méritais clairement pas vu comment tu l’avais traité toutes ces années auparavant ? Mais c’était une preuve de plus de ta bêtise de l’époque, tu aurais dû comprendre que l’homme en face de toi avait un coeur en or. Tu attrapais le papier que tu glissais dans le sac près de toi. « Je ne pense pas le mériter mais merci. Merci pour tout. » De t’avoir accordé son pardon, de te soutenir dans ce moment rempli de douleur et de doutes encore car tant que le bébé ne sera pas dans tes bras en train de crier, il pouvait toujours arriver quelque chose. Tu laissais Joaquin demander à son collègue dans combien de temps vous arriviez. De ton côté, tu combattais une nouvelle contraction quand il te dit : « On arrive bientôt, dans cinq minutes. » Merveilleuse nouvelle ! « Tu sais déjà si c’est une fille ou un garçon ou tu te laisses la surprise ? » Tu respirais un grand coup avant d’expirer alors que tu secouais la tête. « Je vais avoir un garçon, pas de surprise. Et il a une malformation à la main mais on m’a assuré qu’il serait en bonne santé. » Ca, tu demandes encore à voir mais tu l’espérais de toutes tes forces. Le véhicule ralentit un peu et tu réalisais que vous arriviez à l’hôpital. Cela voulait donc dire que ces retrouvailles avec Joaquin allaient prendre fin. Tu attrapais sa main entre deux tâches qu’il accomplissait pour lui dire : « Merci pour tout, ça m’a fait plaisir de te revoir. » Alors que le véhicule s’arrête, Joaquin ouvre les portes et des médecins vous attendent et s’approchent. « Je t’enverrai des photos dans quelques jours, c’est promis. » A défaut d’avoir besoin d’aide, ce numéro pouvait être l’occasion de ne pas se perdre de vue. Et puis vu comment il t’avait aidé, Joaquin méritait une ou deux photos de ton fils. Avant que tu puisses dire autre chose, les médecins t’amenaient à l’intérieur pour une prise en charge complète en vue de l’arrivée de ton fils parmi vous.