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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell

La blonde semble surprise face à l’annonce de ma grossesse - ce n’en est pas vraiment une, l’évidence est juste pointée du doigt, mon ventre arrondi est difficile à manquer - et je suis bien incapable de savoir ce que veut dire cette grimace sur son visage. J’ai fait la même, quand Ariane m’a annoncé qu’elle s’apprêtait à devenir mère mais, de mon côté, c’est plus de la provocation qu’autre chose. Possède-t-elle aussi peu de fibre maternelle que moi-même avant que ma vie ne soit bouleversée ? Se sent-elle coupable à l’idée de m’avoir demandé de lui venir en aide alors que je suis enceinte ? Je ne suis pas malade, pas fragile non plus et la présence de Callum m’a assuré d’être en sécurité mais, peut-être qu’à présent, elle comprend mieux la nécessité d’être accompagnée. Je me garde de faire le moindre commentaire : elle peut bien en penser ce qu’elle veut, ma demi-sœur. Pour l’instant, les liens du sang sont les seuls que nous partageons.

Elle a besoin d’une douche, de soigner la vilaine coupure sur sa main et certainement de quelque chose pour faire passer le mal de tête. Elle ne trouvera rien de bien fort ici, mais il faudra qu’elle s’en contente. Moi, je profite qu’elle disparaisse pour boire une seconde tasse de café en appelant Amos pour le tenir au courant : heureusement qu’elles sont rares, ces nuits que je ne passe pas auprès de lui. Je déteste ça. Elle prend tout son temps la gamine, et moi qui autrefois était un véritable oiseau de nuit, je me surprends à piquer du nez. Quand elle réapparaît dans la pièce, elle a les traits tirés mais une bien meilleure allure. Elle doit être douée pour faire semblant, je sais que moi, je l’étais. « J’respire toujours. » - « C’est déjà ça de pris, je suppose. » Mon ton est amusé - narquois ? - et je me calque sur l’impertinence de la jeune femme. Elle n’arrivera pas à me faire sortir de mes gonds, elle fait face à une maîtresse en la matière en termes d’effronterie.

Est-ce que j’ai raison, de confier mes failles à la gamine ? Que pourrait-elle en faire, de toute façon ? Si je ne partage pas les détails avec tous ceux qui croisent ma route, je n’ai pour autant jamais fait de mes problèmes de drogue un secret d’état. Nombreux sont ceux qui connaissent mon penchant pour la poudre blanche et les différentes épreuves qu’elle m’a fait vivre, avant que je ne parvienne à trouver un équilibre. En tirant sur ma cigarette électronique, je lui confie donc que je ne suis pas sans savoir ce que cela fait, d’être accro à un puissant psychotrope. « Ça fait combien de temps que t’es… Clean ? » Je réfléchis à cette la réponse à apporter à cette question. J’ai avoué avoir eu du mal à replonger et ce n’est pas tout à fait vrai : l’an passé, j’ai accueilli ma vieille amie sans restriction et j’ai touché le fond de la façon la plus brutale qui soit. « Ca faisait un peu plus de quinze ans l’an dernier. » Pour moi, la tentation n’a jamais complètement disparue : elle attendait simplement que je sois à nouveau vulnérable. « Maintenant, ça fait un peu plus d’un an. » Je vais droit au but et je joue un peu plus franc jeu que précédemment. « C’est Amos qui t’a aidée ? » Doucement, je hoche la tête. « L’an dernier c’était lui, oui. La fois d’avant, quelqu’un d’autre. » Quelqu’un qu’il n’est plus important de nommer : c’est de l’histoire ancienne. « Dans un cas comme dans l’autre, je m’en serais pas sortie seule. » L’an passé, je ne m’en serais même pas sortie du tout, puisque c’est Amos qui m’a trouvée inconsciente après mon overdose et qui a contacté les secours. « J’ai fait une overdose. » Je déclare ça avec une calme surprenant, compte tenu de la teneur de l’aveu. « Faut croire qu’on a ça aussi en commun. » En plus de notre désintérêt commun pour le brunch dominical.
 
« Okay, et donc tu te dis que peut-être aider quelqu’un dans le même genre de galère, ça va payer ta dette envers le karma ou un truc du genre ? » C’est mal me connaître, de croire que j’en ai quelque chose à faire de mon karma. Mais en même temps, la gamine ne sait pas grand chose de la femme que je suis. « Tout ça uniquement par bonté d’âme ? » Je reste impassible puisque je sais bien où elle veut en venir : elle cherche où est le loup. Elle cherche à quel moment elle se fait rouler puisque je peux rajouter un troisième point commun à une liste qui ne fait que grandir - nous voilà bientôt meilleures amies pour toujours - elle a l’air aussi profondément méfiante que je le suis. « C’est quoi les conditions ? » - « Tu cherches le piège. » Pas les conditions. « Et y’en a pas. » Aussi surprenant que ça puisse paraître. « En ce qui concerne les conditions, rien de plus que du respect de base. Tu prends soin des lieux, tu crèves pas ici, tu files les clés à personne. » D’autres règles viendront après, quand j’aurais eu le temps de parler de tout ça à tête reposée avec mon complice. « Et si t’as l’occasion d’apprendre à me connaître, tu réaliseras que j’en ai rien à foutre, de mon karma. » Mais je préfèrerais tout faire pour la tenir à l’écart de mon univers, cela va sans dire. « Je  sais ce que c’est d’être méfiante. Je sais que t’es en train de te dire que c’est trop beau pour être vrai. Mais t’as l’air d’être au pied du mur et nous on fait rien de cet endroit, alors je te propose de crécher ici un temps. C’est aussi simple que ça. » Peut-être que ça lui évitera la prostitution. Peut-être que ça lui évitera de se faire planter dans un squat craignos. « J’ai pas d’argent pour rembourser quoi que ce soit. » - « Tu as l’impression que j’ai besoin d’argent ? » Un sourire suffisant étire mes lèvres. Je suis fière de là où j’en suis, je ne cherche même pas à dissimuler mon orgueil et ma suffisance. « Et une fois que t’as accouché il se passe quoi ? Je doute que t’aies très envie de m’avoir dans les pattes dans un moment pareil. » - « J’ai pas l’intention de faire dormir le bébé ici. » Mon sourire amusé ne me quitte pas. Finalement, je secoue la tête et je tire à nouveau sur ma cigarette. « Laisse-moi me soucier de ce qui se passera quand j’aurais accouché. Tout ce que t’as à savoir, c’est que je te demanderai pas de jouer les baby-sitter. » Personne n’approchera ma fille en dehors de son père. Possessive ? Évidemment que je le suis.

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

La jeune femme ne cherche pas à user la patience de Raelyn. Pas volontairement, en tout cas. Mais c’est dans sa nature d’agacer les gens. Avec sa méfiance permanente, son cynisme mal placé et son caractère d’enfant capricieuse. Certains ont parfois l’envie de lui donner une chance, et systématiquement elle fout tout en l’air d’une façon ou d’une autre. Pour l’instant, elle prend ce qu’elle peut. Elle pose quelques questions et s’attend presque à ne pas avoir de réponse. « Ca faisait un peu plus de quinze ans l’an dernier. » hé bein. Y a quinze ans, Spencer était encore en train de piquer des crises et voler les jouets de ses petits camarades des familles d’accueil. Elle avait ses soucis, mais rien de comparable à ce qu’elle est devenue aujourd’hui. « Maintenant, ça fait un peu plus d’un an. » après tant de temps, c’est presque dommage d’avoir rechuté. Mais Spencer n’est pas du genre à blâmer (bon si un peu quand même, mais ça dépend qui et pourquoi.) Elle est sacrément mal placée pour émettre le moindre jugement à ce sujet. « L’an dernier c’était lui, oui. La fois d’avant, quelqu’un d’autre. Dans un cas comme dans l’autre, je m’en serais pas sortie seule. » Spencer écoute bien sagement et enregistre les informations qui lui sont données. Elle ne s’attendait clairement pas à ce que Raelyn lui confie ce genre de chose, surtout pas si tôt dans leur pseudo relation. « J’ai fait une overdose. » « T’as eu de la chance qu’il soit là. » c’est un simple constat. Elle a su s’entourer des bonnes personnes et ça a payé. La petite blonde est encore trop frileuse à l’idée de laisser des gens entrer dans sa vie. Pourtant c’est bien elle qui est allé appeler à l’aide, personne ne lui a forcé la main. Et pour une fois, quelqu’un a répondu présent. C’est sans doute ça qui est le plus déstabilisant dans cette histoire. « Faut croire qu’on a ça aussi en commun. » elle n’a pas fait d’overdose, Spencer. Pas encore. Mais c’est sans doute une question de temps, la plupart des camés ne sont que des morts en sursis et elle ne fait pas exception à la règle. Mais elle note dans un coin de sa tête que sa demi-sœur a fait partie de la même catégorie de gens qu’elle. Les causes perdues, ceux qui touchent le fond et se laissent consumer par leurs démons. Et puis il y a eu une main tendue qu’elle a su saisir et aujourd’hui, Raelyn a réussi à s’en sortir et à construire quelque chose. « Ca aurait sans doute été mieux d’être le genre de personne à aimer les brunchs. » qu’elle plaisante en ricanant. Plus simple, moins dangereux. Et plus simple d’en parler en société, aussi. “Vous avez quoi en commun ?” “Oh trois fois rien, l’addiction à la drogue.” Ca fait pas très bon genre. Et donc, elle commence à comprendre pourquoi Raelyn l’aide et de qui elle parlait un peu plus tôt. “Tu me rappelles quelqu’un.” qu’elle avait dit. Maintenant elle voit qui.

Spencer reste tout de même sur ses gardes, elle ne tient pas à se retrouver dans un quelconque traquenard. (Quand réellement, elle ne devrait pas faire la fine bouche comme ça.) « Tu cherches le piège. Et y’en a pas. » « Tu avoueras que ça paraît un peu gros, comme proposition. » elle hausse les épaules, soulignant juste que n’importe qui trouverait ça louche. « En ce qui concerne les conditions, rien de plus que du respect de base. Tu prends soin des lieux, tu crèves pas ici, tu files les clés à personne. » elle acquiesce doucement. Si Spencer n’est pas une fée du logis, elle sait faire le minimum syndical. De toute façon, c’est pas comme si elle avait beaucoup d’affaires à éparpiller. La partie la plus compliquée reste sans doute la seconde. Elle fait ce qu’elle peut pour pas crever la bouche ouverte dans un caniveau depuis des années, elle peut continuer à essayer de survivre encore un peu dans un endroit comme celui-ci. « Et si t’as l’occasion d’apprendre à me connaître, tu réaliseras que j’en ai rien à foutre, de mon karma. » « C’est qu’des conneries le karma de toute façon. » Blackwell préfère ne pas y croire. Ca lui évite de se poser trop de questions lorsqu’elle fait ses conneries. « Je sais ce que c’est d’être méfiante. Je sais que t’es en train de te dire que c’est trop beau pour être vrai. Mais t’as l’air d’être au pied du mur et nous on fait rien de cet endroit, alors je te propose de crécher ici un temps. C’est aussi simple que ça. » c’est rarement aussi simple en vérité. Et Spencer a toujours du mal à accepter le fait qu’il n’y a pas tant de contreparties que ça. Ses doigts pianotent quelques instants sur le comptoir pendant qu’elle réfléchit à la proposition. C’est clairement le meilleur deal qu’elle puisse avoir. Un appart gratuit (pour l’instant), au moins le temps d’essayer de sortir la tête de l’eau. Une opportunité comme ça ne se représentera pas, et elle doute que Raelyn soit du genre à demander plusieurs fois ou même à insister. Une affaire à prendre ou à laisser. Mais forcément, elle est tiraillée, Spencer. D’un côté, elle a très envie de dire oui, parce que c’est sans doute la meilleure chose à faire, faut être réaliste et accepter le fait qu’elle pourra pas s’en sortir seule. Mais de l’autre, elle a toujours du mal à croire à tout ça. Elle-même, en tant que menteuse régulière, elle a fait bien des promesses qu’elle n’a eu aucun mal à briser. Elle prend un malin plaisir à mener les gens en bateau pour obtenir quand elle y trouve un intérêt. (C’est à dire souvent.) « Tu as l’impression que j’ai besoin d’argent ? » « Un peu moins que moi, je te l’accorde. » (beaucoup moins qu’elle.) Spencer prend le temps de s’inquiéter de la suite tout en se servant enfin un foutu café. « J’ai pas l’intention de faire dormir le bébé ici. » manquerait plus que ça. Spencer imagine que de toute façon, elle a un appartement qui fait dix fois la taille de celui-ci. « Laisse-moi me soucier de ce qui se passera quand j’aurais accouché. Tout ce que t’as à savoir, c’est que je te demanderai pas de jouer les baby-sitter. » la remarque la fait sourire. « Ce serait sans doute pas une très bonne idée, de toute façon. Je pense pas être très qualifiée pour ce genre de job. » elle pointe l’évidence en prenant sa tasse de café pour aller s’installer sur le canapé où elle a passé la nuit. Maintenant qu’il fait jour et qu’elle a l’esprit un poil plus clair, elle peut distinguer les quelques traces de sang séché. Ça va être chiant à ravoir, ça. « Ouais. Okay. » qu’elle dit après un temps de réflexion en reportant son attention sur Raelyn. « Pour l’appart. » c’est sans doute pas nécessaire de préciser, mais elle le fait quand même. « T’as vu dans quel genre d’endroit je reste la plupart du temps, c’est pas comme si je pouvais refuser une offre pareille. » et même si ça l’emmerde au plus haut point d’être redevable, arrive un moment où elle n’a plus trop le choix. Elle a appelé à l’aide et a reçu un peu plus que demandé. « Merci. D’être venue. Et pour heu… La proposition. » pour quelqu’un qui remercie rarement les gens, ça fait déjà deux fois qu’elle le fait avec Raelyn. A raison. En deux rencontres, elle a fait bien plus pour Spencer que la plupart des gens qu’elle a déjà côtoyé. « Promis, si je dois crever j’essaye de pas le faire ici. » y a plusieurs choses plutôt simples à mettre en place pour réussir cette promesse là. Ne pas se défoncer ici, inviter personne, ça devrait être faisable.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell

« T’as eu de la chance qu’il soit là. » Il s’agit d’une évidence, une que je ne renierai pas par fierté ou pudeur. Elle est loin de tout savoir Spencer, elle ignore que lorsqu’Amos m’a trouvée, mon cœur battait faiblement et je m'étouffais dans mon vomi. Elle ignore tout de jusqu’où j’étais tombée parce que mon cœur était brisé à cause des coups de couteau dans mon dos. Je voulais me persuader que je le haïssais, à l’époque. On en a fait du chemin en un peu plus d’un an, voilà ce que je pense alors que je baisse les yeux sur mon ventre rond. « Ca aurait sans doute été mieux d’être le genre de personne à aimer les brunchs. » - « Ouais, mais on aurait été chiantes. » J’esquisse un sourire avant de m’appuyer un peu plus en arrière dans le fauteuil dans lequel je suis installée. Bientôt, je la laisserai tranquille : mais pas avant de lui faire une proposition. Elle est libre de la refuser et je ne m’en offusquerais pas. Je ne sais que trop bien ce qu’est la fierté et je sais aussi qu’elle peut en pousser certains à refuser une main tendue dans leur direction, même s’ils en ont diablement besoin.

« Tu avoueras que ça paraît un peu gros, comme proposition. » C’est à la hauteur de ma démesure. Je ne traite pas le studio avec désinvolture parce qu’il ne m’appartient pas : j’en ai touché un mot à Amos et, surtout, j’aurais agi de la même façon s’il était à moi. Je possède la moitié d’un casino, un loft aux dimensions démesurées, légalement un bâteau, bien qu’il soit plus à Amos qu’à moi et, surtout, un compte en banque dont j’ignore les limites grâce à un trafic plus que lucratif. « Je t’oblige pas à accepter. » Et je ne la traiterai pas différemment si elle le fait : ce n’est pas un moyen de l’acheter ou de la contrôler. « C’est qu’des conneries le karma de toute façon. » Mon sourire dévoile une rangée de dents blanches et je laisse échapper un rire amusé avant de lui tendre ma tasse de café. « Sers m’en un autre, tu veux bien. » Est-ce que j’abuse de mon état ? Pas qu’un peu.

« Un peu moins que moi, je te l’accorde. » - « Un peu moins que toi, oui. » Le savait-elle quand elle a tenté de me retrouver ? Était-elle motivée par l’appât du gain ? La théorie qui était crédible au départ ne l’est plus vraiment : elle n’a rien tenté de me soutirer. Elle ne m’a pas demandé d’argent, elle n’a fait que m’appeler parce qu’elle ne savait pas vers qui se tourner, hier soir. « Ce serait sans doute pas une très bonne idée, de toute façon. Je pense pas être très qualifiée pour ce genre de job. » - « Sa naissance changera rien. J’ai pas l’intention de t’inviter à des repas de famille ou de te demander d’être sa marraine. » Rien qui ne peut donc l’empêcher d’accepter mon offre. J’ai mon loft, mon amant et bientôt époux, j’ai ma vie bien loin de toute cette histoire. « Ouais. Okay. Pour l’appart. T’as vu dans quel genre d’endroit je reste la plupart du temps, c’est pas comme si je pouvais refuser une offre pareille. » Sans effusion de sentiments, je hoche la tête et je lui lance les clés pour qu’elle les rattrape au vol. « Pour ce que ça vaut, je pense que tu prends la bonne décision. J’ai laissé ma fierté guider mes décisions un certain nombre de fois, et c’est pas un chemin que je conseille. » Il est solitaire et, si je le suis, je ne suis plus seule depuis le jour où j’ai appris à les ravaler, elle et ma pudeur. « Merci. D’être venue. Et pour heu… La proposition. Promis, si je dois crever j’essaye de pas le faire ici. » - « Tu me rendras service. Je veux pas voir les flics traîner autour de chez moi. » Et elle n’a pas la moindre idée d’à quel point c’est vrai. Tout ce qui peut attirer l’attention des forces de l’ordre sur moi est à proscrire.

Prête à prendre congé, je vide ma tasse de café avant de me redresser et d’attraper mon sac. « Je vais te laisser récupérer. » Elle doit avoir la gueule de bois, la gorge sèche et tout un tas de désagréments qui vont de paire avec la descente. « Si jamais t’as besoin de te faire un peu d’argent, présente toi au casino. Et présente toi clean. » Comprendre ce qu’elle traverse ne signifie pas pour autant que je suis prête à fermer les yeux sur ce genre de chose lorsque cela concerne les affaires. « Je crois que tu sais où c’est. » J’esquisse une moue amusée : je l’ai surprise à traîner là bas, lors de notre première rencontre, après tout. « Je peux pas te promettre qu’on te proposera un boulot. » Cela ne dépend pas de moi : c’est Amos le gérant, il est le patron des lieux et si nous fonctionnons comme une équipe, jamais je ne lui forcerais la main ou tenterais de le manipuler pour qu’il prenne une décision plutôt qu’une autre. « Mais je peux au moins te promettre un entretien. Le reste, ça dépendra en grande partie de toi. » Et de ce qu’elle a dans le ventre. « Mange quelque chose. T’es blanche à faire peur. » Se pourrait-il qu’il s’agisse d’un conseil presque maternel ?

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell

« Ouais, mais on aurait été chiantes. » la remarque la fait rire. Oui, sûrement. Et pourtant parfois, Spencer se surprend à rêver d’une vie chiante, simple. Elle se demande ce qui se serait passé si Maureen avait été capable de prendre soin d’elle, ou si Jeremiah n’était pas un lâche du genre à abandonner ses familles dès la moindre contrariété. Est-ce qu’elle aurait eu une enfance posée ? Est-ce qu’elle aurait eu la patience d’être une meilleure personne, digne de confiance ? Un diplôme en poche, une situation stable, peut-être un chien. Une vie posée, calme. Elle sait très bien que ce ne sont que des illusions. Blackwell n’est pas taillée pour quelque chose comme ça.

Jamais de sa vie on ne lui a proposé un plan pareil. (Enfin si, mais ça relevait clairement de l’arnaque et si elle avait eu le malheur de dire oui à ce moment-là, elle ne serait plus ici aujourd’hui.) Mais elle a vu tellement de trucs, entendu tellement de fausses promesses qu’aujourd’hui elle n’a plus aucune idée d’à quoi ressemble la vérité. « Je t’oblige pas à accepter. » elle avait pourtant dit qu’elle ne voulait rien, Spencer. Et la voilà en train de potentiellement récupérer un appartement, juste… Juste parce que, pour une fois, elle a pris la bonne décision. C’est assez rare pour être souligné. Certes, elle n’est pas obligée d’accepter. Si elle veut, elle peut tout aussi bien récupérer ses trois affaires et se tirer d’ici pour ne  plus jamais y remettre les pieds. Et d’ici quelques jours, elle sera de retour dans un squat pouilleux ou dans n’importe quel endroit un minimum abrité pour qu’elle puisse dormir, exposée au monde. Elle a toujours détesté devoir compter sur les autres. Et pourtant aujourd’hui, même elle doit reconnaître qu’elle n’a plus le choix. Qui sait combien de temps encore elle va pouvoir survivre là-dehors. La véritable question dans tout ça, c’est pas tant de savoir si elle veut accepter, c’est plutôt de déterminer si oui ou non elle veut essayer de s’en sortir. « Sers m’en un autre, tu veux bien. » en temps normal et pour n’importe qui d’autre, la blonde aurait probablement râlé et rechigné à la tâche. Pourtant, si elle plisse le nez, elle ne dit rien. C’est bien la moindre des choses et c’est peu cher payé pour tout ça. Alors la jeune femme traine la patte jusqu’à Raelyn pour récupérer sa tasse et aller la remplir avant de lui rendre. C’est qu’elle est serviable, quand elle veut.

« Un peu moins que toi, oui. » pour quelqu’un qui passe sa vie à essayer de voler de l’argent pour s’en sortir, il faut croire qu’elle n’est pas si ambitieuse que ça, Spencer. D’ordinaire, elle récupère quelques dollars, juste de quoi ne pas crever la gueule ouverte dans le premier caniveaux qui croise son chemin. Et là, elle se retrouve confrontée à quelqu'un qui a de l’argent. Beaucoup d’argent. Mais, dans un coin de sa tête, la jeune femme sait que c’est sans doute une très mauvaise idée d’essayer de s’en prendre à Raelyn. Elle n’a pas l’air d’être le genre de personne avec qui on déconne. « Sa naissance changera rien. J’ai pas l’intention de t’inviter à des repas de famille ou de te demander d’être sa marraine. » rien d’étonnant là-dedans. A part un passé tumultueux et un géniteur, elles ne partagent pas grand chose, les deux frangines. Raelyn n’a pas attendu de découvrir l’existence de Spencer pour commencer à vivre et fonder sa propre famille. Et, il n'y a pas de place pour la blonde. Même si depuis le début elle clame ne rien vouloir de tout ça, l'entendre de vive voix, c'est un retour à la réalité. Son sourire se fait amer et elle se contente de hocher la tête en portant son regard ailleurs. Ce sont les espoirs futiles d'une gamine paumée qui fait pourtant de son mieux pour trouver sa place et les désillusions de l’adulte qui doit affronter les faits. Elle secoue doucement la tête et change de sujet en acceptant l'appart. Un bref regard vers Raelyn et cette dernière lui lance les clés. Elle a au moins le temps de les rattraper au vol avec sa main valide et prend un moment pour observer l’objet dans sa paume. « Pour ce que ça vaut, je pense que tu prends la bonne décision. J’ai laissé ma fierté guider mes décisions un certain nombre de fois, et c’est pas un chemin que je conseille. » elle relève le regard vers la femme enceinte. Des décisions discutables et regrettables, elle en a déjà fait. Sur bien des aspects, Spencer considère qu’il est déjà trop tard. Elle ne corrigera pas ses erreurs du passé et ne pourra absolument rien changer, mais au moins elle peut essayer de faire mieux à l’avenir. « On verra. » elle est sans doute la seule à avoir besoin d'être convaincue.

Et ça commence par une semi-promesse qu’elle a bien l’intention de tenir. Pas spécifiquement pour éviter les ennuis à Raelyn mais plutôt parce qu’elle n’a pas tellement l’intention de casser sa pipe de si tôt. « Tu me rendras service. Je veux pas voir les flics traîner autour de chez moi. » « J’ai pas trop envie de traîner autour des flics non plus. » pour des raisons qui sont tellement évidentes qu’elles n’ont même pas besoin d’être exprimées tout haut. Et il n’est pas difficile d’imaginer que Raelyn a sans doute envie de s’épargner toute la paperasse qui irait avec une situation pareille. « Je vais te laisser récupérer. » avec une soirée comme celle de la veille, il va lui falloir au moins mille ans pour être à nouveau reposée. (A peu de choses près.) « T’as un bout de nuit à récupérer aussi. » elle n’est toujours pas à l’aise à l’idée d’avoir réveillé une femme enceinte au beau milieu de la nuit. Une chose est sûre, elle fera au moins en sorte d’éviter les coups de fil nocturnes à l’avenir. « Si jamais t’as besoin de te faire un peu d’argent, présente toi au casino. Et présente toi clean. » son intérêt se retrouve piqué au vif. Bien sûr qu’elle a besoin d’argent et après leur petite discussion, Raelyn doit l’avoir bien compris. Mais c’est à double tranchant, ce truc là. Complètement clean, elle ne le sera probablement jamais. Ou pas tant qu’elle ne se sera pas prise en main et qu’elle aura accepté l’aide nécessaire. Avoir dit oui pour l’appart, c’est déjà beaucoup. Elle a pris sur elle, profitant de l’opportunité pour avoir un toit sur la tête et surtout, potentiellement se rapprocher de la seule personne qui partage le même sang qu’elle. Parler de famille, c’est sûrement trop tôt. Sans doute qu’elles n’auront jamais une relation fusionnelle ou proche mais il y a au moins un début de quelque chose et c’est sans doute mieux que rien. Peut-être qu'elle devra se contenter de ça. « Je crois que tu sais où c’est. » « Je saurai retrouver, ouais. » l’idée de décrocher un job est effectivement intéressante. Ca sera sans doute pas un truc payé beaucoup, mais tout est mieux que zéro. Le plus dur dans tout ça, c’est pas forcément de décrocher le boulot, c’est plutôt de le garder. Parce qu’elle est loin d’être fiable sur le long terme, Spencer. Mentir pour bien se vendre ou pour paraître mieux qu'elle ne l'est vraiment, elle sait bien le faire. Assumer une routine où il faut faire des efforts, c'est autre chose. « Je peux pas te promettre qu’on te proposera un boulot. Mais je peux au moins te promettre un entretien. Le reste, ça dépendra en grande partie de toi. » « Je hm… Ferais au mieux. » avant d’envisager de se présenter à un potentiel entretien d’embauche, va lui falloir un moment pour s’y préparer. « Mange quelque chose. T’es blanche à faire peur. » elle acquiesce légèrement, ne pouvant pas vraiment contredire Raelyn à ce sujet. Si elle ne ressent pas encore le besoin ou l’envie de se nourrir, ça ne saurait tarder. Si elle veut continuer dans l’humour, elle peut dire qu’elle travaille sur son teint de nuit. « Faut que j’aille acheter des trucs. » l’appart n’étant pas habité, il n’est pas difficile d’imaginer que les placards sont vides de toute nourriture.

Finalement, avoir été repérée par cet enfoiré de Callum devant le casino, c’est peut-être pas la pire chose qui lui soit arrivé.