The midnight sky is the road I'm takin'
Megan Williams & @co

Si ce n’était pas pour Megan, elle se barrerait sans demander son reste. Les secondes défilaient à une vitesse qu’elle sentait s’égrainer sur sa peau mise à nue par la tenue qu’elle portait et l’ambiance était de plus en plus électrique. Jo le ressentait autant qu’elle n’était faite que de ça ; de tension et de rancœur, à forer là où ça faisait mal pour faire son intéressante et détourner l’attention pour qu’elle ne soit dirigée sur elle, et uniquement sur elle. Charlie et Damon étaient d’un côté, Shiloh et Megan étaient de l’autre, et quand bien même cette dernière semblait soucieuse de faire participer tout le monde aux célébrations, la sensation de n’être que là que par obligation était en train de devenir trop prégnante pour qu’elle y trouve vraiment son compte, Josephine. Megan avait beau la remercier pour son cadeau, elle avait beau la prendre par les épaules pour lui insuffler tout sa reconnaissance, ce n’était pas assez pour qu’elle consente à se sentir à son aise au milieu de tout ce cirque ambulant. Encore une fois, elle connaissait une part du secret de Megan et Damon, aussi de les voir agir comme si de rien n’était, ça lui hérissait le poil plus qu’elle n’oserait jamais l’avouer.
C’était dans ces moments-ci qu’elle s’apercevait de son hypersensibilité. Ce n’était pas qu’un cliché, que les artistes dans son genre avaient la capacité de boire et de recracher les émotions tout de go ; que ce soit au moment où Damon répondit à sa question, que celui où Megan se leva pour s’en aller, elle sentit ses nerfs s’activer et mettre son corps en alerte au point de la faire se lever d’un mouvement brusque de sa chaise, qui racla le sol dans un brouhaha strident, après avoir bu son verre.

Elle lança un bref regard à Charlie, ne préférant pas s’attarder sur elle au risque de ressentir, là encore, trop de choses à la fois. C’était elle qui jouait l’indifférence à son égard, mais c’était aussi elle qui était la plus fière et qui ne supportait pas l’idée de devoir s’adresser à elle la première. Alors, à défaut d’autre option, elle s’adressa à Shiloh à la place, tournant la tête dans sa direction parce que Megan disait vrai quand elle parlait d’elle : elle avait beau transpirer la mièvrerie, sa douceur était assez réconfortante pour que, sur le moment, elle se sente plus gaillarde à l’idée de lui parler.
Ce qu’elle fit, pour lui dire "Tu diras à Megan que j’ai dû partir plus tôt." Ce n’était même pas une question, c’était une affirmation franche et nette qu’elle n’enroberait pas d’un joli papier comme elle l’avait fait avec le cadeau qu’elle lui avait offert. Shiloh inventerait ce qu’elle voudrait pour justifier sa fuite, elle pourrait même ne rien lui dire qu’au fond, Jo s’en cognerait, tant qu’elle pouvait s’en aller. En attendant, c’était tout ce qu’elle voulait pour laisser derrière elle le poids de sa déception concernant Charlie, mais surtout le poids du secret que Megan avait partagé avec elle et qui, se rendait-elle compte avec un temps de retard, pesait trop lourd sur sa conscience. Le serveur qui s’était occupé d’eux dès leur arrivée se pointa à nouveau, certainement alerté par le mouvement de Jo qui n’était pas passé inaperçu, des têtes se tournant vers la table investie par la compagnie "Je peux récupérer mon manteau ?" qu’elle lui fit sans plus de politesse, récupérant sa pochette qu’elle glissa sous son bras avec la ferme intention de partir sans regarder derrière elle. Elle avait fait acte de présence, c’était déjà ça.

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@megan williams, @charlie villanelle, @jo carter, @shiloh atkins

Les pas de Damon semblaient pressés alors qu’il se dirigeait vers les toilettes - mais ce n’était qu’une illusion. En réalité, ils étaient chargés d’un trop plein d’émotions, mais d’émotions négatives qu’il ne pouvait exprimer à haute voix pour le moment. Les apparences étaient bien trop précieuses pour qu’il laisse les émotions parcourant ses veines le submerger. Ce ne fut que lorsque la porte des toilettes fut close derrière lui, et que personne d’autre que Megan ne pouvait l’apercevoir, qu’il laissa tomber le masque. Ici, il n’en avait que faire que la jeune femme voit l’inconfort et la colère, parfois, traverser son visage. Et puis, elle semblait être déjà bien occupée à gérer ses propres émotions pour faire attention à celle que Damon pouvait ressentir - il voyait parfaitement les traces de mascara autour de ses yeux, le rouge les accompagnant. Ils formaient une bien piètre image en cet instant, mais du moment de personne d’autre ne les voyait, tout allait - presque - bien.

« Tu sais, au fond, j’avais envie que tu viennes. J’espérais que tu le fasses. Parce que c’est mon anniversaire et que j’avais envie de le fêter avec toi. Mais ça… » Elle avait laissé le silence s’installer pendant plus d’un instant autour d’eux, avant de prendre la parole. Elle s’était laissée le temps de recomposer une attitude avant de s’exprimer, et de toutes façons Damon n’aurait rien pressé de tout ça. Il n’était pas en attende d’une discussion ou quoi que ce soit de cet acabit, il laissait simplement le temps et l’espace nécessaire à Megan pour se sentir de nouveau apte à retourner en salle. « C’est pire que mieux. Je sais que les apparences sont importantes, mais je doute qu’on renvoie vraiment l’image d’un couple heureux là, ce soir. » Le regard de l’italien finit également par se relever, plongeant dans celui de la blonde face à lui. Il n’aimait en rien la situation dans laquelle ils se trouvaient actuellement, mais la rancoeur était tenace et ne s’effacerait pas ce soir, il le savait. « Tu crois que je le suis, heureuse ? Je comprends même pas comment tu peux penser que je voulais de ça. » - « Parce-que tu penses que je le suis, moi, heureux ? » Là où il était adossé à la porte jusque maintenant, il se redressa et posa ses mains sur ses hanches, ne lâchant pas les azurs de Megan. « Tu penses que je voulais que ça tourne comme ça aussi ? » Il sentait dans ses paroles qu’il s’énervait, et il n’aimait pas ça; lorsqu’il laissait cette émotion prendre le dessus sur toutes les autres il avait l’impression d’entendre Saül dans ses mots, ses paroles: c’était la dernière de ses volontés.

Cependant, Damon ne savait composer autrement en cet instant et il dut faire des efforts pour ne pas laisser la colère prendre le dessus sur le ton par lequel était portée sa voix. « Comment je peux savoir si tu prétends pas que ça te touche à ce point là, hein ? Je me doute bi que tu veux pas fêter ton anniversaire et finir par pleurer dans les toilettes du restaurant, mais comment je peux savoir si c’est pas pour te jouer de moi que tu agis comme ça ? » Il leva les mains, comme pour clamer une innocence de sa part qui n’était en rien nécessaire en cet instant. Le pire dans tout ça, c’était qu’il était parfaitement au courant qu’une part de la détresse qu’il pouvait lire dans les yeux de Megan était de sa faute, car les choses n’étaient pas supposées se construire de la sorte entre eux et qu’il ne l’avait pas habitué à réagir de cette manière là. Mais désormais, tant qu’il n’aurait pas réussi à trouver un semblant de paix en lui-même par rapport à cette situation, il ne saurait agir autrement. « Je sais parfaitement qu’on a pas l’air d’un couple heureux, parce-qu’on l’est pas. Mais on a l’air d’un couple qui passe dans une tempête et qui fait en sorte que ça aille mieux, et ça me suffit pour le moment. » Il était commun, après tout, d’avoir des difficultés à la maison et de ne pas vouloir les exposer aux yeux du monde lorsqu’ils sortaient en compagnie d’autres gens. C’était exactement la façon dont Damon comptait laisser les choses se passer: prétendre que ça allait aux yeux des autres le temps qu’il trouve un moyen que ce soit également vrai de son côté.

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« Parce que tu penses que je le suis, moi, heureux ? » - « Je pense que t’essaies même pas de te donner une chance de l’être. » C’est injuste, évidemment. C’est injuste parce que, jusque-là, je n’ai pas grand-chose à lui repprocher à Damon, si ce n’est la façon dont je me suis sentie le jour de notre mariage et la façon dont il a balayé la chose lorsque j’ai abordé le sujet - au mauvais moment, certainement. Je n’ai pas grand-chose à lui repprocher parce qu’il ne me doit pas grand-chose, aussi. C’est peut-être ça le problème, peut-être que je pensais pouvoir m’acheter une vie différente, une où je compterais pour quelqu’un, une où je n’aurais plus jamais à me soucier à la fois de joindre les deux bouts et de me retrouver toute seule à la fin de la journée, une fois que la nuit tombe. Peut-être que c’est tout ça que je voulais, en oubliant qu’il n’est pas toujours possible de prendre des raccourcis et qu’il y a des choses que l’on ne peut pas obtenir par sa simple et seule volonté. « Tu penses que je voulais que ça tourne comme ça aussi ? » Les bras croisés sous ma poitrine, je baisse les yeux avant de porter une main à mes paupières, afin d’essuyer les larmes les plus récentes. « Au moins tu peux dire que t’avais raison. » Qu’il avait raison de se méfier de moi, qu’il avait question de me qualifier d’arriviste, qu’il avait raison de penser que je ne m’intéresse qu’à moi et à mon nombril. Parce que c’est ce qu’il pense, non ?

« Comment je peux savoir si tu ne prétends pas que ça te touche à ce point là, hein ? Je me doute bien que tu veux pas fêter ton anniversaire et finir par pleurer dans les toilettes du restaurant, mais comment je peux savoir si c’est pas pour te jouer de moi que tu agis come ça ? » Et qu’est-ce que j’aurais à gagner à agir de la sorte ? S’il pense que tout ce que j’ai fais jusqu’ici je l’ai fait pour l’argent ou pour la renommée de sa famille, que c’est tout ce que j’ai eu en tête ces derniers mois, qu’il réponde tout seul à sa question : qu’est-ce que cela m’apporte, de m’attirer sa pitié ? Qui nous voit, puisque nous sommes tous les deux dans les toilettes ? Ne devrais-je pas rayonner de bonheur, puisque je porte au cou la chose la plus chère qu’on m’ait jamais offerte ? La plus chère que je n’ai jamais possédé ? Ne devrais-je pas avoir un sourire jusqu’aux oreilles et estimer que j’ai tout ce dont je rêve ? « Je sais parfaitement qu’on a pas l’air d’un couple heureux, parce qu’on l’est pas. Mais son a l’air d’un couple qui passe dans une tempête et qui fait en sorte que ça aille mieux, et ça me suffit pour le moment. » Combien de temps ? Combien de temps continuera-t-il à estimer que c’est suffisant ? Combien de temps avant qu’il n’en ait assez et qu’il finisse par me dégager, d’une façon ou d’une autre.

« C’est gentil d’avoir pensé à moi. » Mes paroles sonnent faux, alors que je glisse mes mains dans ma nuque pour ouvrir le fermoir du massif collier et pour le décrocher de mon cou. La seule chose que je lui concède, c’est d’avoir en effet vraiment pensé à moi. J’ignore si ce sont les réseaux sociaux qui le lui ont rappelé ou pas, mais il s’est souvenu de la date de mon anniversaire et, ce matin, il a préparé pour moi le petit déjeuner. Il n’a pas décoché un mot en mangeant, mais il l’a fait. « Mais le petit-déjeuner, ça aurait été suffisant. Je le pensais quand j’ai dit que j’en avais pas après ton argent. » Je tends la main qui porte le lourd collier dans sa direction. Qu’il le reprenne, si ça peut l’aider à me croire. Il est magnifique, dans d’autres circonstances je l’aurais adoré et il aurait fait briller mes yeux, mais je préfère encore me racheter auprès de Damon. Qu’il le reprenne si cela peut aider ma cause et lui faire comprendre qu’il n’est pas qu’une machine à fric et à somptueux cadeaux à mes yeux. Les cadeaux dont j’ai envie, ceux dont j’ai besoin, j’ai peur qu’ils ne puissent pas être achetés par des liasses de billets, aussi grosses soient-elles.

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« Je pense que t’essaies même pas de te donner une chance de l’être. » Il dut pincer les lèvres et serrer les dents, Damon, pour ne pas laisser échapper un rire un poil mauvais contre son gré en cet instant. Peut-être qu’il n’avait pas essayé d’être heureux, il ne niait pas cette partie là de l’histoire; mais peut-être ne l’avait-il pas fait tout simplement parce-qu’à ses yeux il n’y avait pas les bonnes conditions réunies pour que ce soit le cas. Etre heureux dans la situation qui lui avait été imposée, à ses yeux, revenait à dire que Saül avait gagné, avait eu raison - et ce n’était pas quelque-chose qu’il désirait réellement envisager. Considérer la possibilité qu’il puisse davantage profiter de la situation, plus qu’il ne le faisait déjà, ne traversait même pas ses pensées. Si la chance d’être heureux, comme le disait si bien Megan, était rendue possible par son père, il ne la saisirait pas - et ce n’était pas les yeux plein de larmes de la jeune femme qui feraient le poids aujourd’hui, pour une fois, face à la colère qui résonnait en son sein.

« Au moins tu peux dire que t’avais raison. » - « J’aurais préféré que ce soit pas le cas. » Maintenant, après avoir côtoyé la jeune femme pendant toutes ces semaines et après avoir commencé à mieux la connaître, il n’aurait plus désiré avoir raison. Au moins, ils auraient pu trouver une solution pour se construire leur bonheur, en naviguant dans ces eaux plus que particulières et peu ordinaires. Désormais, il comprenait simplement qu’il s’était une fois de plus foutu le doigt dans l’oeil jusqu’au coude - et pourtant, c’était son coeur le premier impacté par la situation. Parce-que si l’équilibre qu’ils avaient tant bien que mal trouvé jusque maintenant leur avait permis d’au moins sauver les apparences, ces dernières étaient désormais elles aussi menacées; il n’était pas dupe sur la question Damon et savait qu’ils allaient devoir redoubler d’efforts par la suite pour rattraper une soirée comme celle qu’ils étaient en train de passer. Mais pour le moment, c’était le cadet de ses soucis. Pour le moment, avoir juste l’air d’un couple tentant de se soutenir lui semblait être une version suffisante.

Apparemment, Megan ne semblait pas du même avis pourtant. « C’est gentil d’avoir pensé à moi. » Les mains de la jeune femme atteignirent son cou afin d’y décrocher le collier qu’il lui avait offert le matin même. Il entendit ses propres dents grincer, en la voyant agir ainsi. « Mais le petit-déjeuner, ça aurait été suffisant. Je le pensais quand j’ai dit que j’en avais pas après ton argent. » La main de Megan était tendue dans sa direction, le collier pendant au bout de ses doigts. Pendant un instant, le regard de Damon se perdit dans les reflets de lumière qu’il pouvait offrir - il était vraiment beau, il n’y avait aucun doute sur ce point là. Cependant, même si le geste de la blonde pouvait effectivement prouver sa bonne foi, il secoua son visage. « C’est un cadeau, je le reprendrai pas. » Parce-que même s’il lui avait offert ce cadeau là en particulier pour des raisons qui étaient toutes plus mauvaises les unes que les autres, cela restait un cadeau et il n’était pas question à ses yeux de lui reprendre. « Tu peux le jeter si t’en veux pas, le donner ou le vendre même, mais il est à toi, pas à moi. » Alors il n’y avait aucune version de cette discussion où il tendrait la main devant lui en retour pour reprendre ce bien qui n’avait jamais en réalité été le sien.

Et suite à ses dernières paroles, il ne put s’empêcher de saisir l’instant pour plonger son regard dans celui de Megan. Bien sur que cela lui faisait mal au coeur de la voir se mettre dans des états pareils, bien sur qu’il se sentait responsable d’agir de la sorte face à elle. Bien sur qu’il avait saisi que, dans le fond, elle avait accepté le pacte que Saül lui avait proposé sans hésiter mais que les choses avaient changé en cours de route. Cependant, alors que son coeur se tordait, il se rappelait également qu’à aucun moment personne ne s’était dit que Damon en souffrirait réellement. Ils avaient beau tous avoir prétendu le faire, les actions parlaient plus que les mots en réalité. « Je pensais pouvoir retourner en salle et faire comme si de rien n’était, que les choses étaient arrangées, mais j’ai plus l’énergie pour ça ce soir. » Il déglutissait avec peine, et devait développer des efforts considérables pour ne pas abaisser son regard en cet instant. Il se sentait autant victime que responsable dans cette histoire, mais camper sur ses positions étaient la priorité bien que cela ne lui aille pas si bien au teint. « Je suis désolé que ta soirée d’anniversaire tourne comme ça, mais j’essaie de ne pas l’être pour le reste. » Pour le moment, tant qu’il n’aurait pas trouvé d’alternative afin d’apaiser son coeur, il désirait réellement continuer de lui en vouloir autant qu’il le pouvait. Il avait besoin de cela afin de se construire de nouveau, de se développer d’une meilleure façon - d’évoluer pour lui-même et par lui-même pour la suite.

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Il ne répond rien et il n’en a pas besoin : son silence en dit autant que s’il avait hoché la tête et assumé sa position. Il se moque d’essayer maintenant. Il s’est toujours moqué d’essayer tout simplement parce que la situation lui a été imposée et il m’en veut d’avoir menti ? A quel genre de traitement aurais-je eu le droit si j’avais tout dit dès le premier jour ? Aurais-je eu simplement la chance de découvrir le garçon gentil qu’il avait caché lors de notre première rencontre à cause de son amertume ? « J’aurais préféré que ce soit pas le cas. » Je n’y crois qu’à moitié et c’est à mon tour de ne pas répondre. Ce que je crois dans les moments où je suis le plus en colère - et celui-là en fait partie - c’est que ça l’arrange bien, d’avoir une excuse pour me traiter comme une intruse. Ça me fait mal au cœur, mais je m’en persuade tout de même.

« C’est un cadeau, je le reprendrai pas. » Je l’observe en levant les sourcils, la main toujours tendue dans sa direction. Comment ça il ne le reprendra pas ? J’ai envie de faire les choses comme il faut, et il m’en empêche ? « Tu peux le jeter si t’en veux pas, le donner ou le vendre même, mais il est à toi, pas à moi. » Le vendre ? Mais quel genre de personne croit-il que je suis ? Surprise, je mets quelques secondes de plus à laisser mon bras retomber le long de mon corps, sans cesser de le dévisager. « Pourquoi tu fais ça ? » Pourquoi il refuse de me donner une chance de rectifier le tir, de faire les bonnes choses pour une fois ? J’ai l’impression qu’il ferme totalement les portes, en refusant ce pas dans sa direction. Remettre le collier autour de mon cou, ce serait une insulte, alors je le garde serré dans mon poing. Il est magnifique, mais il me donne l’impression d’être un cadeau empoisonné. Pour autant, si Damon ne veut pas s’en débarrasser, je n’arriverai pas à me résoudre à le jeter. Le jeter. Jeter un objet d’une telle valeure financière. Ce genre de remarque en dit beaucoup sur le genre d'univers dans lequel le jeune homme évolue, finalement.

« Je pensais pouvoir retourner en salle et faire comme si de rien n’était, que les choses étaient arrangées, mais j’ai plus l’énergie pour ça ce soir. » - « T’as plus l’énergie ? » Je lui jette un regard rempli de rancune. Il n’est resté que quelques minutes après être arrivé en retard. J’ai eu une lueur d’espoir en le voyant arriver ce soir, j’ai cru que c’était un pas dans ma direction, une part de moi y a cru en tout cas. Mais ça, c’est encore pire que s’il n’était pas venu et c’est le coup de massue. « Je suis désolé que ta soirée d’anniversaire tourne comme ça, mais j’essaie de ne pas l’être pour le reste. » Il n’a pas l’air désolé du tout. Il a l’air plus dur que je ne l’ai jamais vu et je me demande si c'est moi qui provoque ce genre de réaction chez lui. S’il est aussi froid à mon égard et à l’égard de ce que je peux ressentir à l’intérieur qu’il ne l’est à l’extérieur, alors je l’ai perdu pour de bon et je réalise à quel point cette idée me rend triste. « Je vais être humiliée si tu pars. » L’être en présence d'amies n’aide pas à faire passer la pilule. L’être en présence d’amies, c’est presque encore pire finalement puisque je n’ai pas envie que l’on me prenne en pitié. « C’est moi qui vais partir. On a qu’a dire que je me suis sentie mal, que j’ai été malade et moi je vais rentrer. J’ai pas envie de fêter quoi que ce soit de toute façon. » Pas dans ce restaurant qui ne me ressemble pas et pas alors que tout le monde a pu sentir que tout n’était pas aussi rose que nous essayons de prétendre puisque, ce soir, j’étais la seule à vraiment essayer. « Tu auras qu’à dire aux filles ça. Et que je suis sortie pour appeler un taxi, que je t’attends et que tu voulais juste les tenir au courant avant de me rejoindre. » J’attrape une dernière serviette en papier pour m’essuyer les yeux. « Paye leurs consommations et leur repas pour moi s’il te plait. Je te rembourserai dès qu’on arrive à l’appartement. » Je n’ai pas envie de rajouter une nouvelle dette à mon ardoise, une nouvelle raison de me voir comme une gold digger.

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La surprise, et l’incompréhension même, se lisaient sans aucune difficulté sur le visage de Megan. Peut-être que le geste du bond était effectivement surprenant, mais il n’était pas question qu’il agisse différemment. Le collier, bien qu’il soit le cadeau d’anniversaire le plus impersonnel que Damon ait pu offrir, restait un cadeau et à ses yeux le reprendre serait d’autant plus insultant que de le laisser à la jeune femme. Elle ne ferait ce que bon lui semblait, il n’en avait que faire, mais elle garderait le bijou. « Pourquoi tu fais ça ? » Il ne fit aucun effort pour retenir le soupire qui s’échappait désormais d’entre ses lèvres. « Tu me demandes vraiment pourquoi je te laisse le cadeau que je t’ai offert ? » Oh, si Megan posait ce type de question, c’était surement qu’il y avait autre chose qui la chagrinait - mais ce n’était pas avec un simple regard comme celui qu’elle lui jetait qu’il allait réussir à deviner. Après tout, ces derniers temps, beaucoup de choses restaient inexpliquées et si elle voulait une réponse un peu plus explicite, elle allait devoir donner quelques détails. « Tu vas pas me reprocher de t’avoir offert quelque-chose quand même ? » Alors qu’il aurait tout simplement pu continuer sur sa lancée, rester dans sa rancoeur et ne pas faire le moindre effort pour marquer la journée. Certes, les efforts menaient à une scène de ménage dans les toilettes du restaurant dont ils auraient tous deux pu se passer, mais c’était toujours une meilleure communication que ce à quoi s’adonnait Damon chez eux depuis qu’il avait appris que Megan avait mené le mensonge le plus filé de l’histoire australienne.

Et ce soir, Damon n’avait plus envie de faire les efforts nécessaires pour continuer la soirée. Dans toutes autres circonstances, peut-être qu’il aurait réussi à remettre son plus beau sourire pour continuer de célébrer ce jour spécial pour Megan, et qu’il aurait réussi à prétendre encore un peu. Ce soir, rien que l’idée de retourner à table lui donnait la nausée. «  T’as plus l’énergie ? » - « Non. » C’était, à ses yeux, aussi simple que ça; mais vu le regard que lui accordait désormais la jeune femme, il devinait sans mal qu’elle n’était pas tout à fait d’accord à l’idée qu’il s’éclipse de la sorte. Bien sur qu’il en avait quelque-chose à faire - bien sur qu’il se forçait à ne pas agir dessus. « Je vais être humiliée si tu pars. » Un instant, un seul, il ferma les yeux alors que ses doigts pinçaient l’arête de son nez. Il n’étirât guère habitué à jouer aux durs de la sorte, à faire comme si rien des éléments qui lui étaient apportés pouvait le blesser, faire fondre son coeur - alors que c’était tout le contraire. Mais il s’était promis d’arrêter de se laisser marcher sur les pieds de la sorte, et aujourd’hui ne devait pas faire exception. « C’est moi qui vais partir. On a qu’a dire que je me suis sentie mal, que j’ai été malade et moi je vais rentrer. J’ai pas envie de fêter quoi que ce soit de toute façon. » Son regard se reporta sur la silhouette de la jeune femme. « Tu auras qu’à dire aux filles ça. Et que je suis sortie pour appeler un taxi, que je t’attends et que tu voulais juste les tenir au courant avant de me rejoindre. Paye leurs consommations et leur repas pour moi s’il te plait. Je te rembourserai dès qu’on arrive à l’appartement. »

« Non. » La première partie, toute simple, de sa réponse fut dite avec un calme qui ne ressemblait en rien à un Damon en proie à ses émotions. Et pour cause: cela lui demandait toute son énergie encore disponible afin de ne pas avoir la voix tremblante, les yeux brillants, le coeur flanchant. Il déglutit avec peine avant de plonger son regard dans celui de Megan. « Je vais payer l’addition ça je m’en fiche, t’auras pas besoin de rembourser. Je comptais payer dans tous les cas. » Parce-qu’ils n’avaient plus besoin de statuer quoi que ce soit sur cette partie là, Megan était pleinement au courant que ce n’était pas sur cette partie là de sa vie que le jeune homme était regardant. Après tout, il n’y avait qu’à voir le prix qu’il avait mis dans un collier, dans un cadeau qui n’avait aucune autre valeur que celle numéraire afin de sauver les apparences au mieux. Ce n’était pas une table au restaurant qui allait lui faire avoir une crise cardiaque en regardant l’addition. La partie sur laquelle il ne saurait s’accorder avec la blonde, en revanche, concernait tout le reste de ce qu’elle avait en tête. « Je ne repasse pas par l’appartement. » Un coup d’oeil, quelques instants plus tôt, à son téléphone lui avait indiqué qu’il avait une porte de sortie toute prête et il était hors de question qu’il ne saisisse pas l’occasion. « Et je te laisserai prévenir tes copines toute seule que la soirée est terminée. J’ai pas envie de passer pour l’idiot de service encore une fois. » Cette dernière phrase avait mis quelques instants avant d’être prononcée, allant à l’encontre de toutes les manières de faire et d’agir habituelles de l’italien. S’il n’avait pas voulu tenir tête à qui ou quoi que ce soit dans cette situation, il aurait acquiescé sans trop poser de questions, se serait plié au plan de Megan et serait reparti du lieu de la soirée en grinçant des dents. Il n’avait pas envie de plier l’échine, aujourd’hui; peut-être que ce n’était pas ici que la vraie guerre se passait mais résister à une bataille ne lui ferait pas de mal. « Tu peux leur dire ce que tu veux sur pourquoi tu reviens seule à table, ça m’importe peu. Je passerai par l’accueil pour régler la table, t’auras pas à t’inquiéter de cette partie là. » Et comme ça, elle pourrait faire ce que bon lui semblait du reste de sa soirée d’anniversaire, il ne se mettrait ni en travers de son chemin, ni dans ses pattes.