Elle n'en revenait pas d'avoir réussi à boucler les 21 kilomètres du semi-marathon de Brisbane. Son premier semi-marathon (et sans doute aussi son dernier parce que bon c'était pour un pari qu'elle ne refera pas l'erreur de reproduire et elle n'est clairement pas taillée pour un jour courir un marathon), et si elle a bien profité de sa douche d'après course, elle est de retour sur le parking de l’hôpital prête à profiter des stands installés pour l'occasion et prête aussi à donner un peu de son argent pour l'association. Elle donne déjà de son temps, de son corps, mais elle sait mieux que quiconque que l'association et le service pédiatrique de l’hôpital ont aussi besoin d'argent pour proposer des activités pour les jeunes patients. Et c'est l'occasion pour elle de profiter de sa journée tout en faisant une bonne action. Elle retrouve des collègues, des bénévoles qu'elle a déjà pu croiser au sein de l’hôpital, elle retrouve aussi des anciens patients qui sont revenus là pour donner un peu de leur temps pour cette belle cause, elle retrouve aussi des petites têtes qu'elle connait et reconnaît soit parce qu'elle a déjà eu à les voir en séance de kiné soit parce que toutes ses heures passées bénévolement dans le service lui ont donné le temps de rencontrer quelques uns des pensionnaires du service.

C'est d'ailleurs le cas de cette petite fille en fauteuil qu'elle reconnaît sans difficulté puisqu'elle était avec elle encore la veille en séance. Elle est concentrée, sur le stand du tir-à-l'arc prêt à viser les cibles avec des flèches adaptées à la situation. Ils sont sur un parking d’hôpital mais l'objectif n'étant pas de finir à l'intérieur. Sofia la regarde faire, concentrée, appliquée, et quand la flèche part et atteint la cible, le sourire et la joie qui se lit sur le visage de cette petite fille prouve bien à quel point ce genre d'activité peut faire un bien fou dans ce genre de service. Sofia en est convaincue et c'est pour ça qu'elle compte essayer chaque activités même si son corps est fatigué, même si elle n'a plus la force de faire le moindre effort, elle s'attaque au mur d'escalade installé pour l'occasion. Elle se fait entraîner sur le trampoline par la petite fille d'une ancienne patiente en fauteuil. Elle s'amuse en découvrant l'escrime, un sport dont elle ne comprends ni les règles, ni le principe mais elle trouve cela plutôt esthétiquement beau à regarder même si la maladresse des débutants semble plus amusante que réellement efficace. Il y a 4 ou 5 autres sports qu'elle aimerait tester, en tête de liste le tennis de table (un sport qui ne lui demanderait pas à courir) et le judo ou la boxe (parce qu'elle est sûre qu'à défaut d'être douée, elle ferait rire les autres). Et si elle ne participe pas à tout, elle passe à tout les ateliers, pour au moins saluer les professionnels ou amateurs qui sont là pour permettre à tous de découvrir le sport, et le handi-sport aussi. Pour montrer aux jeunes et aux moins jeunes, qu'ils ont tout à fait le droit de vouloir faire du sport et qu'ils en sont tout à fait capable aussi. Sofia en tant que kiné sait l'importance de bouger et si elle n'est pas une très grande sportive, elle a découvert depuis peu le plaisir de faire du sport.

Assisse sur un banc, elle regarde sur sa droite l'initiation au basketball en fauteuil, et si pour certains valides c'est un moyen de tester le handi-sport, pour d'autres c'est une découverte, le sport en fauteuil ça existe et c'est du vrai sport. Une glace dans la main, et le regard rivé sur le 3 vs 3 qui se jouent devant elle, elle ne fait pas attention en se levant et c'est de justesse qu'elle évite ce garçon qui fait du skateboard au milieu des passants « Nathan ? » Elle le connaît, elle le reconnaît pour l'avoir vu trop souvent à l’hôpital, pour l'avoir croisé durant plusieurs de ses moments de bénévolat dans le service, et elle est heureuse de le voir ici, en pleine forme. Et si le garçon ne l'a pas vu, pas même entendu au milieu de ce brouhaha ambiant, Sofia le regarde continuer sa course, et slalomer pour s'arrêter auprès d'un homme et d'une poussette double. Ca ne passe pas inaperçu ce genre de poussette, encore moins aux yeux de Sofia, et si elle regarde la poussette d'abord, quand elle lève la tête, c'est un autre homme qu'elle reconnaît. Un ancien patient, et son regard passe de Nathan à cet homme et on peut voir à son regard qu'elle est perdue. « Sofia. » C'est Nathan qui cette fois remarque la kiné et alors qu'elle entends son nom elle relève les yeux vers lui en lui souriant et c'est ensuite Caleb qu'elle regarde. Elle n'a pas oublié ce patient. Il y en a dont elle se souvient des soins qu'elle a donné mais pas des noms, d'autres qu'elle a carrément oublié, et il y en a d'autres dont elle se souvient de l'histoire, des blessures, du prénom et Caleb Anderson fait parti de ces patients là. Ceux auxquels on repense parfois en se demandant si la vie a été un peu plus clémente après de telles épreuves. Il a finit ses séances de kinés, il y a déjà quelques années maintenant et le retrouver ici, avec Nathan fait cogiter la Mexicaine un peu trop longtemps. Nathan a fait le chemin inverse et il est face à Sofia désormais et elle réalise que les fois ou elle l'a vu aussi souriant sont rares finalement. « Nathan, ça fait plaisir de te voir, tu as l'air en forme, j'ai appris pour la greffe, je suis heureuse de te voir autre part qu'à l’hôpital. » C'est d'ailleurs une phrase qu'elle pourrait dire à Caleb qu'elle regarde désormais même s'il est encore loin. La ressemblance entre les deux ne devrait pas laisser planer plus de doutes. Mais il n'avait pas d'enfants Caleb, il était seul, il venait de perdre sa femme, mais il n'avait pas d'enfant alors pourquoi Nathan et lui se ressemblent autant ? « On est encore un peu à l’hôpital, mais oui la greffe a marché, je vais mieux, c'est Caleb qui a fait le don, viens je vais te présenter à mon pèr, Caleb et Lucy et Lena. » Elle ne comprends pas grand chose Sofia, mais elle se laisse guider vers l'homme qu'elle n'a pas besoin qu'on lui présente mais elle ne dit rien à Nathan, par respect du secret médical, par respect du passé de Caleb aussi et pourtant une fois devant Caleb, c'est difficile de faire semblant de ne pas le connaître. « Bonjour, Nathan tenait à ce que je rencontre son donneur, ça fait plaisir de te voir. » Et de près, elle a l'impression d'avoir face à elle un autre homme, bien différent de celui qu'elle a rencontré il y a quelques années et qui traversé une phase extrêmement compliquée de sa vie, elle retient tout commentaires sachant déjà que sa simple présence pourrait suffire à perturber l'Australien. « Je présume que c'est Lucy et Lena ? » C'est autant à Nathan qu'à Caleb qu'elle parle finalement et comme souvent dès qu'elle voit un bébé, c'est le regard plein de tendresse et un sourire très grand que l'on peut voir s'afficher sur le visage de Sofia et là elle en voit deux d'un coup, donc deux fois plus de tendresses. « Ce sont tes filles ? » Qu'elle demande cette fois à Caleb, la logique voudrait que oui, parce que s'il venait à lui dire qu'il avait kidnappé ces deux enfants elle serait mal Sofia, mais avant d'aborder d'autres sujets plus sensibles, elle est ravie de voir que la vie a visiblement sourit à Caleb.

Elle se doutait bien qu'aujourd'hui serait un jour ou elle croiserait du monde. Des collègues d'abord, parce qu'ils sont à l’hôpital. Des enfants, parce que c'est pour eux que cette association existe. Et aussi des patients et anciens patients, mais de tout ceux qu'elle aurait pu penser voir Caleb Anderson n'en faisait pas parti. Parce qu'elle ne l'a pas revu depuis quelques années maintenant et aussi parce qu'elle n'avait pas repensé à lui depuis un moment maintenant. Il allait mal quand il a fini ses séances de kinés, il semble en être tout autre chose aujourd'hui et c'est un léger sourire qu'elle se retrouve face à lui. A la fois heureuse de le voir aussi différent, mais aussi un peu gênée de faire irruption dans sa nouvelle vie sans forcément y avoir été invitée. Nathan l'a invité à venir rencontrer son donneur et si Sofia connaît déjà Caleb, elle apprends qu'il est celui qui a permit à Nathan de guérir et si pour le moment elle ne comprends pas totalement le lien qui unit les deux garçons, elle sait que ce n'est pas encore le moment pour questionner Caleb. Et puis est-ce que ça la regarde après tout ? Sans doute pas non mais la curiosité risque d'être trop forte à un moment. «Vous vous connaissez ? » Sa position l'empêche de répondre à cette question. Enfin, elle pourrait dire à Nathan qu'elle connait Caleb mais les futures questions seraient elles sans doute trop intrusives et elle ne pourrait pas lui répondre sans dévoiler certaines choses qu'elle n'a pas envie de trahir. « Euh…oui, Sofia a été ma kiné pendant un petit moment. » Heureusement Caleb réponds à la curiosité de Nathan sans lui mentir, il aurait pu inventer n'importe quoi pour expliquer le fait qu'ils semblent se connaître, il aurait pu s'il n'avait pas eu envie de faire référence à son passé et cet accident, parce que mine de rien Sofia est liée à cette partie de sa vie et elle espère que sa présence ne le perturbe pas trop. « Ça me fait plaisir de te revoir aussi. » Voilà qui réponds à la question qu'elle n'a pas encore posé. Il ne semble pas trop mal à l'aise ou trop gêné par la présence de la kiné et mieux encore, il sourit quand elle le questionne sur les deux petites filles dans la poussette. Un élément nouveau qui prouve bien que la vie a semble t-il vraiment sourit à Caleb depuis qu'il a terminé ses séances de kiné. « Celle qui est réveillée c’est Lena, et celle qui dort c’est Lucy ! » Je regarde Nathan quelques secondes et là encore, le lien entre Nathan et ces deux petites me semblent loin d'être évident. Jamais Nathan n'a évoqué Lucy et Lena, jamais même il n'a évoqué une famille, peut-être sa nouvelle famille d'accueil ? Mais la ressemblance à Caleb reste toujours aussi énigmatique. Mais, pour l'instant c'est vers la petite réveillée, donc Lena si elle a bien retenu, que Sofia a son regard fixé. Elle adore les enfants, elle adore les bébés, elle se rêve mère, un rêve qui semble s'éloigner chaque année un peu plus mais elle regarde Caleb prendre la petite dans ses bras et elle trouve ça tellement touchant un homme qui prends soin de ses enfants comme ça. Parce qu'elle en a la confirmation. « Oui, c’est mes deux princesses. » Elle qui commence à perdre foi en la gente masculine et leur désir d'enfant, elle se retrouve face à un père doux et attentionné et qui parle de ses filles avec une tendresse qui pourrait faire fondre Sofia. « Oh félicitation alors. Elles sont si belles. Tu en as vécu des choses depuis la dernière fois que l'on s'est vu. » Et de belles choses visiblement. « Comment est-ce que tu connais Nathan ? » La question est légitime mais Sofia pense qu'elle est légitime aussi pour lui, parce que ni Caleb, ni Nathan n'avaient jamais évoqué la présence de l'un et de l'autre dans leur vie respective. « Je fais pas mal de bénévolat auprès des enfants de l’hôpital, il est pas facile à approcher, mais avec quelques bonbons et beaucoup de patience, on a réussi à s'entendre tout les deux, n'est-ce pas Nathan ? » Il lève les épaules Nathan, ne voulant pas donner raison à Sofia qui semble le taquiner un peu, mais un léger sourire se cache au coin de des lèvres de son jeune garçon. Elle essaye de rendre tout ça un peu moins triste que ça ne l'était réellement. Nathan malade, Nathan affaibli, Nathan seul et il n'était pas toujours en mesure de pouvoir se joindre aux autres pour les activités de groupe. C'était loin d'être des moments joyeux pour lui, et pourtant c'était son rôle à Sofia. Essayer d'apporter un peu de joie, un peu d'activités et de sourire dans le quotidien des enfants hospitalisés alors elle en a passé quelques moments seule avec lui pour tenter de lui redonner le sourire et de lui redonner la force de se battre aussi. Il va mieux aujourd'hui, il va bien même ou du moins en apparence il va bien. « Caleb, je peux aller me chercher mon coca ? »  Caleb. Il parle de lui en employant son prénom ce qui n'aide clairement pas Sofia à comprendre la relation entre les deux. « Tu restes pas loin, on va s’asseoir sur le banc derrière tu nous rejoins après ? »  Mais elle les regarde interagir en ayant parfois l'impression de voir double tant certaines mimiques sur leurs visages sont semblables, encore plus quand ils sont tout les deux face à elle. Nathan s'éclipse, et c'est Caleb qui l'invite à poursuivre la discussion sur un banc. Elle le suit, à la fois surprise et intriguée surtout. Surprise parce qu'il aurait pu couper court à cette discussion, et intriguée parce qu'elle a l'impression d'avoir face à elle un tout autre homme, avec une toute autre vie et c'est fou le chemin qu'il a parcouru. « T’as participé au marathon ? » Elle secoue la tête, l'air peu fière. « Pas le marathon non mais le semi-marathon et je l'ai terminé. » Elle risque de regretter ça demain quand ses muscles peu habitués à un tel effort si long vont lui rappeler pourquoi elle n'est qu'une sportive du dimanche. « Et toi tu as couru le marathon ? Ou tu es là pour Nathan ? » Elle serait étonnée d'apprendre qu'il est en mesure de courir un marathon au vue de ses antécédents médicaux mais les gens sont surprenants et elle accepte sans mal de se laisser surprendre Sofia. « J'ai failli pas te reconnaître, tu as drôlement changé et la paternité semble t'aller plutôt bien. » Le changement physique est impossible à ne pas voir, mais il y a pleins de petits détails, les sourires déjà, mais le regard aussi, qui est plus doux, plus joyeux, plus vivant aussi. Nathan repasse devant eux pour ramener la monnaie à Caleb et il s'éclipse tout aussi vite. « Comment il va aujourd'hui ? » Qu'elle demande à Caleb au sujet de Nathan. « Je sais que ça ne me regarde pas, mais Nathan est ton fils ? » Tous les signes semblent aller dans cette direction sauf une : le passé de Caleb qui ne faisait pas notion de l'existence d'un enfant et ce n'est pas un fait anodin non ?

Elle regarde Caleb prendre soin de sa fille, le voir avec un bébé est au moins un signe d'espoir pour tout ceux qui sont prêt à renoncer à l'amour. Quand elle l'a rencontré, la vie venait de lui priver de sa future femme et aujourd'hui, il est papa de deux petites filles et il a l'air heureux. C'est presque rassurant pour Sofia de voir que la vie peut être aussi surprenante et riche de belles surprises. Il a l'air heureux, du moins elle le regarde tenir la petite dans ses bras, réagir quand sa fille l’appelle, s'assurer que son doudou soit propre, et c'est touchant un homme qui semble aussi à l'aise dans son rôle de père. Elle n'a pas la chance d'avoir rencontré un homme près à être père encore, elle n'a pas la chance d'être mère mais elle observe cette petite famille avec tendresse et espoir. « Oh non je suis clairement incapable de courir un marathon. Ou semi-marathon. » Il n'y a rien d'étonnant dans la réponse de Caleb. Ca pourrait être mieux, ça pourrait aussi être pire son état mais elle n'est pas surprise, même quelques années après d'apprendre que son ancien patient a gardé des séquelles de son accident. « Tu as l'air en forme en tout cas. » Peut-être qu'il ne peut pas courir un semi-marathon mais à part ça, il semble en forme, aussi bien physiquement que psychologiquement.  « Je suis venu pour Nathan oui, et ma femme qui a un peu aidé pour l’organisation de tout ça. » Sa femme, il est marié donc, rien de vraiment surprenant, il est papa donc marié ça ne semble pas si étonnant et elle est heureuse pour lui, elle l'est vraiment. Il y a quand même une pensée qui lui traverse l'esprit. Il a perdu sa femme, elle a divorcé le tout à peu près au même moment et aujourd'hui, il est marié, papa et elle, elle est toujours seule, sans enfant, sans vie de famille, c'est un peu déprimant pour elle quand même. « Tu en as fais du chemin, papa, marié, je suis heureuse pour toi Caleb. » Mais, c'est en revanche une belle réussite pour Caleb lui qui a vécu le pire, connaît désormais le meilleur. « Je vais beaucoup mieux. » Elle lui sourit et si parfois en séance, il a semblé mentir, ou en tout cas ne pas dire exactement ce qu'il ressentait, aujourd'hui elle sent que c'est la vérité. Qu'il va beaucoup mieux. « Ça se voit, tu rayonnes et tu es nettement plus souriant et abordable aujourd'hui. » Faut dire qu'elle a le souvenir d'un patient refusant de se soigner, d'un patient qui refuse même de parler, de venir en séance, qui refuse de prendre soin de lui, qui refuse l'idée de guérir, alors oui il semble en pleine forme à côté de ce souvenir. Souriant, soigné, et le regard qu'il a quand il regarde ses filles montre qu'il a retrouvé le bonheur dans sa vie.

Nathan ramène la monnaie vers Caleb et Sofia se tait pour éviter qu'une de ses paroles puissent être entendues par le jeune garçon dont elle ne connaît toujours pas le lien exacte qui l'unit à Caleb. Mais, elle ne sera pas celle qui parlera des séances de kiné de Caleb devant Nathan. Il repart et c'est avec un vrai intérêt qu'elle demande à Caleb comment va Nathan. Ce petit garçon, enfin ce pré-ado était mourant en début d'année et aujourd'hui il court, il rit, il fait du skate alors c'est déjà une première réponse pour la kiné. « Mieux. Beaucoup mieux depuis la greffe. Il a encore beaucoup de rendez-vous médicaux, ce qui ne lui plait pas trop mais je serais plutôt mal placé pour lui faire la morale là-dessus. » Il évoque le passé, son refus de soin, son manque d'implication et Sofia a pu le voir même si elle ne lui en a jamais tenu rigueur. « Ah oui je confirme, quand je voyais ton nom au planning, j'avais toujours le doute de savoir si tu allais venir ou non. » Les circonstances sont différentes, Nathan va mieux d'après les dires de Caleb, alors que Caleb allait de pire en pire, et ne voulait pas aller mieux. Mais ce qu'il compte aujourd'hui, c'est qu'ils ont l'air d'aller bien tout les deux et ça rassure la kiné, surtout pour Nathan qu'elle a croisé bien trop souvent dans les couloirs de cet hôpital. « Il a passé tellement de temps à l’hôpital depuis le début de sa vie, je comprends qu'il en ait marre surtout s'il se sent mieux, mais c'est important qu'il soit suivis mais je doute pas que tu en as déjà conscience et que tu lui rappelles comme c'est important de prendre soin de soit. » Elle lui sourit parce que ce sont ce genre de mots qu'elle a tenté de lui faire comprendre il y a quelques années, l'importance de prendre soin de soit, de s'occuper de son corps et de son esprit, de s'impliquer davantage, d'être actif et acteur de ses soins mais Caleb ne pouvait pas le comprendre à l'époque, elle espère qu'aujourd'hui il l'a comprit. Et si la discussion est simple entre eux, il y a toujours ce lien, cette présence de Nathan qui vient perturber l'esprit de Sofia qui a connu les deux mais qui n'a jamais entendu aucun des deux parler de l'autre, alors les questions semblent légitimes même si ça ne la regarde pas finalement. « C’est une histoire longue et un peu compliquée mais oui, c’est mon fils. » « Vu comme il te ressemble c'est pas une grande surprise mais je croyais que Nathan n'avait pas de parents, qu'il avait été abandonné, donc j'étais un peu perdue en vous voyant ensemble. » Tout le monde a des parents, enfin des parents biologiques, mais Nathan n'a jamais eu de parents pour l'accompagner à l’hôpital, elle n'a jamais même entendu Nathan parler d'eux alors elle ne doute pas que ce soit une histoire longue et compliquée. « T’avais raison tout à l’heure, il est pas toujours facile à approcher mais quand il laisse tomber ses barrières…c’est un petit garçon incroyable. » Il regarde Nathan alors qu'il évoque le garçon et Sofia peut sentir l'émotion dans la voix de Caleb et dans son regard aussi quand il se pose sur Nathan. Pas de doute, Caleb est attaché à ce petit et si Sofia ne sait rien de leur passif, ni depuis combien de temps Nathan est le fils de Caleb, elle est heureuse pour Nathan parce qu'il aurait pu avoir bien pire comme père. « Il a pas eu une vie facile, il se protège mais sa nouvelle vie semble lui réussir, il semble plus souriant lui aussi. » C'est une certitude que Caleb l'est beaucoup plus qu'il y a quelques années, mais Nathan aussi semble plus souriant, plus détendue, plus innocent aussi peut-être et moins malade aussi surtout. « Et toi, comment tu vas ? » Elle aime bien parler avec les gens Sofia, elle n'a jamais eu de mal à entrer en contact avec des inconnus, ou à trouver des choses à dire pour faire parler ses patients, mais quand il s'agit de parler d'elle, et de sa vie c'est une autre histoire. Elle n'a rien de joyeux à raconter comme Caleb, rien de croustillants non plus, rien qui ne la rende heureuse et fière et c'est presque désespérant pour elle. « Bien si on oublie les courbatures qui commencent déjà à me brûler les cuisses. » Elle sait qu'il ne parlait pas de ça, mais le semi-marathon qu'elle vient de courir est sincèrement ce qu'il y a de plus intéressant à raconter dans sa vie, ce qui est assez triste voir même pathétique. « Je n'ai pas vraiment connu de grand changement comme toi, pas de mariage, pas d'enfants, toujours kiné à l’hôpital et toujours célibataire, mais je suis capable de courir un semi-marathon et c'est déjà pas mal. » Elle n'arrête pas avec son semi-marathon, et c'est même pas un marathon complet mais c'est la chose dont elle est la plus fière de ces dernières années. C'est à peine exagéré, quoique presque pas finalement.

« Si j'ai été méchant ou désagréable avec toi je suis vraiment désolé. » Elle lui sourit, d'abord pour le rassurer, et aussi parce qu'il n'a pas à s'excuser. « Tu n'as pas à t'excuser vraiment, tu étais mal et je ne t'en ai jamais tenu rigueur. Et j'en ai connu des bien pires que toi si ça peut te rassurer. » Caleb n'était pas violent, il n'était pas méchant, il n'était même pas râleur, il n'avait juste pas envie de l'aide qu'on lui proposait. Mais elle ne lui en a jamais voulu, elle avait de la peine pour lui parce qu'elle connaissait son histoire et elle aurait juste aimé pouvoir faire plus pour lui. Mais aujourd'hui, il a l'air d'aller bien. Moralement déjà, il rayonne, il semble heureux. Et physiquement, il semble en assez bonne santé (il ne pourra pas courir un semi-marathon mais ça a l'air d'aller non ?) Et ce malgré son manque d'implication et son manque de soin. « Aujourd’hui je regrette vraiment de pas m’être plus investi. J’aurais sûrement eu aucune séquelle, non ? » Elle lève les épaules, elle ne connaît pas l'état de santé de Caleb aujourd'hui, juste son état il y a quelques années. Ses blessures, l'étendu des complications et l'évolution de son état à ce moment précis. Mais il a depuis longtemps quitté la salle de kiné de Sofia. Pourtant elle devine, ou plutôt elle sait par expérience les effets de ce genre de blessure sur le corps humain. Elle devine les séquelles dont il peut parler même si elle ne peut pas juger de leur ampleur et de l'impact dans la vie de Caleb. « Aucune c'est difficile à dire le corps ne réagit pas pareil d'une personne à une autre, mais c'est vrai que plus la rééducation est faite tôt, moins il y a de séquelles sur le long terme. Mais, je sais pas exactement comment tu te sens aujourd'hui mais tu as l'air en forme, ça aurait pu être bien plus handicapant comme blessure. » Surtout au vu de sa réticence à prendre au sérieux ses séances de kinés et à faire ses exercices de respirations. Mais, il est debout, il semble respirer normalement, pas d’essoufflement, pas de respiration sifflante, pas de toux, elle ne peut pas savoir comment il réagit à l'effort ou sa faculté pulmonaire mais elle est sûre d'une chose c'est que ça aurait pu être bien bien pire.

Les regards se portent sur l'autre garçon, sur sa santé lui aussi fragile. « Oh oui je le sais, t’en fais pas. Enfin aujourd’hui j’en ai conscience. Même s’il râle beaucoup je l’oblige toujours à se rendre à ses rendez-vous médicaux, je ne veux surtout pas que la maladie le rattrape. » Ce n'est pas tant les rendez-vous médicaux qui vont faire en sorte que la maladie ne le rattrape pas comme il dit, mais elle comprends la pensée de Caleb, du moins elle entends qu'ils sont concernés par la santé de l'enfant et qu'ils vont tout faire pour qu'il suive toutes les recommandations. Après tout, Caleb est son père et Sofia est rassurée de l'apprendre parce que désormais il n'est plus seul pour gérer les choses. « Je suis heureuse de savoir qu'il a quelqu'un qui prends soin de lui désormais. » Un enfant de 10 ans ne devrait jamais avoir à être seul face à la maladie, face à la vie alors même si elle ne comprends pas tout, elle voit la ressemblance entre les deux mecs, elle voit aussi la façon dont Caleb regarde en sa direction pour s'assurer que tout aille bien, et elle est heureuse pour Nathan. Heureuse pour Caleb aussi, comme quoi la vie peut être belle et ce malgré toutes les épreuves. Ils ont tout les deux frôlés la mort, mais aujourd'hui ils ont l'air heureux et Sofia en grande fan de happy ending, ne peut que se réjouir de voir ça.

Ce happy ending, elle n'a pas encore eu la chance de le connaître. Elle y a cru, elle s'est mariée, réalisée son rêve avec le premier homme de sa vie. Elle a cru à son histoire d'amour, elle a cru à une vie de rêve, mais c'était son rêve à elle et pas le sien à lui. Et depuis, elle se cherche, ou plutôt elle cherche l'amour partout ou elle croit l'apercevoir. Mais rien. Pas de changement, pas d'enfants, pas de mariage, pas même de couple. Juste la fierté d'avoir réussi un semi-marathon, c'est tellement une preuve que sa vie n'est pas comme elle l'aurait rêvé. A trente ans, elle ne rêvait clairement pas de finir un semi-marathon, oh non c'était pas ça son rêve. « Au moins tu peux courir un marathon et ça, c’est pas donné à tout le monde. » Il marque un point Caleb, elle a au moins la chance d'avoir un corps qui fonctionne bien. Un corps en bon état, qui fonctionne, mais c'est tout. C'est déjà beaucoup mais pas assez pour la rassurer. « Si on m'avait dit ça y'a quelques mois j'aurais ris, j'ai jamais été très sportive, juste de quoi me maintenir en forme mais jamais au point de préparer un semi-marathon. » Et ça elle le doit à l'arrivée de Jackson Mills dans sa vie. Il a fait d'elle une marathonienne, une sportive capable de courir plus de deux heures sans avoir l'impression de mourir et c'est une sacrée réussite de sa part mais aussi de la part de son prof de sport personnel. « Je suis fière mais c'était pas l'objectif de ma vie. » Elle ajoute en riant même si au fond d'elle, elle ne trouve pas ça si drôle finalement, mais Caleb n'a pas à entendre les lamentations de la kiné sur sa vie amoureuse calamiteuse. « Ça fait longtemps que tu fais du bénévolat à l’hôpital ? C’est quelque chose que j’ai toujours eu envie de faire mais je suis pas sûr d’avoir le temps pour ça. » Le bénévolat, voilà ce qui apporte encore un peu de joie dans la vie de Sofia. Elle qui aime le contact, qui aime aider, qui aime partager des choses, le bénévolat c'est exactement ce dont elle a besoin et une activité qui lui apporte énormément humainement. « Ca fait quelques années que je participe aux activités auprès des enfants mais c'est devenu encore plus concret avec l'association Run for Judy. Je peux apporter un peu de mon temps et de mes connaissances pour proposer des activités sportives adaptées, je suis sur que Nathan aurait aimé que l'on propose de telles activités quand il était hospitalisé. » Nathan ou d'autres, mais ce n'est jamais facile pour les enfants d'être hospitalisés pour de longues périodes. « Je vois tu es pas mal occupé déjà, deux bébés et un pré-ado, ça doit te prendre beaucoup de temps. Mais on cherche à diversifier les activités que l'on peut proposer à l’hôpital, peut-être qu'un jour si on peut mettre en place un atelier de cuisine tu pourras leur apporter tes connaissances. » Sofia connaît le restaurant de Caleb mais que de nom n'ayant jamais vraiment eu l'occasion d'aller manger dans un tel endroit. Mais elle sait qu'il est chef cuisinier et si jamais un jour il veut se lancer dans le bénévolat c'est une idée qu'elle lance comme ça.