Abraham Taylor & @Tessa Mulligan

I should've known I'd leave alone, just goes to show that the blood you bleed is just the blood you owe. We were a pair, but I saw you there, too much to bear, you were my life but life is far away from fair. ☆☆

gifs @unknown & @vampirecherub

(ua gothique) Il avait trouvé refuge dans la seule maison qui ne voulait pas de lui.
De toutes les légendes relatives aux vampires dont Abraham avait depuis eu l’occasion de vérifier par lui-même qu’elles contenaient une part de folklore, celle qui disait qu’aucun d’entre eux ne pouvait pénétrer une habitation sans y avoir au préalable été invité était la plus fausse, et eût-il été capable de confronter à nouveau le regard d’@Amos Taylor, croiser ceux de @Chad Taylor et @Samuel Taylor – ou pire, de ses parents – il se serait probablement précipité chez eux pour leur faire part de cette découverte, et tenter ainsi de prouver la bonne foi qui l’animait encore à vouloir se rendre utile auprès de la guilde des chasseurs. En passant la porte de la Cathédrale St Stephen, l’apprenti vampire s’était presque attendu à finir en cendres, ou à s’écrouler raide mort sur le seuil, et il mentirait s’il prétendait ne pas l’avoir peut-être un peu espéré … Mais non, rien, et si la maison de Dieu lui faisait depuis l’effet d’une coquille vide, au moins n’avait-elle pas laissé à la rue celui qui quelques temps plus tôt venait encore y prier comme une brebis fidèle du troupeau, avant qu’@Anna Constantine ne le prive du droit à espérer un jour passer les portes du Paradis. Alors Abe avait décidé de se terrer là, dans l’ombre, provoquant probablement quelques frayeurs au fossoyeur @Asher Buckley ou lui donnant la subite impression de devenir fou et de voir des choses. Seul @Arthur Coventry savait où le trouver, passait parfois entre deux aventures auprès de @Greta Moore et de @Ruben Hartfield, une donnée susceptible de changer à tout moment car l’envie de rester terré dans cet endroit où les tentations se limitaient n’avait d’égale que celle de disparaître une bonne fois pour toute dans la forêt et de s’assurer que plus personne à Brisbane n’entende plus jamais parler de lui. Il l’aurait fait, sans doute, s’il avait eu la certitude que l’éclipse soit vécue dans sa totalité partout ailleurs, et que changer de latitude ne le condamne pas aussitôt à fuir comme la peste la lumière du soleil.

Ici le jour et la nuit n’avaient plus d’importance, et ses journées à lui ne nécessitant plus ni sommeil ni repos, il errait de la cathédrale au cimetière attenant pareil à un fantôme, son allure s’y prêtant de plus en plus à mesure que son régime alimentaire l’empoisonnait. Pour ne pas avoir à se repaître des vivants, Abe troublait le repos éternel de ceux que l’on venait à peine de mettre en terre – et ils étaient nombreux, en ces temps perturbés. Un sang vicié, corrompu par la mort, mais qu’il suçait pourtant jusqu’à la dernière goutte avec avidité, défaisant le travail du fossoyeur à genoux dans la terre fraîchement retournée, parce qu’il le rassasiait suffisamment pour que chaque humain à passer la porte de la cathédrale ne lui apparaisse plus comme une tentation impossible à réprimer. Pour l’heure il s’en contentait. Pour l’heure le simple souvenir de la façon dont @Tessa Mulligan l’avait chassé de son échoppe, après que seule l’irruption de @Noor Guerrero n’ait peut-être évité un drame de se produire, parvenait encore à lui faire retrouver un semblant de raison lorsqu’il se sentait glisser dans les méandres de ses pulsions. Pour l’heure il était un charognard plutôt qu’un prédateur, et tentait de se satisfaire de cette maigre consolation malgré les joues qui se creusaient, le teint qui grisonnait et l’énergie qui lui manquait, comme autant de symptômes du poison dont il se nourrissait. « Je savais que je te trouverai ici Abe. » Tout à ses lamentations, l’ancien chasseur s’était laissé surprendre par la sorcière dans son errance, la voix de Tessa lui provoquant un mouvement de recul et l’envoyant instinctivement se cacher à l’abri d’une pierre tombale plus haute que ses voisines. « Je suis venue ... En amie ... » En amie ? « Va t’en, Tessa. » La joue posée contre le marbre, il observait à la dérobée le reflet que faisait la pleine lune sur la peau de la jeune femme, et sentit son coeur se serrer en reprenant « Retourne auprès de Samuel, ça vaut mieux. » Son fils avait besoin d’elle, plus que n’en  avait besoin Abe, et peu importe la façon dont elle était parvenue à le retrouver. « Ne me torture pas davantage en restant ici. » Elle ne faisait que verser du sel sur une plaie béante, et il avait déjà assez de sujets sur lesquels se lamenter, jouer l’âme en peine se révélant être un rôle pour lequel il n’avait pas tant besoin de composer.

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Pour un chasseur de monstres nocturnes, Abraham avait toujours eu une préférence marquée pour les longues journées d’été, et pour la caresse du soleil sur sa joue rendue rugueuse par sa barbe fournie. Il se souvenait encore d’avoir grimacé la première fois que son reflet dans le miroir l’y avait fait découvrir des poils blancs, et d’y songer maintenant le Taylor se sentait affreusement bête et futile, incapable d’avoir apprécié à sa juste valeur deux choses qui désormais lui filaient entre les doigts. Le voilà bien puni pour son orgueil, pour sa bêtise, et aujourd’hui aussi pour avoir naïvement cru à la possibilité que le petit secret de Tessa puisse lui conférer le pouvoir d’inverser l’irréversible. Aller la voir était une erreur, il les avait mis en danger son fils et elle, et s’était montré sous le jour d’une bête digne de celui ayant ôté la vie du père et du mari, réduisant à l’état de cendres le brin d’amitié qu’il avait cru la voir développer à son égard et dont il avait silencieusement appris à se contenter. Il aurait peut-être espéré ne plus être qu’un ami, c’est vrai, mais tout cela n’avait plus la moindre importance maintenant qu’il n’était plus qu’un monstre, reclus dans son cimetière comme on se terrait dans un trou. Il ne voulait pas voir Tessa, il ne voulait voir personne, et avait chassé la sorcière d’un ton morne. « C'est Samuel qui m'a convaincue ... Il t'aime bien ... » La remarque lui avait serré le coeur, si tant est que la chose soit toujours possible pour un organe ne battant plus, et voyant la jeune femme approcher en ajoutant « Inutile de te cacher ... ni les glacis ni les pierres ne pourront te cacher. Je peux percevoir ta détresse d'ici. » La percevoir, oui. Mais cela s’arrêtait là, elle ne pouvait rien de plus pour lui, et bien que n’allant pas trouver une autre pierre tombale derrière laquelle se cacher, Abe avait fait un pas en arrière pour dissuader la sorcière de s’approcher trop près. « Peu importe, je n’ai pas envie de revoir ce que j’ai vu dans ton regard la dernière fois. » Du reste il ne pouvait (ou ne pourrait) pas se prémunir éternellement, mais de cela il pouvait.

Aucun miroir ne saurait plus lui témoigner la déchéance de son apparence, mais la faiblesse qu’il sentait le gagner au fil des jours depuis qu’il se terrait ici lui donnait une vague idée du peu d’effet qu’avait le sang des cadavres dont il s’abreuvait pourtant comme un mort de soif. Il ne trompait personne, et surtout pas l’œil observateur de la jeune femme, dont la question « Tu ne te nourris pas, n'est-ce pas ? » s’était accompagnée d’un rictus qu’il ne savait pas comment interpréter. « Je me débrouille. » Il troublait le repos de ceux dont le corps refroidissait à peine, et si le mal semblait moindre en comparaison des autres solutions à sa disposition, loin de lui l’idée de vouloir s’en vanter. « J'espère que tu comprends que tu ne m'as pas laissé le choix la dernière fois ... Je sais que la soif est grande, et qu'au fond de toi tu ne voulais pas faire de mal à Samuel. » Secouant la tête, il s’était défendu d’un ton oscillant entre la honte et la culpabilité. « Je voulais pas … C’était plus fort que moi. Je voyais plus rien, j’entendais plus rien, mais j’te jure que je voulais pas … » Ni faire du mal à Samuel, ni lui en faire à elle, ni même leur faire peur, et pourtant voilà où ils en étaient désormais. « J’aurais jamais dû venir. Et toi non plus, tu n’aurais pas dû venir ici. » Ils appartenaient à deux univers qui ne coexistaient plus, et il était un peu tard pour prétendre pouvoir l’aider, quand bien même elle avait enchaîné à ce sujet « Je ne te garantis pas que je pourrais trouver une solution, mais je peux te promettre d'essayer au moins. Pour ça tu dois me faire la promesse de ne pas goûter au sang des mortels. Si tu cèdes, je ne pourrais plus rien faire pour toi. » sans se douter qu’elle arrivait après la bataille. « Alors je suppose qu’il n’y a plus rien à faire. » Ses canines se découvrant en un sourire amer, il avait observé non sans une certaine tristesse l’expression changer à nouveau sur le visage de Tessa. « Elle n’a pas souffert, je crois. » Il n’en était pas certain, mais il avait envie (besoin) de s’en persuader. « Elle était mourante, j’ai entendu les deux infirmières en parler. Alors moi ou l’inévitable … » La pauvresse serait morte, avec ou sans son intervention, et au pire ne l’avait-il amputée que de quelques jours qu’elle aurait passés clouée dans un lit d’hôpital, à voir sa propre fin arriver. Il n’y en avait eu qu’une seule, avant qu’il ne vienne se terrer ici en quête d’une autre solution, mais une seule c’était déjà une de trop pour qu’il ne puisse tenir la promesse que lui demandait Tessa. « Mais je suppose qu’une vie est une vie, alors quelque soit ce que tu avais en tête, oublie ça et retourne à la tienne. Oublie-moi. » Elle n’aurait même pas besoin d’essayer, il n’y avait plus rien à faire, et la voilà délivrée d’un fardeau qu’il n’aurait même pas dû poser sur ses épaules en premier lieu.

Abraham Taylor & @Tessa Mulligan

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Tessa se fatiguait et s’essoufflait à vouloir prouver une bonne foi dont Abe, en dépit de la façon dont s’était terminée leur dernier face à face, ne doutait pas un seul instant. Il n’avait pas besoin qu’elle tente de le persuader qu’elle aurait fait plus que de se contenter de compatir si elle en avait eu le pouvoir : il le savait. Il n’avait pas besoin qu’elle lui promette avoir tout envisagé pour lui venir en aide : il le savait. Et s’il était assurément venu la voir elle plutôt qu’une autre par facilité et par confiance en l’affection qui les liait, il ne s’en serait pas donné la peine s’il avait cru pouvoir trouver ailleurs une aide plus précieuse ou plus efficace que la sienne. Si Tessa ne pouvait pas l’aider alors personne d’autre ne le pourrait, voilà la certitude avec laquelle il s’était présenté à elle quelques jours plus tôt, et voilà le désarroi qui le rongeait depuis qu’il semblait certain que même elle ne pourrait rien pour lui. « J’aimerais tellement pouvoir le faire Abraham ... » Elle semblait désolée. Coupable, presque, d’un fardeau qu’il refusait de lui faire porter. « Je sais. » Il ne lui reprochait rien, ou au moins pas cela, et préférait garder pour lui le brin d’amertume qui le rongeait sur d’autres sujets. Le seul tort d’Abraham, en réalité, avait été de placer tant d’espoirs dans les capacités ésotériques de la jeune femme qu’il en avait oublié la prudence élémentaire, et manqué faire de son fils Samuel un dommage collatéral d’autant plus insupportable que Tessa portait déjà le deuil d’un époux, et n’aurait pas supporté d’y ajouter celui de son fils unique. Du moins c’était ainsi que le Taylor l’imaginait, lui-même dépourvu d’une descendance et désormais condamné à ne plus en avoir. « Je le sais ... tu n’as pas besoin de le jurer pour que j’y crois. » avait-elle en tout cas rendu avec douceur, leur bonne foi au moins égale dans les regrets qu’ils éprouvaient. « Je n’ai jamais été très douée pour écouter les conseils, tu devrais le savoir pourtant ... je n’en fais qu’à ma tête ! » Entre toutes les émotions négatives avec lesquelles il devait se débattre, elle était parvenue à lui arracher un bref sourire, fugace en ce qu’il s’était évanoui aussi vite qu’il était apparu. « Cette nuit qui n’en finit pas est forcément de mauvais augure. Le seul conseil que vous devriez suivre, ton fils et toi, c’est de quitter cette ville tant qu’il est encore temps. Avant qu’il ne soit trop tard. » Trop tard pour quoi ? Et pour aller où ? Lui-même n’en savait rien, seulement acquis à la certitude que ce qui se tramait depuis que la lune régnait signait peut-être leur fin à tous, la sienne ayant seulement pris la forme d’une agonie destinée à le changer en la bête qu’il traquait jadis avant de lui accorder (peut-être) le repos.

Sans le savoir, et sans doute bien malgré elle, la sorcière étant venue enfoncer le clou, prétendant maintenant à une solution sous condition quand quelques instants plus tôt elle assurait n’en avoir aucune à lui proposer de nature à le délivrer du mal. Que cherchait-elle, si ce n’était le tourmenter, en attendant de lui qu’il ne s’adonne pas à la seule chose qui lui permettait de subsister, aussi contre nature soit-elle ? Elle arrivait trop tard, pour cela aussi. « Si seulement c’était aussi simple Abraham ... » Amer, il avait secoué la tête et fait quelques pas en lui tournant le dos, ne lui faisant à nouveau face que lorsqu’elle avait repris « Je ne cautionne pas tes actes ... Mais je sais aussi que la soif peut aveugler l’esprit de n’importe quel homme. » Non, elle s’en savait rien. Et heureusement, tant il ne souhaitait la douleur et la torture que cela représentait à personne, si ce n’était celle à qui il devait d’être aujourd’hui l’un des monstres qu’il traquait il y avait encore peu. « Il faut que tu te battes Abe... que tu combattes ce mal et un jour tu auras le dessus sur cette soif et ça ne sera plus elle qui te contrôlera ! Je sais que c’est dur, mais je sais aussi que le Abraham que je connais est toujours là ... Quelque part, sinon je ne serais pas capable de percevoir ta culpabilité. Et tu ne chercherais pas à m’éloigner pour me protéger si tu étais le monstre que tu prétends être. » Chassant la remarque d’un signe de la main, il avait questionné en pure rhétorique « Et tu t’imagines que j’étanche ma soif avec ma culpabilité ? » Bien sûr que non. « Elle ne fait que me rendre plus difficile les actes auxquels je ne peux me soustraire. Tu penses que je n’ai pas envisagé de me laisser mourir de faim ? J’ai essayé, mais sans nourriture c’est ma raison qui me quitte la première, et l’instinct de survie qui se charge ensuite de faire ce que mon âme refuse d’envisager. C’est sans fin. » Et c’était en cela, sans doute, que l’on parlait du vampirisme comme d’une damnation, une malédiction, là où la lycanthropie faisait lieu de maladie. « Je reste là, j’agis comme un charognard en arrivant Dieu sait comment à me persuader que me nourrir de cadavres, pourvu qu’ils soient frais, fait moins de moi un monstre que si j’infligeais la mort … Mais jusqu’à quand ? » Combien de temps que la raison ne le quitte, ici aussi, et que son pansement mis sur une jambe de bois n’en puisse plus d’être collé, et recollé ? « Je n’ai pas besoin de miroir pour savoir que mon apparence parle pour moi, j’ai senti la force et les bienfaits du sang lorsqu’il est frais, et celui dont je me nourris ici me maintiens dans une condition physique de vieillard. » Alors il perdrait à nouveau la raison, à moins de trouver une solution. Une solution qui semblait n’exister que dans les espoirs naïfs de mortels.