@Alex Clarke ♡ & Emma ⊹ You were a child Crawling on your knees toward him Making momma so proud But your voice is too loud We like to watch you laughing Picking insects off of plants No time to think of consequences

"Et tu débordes pas ?" Assise sur le rebord de la vasque de la salle de bain, Anabel s'appliquait à mettre du rouge à lèvres d'un carmin flamboyant sur les lèvres d'une Emma confiant son allure aux bons soins d'une enfant de six ans. Ce n'était vraiment la meilleure idée qu'elle ait eue, et même si elle savait pertinemment qu'il y avait de grandes chances qu'elle ressemble à un clown d'ici environ cinq minutes, la brune se laissait faire avec plus ou moins de docilité ; le côté tantine gaga. "Si tu arrêtais de parler ça irait mieux." La gamine n'avait pas vraiment tord, et ne mettait pas les formes pour lui dire. Même pas encore adolescente et déjà du mordant, ça promettait pour la suite. Emma fronçait les sourcils pour la forme, laissant sa filleule apporter la touche finale de ce maquillage du jour d'un "Tadaaam j'ai fini" satisfait, avant de sauter de sur le meuble pour partir vaquer à des activités de petite fille hautement importantes ; comme préparer son sac pour le match de tout à l'heure par exemple. Elle avait beau avoir revêtu sa tenue rouge et blanche, enfilé ses chaussettes et tressé sa longue chevelure, Anabel était une tête en l'air qui nécessitait que l'on passe toujours derrière elle. Un peu comme Joey. Sauf que Joey avait vingt ans de plus. "Va chercher tes affaires mini Forbes ! ... je te rappelle que j'ai encore une fois raté mon permis et qu'on va devoir aller au stade en métro." La seconde partie de sa phrase avait été grommelée, puisque ce fait ne ravissait pas le moins du monde la brune. Cinq fois. Elle était passée cinq fois sous le regard expert de l'inspecteur qui avait presque laissé sous entendre qu'il valait mieux qu'elle arrête de s'acharner. Et puis quoi encore. Elle avait un diplôme d'ingénieur, un permis de conduire ça ne devait pas être la mer à boire, si ? "Et tatie Alex elle vient quand ?" Alex. Tatie. Emma fronçait les sourcils en approchant son visage du miroir, corrigeant avec du démaquillant et un crayon le contour de ses lèvres copieusement foiré par la petite. "Euh, elle nous rejoint là bas." C'est ce qui était prévu du moins. La brune vérifierait sûrement en chemin que son amie n'avait pas oublié, quand bien même cela n'aurait pas changé grand chose à leur programme du jour. La journaliste amenait simplement avec elle une dose de sentiments contradictoires avec lesquels Emma avait encore du mal à composer.

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Il n'y avait que dans un stade de foot qu'Emma encourageait un enfant à plaquer au sol un autre enfant pour prendre l'ascendant ; surtout lorsqu'il s'agissait de sa filleule, de la prunelle de ses yeux. La brune se glissait dans la peau d'une autre lorsqu'elle mettait les pieds dans les gradins d'un terrain. Plus spontanée, plus directe, elle avait fait du footy sa passion et était ravie de la partager avec la petite tête brune de Rachel depuis que Stephen avait consenti à la lui laisser chaque samedi matin pour des entraînements dont il ignorait tout ou presque. Mieux valait pour son cœur. "L'arbitre est nul." Emma était peut être de mauvaise foi aujourd'hui, mais cela n'avait rien à voir avec le fait que l'équipe qu'elle supportait se fasse mener. Elle qui entraînait la tranche d'âge du dessus s'était fait violence pour ne pas se glisser sur la pelouse et observer avec plus d'attention la seule et unique petite joueuse qui attirait son regard, alors elle se laissait la liberté de râler commenter à sa guise. "Mais elle se débrouille bien." En toute objectivité, évidemment. Depuis le début du match, la brune était restée timide sur ses paroles, évoquant globalement les prouesses (mouais) des gamins surexcités sur le terrain plus que des choses la concernant directement. Les discussions avec Alex étaient ponctuées de silences depuis que la blonde était revenue en ville, et si Emma s'était promis d'y mettre du sien, elle pouvait aussi comprendre qu'améliorer leur lien prendrait du temps après toutes ces années de veille. "Tu l'avais déjà vue jouer ?" lui avait elle toutefois demandé, alors qu'un gamin de l'équipe d'Anabel venait de s'emparer du ballon pour une tentative rapidement avortée. Outch, ce plaquage avait du être douloureux.    

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Alex arrivait au stade, elle apercevait déjà la petite tête d'Anabel en équipement, prête à montrer à tout ces gens qu'elle n'avait peur de rien. La petite avait fait un signe de main lorsqu'elle avait vu arriver l'Anglaise, et Alex l'avait imité accompagnant son geste d'un sourire. Elle ne le montrait pas, mais l'Anglaise était stressée à l'idée de venir au stade aujourd'hui. Et pourtant, elle était attendue, elle l'avait dit à Anabel qu'elle viendrait, elle ne pouvait pas se dégonfler, alors avec un peu de retard, elle avait fait son arrivée sur le bord du terrain et rapidement, elle avait aperçu Emma de l'autre coté. Hésitant quelques secondes à la rejoindre, c'était Anabel qui lui avait indiqué la présence d'Emma en criant, indiquant à tout les spectacteurs que la fameuse Emma était en tribune. Alors puisqu'Alex ne pouvait décemment pas faire croire qu'elle n'avait pas vu Emma, elle s'était dirigée dans un pas lent, vers les gradins, retrouvant Emma et s'asseyant sans quitter des yeux le terrain. Parce que c'était bien plus simple de gérer la vue de plusieurs dizaines de goss souriant, que le visage neutre d'Emma.  

Avec Emma, ce n'était désormais que des regards, des silences pourtant bien trop évocateurs et Alex se sentait jugée. Et malgré tout, l'Anglaise n'arrivait même pas à en vouloir à Emma de se montrer si froide envers elle. Pourtant, les deux femmes se connaissaient, ou du moins elles s'étaient connues dans une autre vie. Quand tout était encore simple, quand elle était encore là surtout. Mais les choses avaient changé, Alex s'était enfuie, puis elle était revenue mais entre temps, Rachel était morte et plus rien ne pouvait être pareil désormais. Alex n'était plus la même, Emma n'était plus la même et Rachel n'était juste plus là. Partie à jamais, emportant avec elle, ce lien qu'elle avait avec les deux autres femmes qui restaient derrière, à regarder la fille de leur défunte amie. Et se retrouver là, à observer Anabel jouer, se retrouver à coté d'Emma, rendait l'absence de Rachel entre plus réelle pour Alex. Mais l'heure n'était pas à la nostalgie, Alex ne détournait pas les yeux du terrain, regardant ces tout petits se lancer avec engagement dans des duels qu'Alex auraient qualifié de dangereux mais qui ne perturbait personne autour d'elle, et encore moins Emma qui semblait concentrer toute son attention sur le match, chose qui au fond, arrangeait presque Alex qui avait appréhendé ce moment. Ce moment avec Emma, et pour Alex, c'était comme se confronter à la réalité, celle ou elle quittait tout le monde, sans donner de nouvelles, laissant ses anciennes amies, et ses proches sans explications. Une réalité ou elle s'était comportée comme une lâche et elle ne savait pas comment gérer ce fait avec Emma. Alors, elle ne disait pas grand chose, laissant Emma s'en prendre à l'arbitre, ou commenter le match comme Alex aurait pu le faire dans d'autres circonstances. Mais au moins, les remarques d'Emma avait le mérite de combler les silences et c'était tout ce qui importait finalement. Ne pas laisser trop d'opportunité aux silences de s'installer et devenir pesants pour elles. "Tu l'avais déjà vue jouer ?" Cette fois, ce n'était pas un commentaire sur le match, mais bien à Alex qu'Emma s'adressait directement. Sans regarder dans la direction de sa voisine, Alex s'était lancée dans une explication, avec beaucoup trop de détails inutiles, mais ça permettait de combler les blancs qu'il y avait entre elles depuis qu'Alex s'était installée dans les tribunes au coté d'Emma. « Oui fois dans leur jardin, on jouait au ballon et quand Stephen s'est éclipsé quelques minutes, elle a essayé de me prendre par surprise et de me faire un placage, j'ai pas tout compris sur le moment  mais maintenant tout s'explique. Mais non, je ne l'avais jamais vu en match avant aujourd'hui. » Alex ne connaissait finalement la petite que depuis peu, enfin elle ne l'avait rencontré que récemment, ayant beaucoup entendu parler d'elle, mais Stephen ayant caché une partie de sa vie, pour revivre les souvenirs de sa défunte femme, Alex et lui s'étaient souvent contenté de moments à deux. Évitant de mélanger ce qu'ils vivaient ensemble et leur quotidien. Mais, Stephen avait fini par présenter la petite à Alex et l'Anglaise avait fait la connaissance de la petite Anabel. La mini Forbes et malgré toutes les appréhensions de l'Anglaise à l'idée de faire face à une version mini de Rachel, le courant était bien passé entre les deux, et c'était assez incroyable finalement tant l'Anglaise était normalement réticente à s'approcher de trop près des enfants. Anabel avait été une exception, parce qu'elle était la fille de Rachel, sans doute. Et, ce jour là, Alex avait passé un moment à jouer au ballon avec la petite sous le regard perturbé de Stephen qui n'avait rien dit, mais qui pensait déjà à son exil ce jour là. Mais, Alex n'avait rien vu, se contentant de se concentrer sur les sourires et la joie présent sans discontinu sur le visage d'Anabel, et c'était fou comme son sourire lui rappelait celui de Rachel. Un nouveau blanc s'était installé entre elles, et Alex se contentait de regarder la petite, avec une petite appréhension en assistant à un nouveau placage. « Tu sais que je suis quasiment sur que Stephen pense qu'Anabel fait du foot, mais tu sais le foot Européen, sans placage et autre geste dangereux. » Est-ce qu'Alex était réellement en train de penser à Stephen alors que sa petite princesse sautait la tête en avant pour attraper le ballon qui venait dans sa direction ? Totalement. Mais c'était légitime, et sa peur l'était aussi non ? Parce qu'il n'y avait pas que le ballon qui arrivait vers Anabel, une foule de petits humains suivaient le mouvement du ballon et se rapprochait dangereusement de la petite. Alex avait froncé les sourcils, priant pour qu'ils s'arrêtent avant de piétiner Anabel. Pauvre Stephen, s'il savait. Mais parce qu'Alex avait pu le côtoyer pendant presque une année, elle avait comprit sans difficulté les raisons qui poussaient Emma à être celle qui accompagnait la petite au footy, autrement appelé foot Australien par les Européens tels qu'Alex. « Si tu veux que je vous laisse toutes les deux, je peux partir. » C'est qu'elle sentait bien qu'Emma n'était pas forcément à l'aise, ou c'était elle qui ne l'était pas, sans doute les deux. Mais Alex était assez grande pour comprendre quand sa présence dérangeait, et elle ne voulait pas perturber se moment de complicité entre Emma et sa nièce. « C'est juste que je lui avais promis de venir et je ne voulais pas la décevoir. » Décevoir une autre Forbes, décevoir cette petite qui venait de voir son père s'envoler pour trois mois, elle ne pouvait pas faire ça. Alors, elle était venue pour honorer sa promesse et aussi peut-être au fond, parce qu'elle l'aimait bien cette petite. Parce qu'elle représentait quelque chose qu'Alex n'était pas en mesure de pouvoir expliquer, ni à Emma, ni à elle même. Mais si Emma lui demandait de partir, elle le ferait. Partir elle savait faire de toute façon.

Si Emma s'était jurée qu'elle mettrait de l'eau dans son vin et qu'elle essaierait de faire en sorte de raviver les braises de son amitié passée avec Alex, dans les faits, la pratique était un tantinet plus compliquée que la théorie à mettre en place. Anabel était leur seul lien encore existant, et la brune avait beau ne pas sauter de joie à l'idée de partager ce moment de complicité sportive avec mini Forbes en compagnie de la journaliste, la gamine s'était extasiée en la voyant débarquer dans le stade à son tour, alors il n'y avait qu'à s'incliner. Le souvenir de Rachel la poussait à faire des efforts, aussi, alors que le match commençait, Emma avait commenté pour faire la conversation. Ce qui lui évitait de commencer par les traditionnels : "Comment tu vas depuis le temps ? Parce que sérieux huit ans c'est vachement long." car non, ce n'était pas quelque chose d'acceptable. La chimiste avait décrété que l'arbitre était nul, et alors que son regard était rivé sur la prunelle de ses yeux, elle se risquait à une question un peu plus personnelle en demandant à Alex si c'était la première fois qu'elle voyait la petite jouer ou non. « Oui fois dans leur jardin, on jouait au ballon et quand Stephen s'est éclipsé quelques minutes, elle a essayé de me prendre par surprise et de me faire un placage, j'ai pas tout compris sur le moment  mais maintenant tout s'explique. Mais non, je ne l'avais jamais vu en match avant aujourd'hui. » La brune hochait le menton, bienheureuse qu'il y ait une action (et un gamin ensanglanté) pour combler le vide de ces paroles qu'Emma n'avait pas su commenter.  « Tu sais que je suis quasiment sur que Stephen pense qu'Anabel fait du foot, mais tu sais le foot Européen, sans placage et autre geste dangereux. » Oh ça ne l'étonnait pas, et pour la première fois, elle s'était risqué à un regard vers Alex, un demi sourire au coin des lèvres. "Ouais je pense aussi. Mais tu sais ça a déjà été toute une épopée pour lui faire accepter qu'elle ne fera pas de danse classique ... préservons le encore. De toute façon il est loin." et si jamais la fillette venait à se retrouver plaquée au sol et égratignée, ce serait Alfie en tête de front pour gérer, et Emma n'était absolument pas contre l'idée. La brune n'était pourtant pas la pire des marraines, du moins, elle ne s'estimait pas l'être. Elle avait toujours été refroidie par le côté un brin trop protecteur d'Holloway, et bien qu'elle ait lié un lien particulier avec lui au fil des années, le début avait eu ses quelques couacs. A ses yeux sa filleule méritait de laisser exprimer son côté aventurière, et là où le kiné l'enfermait dans une bulle de rose et de paillettes, elle s'obstinait à lui faire écouter ses instincts les plus téméraires. Elle n'avait aucune idée de ce qu'en pensait Alex, mais si l'anglaise n'avait pas trop changé, elle devrait être plus ou moins rangée de son avis. « Si tu veux que je vous laisse toutes les deux, je peux partir. » Quoi ? La brune fronçait les sourcils, s'attachant les cheveux dans un geste qui laissait percevoir son besoin soudain de s'occuper les mains. « C'est juste que je lui avais promis de venir et je ne voulais pas la décevoir. »  Oh Alex, pas ça. Emma secouait la tête, ponctuant ce mouvement d'un "Non" qui n'avait rien de bien convaincu, ni de non convaincu. Neutre, transparent, banal, il ne lui ressemblait pas, et elle qui était d'ordinaire plus incendiaire que calme plat en perdait ses mots. "Je ... je me suis dit qu'on pouvait essayer de repartir sur d'autres bases toi et moi. Reste. S'il te plaît." Elle y mettait du sien, Emma, mais n'était pas des plus douées. En l’occurrence ici, on avait l'impression que ces quelques mots lui avaient brûlé l'intérieur de la bouche tant ils avaient été durs à dire, mais Lawson restait identique à elle même, et elle priait qu'Alex se souvienne de ce trait de caractère, sans quoi les choses risquaient de devenir un tantinet plus compliquées. "Et puis ... on peut toujours être à trois comme avant. A ceci près que celle ci mesure moins d'un mètre et ne boit pas de Gin Fizz comme si c'était de l'eau." Elle désignant Anabel du menton, haussant les épaules d'un air nonchalant qui ne représentait absolument pas la tornade qui passait dans son cerveau à ce moment, balayant sur son passage sa fierté mal placée et son ego démesuré. "Mais bordel qu'il le prenne comme tremplin au lieu de laisser le ballon filer la, ça c'est encore la faute aux parents qui mettent leurs gamins sous cloche." Autre chose qui n'avait pas changé ; Emma était toujours aussi gênante, et peu encline à utiliser de filtres, comme lorsque le couple devant elles s'était retourné d'un air offusqué pour désapprouver visuellement les paroles de la chimiste. Et Dieu sait qu'elle s'en foutait.    

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De toute façon il est loin. À l’entente de cette phrase, Alex n’avait pu retenir une légère grimace, un sourire sans joie, une nostalgie en repensant à ce qu’il avait représenté dans sa vie cette année, trop longue année. « Oui il est loin. » Le reproche était quelque peu palpable dans cette remarque de l’Anglaise mais elle enchaînait pour ne pas laisser transparaître son émotion. « Mais tu sais entre la danse classique et ça, y’a quand même un monde d’écart. » Ce n'était pas Alex qui allait reprocher le choix du sport pour la petite, elle était, elle même le cliché de la fille qui ne faisait que des sports considérés comme plutôt masculins, mais pourtant, alors qu'elle regardait les enfants évoluer sur ce terrain, elle ne pouvait s’empêcher de craindre pour la santé de la petite. Et c’était quelque chose de nouveau avec lequel elle avait un peu de mal à composer. Avant, jamais elle ne se serait inquiétée pour des enfants quelconques. Mais, Anabel n’était pas un enfant quelconque c’était sans doute pour ça qu’elle ne pouvait s’empêcher de souffler de soulagement en voyant la petite éviter les placages, ou se relever sourire aux lèvres après avoir finit la tête la première dans le gazon. C'était clairement pas le sport fait pour des enfants, filles ou garçons, ce n'était même pas une question de sexe, mais de dangerosité, du moins de ce qu'Alex considérait comme dangereux ou non. Et que dieu préserve Stephen le jour ou il assisterai à un match de sa petite princesse, et qu'il préserve Emma aussi parce qu'elle risquait de subir la colère du brun s'il venait à arriver quelque chose à la petite. Le match avançait, les enfants courraient, criaient, pleuraient aussi pour certains, mais ça ne suffisait pas à diminuer le nombre de contacts. Et, pire encore, le nez en sang de ce petit ne semblait affoler personne, pas même la mère sur le bord qui avait dégainé son paquet de mouchoir avec une telle rapidité, comme si c'était une habitude à laquelle elle était préparée. Ces gens étaient fou, et si Alex, n'avait jamais douté de la folie d'Emma et de son attrait pour les sports un peu barges, elle pensait tout de même qu'il fallait aimer se faire des frayeurs pour assister chaque week-ends à des matchs ou à tout moment l'un des mômes risquaient une fracture ou une commotion. Mais après tout, chacun faisait ce qu'ils voulaient avec ses goss, et Alex n'avait d'yeux (et de craintes) que pour Anabel. Mais même pour la petite, Alex n'avait pas son mot à dire, alors elle avait gardé son inquiétude pour elle, et elle s'était concentrée sur le match, tentant de ne pas se raidir à chaque nouveaux duels.

La discussion peinait à s'installer entre les deux femmes et rien ne pouvait laisser présager qu'au fond ces deux là se connaissaient si bien, ou du moins s'étaient déjà vu toutes les deux dans des tout les états ou presque. Huit ans de silence, ça laissait des traces et Alex continuait de découvrir les conséquences de ces actes. Essayant de ne pas se formaliser de l'attitude glaciale d'Emma, Alex regardait le match, la boule au ventre qui se semblait pas vouloir disparaître. Le silence, ajouté au stress de voir Anabel se faire plaquer au sol une nouvelle fois, Alex avait fini par demander, ou plutôt suggérer, l'idée de partir sentant bien que sa présence n'était pas agréable pour Emma.  "Non. Je ... je me suis dit qu'on pouvait essayer de repartir sur d'autres bases toi et moi. Reste. S'il te plaît." Et Alex avait senti comme ces mots avaient été dur à prononcer pour Emma, mais c'était aussi parce qu'elle se souvenait du caractère un tantinet borné et fière d'Emma, qu'Alex avait été touchée par cette réponse, pourtant pas des plus amicales. Elle s'était redressée un peu, mais elle n'avait rien dit. Elle s'était contentée d'un très léger sourire pour signifier qu'elle allait rester encore un peu. "Et puis ... on peut toujours être à trois comme avant. A ceci près que celle ci mesure moins d'un mètre et ne boit pas de Gin Fizz comme si c'était de l'eau." Alex regardait la petite, adorable petite fille, pleine de vie, souriante et elle voyait Rachel alors que la petite courait le long de la ligne de touche laissant apercevoir des ressemblances frappantes avec sa mère. 'A trois comme avant.' Les yeux rivés sur la petite, Alex n'avait pas voulu imposer un nouveau silence et pourtant, elle n'avait pas su comment répondre à Emma. Parce qu'elle venait de parler du passé, de leur passé, à trois sauf qu'elles n'étaient plus trois, deux et demi et encore. Il y avait Emma, il y avait Alex et il y avait Anabel, mais il manquait le socle qui reliait chaque personne, il manquait Rachel. « Je suis désolé. » Et alors qu’Emma était clairement en train de se mettre à dos certains des parents présents, Alex avait lâché cette phrase sans réfléchir. Prise dans l'émotion. Profitant peut être un peu de l’inattention d’Emma pour prononcer ces mots qui, malgré le nombre de fois qu’elle avait eu à les employer depuis son retour, semblaient toujours aussi difficile à dire et surtout à assumer parce qu’ils la renvoyaient directement à toutes ses erreurs. « Je suis désolé d’être partie. Désolé de ne pas avoir été là quand elle est morte. » Elle ne pouvait pas s’excuser auprès de Rachel, c’était trop tard et elle devait se débrouiller avec sa culpabilité et son sentiment d'avoir été une amie horrible, une lâche. Mais elle pouvait le faire auprès d’Emma. S'excuser, c'était la première chose à faire parce qu'Alex le savait, elle aurait du être là, mais c’était encore une chose qu’elle ne pourrait pas rattraper. Une énième chose qu’elle avait gâché et face à laquelle elle n’avait pas d’autre choix que d’accepter ses erreurs et le caractère irrécupérable de celles ci. Elle ne pouvait pas revenir en arrière, changer les choses, elle ne le pouvait pas mais elle pouvait commencer à assumer ses erreurs et tenter de rattraper ce qui pouvait encore l’être. Elle avait encore parfois du mal à accepter qu’elle ne pouvait pas récupérer sa vie d’avant, que tout ce qu’elle avait connu et eu à l’époque avait disparu, mais elle pouvait tenter de récupérer quelques morceaux de son ancienne vie. Rien ne serait plus jamais comme avant mais elle pouvait encore en faire quelque chose de bien. Elle était là, Emma aussi et si Rachel les avait quitté pour toujours, il lui restait une partie de leur trio, une amie en la personne d'Emma. « Anabel est super, je ne sais pas comment elle fait pour avoir toujours le sourire. Elle me fait vraiment penser à Rachel. » Rachel, encore et toujours Rachel et que c'était compliqué émotionnellement de penser à Rachel, de l'associer à cette petite fille, de passer du temps avec Emma sans qu'elle ne soit là avec elles. C'était compliqué parce que ça rappelait sans cesse ce fait : Rachel était morte. Mais ça renvoyait aussi toute l'incompétence d'Alex, tout ce qu'elle avait réussi à gâcher et à quel point elle avait pu être une amie horrible. Une égoïste, une menteuse, une lâche, et ce n'était pas ces sentiments qui allaient l'aider à se sentir en paix avec elle même. « Tu étais avec elle pour tout ça ? » La grossesse, la naissance d'Anabel, la vie de mère célibataire avant Stephen, le soutien face à sa famille horrible, et la maladie … Rachel avait sans doute eu besoin d'une amie, et si Emma était si proche de la petite fille, c'était qu'elle au moins elle avait tenu son rang, sans flancher, sans craquer, sans fuir.

Elle n’avait pas la moindre idée qui unissait Alex et Stephen, et pourtant à sa façon de grimacer Emma comprenait qu’Alex en était proche. Ce n’était pas spécialement son cas à elle, mais la brune n’était pas un exemple dans sa façon d’entretenir ses relations amicales bien au contraire. Elle avait intégré le kiné comme un membre de sa famille au même titre que Rachel et Anabel, et c’est tout. C’était déjà beaucoup. Elle n’avait pas besoin de s’épancher sur ses états d’âme pour qu’il sache qu’elle était là, qu’elle l’avait toujours été, et la Lawson appréciait qu’ils n’aient pas à se parler pour se comprendre. « Oui il est loin. » Volatilisé au Cambodge, et Emma avait encore un peu de mal à y croire. Elle ne réalisait qu’en allant chercher sa filleule chez Alfie et en se faisant lécher le visage par un Bruley au top de sa forme chaque matin. Autrement dit de la pire des façons. « Mais tu sais entre la danse classique et ça, y’a quand même un monde d’écart. » Oui mais c’était ce qu’Anabel voulait, et Stephen et son esprit étriqué entre les licornes et les paillettes finirait bien par intégrer le fait que sa princesse soit plus garçon manqué que rose et guimauve. Emma fit un vague mouvement du bras en guise de réponse, l’air de dire « t’inquiète » car bien qu’il faille s’inquiéter du jour où Monsieur Névrose découvrirait que son enfant se la jouait Xena la guerrière sur un stade de football, pour le moment tout allait bien dans le meilleur des mondes … ou presque. Entre les deux jeunes femmes, la discussion était informelle presque froide. Elles qui étaient amies à l’époque se retrouvaient maintenant comme deux inconnues, et si jusqu’à présent la brune ne s’était pas trop remise en contact avec la journaliste, maintenant que Holloway était parti, elle n’avait pas d’autre choix que de composer avec sa présence puisque c’était ce que la petite voulait. Alex avait proposé de partir, et si la reine des glaces prenait conscience de son attitude un brin trop hostile, elle se disait qu’il valait mieux qu’elle s’adoucisse sous peine de tout voir partir en fumée. La blonde ne disait rien, mais rien c’était mieux qu’un départ. Elles pouvaient être ensemble à nouveau, différemment, et pour Rachel et sa fille, toutes les deux pouvaient au moins faire l’effort de s’entendre. « Je suis désolée. » Ascenseur émotionnel ; après avoir incendié des gamins à l’attitude un brin trop timorée, Emma se retrouvait happée par les sentiments et redescendue d’un étage. Elle glissait un regard vers Alex, se renfonçant dans son siège sans trop savoir quoi dire ou quoi faire. Le visage fermé, elle se contentait d’écouter. Ecouter sans prendre la fuite c’était déjà ça. « Je suis désolée d’être partie. Désolé de ne pas avoir été là quand elle est morte. » Outch. Ça faisait mal d’entendre ça, et si la brune serrait des dents et plissait les lèvres, ce n’était pas par mécontentement mais plus parce qu’elle ne savait pas comment réagir. La mort de Rachel l’avait touchée en plein cœur, et si Alex avait été là elle l’aurait vue s’éteindre peu à peu, troquer les gin fizz pour les solutions dégueulasses de l’hôpital et ses belles boucles brunes pour un foulard. Sa disparition avait été un traumatisme pour ses proches qui l’avaient vue passer de la jeune mariée rayonnante au cadavre ambulant. La chimiste ressentait encore beaucoup de colère à ce sujet, et sans doute n’arriverait elle jamais à vivre en paix avec la mort de sa meilleure amie et celle qu’elle considérait comme sa sœur. « T’es la maintenant. Et tu pourras plus rien changer de toute façon. » Sans doute un brin trop pragmatique pour la compassion, Emma ne gardait pourtant aucune vraie rancœur envers la blonde. Elle avait simplement du mal à s’exprimer. « Anabel est super, je ne sais pas comment elle fait pour avoir toujours le sourire. Elle me fait vraiment penser à Rachel. » Oula. Emma s’attachait les cheveux pour s’occuper les mains, pour s’occuper l’esprit. Son regard glissait d’instinct vers la tornade brune qui s’en sortait comme une cheffe sur le terrain ; il fallait dire qu’elle avait un bon coach. En toute objectivité. « C’est son portrait craché. Moi ça m’aide à tenir. Elle la fait vivre. » Dit comme ça c’était un peu glauque, mais aux yeux d’Emma, Anabel représentait une part de Rachel qui n’était pas morte, et pour la jeune femme (qui n’avait absolument aucune envie de faire son deuil) de voir la fillette l’aidait à supporter son absence, une absence bien trop pesante depuis presque deux ans. Les bras croisés contre la poitrine, la brune fixait le terrain pour s’épargner un coup d’œil à son amie, la discussion devenant soudainement bien trop forte en sentiments pour que la control freak qu’elle était ne garde le cap. « Tu étais avec elle pour tout ça ? » D’un hochement de tête, la brune approuvait silencieusement. « Quand t’es partie on est restées en contact. On est devenues bien plus proches qu’avant. Puis elle est tombée enceinte, et j’ai fait mes valises. On m’a proposé un poste à Brisbane et ça tombait à pic. J’ai vécu avec elle juste avant qu’elle accouche … et j’ai hurlé sur son voisin pour qu’il nous amène à l’hôpital. » Spoiler alert = Emma n’avait toujours pas son permis, mais ce souvenir la faisait sourire. Le premier de la journée. « Ensuite j’ai pris un appartement, et elle a rencontré Stephen. C’est là que tout est parti en vrille. » Son visage s’était fermé, et elle laissait passer quelques secondes d’un lourd silence avant de poursuivre. « C’était déjà trop tard quand ils ont découvert la tumeur. Elle l’a annoncé petit à petit. C’était bizarre. » Parce que si Rachel savait, Stephen avait nié en bloc son cancer pendant un long moment. L’ambiance était glaciale, triste. Elle ne ressemblait pas à la brune et Emma avait détesté ces moments ; au-delà du fait de voir sa meilleure amie mourir. « Elle est morte six mois plus tard, et ça a été les pires moments de ma vie. Mais oui, j’ai été là. » La brune glissait un regard à son amie, et si dans son regard ne perçait aucune volonté de la faire culpabiliser naissait toutefois au fond de ses iris une colère qu’elle contenait difficilement. Les yeux rougis et la mâchoire crispée, Emma soufflait : « Pourquoi t’es partie Alex ? » tout en sachant pertinemment que si elle parlait plus fort sa voix se briserait.

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Alex avait craint, un peu, beaucoup, la journée au stade avec Emma. Parce qu'Alex connaissait Emma, elle savait qu'elle l'avait sûrement blessée elle aussi et que depuis son retour, les deux jeunes femmes avaient prit soin de s'éviter. Elles se diraient que ce n'était pas de façon volontaire, mais Alex savait au fond que c'était faux et si les circonstances ne les avaient pas repoussé à se côtoyer, peut-être qu'elles seraient restées l'une et l'autre à vivre leur vie chacune de leur côté, comme depuis huit ans finalement. Mais Anabel était venue s'immiscer au milieu de cette amitié presque détruite par le temps et la distance (et la rancœur sans doute du côté d'Emma). Elle avait réuni les deux femmes, comme l'avait fait sa mère quelques années plus tôt. Constat qui aurait pu avoir quelque chose d'ironique, s'il n'y avait pas la mort comme élément qui s'était glissée au milieu de tout ça. Et finalement, comme Alex l'avait craint, tout était froid entre elles. Glaciale même et elles n'avaient comme plus rien à se dire, une constatation qui laissait un nouveau sentiment de gâchis. Et Alex, avait proposé de partir, proposé de quitter ce stade et sortir de la vie d'Emma, elle l'avait déjà fait une fois, elle pouvait le refaire mais cette fois, elle avait demandé l'avis de la jeune femme qui s'était opposée à cette idée, ouvrant même l'idée à une possible amitié entre elles. Et après ce petit échange obligatoire entre elles pour faire baisser la tension, Alex avait cru bon de faire le premier pas, en s'excusant. De façon maladroite, mais c'était le geste qui comptait non ? « T’es la maintenant. Et tu pourras plus rien changer de toute façon. » Et si Alex pouvait parfois manquer de tact, être maladroite dans les moments gênants, Emma n’était pas non plus en reste. C'était réaliste comme réponse, peut-être un poil trop direct pour qu'Alex n'ait pas la sensation qu'on lui renvoyait ses erreurs au visage, encore. Pourquoi fallait-il tout le temps qu'on lui rappelle qu'elle ne pouvait plus rien changer ? Elle le savait, alors pourquoi tout le monde devait lui redire encore et encore ? Elle ne pouvait pas juste exprimer ses regrets d'avoir merdé sans qu'on lui rappelle que c'était trop tard ? Alors sous prétexte qu'elle ne pouvait pas revenir en arrière, elle devait obligatoirement assumer et se taire ? Sans doute, mais elle avait du mal avec le concept de regarder vers l'avant, beaucoup trop emprise avec ses regrets et sa culpabilité. Le regard fixé sur la petite brune qui courrait sur le terrain pour se démarquer, un sourire sur les lèvres et pourtant le regard concentrée sur l'objectif, Alex enviait cette petite fille. Elle n'avait pas une vie famille, Stephen lui avait vaguement expliqué la situation après la mort de Rachel et la lutte pour obtenir la garde de celle qu'il considérait comme sa fille, et pourtant cette petite souriait à tout le monde. Même à l'Anglaise, parce qu'elle était encore trop jeune pour tout comprendre, mais Anabel avait accepté Alex avec une facilité déconcertante. Une amie de maman, une connaissance de papa, il n'y avait pas eu besoin de lui demander pardon, pas eu besoin de se justifier de ses erreurs, pas eu besoin de gérer les souvenirs d'un passé qui s'était envolé. Quoique, cette petite avait quand même remué un peu l'esprit de l'Anglaise, une enfant à peine plus jeune que Nathan, non désirée, mais pourtant tellement aimée. « C’est son portrait craché. Moi ça m’aide à tenir. Elle la fait vivre. » Alex se mordait la lèvre légèrement, émue par les propos d'Emma, et si Anabel avait le sourire de Rachel, et que ça semblait positif pour Emma, pour Alex, c'était parfois encore déroutant de voir cette petite et de se rappeler qu'elle ne reverrait jamais Rachel. Cette discussion commençait à devenir, un poil trop compliquée émotionnellement et Alex n'était pourtant pas au bout de ses surprises. Pourquoi avait-elle demandé si Emma avait été là avec Rachel ? Pourquoi avait-elle posé cette question ? Elle devait réellement apprendre à se taire parfois, parce qu'elle avait la fâcheuse tendance à poser les mauvaises questions, tout le temps. « Quand t’es partie on est restées en contact. On est devenues bien plus proches qu’avant. Puis elle est tombée enceinte, et j’ai fait mes valises. On m’a proposé un poste à Brisbane et ça tombait à pic. J’ai vécu avec elle juste avant qu’elle accouche … et j’ai hurlé sur son voisin pour qu’il nous amène à l’hôpital. » Cette remarque avait au moins eu le mérite de faire sourire Alex, parce qu'imaginer Emma qui hurlait sur un pauvre homme qui avait eu le malheur de se retrouver au mauvais endroit au mauvais moment (enfin d'être le voisin à ce moment la de sa vie), supportant la tornade Emma qui devait décharger toute la tension du moment sur ce pauvre type. Et Alex s'imaginait même que Rachel aurait pu être celle qui avait calmé Emma, alors même qu'elle était celle qui allait accoucher. C'était un fait tout à fait plausible, mais Alex s'était bien gardé de demander plus de précisions, pas qu'elle n'était pas intéressée, mais Emma n'avait pas finit son récit et Alex sentait que ce qui arrivait n'allait pas être aussi joyeux. « Ensuite j’ai pris un appartement, et elle a rencontré Stephen. C’est là que tout est parti en vrille. C’était déjà trop tard quand ils ont découvert la tumeur. Elle l’a annoncé petit à petit. C’était bizarre. Elle est morte six mois plus tard, et ça a été les pires moments de ma vie. Mais oui, j’ai été là. » Et Alex s'en voulait désormais de ne pas avoir rebondi sur le souvenir d'Emma hurlant sur le voisin. Elle s'en voulait aussi d'avoir posé cette foutue question. L'ambiance était déjà bien assez lourde entre Emma et Alex pourquoi, avait-elle demandé ? Surtout qu'au fond, elle n'avait même pas réellement envie de savoir. La mort de Rachel, elle l'avait abordé une fois, une seule fois avec Stephen et elle avait complètement perdu les pédales devant ce type qu'elle ne connaissait même pas. Et après, ils s'étaient concentrés sur les souvenirs de la jeune femme en vie, sans jamais reparler de sa mort, parce qu'elle ne voulait pas entendre tout ça. Le déni, c'était tellement plus agréable finalement. Ne pas savoir, ne pas avoir à l'imaginer gérant ses derniers mois de vie. Non, elle n'avait jamais voulu savoir tout ça, ni combien de temps cela avait duré, ni même entendre le mot tumeur associée à Rachel. Et pourtant …Se mordant la lèvre pour éviter de se laisser submerger par ses émotions, il était hors de question qu'elle craque aujourd'hui. Hors de question qu'elle se montre faible alors qu'elle n'en avait pas le droit, parce qu'elle n'avait pas été là. Parce qu'elle les avait tous lâchement abandonné, tous. Rachel, Emma, Jasper, Tim, Caleb. Elle n'avait pas le droit d'être celle qui craquait aujourd'hui, alors que c'était Emma qui avait vécu tout ça, la maladie de Rachel, sa mort, son enterrement et la vie sans elle. Mais merde pourquoi avait-elle posé cette putain de question ? Silencieuse, elle évitait le regard d'Emma, elle n'avait pas besoin de la regarder pour savoir qu'elle aussi était en train de gérer ses émotions avec plus ou moins de réussite. Elle devait dire quelque chose, elle le savait, mais si parfois elle avait tendance à dire des conneries, elle pouvait aussi devenir extrêmement muette alors que la situation exigeait qu'elle parle. Mais pour dire quoi ? 'Je suis désolé' ou le fameux 'j'aurais aimé être là pour vous.' Non, non tout ça c'était à la fois inutile et déplacé voir même faux. Parce qu'Alex, n'aurait pas aimé être là de toute façon, parce que personne ne voulait voir son amie dépérir jour après jour jusqu'à s'éteindre. Personne ne voulait assister à une telle chose, alors dire une telle chose aurait été fausse. Alors devant son incapacité à dire quelque chose d'adaptée et sincère, Alex était restée silencieuse, chose si rare chez elle que ça montrait à quel point elle était perturbée par les confessions d'Emma.  « Pourquoi t’es partie Alex ? » Elle avait dégluti difficilement, baissé les yeux sur le sol regardant ses chaussures quelques secondes,  cherchant un moyen d'encaisser la question. Elle n'avait pas encore digérer toutes les informations d'Emma, qu'elle se retrouvait prise dans un nouveau tourbillon de souvenirs. Les propos d’Emma, Venant comme une flamme ravivait le feu de la culpabilité d’Alex. Elle n’avait même pas encore terminé d’intégrer chaque mots prononcé par Emma, que la question était posée. Brutale. Soufflée dans un murmure, qui n’avait pas épargnée l’Anglaise. Elle ne savait pas. Emma ne savait réellement pas, elle ne savait rien. Et elle se sentait presque encore plus coupable maintenant qu’elle découvrait que Rachel lui avait été fidèle toute sa vie, sans la trahir même auprès d’une de leurs amies. Même auprès de celle qu’elle avait choisi pour devenir la marraine de sa fille. « Elle ne t’a rien dit ? » C’était évident comme réponse, une énième question conne prononcée par Alex, mais elle avait eu le mérite de venir mettre fin au mutisme dans lequel elle s'était réfugiée. Emma ne demanderait pas si elle savait, mais Alex devait se laisser un peu de temps. Parce que Emma venait de raviver beaucoup trop de choses en elle. Elle devait gagner du temps pour gérer ses émotions, beaucoup trop à fleur de peau pour cacher le malaise qui la parcourait. Elle était là pour voir Anabel, le petite fille de Rachel, jouer au football et quelque soit le football, elle ne s’attendait pas à ce que ce soit elle qui reçoive les coups les plus violents. Mais Emma faisait partie de son passé, Emma l’avait connu avant tout ça, elles avaient été amies et Alex lui avait menti à elle aussi. Comme à tout le monde finalement. Et si depuis le secret n’en était plus réellement un, Alex n’avait encore pas régler toutes les blessures liées à cet événement et ça restait toujours compliqué pour elle d’en parler. De gérer tout ce qu’elle ressentait surtout qu’Emma avait déjà bien déstabilisée les défenses de l’Anglaise en évoquant toute l’histoire de Rachel, sa mort surtout. « J'ai fais un déni de grossesse, j'ai quitté Caleb, j'ai accouché d'un petit garçon, je l'ai laissé à l'adoption et je me suis enfouie pour ne pas avoir à gérer. » Et Alex aurait pu tourner autour du pot, noyer la question en apportant une réponse plus ou moins complète. Elle aurait pu évoquer son besoin de couper court avec sa vie de Brisbane sans en expliquer la raison. Elle aurait pu aussi ne pas répondre et s’enfuir ou regarder Anabel et commenter le match tout en oubliant le contenu de leur dernière discussion. Oublier ces dernières minutes. Elle aurait pu aussi se fermer et lui dire que ça ne la regardait pas, mais aucune de ces options n'avaient semblé avoir un quelconque intérêt. Ça n’allait pas l’aider de fuir, et puis il était temps qu’elle assume que tout ça faisait partie de sa vie de son histoire. Emma aimait les choses concrètes, et bien là c'était concret. Sans y mettre les formes, sans même essayer de s'expliquer sur son choix ou sur son histoire. C'était concret, froid, direct mais c'était l'histoire entière, c'était la vérité technique détachée de toutes notions de ressenties. Après l'évocation de la mort de Rachel, le départ d'Alex, c'était réellement beaucoup trop d'un coup. Anabel regardait en leur direction, leur faisant un petit signe de la main tout en arborant son sourire si caractéristique, si riche de sens et de souvenirs. Ok, cette fois c'était trop et les larmes coulaient sur le visage d'Alex sans même qu'elle n'en ait conscience. « Mais comme tu me l'as rappelé, on ne peut rien changer, alors quelques soient les raisons finalement c'est pas important. Ça ne changera rien au présent ou au passé. » Du revers de la main, elle s'était essuyée les yeux, effaçant toutes traces d'émotions. Forçant un sourire pour répondre à Anabel. Et cette fois, c'était elle qui espérait laisser le passé là ou il était, parce que ça l'arrangeait cette fois, ne voulant pas une énième fois devoir se justifier. « Tu es sûr que c'est une bonne idée ce que l'on fait là ? » Peut-être que le ton détaché qu'elle tentait de prendre n'était pas très adapté, peut-être même que sa façon de s'exprimer n'était pas des plus clairs mais elle cherchait encore à gérer toutes ses émotions, tout ce que cette discussion avec Emma faisait remonter en elle. « Nous deux sans elle. » Elles avaient été amies Emma et Alex, elles s'étaient même bien entendues, mais Rachel avait toujours été là et elle n'était plus là et finalement ce trio qui fonctionnait si bien, devenait un duo à qui on avait arraché le socle et Alex craignait que le temps passé avec Emma ne soit finalement qu'un rappel douloureux de ce qu'elles avaient toutes deux perdues.

Emma avait à peine conscience qu’elle pouvait être froide avec autrui, et si d’ordinaire elle arrivait à pallier à cette carapace de glace en souriant et en lançant quelques traits d’humour, avec Alex les choses étaient un chouïa plus compliquées. Cela faisait bien trop longtemps qu’elles ne s’étaient plus vues, et la Lawson commençait à sentir le temps et la rancœur peser sur ses épaules plus que la joie de retrouver une amie. L’étaient-elles encore d’ailleurs ? Sûrement. Sans quoi ni l’une ni l’autre ne se donnerait la peine de parler, pas même pour les beaux yeux d’Anabel. La journaliste s’obstinait à regarder devant elle, suivant le match avec attention sans pour autant fermer l’oreille à Emma qui se lançait dans des explications plus ou moins claires de son ressenti face à toute cette situation. Alex s’était tirée, elle avait fait face, et si la brune ne tenait pas à faire culpabiliser son amie de ne pas avoir tenu la main de Rachel pendant sa grossesse (ce n’est pas ce que la jeune maman aurait voulu) elle ne pouvait en revanche pas cacher le fait qu’elle avait été là et que blondinette avait un monde à rattraper, au-delà de l’avoir blessée. Au fond le lien entre Emma et Alex n’aurait jamais été si fort que celui qui les unissait individuellement à Rachel, mais toutes les deux n’avaient désormais plus que l’autre pour remonter la pente et n’avaient d’autre choix que de composer pour honorer du mieux qu’elle le pouvait le souvenir de leur amie. Ou du moins ne pas l’entacher. La chimiste racontait dans les grandes lignes ce qu’il en avait été des dernières années, de ce qu’elle avait pu faire pour aider au mieux la jeune maman sans trop savoir si elle aidait l’anglaise ou lui plantait un couteau dans le cœur. Ca faisait mal d’en parler, un mal de chien, mais Emma tenait bon. Il était hors de question d’épiloguer sur la fin de vie larmoyante, sur les funérailles, le dernier affront des grands parents Forbes. Elle était allée à l’essentiel, sans doute un peu trop brusquement. Toutes les deux étaient restées silencieuses un long moment avant d’oser émettre le moindre son, puis finalement la Lawson terminait de planter le clou en demandant où Alex avait bien pu se terrer ces dernières années. Parce que c’était bien beau de demander des explications, mais ça allait dans les deux sens. La blonde n’avait rien dit dans l’immédiat, regardant ses chaussures, priant sans doute pour qu’un gamin se fasse éborgner et que le match prenne le dessus sur leur conversation. Elle avait toutefois fini par répondre un : « Elle ne t’a rien dit ? » qui la fit bouillir car non, Rachel n’avait rien dit. Sinon elle ne serait pas là à poser la question. La brune était restée très silencieuse quant au départ d’Alex, ne lui en voulant pas là où Emma l’avait maudite six cent sept fois environ. Pour s’éviter une réponse cinglante, elle s’était mordu l’intérieur de la joue, attendant patiemment (pas vraiment) la suite. « J'ai fais un déni de grossesse, j'ai quitté Caleb, j'ai accouché d'un petit garçon, je l'ai laissé à l'adoption et je me suis enfuie pour ne pas avoir à gérer. » Pardon ? Pour être directe, Alex était directe. Sans le moindre ménagement elle avait pris Emma à son propre jeu en n’utilisant pas de pincettes, mais cette dernière peinait à reconstruire le tableau. Elle était chez elle à Port Arthur lorsque tout ça s’était passé. Loin, bien trop loin de Brisbane. Soufflée, elle n’arrivait pas à se remettre de cette révélation, et ni les bruits de la foule ni Anabel leur faisant signe n’arrivait à la détendre. Rien. « Mais comme tu me l'as rappelé, on ne peut rien changer, alors quelques soient les raisons finalement c'est pas important. Ça ne changera rien au présent ou au passé. » Sur ce point Emma était toujours d’accord, mais dans la bouche d’Alex on y percevait une note de rancœur. Balayant quelques larmes du revers de la main cette dernière poursuivait finalement d’un « Tu es sûr que c'est une bonne idée ce que l'on fait là ? » qui fit ramener Emma sur terre. « Nous deux sans elle. » « Je … » La brune avait secoué le menton, sans trop savoir comment trouver les mots justes. « … pourquoi pas. On peut rattraper nos erreurs. » La Lawson ne s’en rendait pas compte, mais elle savait que son silence et sa froideur pouvaient être mal interprétés, et ç’avait beau être faux que de dire qu’elle n’en voulait pas à Alex d’avoir disparu, elle n’avait pas envie de voir sa tête au bout d’une pique pour autant. « T’es pas revenue pour rien je suis sûre. On ne s’envole pas autant d’années avec un passé si lourd pour revenir aux origines de ce qui t’as fait fuir pour repartir complètement de zéro. Je me trompe ? » Elle lui glissait un regard, sans trop savoir quoi dire ou faire pour arrondir les angles. Laissant volontairement de côté l’épisode sur le déni de grossesse –déjà parce qu’elle ne savait toujours pas comment réagir et ensuite car elle n’avait pas envie de plomber l’ambiance là où elle se savait aussi réconfortante qu’une porte de prison- Emma attendait pourtant de Clarke qu’elle fasse un pas vers elle, qu’elle comprenne qu’elle n’était pas fermée bien au contraire.

@Alex Clarke ♡ & Emma ⊹ You were a child Crawling on your knees toward him Making momma so proud But your voice is too loud We like to watch you laughing Picking insects off of plants No time to think of consequences

Si Alex avait craint ce moment avec Emma, elle ne s'était tout de même pas attendu à autant de froideur et surtout d'émotions. Les deux femmes auraient pu se contenter de s'ignorer et sourire à Anabel qui semblait heureuse de sa journée, mais il n'en était rien. Elles avaient été amies, elles avaient un passé commun, et elles avaient des choses à régler, des choses à se dire et peut-être aussi un peu à se reprocher. Surtout du côté d'Emma, puisqu'Alex avait tout simplement abandonné tout le monde. Et après son départ, c'était Emma qui avait du gérer les drames, gérer la maladie, gérer la mort de Rachel. Alex avait beaucoup à se faire pardonner, elle avait beaucoup d'excuses à formuler, et beaucoup de choses à tenter de rattraper. Et tout ne se ferait pas en une rencontre, surtout avec Emma qui exprimait sa colère avec une vraie froideur à l'encontre d'Alex. Mais si la discussion était compliquée et désagréable puisqu'elle mettait en lumière toutes les blessures des deux femmes, elle semblait indispensable alors qu'Alex faisait face à Emma pour la première depuis son retour. Elle lui devait des explications, elle lui devait des excuses aussi, chose qu'elle avait l'impression de passer son temps à faire. Mais avec Emma c'était quelque peu différent, et sans réellement savoir comment gérer toutes ses émotions, Alex se montrait à son tour froide et directe, peut-être un peu trop laissant sans voix Emma. Mais les choses étaient dites, les choses étaient claires, Emma savait. Elle comprendrait ou pas, elle accepterait ou pas, ce n'était plus du ressort d'Alex. Et l'Anglaise en venait à se demander si finalement, les deux femmes avaient raison de passer du temps l'une avec l'autre. Puisqu'elles semblaient en souffrir, que ce soit la brune ou la blonde, tout dans cette rencontre semblait douloureux, faisant remonter des souvenirs d'une autre vie.  

« T’es pas revenue pour rien je suis sûre. On ne s’envole pas autant d’années avec un passé si lourd pour revenir aux origines de ce qui t’as fait fuir pour repartir complètement de zéro. Je me trompe ? » Est-ce qu’Emma se trompait? Difficile à dire pour l’Anglaise qui avait souvent refusé de répondre à cette question et au fil du temps elle aussi avait un peu perdu de vues les raisons pour lesquelles elle était revenu ici. A l’origine elle avait choisi Brisbane comme destination en espérant y trouver la rédemption. En espérant pouvoir revenir sur les traces de son passé pour faire le deuil de ses erreurs et de ses choix pour pouvoir enfin se pardonner et avancer. Et puis pendant un temps elle avait eu l’espoir de retrouver sa vie d’avant. Mais très vite, elle s’était rendue compte que ce ne serait pas si simple. Que rien ne serait simple et surtout que rien ne serait comme le avant qu’elle avait connu. Il y avait des choses qui s’étaient cassées à jamais, des gens qui avaient disparu et Rachel faisait partie des relations qu’Alex ne pourrait jamais réparer. Rachel n’était plus là. Et un jour elle devrait accepter. Accepter l’idée qu’elle ne l’a reverrait jamais. Qu’elle ne pourrait jamais s’excuser. Qu’elle ne pourrait jamais lui dire combien elle comptait à ses yeux. Et si l’Anglaise n’était pas encore prête à faire son deuil d'une Rachel dont l'absence se faisait décidément trop cruelle pour bien des gens, Emma était là, bien vivante. Sa rancœur l’était aussi, vivante, palpable mais pourtant malgré sa froideur, elle n’avait pas envoyé chier Alex. Elle aurait pu mais elle n’en avait rien fait. « Nos erreurs ? Tu as fais quoi toi ? » Il était acté entre elles que le tact et la mise en forme n’était pas obligatoire alors elle n’y allait pas par quatre chemins. Emma faisait référence à des erreurs mais pas uniquement à celles d’Alex et peut-être un peu égoïstement, Alex espérait qu’Emma ait elle aussi des choses à se faire pardonner pour éviter d’avoir à répondre à l’autre question. Parce qu'Alex ne savait tout simplement pas ce qu'elle pouvait répondre. Son quota d'émotion était déjà atteint, depuis longtemps, Rachel, la grossesse, la mort. Les abandons successifs, de ce petit garçon dont elle a tu le nom, de Caleb, de ses amis.  C'était presque impossible pour l'Anglaise de ne pas se sentir submerger et elle n'était plus assez lucide pour se replonger dans les vrais raisons de son retour à Brisbane. Et elle n'était pas non plus prête à se replonger dans le chaos de ces derniers mois ou elle avait encore échoué dans bien des domaines. « Non tu te trompes pas enfin je crois. » Une réponse peu clair, mais c'était tout ce qu'elle pouvait donner à ce moment. La seule chose dont elle était sur, c'était qu'elle n’avait jamais vraiment voulu repartir de zéro. Elle aurait réellement aimé revenir en arrière mais pas tout effacer. Parce que tout effacer l'aurait obligé à renoncer à des relations auxquelles elle tenait. Elle ne voulait pas oublier Rachel. Elle ne voulait pas se priver de son lien avec Tim. Et, elle ne voulait surtout pas se risquer de devoir renoncer à Caleb. Son passé était douloureux, mais il était aussi pleins de souvenirs joyeux grâce à eux. Et c'était pour tout ça qu'Alex ne voulait pas repartir complètement de zéro. Mais parfois devoir s’excuser, s’expliquer était une épreuve dont elle se passerait bien. Et pourtant c’était inévitable. On ne pouvait pas disparaître du jour au lendemain pendant huit ans et revenir un beau matin dans la vie des gens qu'elle avait abandonné. « Je sais que ça changera rien pour toi. Mais je suis vraiment désolé Emma. » C’était à peu près tout ce qu’elle était en mesure de confirmer à Emma à cet instant. Leur complicité avait été mise à mal par tout un tas de chose. La distance, les années, et les choix d'Alex avaient entaché ce lien qu'elles avaient et si Emma semblait entrouvrir une porte, par respect pour le brune, Alex ne voulait pas s'y engouffrer trop rapidement. Le temps avait fait des dégâts, pas irrémédiable d'après les dires d'Emma et c'était finalement suffisant pour aujourd'hui. La glace avait été brisée, un peu brusquement mais c'était nécessaire pour les deux femmes. Et Alex n'avait pas pu ajouter plus de détails, qu'Anabel criait leurs deux prénoms comme si c’était un fait totalement habituel pour elle. Emma et Alex. La blonde relevait les yeux pour voir la petite tornade arriver vers elles. Le genou légèrement ouvert, mais un sourire sur les lèvres. « On a gagné. » Et elle répétait en boucle ces quelques mots finissant par partir dans un résumé plus ou moins complet du match. Alex regardait dans la direction d’Emma quittant quelques minutes mini Forbes du regard. Elle aurait encore tellement de chose à lui dire, mais toute l'attention était désormais sur Anabel qui venait réchauffer l'ambiance de sa présence et de sa joie de vivre. Tout sa mère. Et après plusieurs minutes à raconter son match de ses yeux d'enfants, elle avait demandé à Emma de venir l'aider à se changer. « Dis on peut manger une glace après ? Toutes les trois. S'il te plaît ? » La petite s'adressait à Emma, et Alex ne voulant pas s'immiscer n'avait rien dit, elle s'était contentée de regarder Emma, levant les épaules tout en attendant sa réponse. Peut-être que c'était ce qu'il leur fallait, relâcher la pression et passer ce moment avec Anabel, une glace à la main sans penser à tout ce qu'elles venaient de se dire. Rebâtir leur relation prendrait du temps mais avec Anabel qui semblait vouloir les rapprocher, rien n'était impossible. Si elles en avaient envie, elles pourraient faire abstraction de leur passé, pour tenter de retrouver une complicité qu'elles avaient déjà partagé.

Emma était persuadée que la présence d’Alex à Brisbane allait de pair avec une volonté de se racheter, ou du moins de renouer avec son passé, sans quoi elle ne comprenait pas bien le pourquoi du comment de son retour. La brune se doutait bien qu’elle n’était pas la plus affable, ni même la plus proche de l’anglaise, pourtant elle aurait aimé ne pas être prise pour le vilain petit canard, celle qui l’aurait envoyé sur les roses si elle avait essayé de dialoguer. Elles avaient été amies, et bien que le noyau central de cette amitié avait quitté ce monde beaucoup trop tôt, Emma demeurait persuadée qu’avec Alex elles avaient encore quelque chose à exploiter, un lien à tisser, aussi fragile soit-il. « Nos erreurs ? Tu as fait quoi toi ? » Sans préavis, sans mettre les formes (après tout la brune n’en mettait pas non plus) Alex était venue demander à la Lawson ce qu’elle avait à se reprocher à son tour. Il y aurait eu tant de choses à dire, ou peut être si peu. Tout dépendait du point de vue mais Emma n’avait pas été préparée à cette question, alors elle répondait par un balbutiement, se remémorant malgré elle ces quelques mois où elle était tombée dans la noirceur. « Je … ça concerne pas Rachel. » Non, car elle avait été là pour les derniers moments de la jeune maman. Ca la concernait elle, c’étaient ses propres erreurs, mais cela n’empêchait pas le fait qu’elle désirait faire pénitence. « Non tu te trompes pas enfin je crois. » Emma hochait la tête, ne ressentant toutefois aucune satisfaction à l’idée d’avoir eu raison. Le départ d’Alex l’avait beaucoup peinée, avait peiné Rachel, et les blessures n’étaient pas encore tout à fait refermées, alors revoir Alex était une épreuve. La chimiste ne savait pas encore comment se positionner, ni même quel sentiment elle pouvait s’autoriser à ressentir. Pour le moment elle oscillait entre la colère et la joie, la rancœur et la nostalgie, et c’était malgré elle qu’elle se montrait si froide, car dans les faits la chimiste n’avait jamais été très douée avec les contacts humains. « Je sais que ça changera rien pour toi. Mais je suis vraiment désolé Emma. » La brune hochait la tête, lui glissant un regard avant de venir attraper sa main du bout des doigts pour la presser un instant. « Tu te trompes. » Qu’elle s’excuse changeait beaucoup là où Emma ne l’aurait jamais fait. Elle y voyait une marque de tendresse, un pas vers elle, et si la journaliste avait compté à une époque alors quelque part au fond d’elle-même, son esprit étriqué et bien trop fier trouverait la force de lui pardonner son absence et d’en intégrer la raison. Elle l’espérait. « On a gagné. » Hein ? La petite voix (plus ou moins) d’Anabel était venue la sortir de ses pensées, les sortir toutes les deux d’ailleurs. Emma jetait un regard à la ronde, s’apercevant que le match était terminé sans qu’elle ne s’en aperçoive. Heureusement pour elle l’issue du match avait été positive et la petite Anabel se retrouvait désormais avec le sourire de la victoire sur le visage, et ce malgré son genou écorché. « Bravo championne ! » Un high five plus tard, la chimiste avait ébouriffé les mèches brunes de sa filleule, cette dernière profitant de son moment de gloire pour demander : « Dis on peut manger une glace après ? Toutes les trois. S'il te plaît ? » tout en glissant sa petite main dans la sienne, sachant pertinemment qu'il faudrait avant tout rejoindre les vestiaires. « Évidemment. Alex était justement en train de me dire qu’elle avait envie d’une coupe aussi grande que sa tête. » que répondait la brune en entraînant la gamine vers les gradins ; une virée en ville pour fêter cette victoire ok, mais pas avec ce degré de boue dans les cheveux. « Enfin avant tu vas passer sous les douches, et oublie pas d’utiliser du shampooing. » Beaucoup. Car mini Forbes n'y avait pas été de main morte pour décrocher la victoire.

- sujet terminé -