L'interview accordée quelques semaines plus tôt à la journaliste de Australian Men's Health, une jeune femme à  la peau brune qui pétillait d'une intelligence timide, s'était métamorphosée en un article élogieux sur le site internet du magazine. Une plateforme inestimable pour répandre les valeurs progressistes que prônait Chad dans sa salle de sport, et surtout en faire la publicité. Ce dernier s'était pris au jeu de la séance photos, posant comme il s'était déjà entrainé à le faire avec Madison, avec un savant mélange de réalisme et de surjeu, dans un décor aux couleurs chatoyantes. La journaliste avait fait le tour de la salle pour s'imprégner de son ambiance, questionné les membres de l'équipe autant que les adhérent.es sur leurs motivations. Dans son tailleur vichy beige, elle avait l'air d'une inspectrice d'école des années 70. Les jours suivants avaient paru long, comme lorsqu'on attendait impatiemment les résultats d'un examen. Chad s'était occupé tant bien que mal, continué le cours de sa vie, mais il n'y avait pas une heure de la journée où il n'était pas obsédé par la retombée de cet article. Personne ne leur avait promis une critique bienveillante. Le sujet de l'inclusion dans les salles de sport était le seul indice qu'on leur avait donné, et Chad était suffisamment confiant pour faire le pari qu'il faisait partie des bons élèves. Fran lui avait sauté dessus à peine passé l'encadrement de la porte. Il avait vraisemblablement parcouru l'article, et compte tenu de son enthousiasme, Chad pouvait se permettre d'être soulagé avant d'en faire sa propre lecture. « Venez comme vous êtes n'est pas la devise des salles de sport. Heureusement, des endroits tels que EveryBody à Brisbane changent la donne, en considérant le sport comme un droit humain. » pouvait-on lire dans le chapô de l'article. La moitié de la page était consacrée à la salle, ses coachs et leurs combats dans un milieu dévalorisant pour les minorités, puis déroulait une liste heureusement non exhaustive des autres endroits et associations qui luttaient pour des valeurs similaires. Cette fois, Chad ne pouvait se défiler à l'invitation de Brad de célébrer cette victoire dans un bar de la ville. Pour son associé, toute excuse était bonne pour faire la fête, mais il avait toujours du mal à digérer d'avoir échoué à convaincre Chad de se libérer le soir de ses quarante ans.

Habitant à quelques kilomètres, Chad prévoyait rarement des vêtements de rechange. Même si l'agencement avait été étudié pour faire des vestiaires un lieu sûr, il préférait se doucher chez lui après un ultime footing. Il avait donc promis à toute l'équipe de les rejoindre un peu plus tard, frais comme un gardon. Il lui avait fallu une vingtaine de minutes pour parvenir chez lui. En ce début de soirée, le soleil avait déjà raccroché les gants lui aussi, et les températures commençaient à décliner. Après une douche revigorante, Chad se glissa dans un jean et enfila un polo à manches longues qu'il réhaussa d'une veste, en jean elle aussi. A en juger par le dernier message de Brad, cela faisait une quinzaine de minutes qu'ils étaient arrivés au bar. En moto, il lui en fallait quarante de plus pour rejoindre le centre ville. L'inconvénient de vivre à Logan City, que Chad considérait rarement tant les avantages lui paraissaient inégalables. Il n'avait plus 20 ans pour passer sa vie dans les bars et arpenter la nuit. Lors de ces soirées inaccoutumées, Brad lui proposait généralement de l'héberger, si bien qu'il avait prévu d'emporter le nécessaire dans un sac à dos. Il arriva comme convenu quarante minutes plus tard. Dans le bar, l'effervescence était à son comble. Un îlot de chaleur et de froment flottait dans l'air. Les voix qui braillaient au karaoké se mêlaient au son des rires et des boules de billard qui ricochaient. Apercevant le groupe, Chad se faufila jusqu'à eux pour déposer ses affaires, et se défaire de la veste dans laquelle il étouffait. Visiblement ils avaient bien choisi leur soir, car la population semblait plutôt gay friendly et, de fait, peu vêtue. Le jeune Fran portait lui-même un débardeur si échancré qu'il laissait peu de place à l'imagination. « Je vais au bar, je reviens. » avait prévenu Chad en s'éloignant de la table pour se frayer un chemin. Sa taille était toujours un atout pour se repérer dans les attroupements. Parvenu au bar, il attendit patiemment son tour en s'accoudant au comptoir. Un homme aux cheveux poivre et sel était perché sur un tabouret à côté, et il ne lui avait pas fallu davantage qu'un coup d'œil pour réaliser qu'il avait lui aussi surestimé l'élégance de sa soirée. « Je suis rassuré de voir que je suis pas le seul à être trop habillé ce soir. » avait-il affirmé pour briser la glace. « Il y a un thème qu'on a oublié de me partager ? »

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Être un Wilson est une responsabilité en soi. Enfin... en théorie. C'est quelque chose que ton père a toujours essayé de te transmettre, et ce, sans jamais y parvenir, l'entreprise familiale et sa fierté à lui, ça ne t'a jamais intéressé. Et tu ne t'es jamais gêné pour le dire, le plus bruyamment possible tout en grandissant et même maintenant. Pour emmerder, pour ne pas faire comme les autres, pour te faire ta place, peu importe la raison qu'une ribambelle de psychiatre s'amuseront à trouver un jour, les faits sont que ton père et toi, vous avez beau partager le même prénom, vos ambitions sont bien différentes. Et le fardeau est retombé sur Miles, le plus jeune. Tu ne sais pas si c'est lui le plus bête ou le plus intelligent au final, cependant, des années plus tard, c'est bien lui à la tête de cette entreprise qui porte votre nom de famille et lui qui te rappelle que tu dois venir à certaines réunions. Même si tu lui as donné tes parts, même si tu t'en fiches, c'est pour ton bien et parce que visiblement, tu as promis. Quand exactement ? Tu as posé la question au téléphone ce matin-même et l'autre Wilson t'a dit qu'il n'avait pas le temps, que ta présence était requise, dans un costume qui plus est.
Tu n'as qu'à hocher la tête et jouer sur ton téléphone, oui, ton petit frère te gère comme le ferait une mère célibataire qui doit s'occuper seul d'un gamin turbulent. Et tu l'as fait, être sur ton téléphone, tu as seulement relevé la tête quand les chiffres, bon, ont été annoncés, et qu'il a fallu féliciter Miles. "Hey... moi je dis, c'est le moment de fêter tout ça, vous travaillez si dur, vous méritez une pause." Cela n'a pas été bien difficile de convaincre ton frère, ou même les employés présents. Ce qui explique bien pourquoi tu en es à ton troisième shot de tequila et pourquoi tu es es sur une scène, accompagnant ton frère pour ce karaoké improvisé. Autant dire que tu n'as pas besoin de l'écran pour beugler les paroles de you give love a bad name, merci bien, et quelques minutes et applaudissements plus tard, tu trouves le bar. Parce qu'il vous faut plus d'alcool et que la soirée ne fait que commencer, tu peux le sentir. Et personne ne pose jamais de question quand tu es celui qui paye, les regrets viendront plus tard. Beaucoup plus tard. Tu ne fais pas tant d'efforts que cela pour capter l'attention d'un des employés du bar, tu seras servi quand tu seras servi, vraiment, mais la personne qui s'adresse à toi... il a ton attention, immédiatement.
Et ce n'est même pas ton cerveau légèrement embrumé par les effluves d'alcool qui prend les commandes face au blond et tu laisses, avec un sourire, tes yeux se promener sur la silhouette du nouveau venu. Pour le détailler de la tête aux pieds, littéralement, d'une façon que certains trouveraient très malpolie, mais qui s'en soucie ? Et le sourire que tu as sur le visage en dit sûrement long sur ce que tu penses dans la présente. "Oh, c'est juste pour le bar et pour boire mon poids en shot de tequila... j'ai prévu d'être beaucoup moins habillé plus tard la soirée." Tu le dis sur le ton de la plaisanterie, tu restes tout à fait sérieux, d'ailleurs, s'il veut voir à quel point tu es sérieux, il n'a qu'à demander ou même te suivre jusqu'à ton côté de Brisbane. Ce qui est un peu risible, le très charmant jeune homme doit être accompagné, tu l'espères véritablement pour lui, et il doit être là pour se détendre après une journée de boulot. Ou pas ? Il a le droit à un sourire, parce que tu es de bonne humeur et tu pivotes sur ta chaise empruntée pour chercher ton frère et votre groupe du regard. Tu les pointes du doigt la seconde suivante.
"Je suis avec cette petite troupe-là. Je suis le trouble-fête qui leur a fait remarquer qu'il n'y avait pas d'alcool à leur réunion." Tu hausses les épaules, un faux air coupable passant sur tes traits. Tu ne te sens même pas désolé pour la gueule de bois que certains vont avoir dans quelques heures, au moins ils auront passé une bonne soirée. Ton regard retombe sur le blond l'instant suivant. "Et vous ? C'est quoi votre excuse ?" Pour sa tenue, pour sa raison d'être dans le bar, qu'il te dise tout, tu es soudainement intéressé et tu écouteras même ce qu'il dit. Pour de vrai, un fait rare quand on te connait.

Il fut un temps où Chad n'était pas étranger à ce genre de décor. A l'époque où il était encore marié à Kelly, et ses désirs réprimés chaque nuit passée ensemble, il lui arrivait de profiter de son absence pour sillonner les bars en solitaire dans l'espoir de trouver des bras dans lesquels s'assouvir. Il n'était pas fier de la tromper, mais ces quelques heures d'abandon semblaient accorder des mois de sursis à leur couple, et à sa libido capricieuse. C'était arrivé une poignée de fois, rien de sufisamment fréquent pour le faire culpabiliser des jours durant. Kelly était une femme conventionnelle et se contentait certainement de leurs rapports prémédités et sans extravagances. Se remémorer les traumatismes de sa sexualité lui donnait froid dans le dos. Chad se souvenait du stress que lui engendrait son devoir conjugal autant que la honte qu'il ressentait chaque fois qu'il se retrouvait dans le lit d'un inconnu. C'était une partie de sa vie inavouable qu'il préférait garder pour lui. La tendance s'était inversée depuis qu'il fréquentait Casey. Rares étaient les fois où il se bridait en sa présence. Son compagnon exerçait toujours un énorme pouvoir d'attraction sur lui, même dans les endroits les plus insolites. Chad blâmait une adolescence jamais tout à fait satisfaite, et Casey s'en accommodait très bien. Ce soir était différent. Se retrouver dans un bar en compagnie de ses amis, et sans la pression de devoir séduire à tout prix, était une toute autre expérience. La raison de leur présence suffisait à le faire flotter sur un petit nuage, et ce malgré la chaleur qui régnait dans la pièce. Chad n'avait pas particulièrement prévu de boire. Au-delà de son mode de vie sain, son obsession pour le contrôle le rendait extrêmement prudent et raisonnable. Il lui arrivait cependant des faire quelques entorses, surtout en présence de sa famille. L'alcool s'invitait souvent à Noël pour rendre le dîner plus supportable... ou plus décomplexé, selon qui se trouvait autour de la table.

Chad ne remarqua même pas la façon dont l'inconnu l'avait détaillé de la tête aux pieds. Les gens le faisaient souvent pour accentuer sa taille de façon un peu lourde, au cas où il n'aurait pas remarqué, qu'il était grand. Naïf, il avait mis ce geste sur le compte de l'intérêt que l'homme portait à sa tenue, bien moins formelle que le costume que lui-même portait avec distinction. S'il devait deviner, Chad dirait que l'homme travaillait dans le droit ou la finance, ou occupait même un poste éminent à l'université, et venait se détendre après une journée de travail qui s'était éternisée. Ou bien dentiste, à en juger par son sourire immaculé ? Il dégageait dans tous les cas un charisme magnétique. « C'est donc ça qu'on boit ici, de la tequila. Quelque chose à fêter ? Ou à oublier ? » Selon Chad, il n'y avait pas véritablement de raison moins dichotomiques de s'abandonner à l'alcool. « Certains ont déjà passé l'étape d'être moins habillés. » avait-il fait fait remarquer en tournant la tête vers un couple de jeunes, autour de la vingtaine, qui avait jeté son dévolu sur Fran. Le regard de Chad suivit la direction que l'homme lui indiqua du bout des doigts. Un sourire amusé étira ses lèvres. « Ils n'ont pas l'air de trop subir. » dit-il en se tournant à nouveau vers le bar. Son buste pivota de l'autre côté pour désigner la bande de gais lurons qui l'accompagnait. « Je suis avec le groupe là-bas. Le trouble-fête c'est le grand brun qui ressemble un peu trop à Clark Kent. » Chad s'en amusait d'autant plus lorsque son associé portait des lunettes pour exécuter ses tâches devant un écran d'ordinateur. « Je gère une salle de sport à Logan City, et on a eu droit à quelques éloges dans un article de presse. Pour le coup ça m'a semblé une bonne excuse pour peut-être ouvrir un peu plus tard demain. » dit-il pour justifier sa présence à son tour. Il ne duperait personne de son entourage, mais l'homme pourrait le croire intrépide et spontané. « Moi c'est Chad. » renchérit-il en tendant une main amicale.

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Miles te le dirait très certainement s'il te voyait faire : tu as passé l'âge de draguer dans les bars. Véritablement, la discipline devrait être réservée à ceux qui n'ont pas brisé autant de cœurs que toi, qui n'ont pas autant d'enfants que toi... et qui, de manière générale, ont de meilleures intentions que toi. Ce n'est pas si difficile que cela pour la dernière condition, tu es la personne la plus égoïste que tu connaisses, les histoires des autres et leur vie un peu triviale t'ennuient très rapidement à dire vrai, et ce n'est pas comme si cela te manquait. Non, vraiment pas, les hauts et les bas des relations, très peu pour toi ? Avoir un partenaire ce n'est pas que des prises de tête, tu le sais, tu l'as vécu, tu serais un hypocrite fini si tu te concentrais uniquement sur le négatif, mais comme pour tout, certains sont faits pour cela et d'autres non. Tu es fait pour être seul, pour ne pas t'attacher et c'est cliché, mais les bars regorgent de personne qui cherchent exactement la même chose. Une bonne nuit d'exercices passée sous les draps avec un inconnu et tout repart, oui, c'est ton diagnostic de médecin.
Et c'est bien pour cela que tu offres un sourire au blond la seconde suivante, répondant à sa première question. "Alors sachant que je suis neurochirurgien, des fois, je peux boire pour les deux raisons et dans la même journée alors..." C'est une blague qui est tirée de ton vécu, malheureusement, vu ton métier les réussites et les échecs se traduisent par un prolongement d'une vie ou la fin de cette dernière. Il n'y a pas vraiment d'entre deux dans ce que tu fais, une des raisons pour laquelle tu adores ton métier, mais cela le rend également trop terrifiant et juste trop pour certains. Et c'est un bon moyen d'expliquer à ce charmant inconnu que tu en as beaucoup sous le crâne, tu ne sais pas juste mieux flirter que la moyenne. Tu te tournes légèrement pour observer le groupe qu'il te montre, avant de dériver vers Miles, qui a le sourire aux lèvres, il n'a pas besoin de toi, une bonne chose. Tu peux reprendre ta position initiale, poussant ton petit frère de ton esprit. "C'est ça l'avantage d'avoir quelques années de moins, les conséquences paraissent et sont moins tragiques." Ou alors on peut juste se foutre de tout, comme toi.
"Et la gueule de bois n'est qu'une légère migraine." Cela, tu l'ajoutes avec un léger rire, c'est la vérité, tu vas avoir besoin de beaucoup d'eau et de paracétamol dans quelques heures. Ce sera le problème du Heath de demain, le sien et celui de ses collègues au St Vincent, pour le moment, tu as un peu envie de rire en réalisant que tu essayes de draguer le gérant d'une salle de sport. Au moins, ça explique les épaules, et tu peux être certain qu'il ne sera pas désagréable à regarder sans son t-shirt. Pas désagréable à regarder du tout..."Salle de sport carrément ? Et moi qui me trouvais inadéquat, je vois qu'on joue dans deux catégories complètement différentes." Ce qui n'est pas une mauvaise chose, et enfin, tu as un prénom. Chad, Chad qui te tend la main, que tu serres aussitôt, ne le quittant pas du regard. "Enchanté... Heath." Les présentations sont faites, tu ne sais pas si c'est son véritable prénom, tu as assez d'âge au compteur pour savoir que les gens aiment bien utiliser des alias ou des pseudos dans ce genre de situations, mais au moins, il ne sera pas juste le blond pour le reste de la soirée. "Du coup, vous n'avez toujours pas commandé, c'est quoi votre poison ?" Évidemment, tu l'incites à boire juste un petit plus, pour qu'il pense que tout ça, continuer de te parler, potentiellement te suivre dans un autre endroit ou même chez toi... c'est la meilleure idée du siècle. "Oui, j'aime savoir quelle boisson j'offre aux gens qui m'ont tapé dans l'œil." Que tu ajoutes, toujours sans perdre ton sourire.

La dernière théorie de Chad s'avéra presque juste, lorsque l'homme lui confia en toute décontraction être neurochirurgien. S'il n'avait pas déjà éveillé tout son intérêt, cette révélation acheva de le rendre fascinant à ses yeux. Fils de fermier un peu complexé par ses origines, Chad adorait les mondanités et les gens auxquels il les associait de façon tout à fait arbitraire et fantasmée. Un médecin avait forcément des goûts distingués et une vie aisée. Ce qu'il avait toujours recherché inconsciemment en s'entourant de beau monde, quitte à jouer un rôle. Ce Chad opportuniste avait commencé à disparaître depuis son divorce, et surtout depuis que la modestie de Casey ruisselait sur lui chaque jour. Mais il ne pourrait jamais tout à fait la réprimer, à moins de faire une croix sur la ville et ses tentations. « Neurochirurgien... impressionnant. Je connais aucun médecin dans mon entourage, pour moi ça reste des êtres inatteignables. Si j'avais su que vous fréquentiez aussi les bars comme tout le monde. » avait-il déclamé très sérieux. Aidés par la télévision, les médecins exerçaient un pouvoir de fascination sur les gens. Du moins lorsqu'ils étaient compétents. Chad devait bien reconnaître que moins il fréquentait leurs cabinets, mieux il se portait, car il avait fait de son corps et de sa santé la vitrine de son travail. « Ce soir c'est pour célébrer ou oublier ? » avait-il demandé par curiosité. « Ou les deux ? » Chad buvait rarement pour oublier. Il associait l'alcool au partage et à la dégustation. L'héritage d'avoir partagé la vie d'une œnologue. Lors de ce genre de soirées, la pression sociale rendait ses habitudes de vie ennuyeuses, et s'il s'en fichait bien d'ordinaire, il estimait la raison de sa présence suffisamment légitime pour faire quelques entorses à ses principes. « Ca doit être pour ça que je bois de moins en moins. Mon vieux corps anticipe déjà le lendemain. » Sans s'en rendre compte, Chad faisait souvent en sorte de se faire mousser auprès des autres. Il n'était pas particulièrement humble, ni même insouciant de ses atouts. Sa clientèle, il se l'était forgée principalement en usant de ses charmes, avant de la fidéliser par son professionnalisme. Il avait l'impression que l'inconnu utilisait les mêmes ficelles, si bien qu'il n'hésitait pas à répondre à cette fausse modestie avec toute la naïveté du monde. « Inadéquat ? Pas du tout. » En soit, Chad avait conscience que le coach sportif avait aussi cette aura magnétique dans l'imaginaire collectif. On leur prêtait souvent un sacré tableau de chasse. « Je suis aussi pompier volontaire, il m'arrive de fréquenter l'hôpital mais en général je ne dépasse pas les portes des urgences. » avait-il ajouté, comme un pont qu'il dressait entre leurs deux existences opposées. Lui-même avait investi les lits de l'hôpital, car son métier comportait des risques auxquels il s'exposait constamment. En quelque sorte, il espérait que cette dernière révélation suffirait à le hisser plus près des rangs d'un neurochirurgien. « Eh bien enchanté Heath. » dit-il sans rompre le contact solennel de leurs mains. La sienne était sans doute moite dans cette ambiance chaleureuse. Loin de réaliser que Heath flirtait tout à fait avec lui, Chad avait plutôt l'innocence de croire qu'il parlait de sa personnalité, lorsqu'il reconnaissait lu avoir tapé dans l'oeil. Lui non plus ne se départissait pas d'un sourire de circonstance. « Est-ce que j'aurais l'air trop précieux si je demandais une margarita ? » Il n'était pas certain d'en avoir quelque chose à faire, de détonner avec l'image virile qu'on prêtait à un grand gaillard comme lui.

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"La chance, il y a beaucoup trop de médecins dans mon entourage, on échange nos vies quand tu veux." Et cela, ce n'est même pas une ligne clichée pour impressionner l'homme à quelques centimètres de toi. Chad ne sait pas à quel point cela est barbant parfois de parler avec d'autres confrères, qui voient tout en absolu, en noir et blanc et qui aiment te rappeler à quel point ils sont importants et bien placés. Toi ? Tu as toujours été arrogant, ton titre de neurochirurgien ne t'a pas aidé à le devenir, certes, ça n'a pas arrangé les choses, mais tu as la présence d'esprit de garder le jargon médical aux couloirs du St-Vincent. Et surtout, tu sais décrocher et faire la part des choses. L'homme que tu es devant tes patients, celui qui s'occupe des vies humaines et des chances de survie de beaucoup, n'est certainement pas la personne qui est en train de flirter avec Chad.
Encore heureux, sinon, tu aurais beaucoup de questions à te poser et tu es sûr et certain que ton cerveau finirait par exploser. Il faut bien tout séparer et là, ce soir, tu es là pour t'amuser et ne penser à rien. Ce sera un bonus, oui vraiment, si tu repars avec quelqu'un et Chad n'est pas encore allé retrouver son groupe d'amis à lui alors... peut-être que tu n'as pas perdu la main pour ce genre de choses. "Il faut une raison pour boire ? On est quel jour de la semaine déjà ? On va dire que c'est ça la raison." Tu as un léger rire et tu délaisses Chad et ses traits anguleux quelques instants pour jeter un coup d'œil à Miles. Pris dans une conversation avec un de ses collègues, tu ne sais pas qui lui a mis une autre bière entre les mains, n'était-ce pas ton rôle ce soir ? Peu importe, il se débrouille très bien sans toi et il a l'air beaucoup plus détendu qu'il y a quelques heures. Donc, tu te tournes de nouveau vers Chad. "Non, c'était un bon mois pour la compagnie visiblement." C'est tout ce que tu diras sur le sujet, pas besoin de raconter ta vie à un parfait inconnu et ce même si le dit inconnu est très charmant. Les chances pour que vous vous croisiez de nouveau sont très minces, Brisbane est une grande ville après tout, et qui vient se perdre deux fois de suite dans le même bar ? Les gens sans absolument aucun goût, voilà qui.
"Toi ? Vieux ? Tu t'en sors bien pour le moment..." La phrase est ponctuée par un autre clin d'œil et même si Chad te trouve un peu lourd, il ne le manifeste pas, il n'a pas encore fui et quand enfin, les mains sont serrées, tu le fais avec un sourire sur le visage, ton regard dans celui de l'homme plus jeune que toi, et sa nouvelle question. "Déjà, qui en a quelque chose à foutre ? Même un cocktail rose bonbon avec une ombrelle ne va pas entacher ta virilité." Et, on est en 2023, les gens n'essayent pas de se battre justement contre ce genre de clichés en s'insurgeant en ligne et avec leur téléphone à la main ? Toi, tu t'es toujours moqué de l'image que tu renvoyais, bien conscient d'être privilégié. Ouais, t'es juste un autre homme blanc né avec un héritage qui t'attend depuis longtemps et vu que Chad est logé à la même enseigne que toi, il devrait être aussi imbu de sa personne que toi, c'est une bonne leçon de vie, ça. Tu n'es pas là pour être moralisateur et tu te contentes de faire un signe de la main au barman. "Deuxièmement, de la tequila et du triple sec ? Je pense que ça va, tu t'en sors bien, et puis c'est mon cocktail de prédilection quand je n'ai pas envie de me prendre la tête." Ce qui arrive très souvent. L'employé vous fait face l'instant suivant et tu commandes pour vous deux. "Un round de margarita s'il vous plait." Tu trouves ton portefeuille tout aussi rapidement, le billet glissant sur le comptoir et pour l'employé, toi, tu es déjà tourné vers Chad.
"Je m'occupe de l'addition, tu pourras me rembourser autrement." Et tu as certainement l'air un peu trop détendu pour quelqu'un qui flirte sans aucune finesse.

La répartie de Heath lui arracha un sourire entendu. Il le croyait sur parole, et même si une partie de lui aspirait à cette vie mondaine, Chad demeurait attaché à ses origines. En s'élevant socialement, il avait déjà eu l'impression de renier l'éducation de ses parents. Une éducation pourtant chaleureuse malgré ses aspects conventionnels. Il avait eu de la chance, de grandir dans un environnement si vaste, où on il avait appris à toujours repousser les limites, physiques ou invisibles. C'était ce qu'il faisait chaque jour. « Sans aller jusqu'à échanger nos vies, on pourrait commencer par échanger nos cartes de visite. C'est qu'à moitié pour le business, promis. » dit-il en extirpant de sa poche une carte estampillée du logo de EveryBody. Il en avait toujours sur lui, en prévision de ce genre de rencontres fortuites. Pour lui, le travail ne s'arrêtait pas à la lisière de son établissement. « Il y a des gens de tous les horizons à la salle qui adorent sortir de temps en temps. L'avantage de venir de différents milieux, c'est qu'on parle jamais boutique. Libre à toi de venir te changer de ton entourage quand tu veux. » Chad serait bien entendu ravi de compter un membre de plus, mais il avait surtout entendu le souhait de Heath de se dépayser. Lui-même connaissait ce besoin de s'extraire de sa classe sociale, ne serait-ce que pour réaliser ses privilèges. Déposant la carte sur le comptoir, il la glissa dans la direction de son interlocuteur comme un jeton de poker. Dans son rapport à l'alcool, Heath semblait bien moins raisonnable que lui, pour un médecin du moins. De fait, Chad avait tendance à fréquenter des personnes modérées, et les rares exceptions faisaient de bien piètres modèles. Dans son entourage, c'était tout ou rien, et il devait admettre être curieux de découvrir si Heath avait trouvé le bon compromis. « Alors ça nous fait une bonne raison à tous les deux. » se surprit-il à répondre. Etrangement, il aurait voulu trinquer à ce constat, et se trouva bien démuni sans verre à la main. En baladant son regard, il remarqua que le barman était encore occupé ailleurs, secouant son shaker avec une extrême dextérité. La façon dont il servait ses verres sans en renverser une goutte défiait toutes les lois de la physique. Comme il s'y était attendu, Heath le flatta, et même si Chad était conscient d'être bien conservé – il travaillait sur son apparence tous les jours – il ne se lassait jamais d'entendre que ses efforts n'étaient pas vains. « Quel âge tu me donnes ? » demanda-t-il pour pousser le compliment encore plus loin. Quoique ses cheveux le trahissaient, Heath ne déméritait pas, et donnait au contraire cette impression d'être sans âge. Ni jeune, ni tout à fait vieux, juste une âme pleine de sagesse dans un corps mûr. Sa réponse le démontrait. Chad aurait voulu le tester qu'il n'aurait pas pu mieux s'en sortir. « J'avoue que ça fait longtemps que j'en ai plus rien à faire. Mais bravo, tu m'as donc l'air d'être tolérant, en plus d'être intelligent. » Le glorifia-t-il à son tour. Chad avait grandi dans un environnement machiste, où les émotions et les failles n'étaient pas du ressort des hommes. Son père, ses frères, ses collègues de l'Hibiscus ou de la caserne, tous avaient des notions bien tranchées de ce qu'était la virilité. C'était ce qu'il avait voulu fuir et déconstruire en créant sa propre salle de sport. « Et généreux en plus de ça. Je te le revaudrai, pour sûr. » s'engagea-t-il tandis que le barman s'activait à leur concocter leurs boissons. « Alors dis-moi, tu es originaire de Brisbane ? »

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crédit/(pedrettigifs/tumblr) ✰ w/ @Chad Taylor

Il y a des choses que tu n’oublieras très certainement jamais. Comment tenir chacun des scalpels que tu utilises au bloc, la constante d’Avogadro, dans quelles solutions tu dois ranger tel ou telle coupe du cerveau, et ça... mais si, ce truc, le flirt pas du tout innocent et totalement évident et ce même si tu ne t’es pas prêté à l’exercice depuis longtemps. Depuis quelques semaines il te semble, parce que tu étais occupé et que visiblement, être neurochirurgien ça veut dire oublier de vivre. Pas pour toi et définitivement pas comment tu le fais. Tu bois sûrement trop pour quelqu’un de ton âge mais tu t’en fiches, comme tu te fiches de passer pour le type le plus bourru de l’univers ou des vilaines conséquences qu’il y aura le lendemain matin. Cela n’entre vraiment pas en compte quand tu sembles avoir l’attention et toute l’attention de Chad en plus. Un rire t’échappe alors qu’il te tend une carte de visite, c’est très professionnel et très honnête de ta part, mais toi dans une gym? Hmm, cela ne risque pas d'arriver, et ce même si tu pourrais lui expliquer, dans les détails en plus, tous les bénéfices de l’activité physique en fait, mais ce n’est pas pour autant que cela t’intéresse. Vu le nombre d’heure que tu dois passer sur tes deux pieds à ton boulot, tu donnes suffisamment de ta personne en fait.
“Et tu caches des cartes de visite dans ta veste pour toutes les occasions ou c’est juste moi qui suis spécial, hmm ? Ne réponds pas à cette question au fait, mon ego n’a pas besoin de connaitre la réponse en réalité.” La carte de Chad est récupérée, il te faut plus de temps pour dénicher la tienne au fin fond de ton portefeuille et l’échange est fait. C’est ton vrai numéro de téléphone pour le coup, même pas une blague ou une arnaque pour qu’il ne puisse pas te retrouver le lendemain. Qu’est-ce que tu as à perdre de toute façon ? Quelque chose te dit que tu ne regretterais pas une nuit ou même plusieurs avec Chad, du tout même. “Toute discussion en dehors des murs du St Vincent est une pause, vraiment, je n’exagère même pas.”  Le domaine médical a ses avantages et ses inconvénients et de ton expérience, la plupart de tes collègues ne savent malheureusement pas décrocher et passer à autre chose. Toi ? Tu as toujours su faire la part des choses et pas de doute que si Chad te voyait dans les couloirs du St Vincent, il ne te reconnaitrait très certainement pas. Le Docteur Wilson est une personne complètement différente, il le faut bien, car après tout, le Docteur Wilson sauve des vies et au quotidien. Maintenant dans ce bar ? On est bien loin de cette réalité-là, tu le sais, ça ne fait pas de toi un monstre que de te moquer des autres quand tu n’es pas payé pour le faire, ça ne te rend même sain de vouloir chercher des distractions.
Chad a l’air d’en être une de belles distractions, sinon tu n’insisterais pas autant à vrai dire. “Hmmm ? La trentaine passé au moins, mais je ne dirais pas plus... et c’est à moitié la vérité, un peu la margarita et aussi moi qui essaye de gagner quelques points de sympathie, genre vraiment.” La flatterie ouvre toutes les portes, du moins, ça a toujours été le cas chez toi et tu te dis que ce qui fonctionne avec toi doit très bien fonctionner avec les autres. C’est logique en fait, tellement logique que lorsque le barman pose vos verres devant vous, tu lèves le tien sans aucune hésitation. “Est-ce que je suis tolérant ou alors est-ce une bonne excuse pour me retrouver dans le lit de qui je veux quand je le souhaite? Une autre question à laquelle il ne faut pas répondre.” Tu dis cela avant de trinquer tout seul, tu fais claquer ton verre contre celui de Chad sans autre préambule avant de prendre une gorgée. Hmm, le barman n’y est pas allé de main morte avec l’alcool pour votre tournée, ce qui est autant une bonne qu’une mauvaise chose en réalité. “Et yep, je suis né ici, j’ai grandi ici, et je vais sûrement mourir ici si tu veux tout savoir.” Tu hausses les épaules, pas prêt à raconter toute ta vie et sincèrement ? Elle n’est pas si intéressante que cela, surtout si vous ne vous revoyez pas après ce soir.  “Mais, vu que je paye les verres et que tu as aussi l’air très intelligent, si on sautait l’étape des vingt questions pour passer directement aux choses sérieuses, tu en dis quoi ?” Cela est dit avec un autre type de sourire sur ton visage, alors que tu poses ton regard clair sur Chad. 

Chad était aussi doué pour la drague qu'il ne l'était pour détecter ses usages. Cette naïveté lui avait valu d'être un coach personnel particulièrement apprécié d'une clientèle – des femmes d'âge moyen, souvent ennuyées dans leur mariage – avec laquelle il entretenait malgré lui l'ambiguité. A l'époque, sa parade langoureuse avec Kelly avait fait grincer des dents ses camarades les plus entreprenants qui, à l'instar de Rhett, n'hésitaient pas à multiplier les conquêtes. C'était ce qui avait fait le charme et le ciment de leur relation, d'être à la fois si pudiques et si ostensiblement amoureux. Même avec Casey, la flamme avait brûlé timidement un long moment avant de s'embraser, ce soir où ils avaient consommé des semaines de tension. De ce point de vue, Chad manquait de la fougue de ses frères, qui s'encombraient bien moins de la galanterie presque anachronique à laquelle il était attaché. Organisé et pointilleux, il faisait les choses dans l'ordre, et ne s'autorisait que rarement à sortir du cadre bien rangé de ses convenances. En tendant cette carte de visite, Chad n'accomplissait rien d'autre qu'un devoir professionnel, même si ce dernier avait tendance à se confondre avec sa vie personnelle.« J'en ai en toutes circonstances, mais je les offre pas à n'importe qui. » s'était-il fendu malgré tout pour rassurer Heath sur son statut un brin privilégié. En dépit de sa tolérance, valeur qu'elle prônait constamment, la salle de sport n'était ouverte qu'à celles et ceux qui promettaient de la respecter. Chad ne la vendait pas à tout le monde, et se révélait être doué pour cerner la personnalité des gens. Il attrapa volontiers la carte que son interlocuteur lui cédait en retour, la rangeant dans la poche de son jean après l'avoir scannée du regard. « Tu n'es donc pas du genre à ramener du travail à la maison ? C'est un peu mon vice, mais j'imagine que c'est le lot de tous les jeunes entrepreneurs... » Contrairement à lui, et à des ambitions longtemps refoulées par la peur d'échouer, son entreprise était jeune et florissante. De son réveil en passant par ses assiettes et jusqu'au coucher, Chad vivait pour le sport, et pour transmettre ses bienfaits aux autres. Il n'avait pas honte de dire qu'il était un bourreau du travail, surtout lorsqu'il en était lui-même la vitrine. La réponse de Heath, tout à fait conventionnelle et prévisible, avait tout de même su faire mouche. « Ok je sais que tu me flattes, mais je prends quand même. » dit-il en se fendant d'un sourire enjôleur. Ils trinquèrent aussitôt leurs verres déposés sur le comptoir. « J'espère que tu l'es vraiment, mais j'ai le temps de le découvrir. » avait-il ajouté avant d'absorber quelque gorgées salvatrices. Les intentions de Heath, de moins en moins subtiles, finirent par lui apparaître comme par magie, et Chad s'en voulut instantanément d'avoir pu être si crédule. Visiblement, personne ne payait des verres aux inconnus par simple bonté d'âme, pas même un chirurgien. « Ah donc c'est pas tout à fait désintéressé de ta part. » s'exclama-t-il comme s'il venait subitement d'être ramené sur terre. « Je suis désolé si j'ai pu envoyer des signaux mais je suis en couple, et plutôt du genre fidèle. » précisa-t-il en engloutissant le reste de son verre. « Je paye la seconde tournée, histoire de remettre les compteurs à zéro. » Une fois leurs verres servis, il s'excusa de devoir abandonner Heath pour retrouver sa bande, dont une partie avait déjà investi la piste de danse. Posté devant une table haute, il les observait du coin de l'oeil, se surprenant parfois à vérifier où était Heath dans la foule, et à espérer étrangement qu'il le surveillait en retour. Chad ignorait d'où lui venait ce besoin compulsif de se sentir épié, désiré, comme si les arrières pensées de l'homme avaient fini par éveiller une envie de plaire à nouveau, juste pour consoler sa fierté. Après quelques tournées de shots commanditées par Brad, Chad se retrouva à son tour au milieu de la piste de danse. Il faisait chaud, et son esprit désinhibé par l'alcool se laissa porter par la musique. Au bout de plusieurs minutes, il se retrouva par un heureux hasard à une distance dangereusement proche de Heath. Son cœur tambourinait dans sa poitrine lorsque leurs regards se croisaient, comme propulsé par l'adrénaline qui se répandait par décharges dans tout son corps. Poussés par la foule, leurs bustes finirent bientôt par se toucher, et Chad se sentit inéluctablement attiré vers lui.

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{a little party never killed nobody}
crédit/(pedrettigifs/tumblr) ✰ w/ @Chad Taylor

Tu es assez âgé pour savoir que les gens viennent se presser dans ce genre d'endroit pour oublier le monde extérieur. Oui, la musique est forte, oui, il y a du monde et oui, les cocktails sont un peu trop coûteux et n'importe qui pourrait boire pour moins cher et chez soi. Mais les gens, comme Chad, comme toi, ne sont pas chez eux ce soir pour des raisons précises et c'est bien pour quelques minutes à jouer les idiots et à oublier les responsabilités. On ne peut pas vraiment te blâmer de fuir la "vraie vie" avec le métier que tu as et tu redeviendras sage et raisonnable dès que tu auras passé les portes du bar. Ou que tu retrouveras ton lit et qu'il te faudra songer à soigner ta gueule de bois. Tout ceci, ce sont des problèmes pour demain, pour le moment où le jour se lèvera. Pour le moment, tu ne vois que ton verre et Chad et tu te dis que c'est une bonne combinaison. Surtout que l'autre homme accepte les compliments et le fait que tu sois direct n'est pas mal pris. C'est tout le contraire, cependant, Chad te donne une autre information cruciale le concernant, une information qui n'a absolument rien à voir avec son physique, malheureusement. En couple ? Le contraire t'aurait déçu et étonné mais... à qui est-ce qu'il fait le rappel ? À toi qui viens juste de débarquer dans sa soirée ? Ou lui qui était en train, et ouvertement, de flirter avec toi ?"En couple et plutôt du genre fidèle, c'est noté... je suppose que ton partenaire n'est pas là ce soir ?" Que tu dis en ayant un geste de la main pour le reste du bar. Tu n'as pas besoin qu'il confirme ta supposition, si c'était le cas, votre conversation se serait arrêtée depuis longtemps, ça tu en es persuadé.
Mais Chad paye la seconde tournée et tout ce que tu peux faire c'est le remercier pour ton verre, lâcher : "Je n'insiste pas." et chercher le groupe avec qui tu es venu. Miles et ses collègues ont l'air beaucoup plus détendus après quelques verres et personne n'a envie de repartir. Parfait. Tu te fais une note mentale d'appeler un taxi pour tout le monde, hors de question de laisser les gens remonter dans leur véhicule, tu es bien certain que cela ne dérangera personne que les voitures restent sur le parking pendant quelques heures, et tu payeras même les amendes s'il le faut. C'est la dernière pensée adulte et responsable que tu as avant d'attraper tous les verres qu'on te tend et toi aussi, d'oublier ta journée. La beauté de l'alcool, on dit adieu à toutes ses inhibitions et on croise le regarde une fois, deux fois... okay trois fois, de Chad, le type en couple, rangé et fidèle. À d'autres, que tu te dis à plusieurs reprises, son partenaire devrait lui apprendre à ne pas regarder d'autres hommes de la sorte, cela pourrait vraiment se retourner contre lui. Tu es d'humeur joueuse et légère, obligé après autant de tequila et quand toi aussi, tu rejoins la piste de danse, tu remarques bien évidemment ta proximité avec Chad, évidemment. On te pousse, tu te rapproches, et c'est assez pour que tu prennes ta décision.
"Dis donc... un peu plus et on pourrait avoir l'impression que tu fais exprès de me chercher." Tu te penches pour murmurer cela directement dans son oreille, cela rend les choses plus compliquées. Ou très simple que tu te dis en posant ta main droite sur l'épaule de Chad."Ou de te rapprocher." La musique est forte, tout le monde s'amuse et bouge autour de vous et tu lui adresses un léger sourire avant que ta main quitte son épaule pour trouver son menton."Je vais mettre fin à ta peine mon grand." Ta phrase est à peine finie que déjà, tes lèvres viennent se presser contre celle de Chad. Tu profites de la surprise, du moment, de la musique et de l'alcool pour l'embrasser correctement. Et comme tu voulais le faire depuis que tu es venu t'accouder à ce bar et qu'il a capté ton regard. C'est fait et tu recules avec le sourire, lui tapotant la joue. "Voilà, bonne soirée." Tu le lâches, tournant les talons et retournant à ta table. Au moins, il aura quelque chose de plus à raconter à son partenaire.