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@marley lynch

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Les allers et retours entre Brisbane et Sydney avaient toujours fait partie des habitudes d’Ezra, et ce depuis des années maintenant. Si une bonne partie de la fratrie habitait dans le Queensland depuis une décennie désormais, ce n’était pas le cas de leur père et ils avaient donc tous eu l’habitude de retourner sur le territoire de leur enfance ici et là, quand les besoins se faisaient pressants ou l’envie présente. Avec le temps, c’était devenu presque une étape obligatoire à tous les quelques mois, afin de reprendre aussi contact avec les connaissances qu’il pouvait avoir sur place - d’anciens copains du lycée, des personnes avec qui il avait grandi et d’autres encore. Créchant dans ce qui était sa chambre d’adolescent, Ezra ne se privait pas de faire une pierre, deux coups, et de profiter d’avoir un pied-à-terre sur place pour y rester quelques jours et faire le tour du carnet d’adresses. Ces derniers temps cependant, pour Ezra, ce n’était pas réellement par envie qu’il se rendait à Sydney et ce serait même bien passé d’avoir à y mettre les pieds, bien que certaines de ces vieilles habitudes lui manquaient. S’il s’était rendu plusieurs fois à Sydney ces dernières semaines, c’était surtout parce-que Ginny, la mère de son fils, était portée disparue depuis autant de temps et qu’il y avait des étapes de ces recherches qui se passaient sur place, à Sydney. Et puis une bonne partie des affaires du gamin se trouvaient là-bas, ainsi que ses souvenirs d’une année passée aux côtés de sa mère alors que cette dernière n’avait pas été anticipée non plus; il n’avait pas d’autre choix que de faire la navette entre les deux villes pour s’assurer de la bonne continuité de la vie, en réalité.

Lors de son dernier voyage sur place cependant, il s’était octroyé un temps mort afin de souffler quelque peu et de prendre un peu de recul sur toutes les situations qui s’étaient enchainées ces derniers temps. Entre les rides sur le front que lui causaient la disparition de Ginny, et celles qui s’ajoutaient à tout ça avec la naissance d’Alice, il était vrai qu’Ezra avait eu l’impression de courir partout et de ne pas avoir le temps de se poser un instant - tout ça sans oublier qu’il gérait un garage en parallèle et qu’il n’avait pas récupéré sa forme physique à son maximum, il n’aurait jamais pensé que c’était à son âge qu’il mènerait ce type de vie. Il avait donc profité de son passage à Sydney pour reprendre contact avec de vieux copains à lui, et c’était sur Milton que la responsabilité de divertir un peu Beauregard était retombée. Ils avaient passé une bonne soirée, avaient pu partager les dernières nouvelles des deux familles - plus Ezra vers son ami que l’inverse, mais les conditions étaient ce qu’elles étaient -, et rentrer chacun chez eux dans un taxi en titubant quelque peu. Cette fois-ci cependant, Milton était réapparu auprès de son ami avant qu’il ne reparte pour Brisbane, se proposant de l’accompagner à l’aéroport alors qu’il avait un quelque-chose à lui remettre.

C’était donc avec cette enveloppe confiée par Milton en mains que plusieurs jours après son retour plus au nord sur la côte, qu’Ezra s’était dirigé vers Oxlade Drive alors que la fin de journée approchait à grands pas. Cela faisait également trop de temps qu’il n’était pas passé dans le coin, et s’en voulait de rattraper le temps perdu de cette façon; mais ainsi, il pourrait faire un pierre deux coups et servir d’intermédiaire entre les deux Lynch sans que la plus jeune ne soit au courant du service que son ainé avait demandé auprès d’Ezra. Se garant sur le bas côté de la rue, il ne lui fallut qu’un instant pour rejoindre le pas de la porte de Marley et appuyer sur la sonnette. Il n’avait pas annoncé son arrivée, n’avait même pas envoyé un message à la jeune femme et ce ne fut qu’une fois sur place qu’il se dit que c’était idiot et qu’il aurait prévenir de son arrivée; il se pourrait bien qu’elle ait d’autres chats à fouette que d’attendre sagement chez elle que Beauregard daigne se pointer pour prendre de ses nouvelles un jour aléatoirement hasardeux du calendrier. Quand la porte se déroba pour laisser place à la jeune femme cependant, un vent de soulagement souffla sur Ezra et il dégaina son plus beau sourire - elle lui en voudrait surement bien moins s’il souriait comme ça. « Je sais que j’ai pas prévenu de mon arrivée, mais surprise ! » On aurait presque dit un enfant pris la main dans le sac en train de faire une bêtise, à cette allure là. De toutes façons, si sa présence dérangeait, il comptait sur Marley pour gentiment lui montrer le chemin retour jusque sa voiture.

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Il était le premier en règle générale à apprécier les visites surprises chez lui; ou tout du moins disons qu’il ne se formalisait pas lorsque ses proches usaient de cette technique. Cela prouvait qu’ils étaient assez à l’aise avec lui et chez lui pour débarquer comme si de rien n’était afin de simplement passer du temps en sa compagnie. Ces derniers temps, il était vrai que les choses avaient quelque peu changées et que les visites impromptues de la sorte n’étaient plus aussi faciles à glisser dans les journées qui pouvaient parfois sembler un peu longues. Alors, devant la porte de chez Marley, il espérait que la jeune femme l’accueillerait dans la première catégorie citée plutôt que dans la seconde, là il dérangerait et où il ne serait pas le bienvenue aujourd’hui - mais à voir la façon dont elle se décala pour le laisser passer lorsqu’elle lui ouvrit la porte, il se dit qu’il se devait effectivement être assez le bienvenu qu’importent les circonstances de sa journée à le laisser entrer de suite sans une once d’hésitation. « T'as de la chance de me trouver ici. » Faisant quelques pas dans le logement, il finit par hausser légèrement un sourcil d’étonnement et par se tourner de nouveau vers Marley. « Ah ouais ? Beaucoup de boulot ? » Pas qu’il n’existait pas d’autres raisons pour lesquelles elle pouvait être retenue ailleurs que chez elle, mais disons que le travail était la plus évidente de toutes.

Finalement, elle les entraina vers le salon, fit signe à son ami de s’installer dans le canapé et il ne fallut pas une minute de plus pour qu’il suive les directives. Plus rapidement qu’il n’aurait pu l’anticiper, une bière se trouvait déjà d’ailleurs dans ses mains et ce fut bien sur avec un petit sourire qu’il accueillit cette dernière. Parfois, il oubliait que la vie pouvait être aussi simple que ça. «  Que me vaut ce plaisir ? J'ai presque cru que tu m'avais oubliée. » Avec un petit rire, Ezra fit d’abord en sorte de faire tinter comme il le put sa canette contre celle de la jeune femme, avant de boire une gorgée de bière. « T’oublier ? Tu sais bien que c’est pas possible. » Ce n’était même pas uniquement pour faire plaisir à son égo à elle qu’il disait ça: depuis le temps qu’ils se connaissaient, et même au sens plus large que les Lynch et les Beauregard naviguaient dans le même cercle, il n’était pas possible d’oublier Marley. De sourire amusé, ses lèvres passèrent à un sourire bien plus tendre alors qu’il s’apprêtait à enchainer sur une vraie réponse à la question de la brune. « Blague à part: je t’ai pas oublié, juste Lily a accouché plus tôt que prévu et que nos journées sont maintenant bien remplies des désirs et des ordres d’une petite Alice. » Ce n’était donc pas par simple envie qu’il évitait une bonne partie de ses connaissances, mais simplement parce-qu’un nouveau petit être au sein de son foyer avait besoin de toute l‘attention disponible de ses deux parents. Sans plus attendre, Ezra sortit son téléphone - il n’y avait pas besoin d’aller plus loin que son écran de verrouillage, car c’était sa petite princesse qui s’y trouvait là - afin de montrer une photo d’Alice à Marley. « Je suis complètement gaga et on va pas en parler plus longtemps sinon on va pas m’arrêter. »

Et puis surtout, la raison principale du pourquoi il ne désirait pas s’attarder sur un autre sujet tel que sa fille, c’était qu’il n’était pas venu là pour ça. Il en profitait, bien sur, faisant une pierre deux coups avec les dernières nouvelles et ce qui le poussait à venir jusque chez Marley aujourd’hui. Surtout qu’il se doutait que le sujet qu’il souhaitait aborder ne serait pas de tout repos, ou du moins ne risquait pas de plaire à la brune autant que c’était le cas pour lui. « Je suis allé à Sydney, le weekend dernier. » Il n’avait pas perdu de temps pour provoquer la rencontre entre elle et lui une fois revenu en terre conquise du Queensland. « J’ai vu mon père, tu te doutes bien. » Cette partie là de l’histoire ne l’étonnerait pas, puisque c’était principalement pour cette raison qu’il retournait encore sur ses terres natales de temps à autres. « Mais c’est pas le seul que j’ai vu sur place, tu te doutes bien. » Il tournait un peu autour du pot, hésitait à mettre les mots sur les maux, attendait surtout de voir la façon dont Marley allait réagir - et si elle le ferait rapidement ou s’il lui faudrait aller au bout de ses phrases et idées pour qu’elle puisse comprendre où Ezra souhaitait en venir.

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Le « Hum » qu’elle laissa échapper fut pris, du côté d’Ezra, pour une affirmation - mais étant donné qu’elle n’enchanta pas pour lui expliciter avec plus de clarté pourquoi c’était effectivement son boulot qui lui prenait pas mal de temps, l’empêchant d’être peut-être autant disponible qu’elle l’aurait voulu, il ne creusa pas la question. Il n’était pas toujours malin, il aurait pu le faire sans s’apercevoir que cela pouvait poser problème; sur le moment, il ne le faisait pas simplement parce-qu’il avait bien d’autres sujets à aborder avec Marley et qu’ils auraient au pire tout le loisir plus tard de discuter plus en profondeur de tout et de rien. Parce-que, comme il lui confirma avec une pointe d’humour dans la voix et dans les mots, oublier l’existence de la jeune femme n’était pas quelque-chose de possiblement faisable. « Flatteur. » Il accorda un clin d’œil pour compléter le tableau. En réalité, il n’avait pas besoin de forcer le trait d’une quelconque manière: depuis le temps que la brune et lui se connaissait, il était réellement impossible d’oublier son existence, même si les aléas de la vie faisaient qu’il n’était plus autant disponible qu’avant. Car, de fil en aiguille et d’une pensée à une autre, il s’aperçut qu’il n’avait pas porté les bonnes nouvelles jusque la brune à ses côtés concernant la nouvelle arrivée dans sa petite famille. « Félicitations ! Alice se porte bien ? Et Lily ? » Il avait déjà le sourire jusqu’aux oreilles de toutes façons, et le téléphone sortit de la poche pour lui montrer des photos. « Alice se porte comme un charme. Elle est adorable, elle est magnifique, c’est le plus beau bébé du monde pour moi, tu te doutes bien. » Etant donné qu’il n’avait pas connu Noah lors de ses premiers mois de vie, il pouvait se permettre d’avoir de telles paroles. « Lily se porte bien aussi. Autant qu’une femme qui vient de mettre un enfant au monde, en tous cas. » Elle était fatiguée, son quotidien s’était retrouvé complètement chamboulé, mais elle était heureuse aussi. « Elle est magnifique. Et elle a beaucoup de chance de vous avoir tous les deux ainsi que Noah.  » Le sourire satisfait qu’Ezra étirait était sincère, authentique; c’était là le genre de paroles qui lui réchauffait le coeur. « Merci Marley. Vraiment, j’ai de la chance oui. » Encore quelques années auparavant les choses ne se présentaient pas du tout de cette façon pour Beauregard, et il n’aurait jamais admis à voix haute être chanceux puisqu’il ne pensait pas l’être du tout. Le vent avait fait tourner la roue et il ne s’en plaindrait jamais.

Ce n’était pas parce-que les choses allaient de l’avant dans sa vie personnelle et de famille que pour autant, il oubliait les choses et les personnes qui avaient permis qu’il se construise et en arrive où il en était aujourd’hui. C’était pour cette raison que, dès qu’il retournait sur Sydney et qu’il avait assez de temps sur place, il se permettait de retourner voir les personnes qu’il avait connu durant son enfance - son père en premier, bien sur, même s’il appartenait à une catégorie un peu différente de son côté. « Comment va-t-il ? Il se porte bien ? » Peut-être était-ce une légère pointe d’inquiétude qu’il sembla déceler dans la voix de Marley, si bien qu’il s’empressa d’hocher la tête. « Oui oui, il se porte bien t’en fais pas. » Elle avait connu le patriarche Beauregard pendant bien des années, alors qu’ils partageaient des terrains de jeu communs lorsqu’ils étaient tous bien plus petits. « Je crois même qu’il a retrouvé quelqu’un mais ose pas en parler encore. Ca a beau faire des années que maman est plus là, je pense qu’il a toujours du mal à s’autoriser à être pleinement heureux. » C’était quelques indices ici et là, dans la maison de famille, qui avaient mis la puce à l’oreille du plus jeune de ses garçons. Un jour, certainement, il soulignerait à son père qu’il avait compris depuis quelques temps déjà qu’il avait réussi à trouver quelqu’un pour panser les plaies de son coeur; cependant, ce n’était pas non plus de ça qu’il souhaitait réellement discuter avec la brune, qui avait finalement compris où il en emmenait la discussion. « Je m'en moque. Si t'es venu pour me parler d'eux, c'est pas la peine Ezra. » Le ton qu’elle avait appliqué à ces nouvelles paroles ne laissait en réalité pas trop de place à l’incompréhension; même Ezra pouvait saisir que c’était un terrain glissant. Mais il avait de l’autre côté promis à l’ainé de la jeune femme qu’il tenterait au moins de voir s’il était possible qu’elle soit ouverte à la discussion de récupérer l’enveloppe qu’il lui avait fourni, alors en bon samaritain, il continuait dans cette direction. « Pas vraiment en parler, je sais que c’est pas un sujet qui t’enchante. » Parce-que ce n’était pas la première fois qu’ils abordaient leurs familles respectives et que du côté des Lynch, c’était porte close au bout de quelques phrases. « Milton voulait juste te transmettre une enveloppe, mais il a pas ton adresse, alors je l’ai prise avec moi pour te l’emmener ici. Vraiment, ça va pas plus loin promis. » Le problème était, en réalité, que ça aille déjà jusque là. Sortant la dite enveloppe de la poche de sa veste, il la tendit dans la direction de Marley avant qu’elle ne se dérobe à sa vue ou qu’elle décide de le sortir à coup de pied dans le postérieur de son appartement. « Rien de plus. » Cela ne pouvait pas faire réellement de mal, non ? Après tout, il s‘agissait là simplement d’un grand frère s’inquiétant pour sa petite soeur, et Ezra était bien placé pour comprendre comment se sentait Milton, étant donné qu’il s’inquiétait en permanence de son côté pour sa petite soeur, qu’il n’avait d’ailleurs pas vu depuis de longues semaines à ses yeux.

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« Je dirais qu'elle est dans le top 3… » Ne laissant pas un seul instant de répit à Marley, les traits du visage d’Ezra affichaient déjà un air d’étonnement, la bouche ouverte un peu trop grande sous le coup de l’émotion. Et bien sur qu’elle tira la langue en prime, soulignant ici l’ironie de sa phrase. « Elle domine le top 3, surtout ! » Il faisait l’offusqué, mais il ne l’était pas réellement. Simplement, forcément à ses yeux que sa petite princesse était la personne la plus belle sur cette terre sans discussion possible - et bien sur que Marley allait se moquer gentiment de lui, qu’importe le contexte en réalité. C’était comme ça que fonctionnaient les choses entre eux, depuis longtemps et il ne demandait pas à ce que ça change. Alice passerait simplement avant tout le monde désormais, et qui ne serait pas d’accord avec ce choix sans appel ferait face à la colère du jeune papa. Et en parlant de père, Ezra expliquait justement à Marley qu’il était persuadé que le sien avait refait sa vie sans trop en parler autour de lui, cachant presque la présence d’une nouvelle femme dans sa vie lorsque son fils était passé le voir la dernière fois à Sydney. « Il finira bien par vous la présenter. » Avec un sourire amusé accroché à ses lèvres, il opina légèrement du chef, haussant les épaules par la même occasion. « Surement. En vrai, il est tellement à cheval sur les relations amoureuses et sur comment elles sont censées être, il nous a tellement fait la morale aussi quand on était jeunes qu’il doit surement pas vouloir être pris la main dans le sac. » Et bien sur qu’Ezra le premier ne perdrait pas un seul instant pour se moquer gentiment de lui et lui rappeler que quelques années en arrière, il n’aurait permis à aucun de ses enfants d’agir de la sorte. David avait amélioré sa vision de la vie, et surtout de la vie de famille à partir du moment où tous ses enfants avaient décidé de ne respecter aucun des principes qui régissaient pourtant lui son quotidien; ça n’avait pas été de tout repos, mais il s’était plié à l’idée qu’il était possible d’être heureux même si le quotidien n’était pas exactement comme il l’attendait lui.

Si aborder le sujet de sa propre famille était toujours empli de douceur aux yeux d’Ezra, qu’importe l’état des relations entre tous ces membres sur l’instant même, il savait d’avance que ce n’était pas aussi simple lorsqu’il s’agissait des Lynch - et à voir la réaction primaire qu’avait déjà Marley, il maudissait intérieurement Milton de lui avoir demandé de jouer le tampon entre les deux. « Alors ne l'aborde pas. » Il entendit presque la langue de la jeune femme claquer contre son palais à la suite de ses mots. Effectivement, cela pourrait être aussi simple: le terrain était glissant, il ne savait d’avance, alors il ne tentait même pas de mettre un pied dessus. Malheureusement, malgré tout le contexte autour, Beauregard avait promis au grand frère de la jeune femme d’au moins tenter d’approcher du sujet et de remettre l’enveloppe qu’il tira de sa veste à Marley. Rien de plus, vraiment, promis. Mais elle ne tenait déjà plus en place, s’étant levée du canapé d’un coup d’un seul. « T'es le messager maintenant c'est ça ? Si j'ai besoin de livrer un colis c'est toi que je contacte ? » Il fronça les sourcils, un air déjà légèrement désabusé accroché à son visage. La colère qui résonnait en elle l’empêchait de voir à quel point ses paroles étaient ridicules en cet instant - mais toujours moins que celles qui furent prononcées ensuite, en réalité. « Tu lui as pas donné mon adresse quand même ? J'ten prie, dis-moi que tu lui as rien dit ! » Ezra voyait que la question était sincère et qu’une certaine panique commençait à s’installer dans le fond du regard de la brune - ce fut pourtant lui qui écarquilla les yeux lorsqu’elle le secoua par les épaules, ne s’attendant à aucun moment à une réaction de ce type de la part de personne en réalité. « Quoi ? Mais n’importe quoi. » Bien sur qu’il se positionnait sur la défensive de son côté également désormais. Heureusement cependant que la brune arrêta de le secouer rapidement comme un prunier, car il était calme Ezra mais il n’appréciait pas de se retrouver à être celui malmené comme ça. « Je suis pas complètement demeuré non plus. Si je lui avais donné ton adresse en plus, est-ce que tu penses que je me serais moi emmerdé à venir jusque là te donner l’enveloppe ? » Ca n’aurait fait aucun sens - autant qu’il donne l’adresse de Marley à Milton qu’il joue les messagers alors que ce dernier n’avait plus besoin de lui si ça avait été le cas.

Soupirant lorsque l’enveloppe lui fut arrachée des mains pour être lancée violemment sur le sol, Ezra croisa les bras sur sa poitrine, se laissant tomber en arrière dans le canapé. Son regard était posé sur la jeune femme femme, qui semblait au bord de l’implosion en plus d’être déjà en pleine explosion clairement. « J'comprends pas pourquoi t'as fait ça. » Haussant un sourcil légèrement, il secoua la tête; elle n’était clairement pas en état de comprendre effectivement les raisons pourtant logiques qui auraient pu pousser Ezra à agir de la sorte, effectivement. « Peut-être parce-qu’il s’inquiète pour toi ? Que c’est ton frère ? Que j’ai moi la chance de pouvoir te voir et pas lui donc il en profite ? » Il savait que ce n’était là que des arguments qui allaient l’enfoncer dans ses choix, mais tant pis: il n’était pas du genre à mentir lorsqu’il était mis devant le fait accompli, et puis de toutes façons cela se voyait comme le nez au milieu de la figure lorsqu’il le faisait dans ce type de circonstances. Soupirant une nouvelle fois, il se leva du canapé pour faire un pas et un autre en direction de Marley - avant de s’arrêter en milieu de parcours, ne désirant pas non plus être trop proche d’elle qu’elle puisse lui retourner une droite. « Je te jure qu’il s’inquiète pour toi, Marley. C’est ton grand frère, c’est pas n’importe qui. » Il connaissait autant l’histoire des Lynch que le sentiment que pouvait ressentir Milton; il avait été présent pour la première partie de cette histoire, et savait se mettre dans les chaussures de l’ainé. A sa place, il aurait fait en sorte d’avoir par tous les moyens des nouvelles de sa petite soeur. « Tu peux pas m’en vouloir d’avoir voulu rendre un service un ami, franchement. Si ? »

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S’il avait pu savoir en avance qu’elle réagirait de la sorte, Ezra ne serait bien sur pas venu jusque chez Marley aujourd’hui. A un moment, ils étaient tranquillement en train de discuter de la venue au monde d’Alice et de la vie que menait le père Beauregard de son côté à Sydney - et celui d’après, elle l’attrapait par les épaules pour le secouer comme un prunier. Ce n’était pas tant les raisons qui poussaient la jeune femme à réagir de la sorte qui le poussaient à se mettre sur la défensive, mais bien le fait qu’elle n’entendait à aucun moment les arguments que lui mettait en avant. Il savait que les relations au sein de la famille Lynch n’étaient plus ce qu’elles avaient pu être fut un temps, mais ce n’était pas pour autant que Milton n’avait pas le droit de s’inquiéter pour sa petite soeur et de tenter de prendre de ses nouvelles. A la place de l’ainé Lynch, bien qu’Ezra aurait agi de la sorte également, et qu’il aurait usé de ses contacts et amis pour faire parvenir au moins un message à Katherine. Naturellement, il était normal pour lui d’agir de la sorte pour Milton et Marley, même si cette dernière était fermée à la discussion. « T'es sûr de toi ? » Ses paroles s’étaient annoncées avec un rire amer, claquant presque l’air lorsqu’elles furent prononcées. Ezra leva les mains en l’air, comme pour clamer une innocence qu’il ne savait pas avoir besoin de mettre en avant. « C’est lui qui me l’a dit, j’ai aucune raison de pas le croire. » Parce-qu’aux yeux de Beauregard, la situation était réellement aussi simple que ça: son ami de toujours lui avait dit qu’il s’inquiétait pour sa petite soeur et qu’il voulait juste prendre de ses nouvelles, il n’avait aucun raison de ne pas le croire. C’était peut-être un peu plus simple et surement trop naïf comme comportement, mais c’était de la sorte qu’il était avec ceux qui étaient ses amis: Ezra les croyait sans une seconde d’hésitation.

Apparement, ce n’était pas la réponse que Marley attendait, puisque cette dernière parcourut les quelques pas finalement qui la séparaient de l’enveloppe qu’elle avait jeté au loin dans le salon. Ses mains tremblaient, il pouvait aisément le voir. De son côté, il pinça les lèvres, ses mains posées sur ses hanches. Il était empli de confiance en cet instant, Ezra, puisqu’encore une fois il n’avait aucune raison de ne pas croire Milton quand celui ci lui disait penser à bien. Dommage pour Beauregard. « Blablabla... Je t'interdis de remettre les pieds à Sydney. Blablabla... Si j'apprends que t'es revenue, je peux te promettre que t'auras de mes nouvelles autrement que dans une lettre. » Vraiment dommage pour lui, car au fil des maires mots que la jeune femme laissait passer la barrière de ses lèvres pour donner le ton de la lettre qu’elle tenait en mains, le visage d’Ezra se décomposait. Il avait l’impression d’entendre des choses qu’un autre aurait pu dire, sous la colère; il ne saurait imaginer Milton prononcer de telles paroles, et avoir un bagage de colère assez lourd pour souhaiter les coucher sur papiers. Il savait que certaines paroles avaient été prononcées à l’époque, mais de l’eau avait coulé sous les ponts. « Lis. » Le regard que Marley posa sur lui était embué de larmes, là où celui d’Ezra était voilé d’une culpabilité sans nom. Ce n’était pas du tout vers ça qu’il avait voulu emmener les choses. « Lis. » Qu’elle répéta d’un ton plus ferme, alors qu’elle lui imposait la lettre en ses mains à lui. Après avoir accroché les prunelles de la brune un instant supplémentaire, il descendit les siennes sur le bout de papier. Et effectivement, il ne s’attendait pas à croiser de tels mots de la part de l’ainé des Lynch. Ce fut le mouvement de Marley en direction de la cuisine qui fit relever le nez de Beauregard. « La prochaine fois qu'il te demande un service... Rends-toi service : Refuse. » Il pinça ses lèvres, déglutit avec difficulté et peine. Ses doigts jouaient désormais avec le bord du papier, ne sachant que trop peu où se mettre: ce n’était pas de cette façon là qu’il avait envisagé la moindre chose de cette rencontre. « Je suis désolé Marley. » Et même s’il avait du mal à relever son regard vers elle, il était sincère dans ses mots. « Je pensais pas… » Il ne pensait pas très souvent, ce qui devenait un problème récurant. « J’avais pas de raisons de pas le croire, quand il m’a dit que c’était pour prendre contact avec toi. » Soupirant, il finit par se laisser retomber dans le canapé un peu trop lourdement à son gout - trahissant la culpabilité qui l’accablait en cet instant. « Je savais même pas qu’il savait que t’étais allée à Sydney. » Il plissa un instant le bout du nez. « Je le savais pas moi-même, j’aurais pu faire le lien peut-être si ça avait été le cas. » Ses mots ne contenaient aucun reproche, ou en tous cas pas à l’encontre de la jeune femme; c’était plus contre lui qu’ils étaient tournés, de ne pas savoir être plus attentif aux détails qui étaient pourtant d’une évidence claire comme de l’eau de roche pour le reste de la population. « C’était qui ? » Parce-que la lettre mentionnait un enterrement, mais il n’en avait pas eu vent non plus de cet événement là. Etait-ce quelque-chose pour laquelle il aurait pu être présent pour Marley, par Milton également, et où il aurait peut-être pu faire tampon entre les membres de la famille Lynch plutôt que de servir de catalyseur là où ce n’était clairement pas nécessaire de l’être ?

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Bien sur qu’il s’en voulait, et bien sur qu’il n’avait jamais anticipé que cette visite chez Marley tourne de cette façon. Il pensait réellement faire une bonne action en jouant les pigeons-voyageurs pour Milton; il avait simplement été un pigeon, sans ajout à la suite, finalement. Etait-ce si simple de le manipuler pour obtenir de lui ce qui était attendu ? Ce n’était pas la première fois qu’Ezra se retrouvait dans ce type de situation, c’était surement la partie la plus dérangeante dans tout ça - et pourtant, il ne savait faire autrement que de plonger tête baissée dans le piège. Se laissant retomber dans le canapé, il avait laissé échapper un soupire qui en disait long sur la culpabilité réelle qu’il ressentait en cet instant: elle n’était en rien faussée, autant authentique qu’il pouvait toujours l’être en réalité.

Il s’écoula peut-être l’équivalent d’une minute d’un lourd silence avant que Marley ne le rejoigne sur le canapé, lui tendant un second verre qu’elle avait également rempli de whisky. Ce n’était pas l’envie qui manquait à Ezra de faire passer l’amertume portée en bouche avec une gorgée de liquide ambré, mais les responsabilités qu’il devait endosser de nouveau une fois qu’il serait sorti de chez la jeune femme l’empêcher de boire un verre à cette heure là de la journée. Il se contenta cependant d’attraper le contenant d’une de ses mains libres; il le reposerait sur la tableau d’appoint plus tard. « Mon père. Quand il est mort en janvier 2020... Je suis pas allée à l’enterrement. » En réalité, cela aurait du être une évidence à ses yeux - mais il n’était pas assez malin pour faire les liens seul, les autres devant lui souligner l’évidence la plupart du temps. Pour tout ça aussi, il se trouvait être trop souvent désolé. En l’occurence, lui était présent à cet enterrement là - Marley avait-elle été mise au courant de ce détail ? A l’époque, il ne s’était pas dit que c’était là une information à lui communiquer, car si elle ne s’était pas pointée sur place pour l’enterrement de son propre père, c’était pour une bonne raison et ramener le sujet sur le tapis n’était pas une idée de génie. Promis, parfois, il tentait fort de faire les choses dans le bon sens. « Tu pouvais pas savoir Ezra… Il a toujours été très doué pour obtenir ce qu'il voulait des autres. » - « J’aurais pu essayer de faire un effort, au moins. » Il pinça ses lèvres un instant, alors qu’il resserrait quelque peu la prise de la main de Marley sur la sienne. « J’aurais jamais pensé qu’il utiliserait ce comportement avec moi, surtout. Je sais que j’aurais jamais voulu jouer le facteur s’il m’avait dit ses intentions, mais bordel depuis le temps qu’on se connaît lui et moi, il aurait pu essayer d pas me prendre pour un con sérieux. » Il soupira lâchement. Il ne savait pas, mais il aurait pu avoir au moins un doute; il connaissait Milton depuis assez longtemps pour savoir que c'était un sacré chenapan et qu’un comportement appliqué avec quelqu’un pouvait se retrouver auprès d’autres, même de vous.

Ezra secoua quelque peu la tête, changeant presque de sujet. « Je te l’ai jamais dit, mais je suis désolé pour ton père. » Ce n’était jamais le bon moment pour ce genre de paroles, mais étant donné qu’il avait mal démarré aujourd’hui, il n’était plus à une phase dite de travers ou à un moment qui n’était pas propice à la formuler. Lorsqu’elle remonta son regard vers lui, il ne changea pas de direction cette fois ci. « Tu as eu des nouvelles des autres ? Et ma mère ? » Ezra esquissa un petit sourire. « Je suis passé voir ta mère oui. » Parce-que comme il était impensable pour lui de passer par Sydney sans aller voir son père, la mère de Marley avait presque systématiquement droit à sa visite également de son côté. Après tout, elle avait été tant présente à leurs côtés depuis tant d’années que ce n’était qu’un juste retour des choses aux yeux  de Beauregard. « Elle va bien. Mon père avait vendu la mèche pour Alice, alors elle avait préparé un petit cadeau que je puisse remporter ici. » Et celui ci n’avait pas été empoisonné, puisqu’il s’agissait d’un petit gilet qu’elle avait tricoté elle-même; tous les Lynch restés à Sydney n’avaient pas vocation à se payer sa tête, tout de même. « Elle m’a demandé de tes nouvelles, comme à chaque fois. » Parce-que c’était plutôt de notoriété publique qu’Ezra soit resté en contact avec Marley, une fois les deux jeunes gens emménagés à Brisbane. « Je lui ai dit qu’elle avait pas à s’en faire pour toi, mais elle était peinée que je lui donne pas plus de détails je crois. » Mais ce n’était pas son rôle auprès de la matriarche; s’il jouait déjà le double-agent avec Milton, parce-qu’il comprenait le positionnement dans lequel ce dernier se trouvait jusque aujourd’hui, il n’avait pas la même facilité à informer la mère de Marley sur sa fille. « Tu lui en veux toujours à elle aussi ? »

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« S'il a été obligé d'agir ainsi c'était parce qu'il savait que tu aurais refusé si tu avais su la vérité. Il sait que tu es quelqu'un de bien et que tu n'aurais jamais accepté un tel comportement de sa part. » La première réponse d’Ezra à ces mots là fut de lâcher un soupire, long et las. Il ne réfutait pas être quelqu’une de bien: il le savait, cela lui avait été répété plus d’une fois pendant sa courte vie. Il n’utilisait pas cette excuse pour s’en vanter non plus, que cela soit dit en passant, n’étant pas du genre à se mettre en avant de la sorte. Seulement, d’être effectivement quelqu’un de bien faisait apparemment de lui quelqu’un de manipulable aux yeux des autres, de ce qui avaient de mauvaises intentions. Il n’aurait jamais pensé que Milton rentrerait dans cette catégorie là, mais il fallait aujourd’hui se rendre à l’évidence: il s’était fait avoir, son ami d’enfance s’était joué de lui; Ezra notait dans un coin de son esprit de lui en toucher deux mots la prochaine fois qu’il croiserait sa route à Sydney - ce ne serait pas pour lui dire qu’il lui avait manqué. « En même temps, normal que j’aurais pas accepté un comportement comme ça. Pas que de lui d’ailleurs, de n’importe qui. » Il avait accompagné ses mots d’un rire sans envie, ponctué d’une rancoeur qu’il ressentait déjà à l’égard de Milton. « Ça me fait chier qu’il l’ait su et qu’il ait joué. » Il était naïf, et a ses yeux en cet instant Milton était une enflure de première.

Les deux amis passèrent dans un premier temps en revu le sujet de conversation original, celui qui avait provoqué la raison de la présence d’Ezra chez Marley, mais cette dernière finit par l’abandonner pour lui poser d’autres questions; ce n’était pas lui qui se permettrait d’aller une seconde fois à l’encontre de la volonté de la jeune femme, alors il laissa le courant de la conversation l’emporter sur les questions éventuelles qu’il aurait pu poser si l’opportunité était restée entière. Il finit par lui dire qu’il était passé chez sa mère à elle, et que cette dernière avait offert un cadeau pour Alice - il soupçonnait son père d’avoir vendu la mèche quelques jours avant qu’il n’arrive à Sydney. Ce fut à l’évocation de cette partie là de la conversation que le visage de Marley reprit des couleurs, et qu’une expression autant d’étonnement que de surprise s’empara de ses traits. Elle porta même sa main à sa bouche. Ezra ouvrir un brin davantage les yeux, ne comprenant pas ce qu’il lui arrivait. « Mais ! Je t'ai rien offert pour la petite ! » De suite, le visage de Beauregard prit une teinte de soulagement et il leva les yeux au ciel. « Tu m’as fait peur, j’ai cru que c’était quelque chose de grave. » Marley, de son coté, baissait son regard et semblait s’embarrasser d’une honte qui n’avait pas à exister. « J'te jure que je me rattraperai. » - « Eh, Marley. » Il attrapa doucement l’épaule de la jeune femme de sa paume, pour qu’elle recentre son attention sur lui plutôt que sur n’importe quoi d’autre pour y cacher désarroi. « C'est vraiment pas grave, t’as pas besoin en plus. » Bien que ça ferait plaisir à Ezra - moins à Lily mais la question ne se posait pas en l’occurrence - qu’elle pense à eux et à la petite en trouvant un petit cadeau, ça n’avait jamais été ni une obligatoire, ni une priorité dans tout ça.

Mais le cadeau offert pour Alice de la part de la mère de Marley n’était pas la seule chose à retirer de l’entrevue d’Ezra avec elle. Bien sûr qu’elle avait demandé des nouvelles de sa fille, et qu’elle savait très bien que Beauregard pourrait être la personne toute designer pour que cela puisse arriver. Même si les choses étaient compliquées entre les membres de la famille Lynch, il ne pouvait que comprendre cette certaine inquiétude de la patriarche à l’égard de l’un de ses petits. A la suite, le soupire de Marley à sa question pouvait tenir de réponse en réalité. « Ce n'est pas une question de lui en vouloir... C'est elle qui a choisi de tirer une croix sur moi. C'est elle qui a obéi à Milton lorsqu'il leur a demandé à tous de couper les ponts avec moi... » Le soupire qui aurait pu être le sien fut retenu de justesse par Ezra, pinçant les lèvres et laissant plutôt son regard s’exprimer pour lui. Ce n’était pas la première fois qu’ils abordaient le sujet, bien sûr, depuis le temps qu’ils se connaissaient - et surtout au regarde des épreuves qu’ils avaient connu de l’un comme de l’autre -; c’était en revanche la première fois que c’était le cas alors qu’il avait en sa possession la connaissance d’un Milton qui n’était pas toujours le gentil garçon qu’il avait pu être avec Ezra. Et bien sûr que cela prenait une toute autre dimension. Surtout qu’à l’époque, les faits lui avaient été rapportés avec peu de pressions, et maintenant il se doutait bien que ce n’était peut être pas aussi facile que ce qui lui avait été raconté. «  Si elle avait vraiment envie de savoir comment j'allais, elle prendrait son putain de téléphone. » Dans un geste qui traduisait ce qu’elle pouvait ressentir à l’égard de la situation, Marley finit son verre d’une traite et s’affala encore davantage dans le canapé. Laissant un instant de silence supplémentaire s’installer, Ezra finit par humecter ses lèvres en les roulant l’une sur l’autre avant de prendre la parole. « Si Milton lui a menti, comme il l’a fait avec moi, elle t’appelle peut être pas parce-qu’elle sait peut être pas à quel point tu souffres de la situation. » Comme quoi, parfois, il arrivait à connecter quelques neurones pour sortir de bonnes analyses de situations.

« C'est comment pour toi avec ta famille ? » Inspirant longuement, Ezra finit par laisser un petit rire lui échapper - ce dernier étant plutôt amusé, il fallait l’avouer. Oh, la famille Beauregard pouvait être qualifiée de bien de choses mais surtout d’un joyeux bazar. « C’est… Toute ma vie. » Il savait que de n’était pas exactement cette réponse là que la jeune femme attendait, mais c’était pourtant la première vérité à établir. Ezra avait toujours voué une importance sans limites à sa famille, depuis tout petit, et ce n’était pas quelque-chose que avait pu être altérée avec le temps. « Je veux dire, je ferai tout pour eux, et le contraire est vrai aussi. » Il finit par reposer doucement le verre que Marley lui avait planté dans les mains sur la table basse: il était évident qu’il n’y toucherait pas. « Mais c’est pas toujours facile entre nous. Disons que plus on vieillit, plus les choses se passent bien quand même. Mon père s’est adouci aussi, avec le temps, ça fait que certaines tensions ont fini par disparaître entre lui et ses enfants. » Ils avaient réussi, tour à tour, à endosser le rôle de mouton noir de la famille pour des raisons plus ou moins similaires pour certains, complètement différentes pour d’autres; ils avaient surtout réussi à se serrer les coudes face à un père parfois un brin trop intransigeant face aux parcours qu’il n’avait su anticiper pour ses enfants. « Malheureusement, perdre Ian y’a dix ans nous a tous rapprochés, aussi. » Il tira une petite moue, haussa quelque peu les épaules. C’était la triste réalité de la vie, mais le deuil rapprochait les gens et altérait la vision que l’un pouvait avoir sur cette dernière.

with the bridges burned

@marley lynch

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La jeune femme baissa légèrement la tête. « Mais c'est grave. » Le sourire qui étirait légèrement les lèvres d’Ezra prouvait ce que ses paroles à lui disaient: ce n’était véritablement pas grave. La petite était de toutes façons pourrie-gâtée depuis qu’elle avait mis un pied dans ce monde - et même bien avant -, alors elle pouvait bien se passer d’un nouveau présent. Marley n’aurait qu’à rectifier le tir plus tard si le coeur allait dans cette direction, mais pour aujourd’hui elle n’avait vraiment pas besoin de se faire tout ce soucis là.

Ils ne déblatèrent pas bien plus longtemps sur la question, enchainèrent plutôt sur un autre sujet, alors que la brune interrogeait Ezra pour savoir si les relations qu’il avait de son côté avec ses propres frères et soeur étaient aussi complexes que celles qu’elle pouvait avoir de son côté avec sa famille. Ils avaient leurs sujets de discorde, bien sur comme tous, les Beauregard; mais dans les grandes lignes il était plutôt rare de les voir ne pas tomber en accord sur bien des sujets, ne pas être présents les uns pour les autres, ne pas se soutenir à travers les épreuves de la vie. C’était un atout qu’Ezra avait toujours pu mettre en avant dans sa vie: sa famille était ce pour quoi il se battrait jusqu’à en perdre son souffle. Avec les années, cette dernière s’était agrandi et avait accueilli bien des membres, mais cela ne changeait pas le principe de base. Même avec son père, qui était celui des Beauregard qui avait le plus de mal à faire des concessions, les choses s’étaient améliorées avec le temps. « C'est vrai qu'il n'a pas toujours été très tendre… » Il laissa échapper un petit rire. « Je me suis fait engueuler plus d’une fois, oui. » C’étaient maintenant là de bons souvenirs presque, mais lorsqu’il était enfant Ezra étant quelque peu casse cou sur les bords, son père avait du mal à faire en sorte qu’il reste dans les rangs qu’il souhaitait lui imposer si bien qu’il avait plus d’une fois hausser la voix - et lever la main, il fallait l’avouer - sur le dernier de ses garçons. « C'est bien que vous soyez là les uns pour les autres. » Il hocha rapidement la tête, laissant son regard se poser un instant supplémentaire sur ses mains. Le décès de l’un des frères avait été l’épreuve la plus compliquée à vivre pour la fratrie, mais heureusement ils avaient pu en tirer du positif et se trouver aujourd’hui plus soudés qu’ils ne l’avaient été en grandissant. Une partie d’Ezra se demandait de temps en temps si cela aurait été le cas également si Ian avait toujours été parmi eux - et après il se rappelait qu’il était celui qui aurait su faire en sorte que cela arrive dans tous les cas. A cette pensée, son coeur se fit un brin plus léger, alors qu’il relevait un petit sourire en direction de Marley.

« Je suis contente de t'avoir vu Ezra. « A son tour, Beauregard jeta un coup d’oeil à l’heure qu’il pouvait être et se rendit compte qu’il avait étendu son séjour dans le salon de Marley de façon bien plus radicale qu’il ne l’aurait pensé. Dans pas longtemps, il allait être en retard pour aller chercher Noah. « Je suis content aussi d’être passé. » Ce n’était pas pour les bonnes raisons il s’en rendrait compte un jour, mais au moins ils avaient pu se revoir. « La prochaine fois, faudra pas qu'on attende aussi longtemps et… » A son petit sourire, il haussa un sourcil. « … la prochaine fois que Milton te parle de moi, dis-lui que j'ai déménagé, qu'un extraterrestre m'a enlevée, ou que je suis entrée au couvent. » Ce fut bien sur un rire franc qui échappa à Ezra, en écho de celui de la brune. « J’aime beaucoup l’idée des aliens. Je prendrai cette excuse là. » Pour le moment, il n’avait pas spécialement envie de se retrouver face à l’ainé des Lynch, mais au moins il aurait une excuse bidon toute prête sous la main. Finalement, se relevant du canapé, il soupira quelque peu - il prenait de l’âge et de la fatigue surtout ces derniers temps avec la petite. « La prochaine fois surtout, on fait en sorte que ça soit pas si long hein ? Entre deux rencontres ? » Ils avaient de trop laisser trainer les choses, et cela ne devait plus se reproduire. « De toutes façons, faut que tu vois Alice et avant qu’elle ait dix-huit ans ce serait bien quoi. » Son sourire et son regard étaient taquins, parce-qu’il s’amusait de la situation. S’il le fallait, il reviendrait ici avec la petite dans les bras pour l’imposer à Marley, afin qu’elle puisse la rencontrer.

Se penchant légèrement, il déposa une bise sur la joue de la jeune femme. » Appelle moi quand t’as un instant, qu’on se cale quelque chose. Ou passe au garage. Ou à la maison. » Bref: il existait mille et un moyens pour qu’il ne s’écoule plus une nouvelle fois autant de temps avant que leurs chemins se croisent de nouveau. Se penchant cette fois-ci pour attraper l’enveloppe qu’il avait apporté et la lettre qui se trouvait fut un temps dedans, il fourra le tout dans sa poche. « Et ça, ça repart avec moi. » Adressant un petit clin d’oeil à Marley, c’était peut-être la seule initiative intelligente qu’il prendrait de la journée alors il n’allait pas la laisser passer à la trappe: la lettre avait déjà assez fait de dégâts comme ça à être arrivée jusque la brune, pas besoin qu’elle reste ici. Enfin, il finit par faire demi-tour et par retrouver le chemin de la sortie.