boys will be boys (elijah)

Rien que du rouge. Sur le cuir des fauteuils. Sous leurs pieds foulant la moquette. Dans la lumière des spots qui dansaient entre les tables. Si Micah s'avisait d'oublier, la couleur de la soirée lui rappelerait qu'il s'apprêtait à jouer à un jeu dangereux. Un jeu auquel il n'avait envie de jouer en compagnie de personne d'autre qu'Elijah. Par chance, son acolyte était libre. Les choses semblaient bien se goupiller, en dépit des circonstances. Lorsque Micah avait appris – et peu lui importait la vérité à cet instant – qu'il y avait l'éventuelle hypothèse que Lena le trompait, la seule couleur qui avait imprégné sa rétine était celle qui enveloppait l'ambiance feutrée du cabaret. Et ce n'était certainement pas la tendance qu'elle avait de filtrer ses appels qui l'inciterait à mettre un peu d'eau dans son vin pour une fois. Ils ne s'étaient pas croisés depuis son retour du tournage. Ils ne s'étaient pas croisés alors que Jo, la première à l'avoir contactée, avait rappliqué dans la maison de ses parents, chargée des mêmes souvenirs qui achevaient de s'évaporer de la mémoire de son père. Manque d'empathie ou foutage de gueule absolu, Lena n'avait de toute évidence pas la moindre idée, ni ne s'était intéressée, du genre de connexion qu'il entretenait avec Jo. Elle était l'une des seules à le comprendre et à le soutenir pendant cette épreuve, tandis que les autres vivaient des vies de famille banales et simplettes que Micah leur enviaient un peu à vrai dire. La seule chose dont il avait envie ce soir-là, c'était de boire, de s'amuser et de soigner sa virilité écorchée. Et comme toujours, Elijah était le compagnon idéal pour lui rappeler sa valeur, et à quel point les femmes savaient elles aussi jouer les bourreaux dans leurs histoires. A ce niveau, la parité était respectée.

Le soleil se couchait à peine lorsqu'il avait sauté dans son cabriolet. Une Porsche 911 Turbo qui dormait dans le garage de son père et qu'il avait récupérée lors de son ultime visite. Depuis des mois Micah était abonné aux chauffeurs privés. On le conduisait où il voulait certes, mais il avait perdu l'essence même de la liberté et de la spontanéité d'une escapade en voiture. Cette fois il avait envie d'occuper le siège conducteur et de rouler, même avec un objectif. Un cabaret sélectif de Fortitude. Pour avoir fait l'expérience du Moulin Rouge parisien, Micah ne s'attendait pas à grand chose mais, dans sa furie, rien ne l'intéressait plus que la distraction de danseuses peu vêtues et la conversation d'un ami. On l'avait accompagné jusqu'à sa table, où l'attendait sagement une bouteille de champagne se prélassant dans son sceau en aluminium. Rouge lui aussi. Il en versa dans deux flûtes et en monopolisa une où il trempa ses lèvres. La journée ne cessait de se rejouer dans son esprit. Il n'eut pas le temps de s'impatienter qu'Elijah débarqua à son tour. Ponctuel, comme à son habitude. « Enfin, j'ai cru que tu allais manquer le spectacle ! » exagéra-t-il en se levant pour le gratifier d'une accolade fraternelle. « Content de te voir mon pote. Tu m'en voudras pas, j'ai commencé sans toi. Je t'ai pas demandé si tu voulais un verre. » dit-il en lui indiquant la deuxième flûte où pétillait du champagne. « Tu me sauves la vie d'avoir accepté l'invitation au pied levé. J'avais vraaaiment besoin de cette soirée. » Autrement dit de se vider la tête avec un ami, sans complexe ni la crainte de voir sa réputation calomniée dans la presse. Lena s'en était chargée toute seule.

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Dernière édition par Elijah Walker le Mer 22 Nov 2023 - 22:09, édité 1 fois

Boys will be boys

@Micah Tomlinson & Elijah Walker
( AVRIL 2023 )

Elijah avait l’impression d’émerger au bout d’un long tunnel sous-marin, et d’inspirer une bouffée d’air vicié après avoir manqué de se noyer. Les dernières semaines avaient été tout simplement insupportables, et il s’étonnait d’en être sorti relativement indemne, bien qu’il fût encore loin de se sentir retrouver la quiétude et la sérénité dont il ne se départait habituellement jamais. La fin du mois de mars et le début du mois d’avril avaient revêtu des allures catastrophiques, et cela faisait près d’une décennie qu’Eli n’avait plus perdu à ce point le contrôle sur ses actions. Laissé démuni et impulsif par le conflit à la violence émotionnelle inouïe qui l’avait opposé à Flora, Eli, à court de ressources, en était arrivé à rompre les près de sept ans d’abstinence qu’il avait à son actif. C’est en compagnie de Rhett, lui-même aux prises avec une addiction qui n’était pas sans rappeler celle contre laquelle lui-même s’était battu des années auparavant, qu’Eli avait cédé au plus terrible de ses vices dans un espoir désespéré et illusoire de trouver un apaisement après avoir saccagé une relation dont il peinait encore à saisir la portée exacte. Les jours suivants avaient été rythmés par l’angoisse, la culpabilité et la tentation de recommencer, et à plus d’une reprise, Eli avait manqué de sombrer dans une rechute qui aurait certainement causé sa perte. Se procurer du produit avait été d’une facilité déconcertante, et l’envie d’en consommer s’était faite aussi puissante, sinon plus, qu’à l’époque où son quotidien avait été rythmé par la prise de substances. Enfermé dans son penthouse des jours durant, Eli avait été enrôlé dans un combat acharné contre lui-même dont il peinait encore à réaliser qu’il avait fini, du moins provisoirement, par le remporter.

Contre toute attente, c’est Flora elle-même qui l’avait extirpé des griffes acérées de sa dépendance, à l’occasion d’une visite à laquelle il ne s’était absolument pas attendu, et lors de laquelle elle avait jeté le pochon qu’il avait acheté et brûlait de consommer, sans parvenir à s’y résoudre, mais sans avoir la force non plus de s’en débarrasser. Sans son passage, l’issue de l’épisode aurait indubitablement été considérablement plus sombre, et Eli restait sidéré par la chance qu’il avait eue d’avoir été sauvé in extremis par celle qui était parvenue à prendre cette impossible décision à sa place. Mais depuis ce fameux jour dont la portée émotionnelle avait ramené l’héritier à la réalité et à ses responsabilités, un silence radio s’était installé entre eux, et laissait libre cours aux interrogations qui continuaient de le tarauder par centaines, laissant son esprit confus, en quête d’une distraction et d’un apaisement qu’il peinait à trouver.

L’appel de Micah était tombé à merveille dans cette situation orageuse, et si Eli avait été appelé à l’aide par son ami, il eut en réalité l’impression d’être lui-même celui qui allait être sauvé par la rencontre que proposait ce dernier. Eli avait sauté sur l’opportunité de quitter son appartement et les ruminations qui ne le quittaient plus, et c’est sans hésiter qu’il avait rejoint Micah à leur point de rendez-vous, dans un cabaret particulièrement réputé à Fortitude Valley. Comme toujours impeccablement à l’heure, Eli suivit l’hôtesse qui l’escorta à la table où était déjà installé Micah, une flûte pleine de champagne à la main. « J’aurais raté ça pour rien au monde ! », renchérit-il avec un sourire sincère, sans doute le premier qu’il esquissait depuis des semaines, tout en rendant l’accolade initiée par son ami avant de prendre place à ses côtés. « T’as lu dans mes pensées. À la tienne », trinqua-t-il avant de prendre une gorgée et de hausser légèrement les sourcils d’un air appréciateur, agréablement surpris par la qualité du champagne. « Eh bah, tu t’es pas foutu de ma gueule », commenta-t-il avant de retourner à sa flûte, qu’il se retint de finir d’une traite, trop bien élevé pour céder à ses pulsions. Il adressa un nouveau sourire à Micah, qui lui reflétait déjà sa gratitude d’être venu lui tenir compagnie à cette soirée. « Content d’être là, mon vieux », répliqua-t-il sincèrement, avant de l’enjoindre à élaborer. « Tu veux m’expliquer ? Ou est-ce qu’on est venu noyer tes tracas dans du champagne hors de prix ? », demanda-t-il d’un ton taquin mais pas moins ingénu pour autant, laissant le libre choix à Micah de se confier ou non. Il n’évoqua pas même vaguement ses propres tracas, pudique comme à son habitude, saisissant à pleines mains l’opportunité d’écouter son ami avant de même envisager que l’on s’intéresse à ses démons à lui.

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❝oh my lungs are begging me to beg for you❞ all of these highs and all of these lows don't keep me company. i've been breathing you in and drinking you down, you're the only remedy. say you're gonna hold my head up, say you're gonna break my fall ; say you're gonna stay forever, baby, this is all i want. cause all my bones are begging me to beg for you, begging me to beg for your love.

Moins que la tromperie, c'était le moment choisi que Micah reprochait à Lena. Et bien moins que son indifférence face aux récents drames qui secouaient sa famille, c'était leur existence même qui le révoltait. Il se sentait démuni, impuissant, et les petits scandales autour de sa réputation, qui l'amusaient autrefois, ne faisaient qu'ajouter de l'eau au moulin de sa colère. Le lieu du rendez-vous n'était pas anodin. Tant qu'à se distraire avec un ami, Micah espérait bien en profiter pour prouver qu'il n'était pas le dernier des cocus, et que lui aussi avait ses vices. Ceux-là même qu'il avait commencé à effacer en fréquentant Lena. Il se leva pour accueillir Elijah. Ce dernier avait l'air en forme, mais Micah ne se souvenait pas d'une seule de leurs rencontres où il n'était pas un minimum apprêté. Sans doute parce que leur relation était initialement professionnelle, et qu'une partie de lui ne pouvait se résigner à considérer l'acteur comme un client potentiel. Ils trinquèrent à la première d'une longue série. « Est-ce que je me suis déjà foutu de ta gueule ? » demanda-t-il en fanfaronnant, fouillant lui-même dans sa mémoire en quête d'un souvenir moins opulent que les autres. Il était de notoriété publique que Micah dépensait sans compter en soirée, et beaucoup d'autres en avait profité avant Elijah. Des personnes qui ne faisaient même plus partie de sa vie et qu'il n'aurait jamais qualifiées d'amis. En y repensant, Micah était souvent entouré mais toujours seul. Privilégier la compagnie à l'amitié, l'hypocrisie à la sincérité avait participé à son ascension dans le milieu, mais les conséquences sur sa vie se ressentaient dans les moments difficiles. De son point de vue, Eli et lui étaient suffisamment proches désormais pour se faire quelques confidences intimes sans craindre d'outrepasser le cadre professionnel de leurs premiers échanges. Mais aussi lucide pouvait-il être dans ses choix de carrière, Micah était d'une naïveté sans nom hors du champ des caméras. Il avait déjà lu des citations privées dans des magazines sans en reconnaître les sources. La mise en garde de Jo résonnait encore dans un coin de son esprit. Il était peut-être temps d'arrêter de mettre tout le monde au même niveau. « Bien-sûr qu'on est venu noyer mes tracas dans du champagne hors de prix. L'avantage, c'est que ça file pas des maux de tête le lendemain. » avait-il entamé à moitié ironique. Son objectif plus ou moins conscient était de tellement profiter de cette soirée qu'il en oublierait les contours. Et comme pour appuyer ses propos, il engloutit le contenu de sa flûte pour le simple plaisir de se resservir. « Même si j'ai aucun mal à raconter mes problèmes, j'ai souvent l'impression que les gens les trouvent futiles. T'as jamais cette impression ? » En comparaison du commun des mortels, la plupart de ses problèmes étaient de fait futiles. Le diagnostic insoupçonné de son père avait presque des allures de mauvais karma. Une punition un peu sévère pour toutes ces fois où il avait méprisé les sentiments des autres au profit des siens. « J'ai appris par le biais de la presse que Lena me trompe potentiellement. C'est super agréable, d'apprendre qu'on est cocu en même temps que le reste du monde. » renchérit-il en opinant avec sarcasme. « Je me sens vraiment comme une grosse merde, et le pire c'est qu'elle m'ignore totalement depuis que je suis rentré de tournage. » Etait-ce la honte ou l'indifférence ? Peut-être bien un mélange des deux. Par fierté, Micah n'avait révélé à personne le petit secret de leur arrangement. Cet aveu aurait rendu son irritation encore moins légitime. « Nan mais franchement, elle m'a trompé. Elle m'a trompé MOI. Elle se prend pour qui putain ? »

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(#) Sujet: Re: boys will be boys (elijah) Mar 10 Oct 2023 - 0:18

Boys will be boys

@Micah Tomlinson & Elijah Walker
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La dynamique partagée par Micah et Eli était si délicieusement simple qu’elle en devenait remarquable aux yeux de l’héritier. Depuis quelques années, il n’existait dans sa vie que deux types de relations – celles mondaines et vides de substance, et celles pleines de sens où rien n’était jamais simple, rythmées par autant de malentendus que de conflits. Ceux qui l’amusaient ne l’intéressaient pas suffisamment pour qu’il eût envie de creuser davantage les liens qui les unissaient, et ceux auxquels il tenait réellement ne faisaient que graduellement s’éloigner de lui au rythme des différends qui les séparaient. Micah semblait constituer une exception rafraîchissante à cette règle pour le moins pénible, et l’acteur avait habitué l’héritier à une compagnie aussi divertissante qu’elle n’était intéressante, alternant les pitreries avec des moments plus sincères, sans jamais s’enfoncer dans des réflexions susceptibles de trop alourdir l’atmosphère. Lorsque l’un risquait de devenir maussade, l’autre l’arrachait joyeusement à ses tracas, sans pour autant donner l’impression de ne pas s’en soucier, et de cette dynamique avait émergé leur camaraderie désormais bien assise. Eli ne se lassait pas des moments proposés par son acolyte, et se complaisait dans les cadres où il l’invitait régulièrement, nullement étranger à l’opulence à laquelle l’avait habitué Micah et qui n’était pas sans lui rappeler celle dans laquelle il avait grandi, et dont il aimait profiter bien plus qu’il ne l’admettait au premier abord, golden boy qui se voulait bien plus accessible qu’il ne l’était malgré lui. S’il savoura comme il se devait le champagne scandaleusement cher commandé en quantités par Micah, il ne s’émerveilla pas pour autant de son goût – après tout, il ne comptait plus le nombre de coupes du même millésime qu’il avait déjà eu l’occasion de déguster au cours de années de vie privilégiée. Il ne manqua toutefois pas de complimenter son acolyte sur son choix de champagne, esquissant un sourire amusé à la question rhétorique que celui-ci lui adressa en guise de réponse. « Absolument jamais », concéda-t-il sans détour, hochant la tête d’un air faussement solennel avant de reprendre une généreuse gorgée de son verre.

Et si le sourire de l’architecte ne disparut aucunement de ses lèvres, il se teinta d’une nuance un peu plus sérieuse derrière la légèreté employée pour s’enquérir, de manière détournée, des motifs qui avaient sous-tendu l’invitation pressée de Micah. Eli pouffa à la réponse de l’acteur, dont le ton narquois ne dissimula toutefois pas parfaitement la préoccupation qu’il pouvait deviner entre les lignes de son discours faussement détaché, et piqua son attention. Eli maintint en direction de Micah un regard à la curiosité prudente, comme pour l’encourager à élaborer sans lui donner l’impression d’être à l’affût des derniers ragots. L’héritier arqua un sourcil amusé devant l’ardeur employée par Micah pour finir son verre, et n’attendit pas davantage pour en faire autant, avant de tendre son verre pour se faire resservir en attendant que son comparse ne reprenne la parole. À la réflexion suivante de l’acteur, Eli hocha la tête d’un air entendu, sans parvenir à réprimer un sourire teinté de cynisme en renchérissant : « Faut croire que c’est le prix à payer pour la belle vie qu’on mène loin de la réalité. » Il avait beau se revendiquer terre-à-terre, il savait parfaitement qu’il menait une vie déconnectée de la réalité, et se permettait de l’admettre à voix haute devant Micah dont il savait qu’il vivait avec autant de privilèges que lui. Mais Micah semblait avoir autre chose à l’esprit que de philosopher sur les tenants et aboutissants de leur rang social à tous les deux, et ne tarda pas à révéler le fond de sa pensée à un Eli qui grimaça aussitôt à l’entente de la source des tracas de la coqueluche des médias, qui avait visiblement essuyé un revers de la part de ces derniers. « Merde alors », laissa-t-il échapper, loin de son éloquence habituelle, tout en secouant la tête d’un air navré, remplissant précipitamment leurs verres entretemps déjà vides, avant de reporter son regard sur Micah dont l’expression s’était faite plus maussade derrière les sarcasmes qu’il prononçait d’un ton acerbe. « Merde », répéta-t-il sans s’en rendre compte, « je suis désolé, vieux. » Il n’eut toutefois pas le temps d’élaborer que Micah surenchérit, visiblement rattrapé par des émotions difficilement contenables. « Tu es sûr qu’elle t’a trompé ? Aucune chance que ce soit quelque chose que les médias ont déformé ? », demanda-t-il prudemment, avant de rapidement abandonner l’angle rationnel vers lequel il s’était automatiquement tourné, conscient que Micah n’avait sans doute pas besoin de réfléchir, mais davantage de se décharger de la colère suscitée par la situation. « En tout cas, si c’est vrai, c’est certainement pas toi la merde dans cette histoire – ça, c’est celle qui a aucune honte à t’humilier en te trahissant », ajouta-t-il donc d’un ton ferme, s’exprimant avec d’autant plus d’ardeur qu’il ne connaissait que trop bien ce sentiment de trahison. « Allez, bois ton verre. Elle va pas se faire oublier toute seule, tu sais », le provoqua-t-il avec un sourire en coin, brandissant déjà la bouteille pour resservir sa quatrième flûte à Micah sitôt qu’il eût vidé la sienne, comme pour montrer l’exemple. Un mauvais exemple, certes – mais Eli n’était pas qu’un excellent compagnon de soirée, il était avant tout une mauvaise influence d’une efficacité redoutable lorsqu’il s’était mis en tête de faire passer un bon moment à quelqu’un.

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(#) Sujet: Re: boys will be boys (elijah) Sam 4 Nov 2023 - 17:52

Ne pas avoir à convaincre que ses états d'âme valaient autant que les autres était le principal avantage de fréquenter des gens riches et privilégiés à son image. Et c'était la raison pour laquelle les échanges étaient si fluides et naturels avec Eli, car depuis le départ ils s'étaient identifiés l'un à l'autre, à la fois dans l'opulence de leurs modes de vie et dans la suffisance avec laquelle ils se complaisaient. Elijah avait parcouru le monde et hérité des exigences luxueuses de ses parents, chose que les parvenus ne pouvaient jamais comprendre, et que Micah se lassait de devoir expliquer. Oui il avait grandi avec une cuillère en argent dans la bouche, mais était-ce de sa faute ? Et à sa place, qui ne profiterait pas de ses privilèges, couplés à ceux d'être un homme blanc dans un monde qui leur faisait la part belle ? « Ouais, j'imagine... ça me paraît pourtant bien réél à moi. Je veux dire, ça se saurait si l'argent pouvait régler tous les problèmes. » répondit-il, moins fataliste que son ami. C'était peut-être l'âge, ou un certain cynisme, qui rendait Eli beaucoup plus catégorique que lui sur ce point. Ou justement le fait d'avoir fréquenté toute sa vie des personnes incapables de le comprendre, et qui avaient fini par le persuader qu'en comparaison, il n'avait pas franchement de quoi se plaindre. Micah n'était pas d'accord. Sa réalité, aussi séduisante vue de l'extérieur, n'en était pas moins implacable parfois. A commencer par ses émotions, qu'il devait souvent partager avec le reste du monde. Une intimité qu'il était forcé de partager, sous prétexte qu'il était une figure publique, et que ses moindres faits et gestes devaient faire l'objet d'un spectacle qu'on suivait avec autant de détachement qu'on prêtait de superficialité à ses histoires. Lui-même n'aurait pas été si affecté par cette supposée tromperie s'il n'avait pas fini par croire que cette relation avec Lena avait un fond de vérité. Il était beaucoup trop énervé par la situation pour quelqu'un qui n'avait de toute évidence aucun sentiment pour elle. Et cela l'arrangeait bien, finalement, de devoir faire semblant de jouer les copains jaloux, heurtés dans leur virilité, car c'était exactement ce qu'il ressentait à cet instant sans pouvoir tout à fait expliquer pourquoi. « J'y ai pensé. Que c'était juste une histoire imaginée par la presse à partir d'une photo sortie de son contexte. Mais j'ai l'intuition que c'est pas le cas, et le silence radio de Lena semble le prouver. » dit-il en reposant la coupe que son ami venait de remplir, comme s'ils ne pouvaient supporter la vision d'un verre vide. « Puis c'est surtout ça qui m'énerve, qu'elle assume même pas ses actes. » Perspicace, Eli chassa lui aussi bien vite ses pensées rationnelles. Ils n'en seraient pas là si Lena avait au moins pris ses responsabilités et répondu au téléphone. C'était certainement sa façon à elle de nier que quelque chose venait de se briser entre eux, et qu'elle en était la plus évidente coupable. « Et pourquoi je peux pas m'empêcher de penser que ce type est une merde lui aussi ? C'est pas comme si tout le monde était au courant qu'on se fréquente depuis un an. » Encore un charognard, attiré par la réputation que pouvait lui procurer ce genre de publicité gratuite. Il pouvait être fier, d'être celui qui avait fait passer le tombeur de la presse pour un cocu comme les autres. Micah espérait au moins que cet embarras le rendrait plus humain et accessible auprès du public. Après tout, si même lui pouvait se faire tromper, l'utopie de la fidélité existait-elle vraiment ? « Si j'avais son adresse, j'irais lui foutre mon poing dans la gueule sérieux. » N'importe qui lui rétorquerait que ce serait la pire idée du siècle en termes de relations publiques, mais ça n'en serait pas moins satisfaisant sur le moment. Les bulles lui montaient déjà à la tête, alors qu'ils trinquaient pour la troisième fois en l'espace de quelques minutes. C'était exactement ce dont il avait besoin, et c'était bien la raison pour laquelle Micah savait qu'il pouvait compter sur Elijah pour être aussi déraisonnable que lui. « Ouais t'as raison, qu'elle aille se faire foutre. Du moins une fois de plus. » conclut-il avec amertume en engouffrant son champagne, laissant le liquide glisser et pétiller sur son palais avant de déglutir. « C'est vraiment la lose, dis-moi que t'as des trucs sympas à raconter. »

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(#) Sujet: Re: boys will be boys (elijah) Dim 26 Nov 2023 - 18:50

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Progressivement, la tension accumulée par Eli au fil des derniers rebondissements et contrariétés qu’il avait traversés se dissipait tandis que disparaissait une quantité croissante de champagne hors de prix dans son gosier. Aux côtés de Micah, et grâce à la compagnie que celui-ci lui offrait à chaque fois qu’ils passaient du temps ensemble, tout lui semblait plus simple, moins grave, et il renouait systématiquement avec son éternel optimisme, récemment mis à rude épreuve mais pas disparu pour autant. Eli faisait certes preuve d’un sens de l’autodérision remarquable lorsqu’il s’agissait de critiquer ses propres problèmes – mais ses privilèges ni son mode de vie régulièrement déconnecté de la réalité du commun des mortels ne rendaient pas ses peines moins réelles, ni ses tracas moins envahissants. En présence d’autrui, il s’abstenait régulièrement de se lamenter sur son sort, conscient de sa chance dans bon nombre de domaines – mais sa chance ne l’avait jamais empêché de traverser autant de peines de cœurs que de ruminations terrifiantes au fil des années, et si le chagrin avait pu être résolu par un chèque, peu importe son montant, l’héritier l’aurait signé sans hésiter plutôt que de rester prisonnier des mécanismes impitoyables de son esprit démuni devant des émotions qu’il était incapable de gérer. Aux côtés de Micah, il se montrait cynique et évoquait leur condition avec légèreté – mais il savait, derrière son sourire potache, qu’il pouvait se livrer avec davantage d’authenticité sans redouter de rencontrer de l’incompréhension s’il venait à admettre que le luxe, la fortune et la réussite ne suffisaient pas à garantir le bonheur que beaucoup croyaient à sa portée. Il savait qu’il n’était pas obligé d’aborder les choses avec autant de légèreté, que sa sincérité ne risquait pas à le faire passer pour un abruti prétentieux aux yeux de son interlocuteur – car celui-ci le comprenait, lui et le monde dont il était issu. Micah l’osait, cette franchise qu’Eli avait contourné au moyen d’une remarque cynique – et la réflexion du comédien valut à ce dernier un regard bien moins sot de la part de son comparse, qui hocha la tête avec un sourire pas tout à fait joyeux. « À moi aussi. J’aurais dilapidé chacun de mes comptes, si ça avait suffi à tout résoudre », confia le Walker sans détour, s’essayant à son tour à un discours plus vrai, un où il avait le droit de verbaliser une souffrance que les zéros qui s’accumulaient derrière sa fortune ne suffisaient à soulager.

Eli accueillit attentivement le récit de la trahison dont Micah avait été victime, ne le quittant du regard que le temps d’attraper son verre à une ou deux reprises. Lui-même ne suivait pas vraiment ce qui se disait dans les tabloïds, et les quelques informations dont il avait connaissance au sujet de la vie de ceux que les paparazzis se plaisaient à poursuivre, il avait coutume de les entendre plutôt que de les lire – parfois de la bouche des principaux intéressés, parfois au travers des rumeurs que les uns et les autres se plaisaient à répéter au détour d’une conversation mondaine. L’infidélité de Lena faisait partie de ces informations qu’il avait ratées, jusqu’à ce que Micah en fasse la choquante révélation. Eli scrutait son ami avec une certaine incrédulité, mêlée à l’aversion que lui inspirait ce genre de comportements, dont lui-même avait fait les frais de la plus douloureuse des façons et qu’il s’était juré ne jamais infliger à quiconque. « Et toi, t’as essayé de la contacter ? », s’enquit-il, d’un ton suffisamment neutre pour ne pas sembler sous-entendre qu’il estimait que Micah aurait dû prendre les devants – dans ce genre de situation, il estimait qu’il était libre d’agir comme il le voulait. Il l’écouta poursuivre avec une animosité croissante, bien vite dirigée également vers celui dans les bras duquel Lena avait commis l’irréparable ; et si Eli fut poussé à croire que ce dernier n’était pas aussi fautif que celle qui avait failli à ses engagements envers son petit ami, il se garda bien d’en faire la réflexion à Micah, dont il savait qu’il avait besoin de déverser sa colère et sa frustration. « Ouais, je comprends. Mais je sais pas si ce mec mérite que tu t’abîmes la main pour lui », nuança l’héritier au sujet des projets de règlements de comptes de l’acteur, peu désireux de voir ce dernier s’attirer davantage d’ennuis. Il prit une généreuse rasade de champagne et hocha la tête d’un air appréciateur en voyant, progressivement, Micah recouvrer ses esprits après avoir évacué sa colère. Mais l’héritier ne tarda pas à toussoter et manquer d’avaler de travers sa gorgée à la requête que lui adressa un Micah visiblement en mal de nouvelles plus positives – il reposa lentement son verre, regrettant presque d’avoir diverti son interlocuteur maintenant que ce dernier s’intéressait à lui. « Euhm… », commença-t-il, un sourire embarrassé se dessinant sur ses lèvres tandis qu’il retrouva le regard de Micah. « Pour être sincère, j’ai pas vécu grand-chose de sympa ces derniers temps. Je viens de passer quelques semaines assez pourries. » L’euphémisme était si énorme qu’il en devenait pratiquement obscène, mais Eli n’avait jamais raffolé de se montrer sous un jour vulnérable, et les mots plus francs s’accompagneraient automatiquement de ce risque. « Disons que j’ai fait pas mal de conneries à cause d’une fille », poursuivit-il, vaguement, avant de se reprendre : « Enfin, à cause de moi-même. » Il termina son énième verre et, dans un geste devenu presque automatique, il remplit à nouveau leurs verres. Remettre la faute sur l’autre était aussi facile que séduisant, et Flora avait été à l’origine de bon nombre de frustrations chez l’héritier – mais ce dernier ne pouvait se résoudre à lui faire porter le chapeau pour ses propres mauvaises décisions, quand bien même cette option semblait tentante pour l’incorrigible lâche qu’il pouvait être.

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(#) Sujet: Re: boys will be boys (elijah) Lun 29 Jan 2024 - 22:25

Au-delà de son rang, et de ses convictions résolument similaires, Elijah était d'une compagnie réconfortante. Son métier y était peut-être pour quelque chose, l'obligeant à s'intéresser aux autres, et à se montrer sous son plus beau jour. Ou peut-être que son âge pesait dans la balance lui aussi, lui conférant davantage de clairvoyance sur la nature des gens, et sur ce qu'il pouvait tirer d'eux. Malgré sa maturité et ses airs aristocratiques, il ne donnait pas l'impression à Micah de mépriser ses états d'âme, possiblement parce qu'il n'était pas enfant unique, et qu'il avait déjà composé avec l'immaturité d'un cadet, né avec les mêmes privilèges et la malédiction inéluctable de ne jamais être à sa hauteur. Mais la relation qui animait la fratrie Walker l'intéressait bien moins que le poids accablant de leur héritage familial. Comme Micah le disait si bien, l'argent n'avait pas le pouvoir de résoudre les problèmes, et il lui arrivait même parfois d'en être à l'origine. « Clairement, ni toi ni moi serions riches. » conclut-il avec ironie. Micah était conscient des tracas de son ami, mais avant tout, il lui importait de ne pas les hiérarchiser. Comme lui, Elijah donnait souvent l'impression d'être un peu frivole, voire de n'avoir aucune émotion négative. On les accusait un peu facilement d'être égocentriques, mais pouvait-on faire preuve de plus d'abnégation qu'en refusant d'embarrasser les autres avec ses propres problèmes ? « Après, je préfère encore être un riche avec des problèmes que pauvre. » renchérit-il en étouffant un rire un peu gras, typique de ces ruses qu'on employait pour ne mettre fin à une discussion qui s'annonçait trop sérieuse. Micah était bien conscient que son histoire était d'une banalité affligeante, mais la gravité avec laquelle Eli l'écoutait, opinant d'un air presque désabusé, était la raison pour laquelle il avait pensé à lui pour la raconter. Il ne faisait que spéculer, déversait une colère qui ne s'exprimerait de fait pas autrement que dans des mots pas toujours très polis, mais à la mesure de ses sentiments présents. D'ailleurs, Elijah ne lui demandait pas d'être poli, ni même mesuré, mais il savait faire en sorte de l'apaiser. « Bien-sûr que j'ai essayé. La seule option qu'il me reste c'est d'aller chez elle, mais ça ferait vraiment de moi un pauvre type. » Jamais Micah ne s'abaisserait à se pointer sur le pas de sa porte, car de toute manière ils n'avaient aucun compte à se rendre. Il trouvait qu'un message, même laconique, aurait au moins suffi à étancher une partie de sa colère. Tout ce qu'il demandait, c'était une explication, à défaut de vaines excuses. « Ni ma main ni ma réputation si tu veux mon avis. C'est pas la bonne époque pour jouer des poings. » Le plus drôle, c'était que Micah n'aurait certainement pas survécu cinq minutes dans une arène, à cette époque tant fantasmée durant laquelle on réglait ses comptes avec des promesses de mort. Sa diatribe, qui se résumait à des paroles qu'il n'assumerait jamais, avait au moins eu le don de le calmer. Il but une, deux, puis trois autres gorgées de champagne pour hydrater sa gorge asséchée par le feu de sa jalousie, tandis que son interlocuteur manquait de s'étouffer. A l'évidence, Elijah ne s'était pas attendu à devoir raconter ses propres déboires ce soir. « Merde, il t'est arrivé quoi ? » avait demandé Micah, sincèrement préocuppé. La réalité le rattrapa soudain. « Désolé mec, je débite depuis 5 minutes sur mes histoires de cocu alors que t'as visiblement pas passé une meilleure journée que moi... Et en plus t'es assez sympa pour m'écouter sans te plaindre. » se flagela-t-il, une main posée sur la table qui se dressait entre leurs sièges. « C'est quoi que t'appelles des conneries ? »

@Elijah Walker

Baby, what's your sign?
My moon's in Leo, my Cancer is sun. You won't play, you're no fun. Well, I don't care what they think. Drag racing my little red sports car. I'm not unhinged or unhappy, I'm just wild - Lana Del Rey (Chemtrails Over the Country Club)

Boys will be boys

@Micah Tomlinson & Elijah Walker
( AVRIL 2023 )

Eli n’avait jamais été de ceux qui abordaient les questions de cœur avec raison. Il se vantait d’avoir la tête froide et de maîtriser tant ses émotions que ses réactions ; mais il n’en demeurait pas moins foncièrement impulsif, et surtout, profondément idiot dès lors que les sentiments avaient tendance à se faire trop complexes. Avec les années, l’héritier était devenu de plus en plus calculateur et laissait de moins en moins de place à la spontanéité : s’il était d’un naturel avenant et affable, doté d’un contact aussi facile qu’agréable, derrière sa façade accessible, il n’était rien de moins qu’un monstre de contrôle. On lui avait brisé le cœur une fois, et on ne l’y reprendrait plus jamais, voilà ce qu’il avait décidé près d’une décennie auparavant. Il avait fait les frais de la trahison la plus cruelle au moment où il s’était autorisé à être plus vulnérable que jamais, trop naïf pour soupçonner l’autre d’être capable de lui faire du mal. Au final, il s’était retrouvé anéanti, meurtri et honteux, mais surtout suffisamment en colère, tant envers celle qui avait réduit son cœur en poussière qu’envers lui-même pour avoir été aussi stupide, que pour se jurer de ne plus jamais subir le même sort que celui qu’on lui avait réservé le jour où il avait décidé de confier son cœur sans réserve. Désormais, et ce depuis des années, Eli ne s’autorisait à n’être rien de plus qu’un amant qui maniait certes avec talent tant le corps que les mots, mais qui demeurait profondément vide de substances ; quant aux femmes qu’il séduisait, il ne les autorisait jamais à devenir davantage qu’une aventure sans lendemain. Devenu un coureur de jupons invétéré qui aspirait à maîtriser la totalité des émotions malvenues susceptibles de surgir, il n’était en réalité rien de plus qu’un homme mortellement effrayé par la perspective d’une perte de contrôle, aussi infime fût-elle : rien n’était jamais laissé au hasard, et tout était mis en œuvre pour dissocier intégralement ses aventures charnelles des sentiments que celles-ci menaçaient d’engendrer.

Fort de sa mauvaise foi crasse, Eli se fit la réflexion, en découvrant les mésaventures récentes de Micah, qu’il avait raison de se refuser le droit à l’amour depuis des années : il voyait son comparse comme la preuve vivante qu’il ne valait mieux pas accorder sa confiance en amour, que faire preuve d’une pareille vulnérabilité relevait d’une condamnation à se faire briser le cœur. Micah et lui rivalisaient de remarques potaches pour alléger l’atmosphère à tour de rôle, avant de renouer avec une sincérité plus brute, mettant le doigt sur des doutes, des faiblesses et une douleur sans doute difficile à verbaliser. Eli écouta attentivement son ami, dont la colère déguisait mal la souffrance, et, à l’issue d’un rire qui s’échappa de bon cœur d’entre ses lèvres à la plaisanterie de Micah, il reprit une mine plus sérieuse alors que ce dernier déplorait l’absence totale de communication entre Lena et lui depuis la nouvelle. Avec ferveur, Eli secoua la tête de gauche à droite avant de renchérir, abondant toujours dans le sens de son acolyte : « Non, ne fais pas ça. Pas que je pense que ça fasse de toi un pauvre type – je comprends la tentation. Mais selon moi, elle t’envoie un message suffisamment clair comme ça. » La voix posée du Walker n’était pas dépourvue d’une certaine amertume, bien qu’il ne connaisse absolument pas celle qui partageait jusqu’alors la vie du comédien : il était si loin de leur relation qu’il ignorait le caractère initialement artificiel de celle-ci. Une courte pause et une nouvelle paire de gorgées de champagne plus tard, Eli précisa son propos. « Soit elle en a rien à cirer, soit elle est trop lâche pour assumer les conséquences de ce qu’elle t’a fait. Dans tous les cas, à ta place, je perdrais pas mon temps avec une nana qui me manque à ce point de respect, et en plus, qui refuse de me parler quand j’essaie de comprendre », conclut-il d’un ton catégorique, tout en omettant un détail pourtant non négligeable : Eli ne perdait son temps avec personne, pas même les femmes qui lui témoignaient le respect dont il venait de déplorer l’absence. Mais, dans sa vision biaisée des choses, il ne jugea pas pertinent de broder autour de ce qu’il estimait être le seul message-clé de son propos : l’infidélité, surtout couplée à la lâcheté, ne méritait ni pardon, ni effort supplémentaire. Son expression pratiquement courroucée finit par s’égayer d’un nouveau sourire et il hocha vigoureusement la tête, l’air un peu plus amusé alors que Micah se résigna à ne pas s’en prendre lui-même à celui dans les bras duquel Lena l’avait trahi. « Non, c’est clair. Il en vaut pas la peine », affirma-t-il avec conviction, témoignant un soutien inconditionnel à son ami qui avait davantage besoin de validation que de nuance.

Ils arrivèrent bientôt au bout de l’onéreuse bouteille dont le prix faramineux n’avait eu aucun impact sur la vitesse de leur consommation, et Eli n’hésita pas à demander à l’une des serveuses de l’établissement d’en apporter une autre. Il y vit une occasion de se défiler alors que Micah semblait regretter d’avoir monopolisé la conversation, loin de se douter qu’Eli aurait préféré éviter que l’attention ne dévie sur ses problèmes à lui. Une fois la nouvelle bouteille servie et ouverte, le Walker prit une interminable gorgée de sa flûte, visiblement peu pressé de répondre à la question de son ami, qui reprit finalement la parole avant qu’il ne réponde, offrant ainsi l’occasion idéale à Eli de rebondir sur un sujet moins épineux que le précédent. « Non mais t’inquiète, vraiment. Je préfère écouter les autres se plaindre que d’avoir à me lamenter moi-même », plaisanta-t-il seulement à moitié, bien plus sincère que ne le laissait entendre son sourire potache. Eli vint chercher une nouvelle dose de courage liquide dans sa flûte et finit par hausser les épaules en poussant un soupir à fendre l’âme, avant de se résoudre à arrêter de tourner autour du pot. « Je me suis pris la tête avec une fille, puis je me suis pris la tête avec mon frère. Ça a pris des proportions assez extrêmes, et – bon, disons que j’ai jamais été très doué pour gérer mes problèmes autrement qu’en les noyant dans des consommations », ricana-t-il sans joie, secouant légèrement la tête d’un air embarrassé. « Des consommations que j’étais censé avoir abandonné pour de bon il y a des années », précisa-t-il d’un ton réticent, son regard d’ordinaire téméraire s’étant soudain fait un peu plus fuyant.

rainmaker

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