Siham et personne d’ailleurs, n’était plus en mesure de dire combien de jour s’étaient écoulé depuis le début de la malédiction. L’eclipse avait plongé Brisbane dans le noir total et la nuit était à présent infinie. Le manque de vitamine D se faisait ressentir, une fatigue chronique se lisait sur les visages de tout le monde. Les cycles du sommeils étaient perturbés et s’y ajoutaient la peur constante de voir ses jours se finir. Les hommes avaient peur pour leurs femmes et leurs enfants, les femmes avaient peur de manquer de vigilences, de voir leurs progénitures se faire dévorer sous leurs propres yeux. Les enfants avaient peut de devenir orphelins. Ils étaient nombreux, ceux à qui il manquait un membre de leurs famille, ceux à qui ont avait arraché un bout de leur chair. Siham en faisait partie. Elle avait vu sombrer l’homme le plus important à ses yeux, celui qui lui avait donné la vie, son père. Là non plus, elle n’était pas en mesure de dire depuis quand il manquait à l’appel. Les jours se ressemblaient terriblement, même si Siham avait à présent de quoi s’occuper. Petit à petit, elle délaissait sa place à la blanchisserie de l’hôpital pour apprendre à maitriser ses nouvelles compétences. Elle était une sorcière en soif d’apprentissage, elle brûlait les étapes, elle allait trop vite et elle était si sûre d’elle qu’elle n’y voyait pas le danger. Pourtant, tout le monde la mettait en garde. Chaque chose en son temps, mais elle n’avait pas le temps pour repousser sa vengeance. « Je te promets, je te promets que je le retrouverai… que je le traquerais… je le tuerai. » elle était agenouillée sur cette tombe dont les inscriptions étaient si vieilles qu’elles étaient effacée par le temps, la pierre était détériorée, rongée par les pluies acides australiennes. Ce n’était pas la tombe de son père, lui n’avait pas eu la chance d’en avoir une. Lui se trouvait dans la fosse commune, entassé avec des centaines d’autres corps, des cadavres qu’on avait entassés, faute de place, faute de pouvoir creuser autant de tombe pour autant de cercueil. C’est ce qui arrive dans la malédiction s’abat sur une ville entière.
« Vous êtes sûre que vous êtes au bon endroit ? » Siham se redressa, ne s’attendant pas à être interrompue. Elle se retourna et vit ce jeune homme, aux joues sales, aux vêtements anciens et tâchés de terre. « Désolée… vous vouliez vous recueillir ? » elle se leva à présent, laissant la place. « Je me disais que ces tombes devaient être abandonnées… » donc, il était étrange d’y venir y faire ses prières non ? « Mon père se trouve dans la fosse, j’avais besoin d’un endroit pour avoir la sensation de m’adresser directement à lui… »

   « Non… Je travaille ici. » Siham toise, le regarde de haut en bas, comprend mieux la terre, comprend mieux la pelle. Bien qu’il tenait cette dernière comme s’il était prêt à l’utiliser à tout moment, non pas pour creuser un trou, mais bien pour se défendre de quelque chose, ou attaquer quelqu’un. Tous les moyens étaient bons, semble t il, quand on a pas d’autres choix…
Siham travaillait dans les sous sol de l’hopital, dans la blanchisserie, elle nettoyait des heures durant des draps tâchés de sang, souillés de substances corporelles en tout genre. Elle ne voyait quasiment personne de ses journées lorsqu’elle y était, mise à part sa chef et son collègue. Trois pour faire tourner cette usine, laver à l’eau clair et frotter à la force de ces mains. Rien de très glorieux, elle était aussi chaque jour dans la crasse et dans la solitude. Quelques similitudes avec ce jeune homme qui s’occupait du cimetière. Même si les sous-sols de l’hôpital semblaient être plus sûres pour Siham que les caveaux entre ouverts qui régnaient ici.
S’expliquant sur les raisons de son recueillement, sur cette tombe précisément, Siham avait bien conscience que ça pouvait être déplacé. « Merde… » pour son père ? pour le fait de prier sur une tombe dont elle ignore l’appartenance ? Peut être priait-elle sur la sépulture d’un criminel qui se foutait bien de recevoir ses larmes sur son marbre. « Il y a une tombe un peu plus haut d’une personne anonyme. Elle est souvent visitée et fleurie. Y’a pas de nom dessus alors les gens font comme toi là… Mais là bas. Tu veux j’te montre ? » elle se sentait aussitôt bien moins idiote. Elle n’était finalement pas la seule… elle se mis debout, essuyant ses genoux de la terre qu’elle avait ramassé en se redressant et hocha la tête. « C’est mieux là bas, faut se méfier des coins trop éloignés où y’a pas un chat comme ça. » elle pouvait tout aussi bien se mefier des endroits bondés, noyé dans la foule est jamais plus en sécurité que seul dans un coin. « Je… te suis. » elle posa ses yeux à nouveau sur cette pelle. « tu devrais demander à ce qu’on te donne autre chose comme arme pour pouvoir mieux te défendre… » Cesar lui avait dit que les pieux en bois et les armes dont les munitions étaient aussi en bois valaient mieux que toutes autres. Pour les vampires, du moins. « Il y a plein de tombes ouvertes… » fit-elle, le sang glacés. Autant de tombe ouverte que de cadavres qui en étaient sorties ? Sur l’une d’elle, elle pouvait lire:
Chaque jour, je me souviens de toi,
Un être cher qui n'est plus là,
L'amour que tu as laissé derrière toi,
Le doux écho de ta voix résonne encore,
Etreinte chaleureuse, dans nos cœurs, tu vis encore,
Nostalgie et larmes, ton absence est un poids.

Tristesse.

« Il y a plein de… créatures qui ont l’air de… se divertir des fois. Je sais pas trop. Je me contente de creuser les trous qu’on me demande. Je cherche pas plus loin ou je serai déjà devenu fou. »  avait-il passé un pacte avec le diable pour pouvoir travailler ici et être épargné par les créatures ? En était-il une lui-même ? Avait-il quelqu’un qui le surveille et le protège à chaque instant de toute monstruosité ? Après tout, le cimetière n’avait-il pas besoin d’un veilleur jour et nuit pour prendre soin de ses tombes et de ses morts ?  Il avait forcément vu des choses terrifiantes, comme tout le monde d’ailleurs depuis la malédiction, sauf que tout le monde ne choisissait de travailler dans le lieu le plus exposé de la ville…
« Et j’ai… d’autres choses pour me défendre. »  La jeune sorcière décale son regard vers lui, se retirant de la tombe qu’elle avait sous les yeux et de ses écriteaux. Elle ne voyait que cette pelle mais après tout, il dissimulait peut être autre chose sous ses vêtements. Ou peut être qu’il pouvait compter sur sa force physique, peut être qu’il était doté d’agilité supérieure à la moyenne,  qu’il était rusé et que ses sens étaient développés suite à une mutation… qui sait. Siham restait prudente malgré tout. Elle ne sentait pas cette odeur caractéristique des loups en s’approchant de lui, mais peut être que sa baisse d’attention pouvait lui jouer des tours. Elle savait très bien qu’elle ne maitrisait pas toujours ses nouveaux pouvoirs. Ils pouvaient se retourner contre elle aussi. « Vous vous avez quoi pour vous défendre ? » elle se pinça les lèvres. Fallait-il lui révéler que derrière sa cape se trouvait le pieux en bois que lui avait conseiller d’acheter Cesar ? Que dans la poche arrière de son pantalon se trouvait un pistoler aux balles de bois ? Que dans botte droite, elle cachait une fiole d’un doux mélange de perles de rosées de minuit, de poussière de lune, de poudre de rêverie et d’aile de chauve souris luisante, un bon cocktail pour endormir quelqu’un longuement, sans le tuer pour autant. Il suffisait d’en humer le parfum pour tomber raide au sol. « Jamais sans mon pieux. » c’était faire gage de confiance de lui donner cette information tout en dissimulant le reste. S’il était un vampire, elle s’en rendrait bien vite compte. « où est cette tombe ? »