They didn’t expect to hear
the sound of those magic bells
Dahlia Jakande & @Shiloh Atkins

À peine avait-elle retrouvé la quiétude de l’illustre capitale du Queensland qu’une tempête s’était abattue, causant des dommages considérables aux habitations et aux infrastructures urbaines. Sous la puissance dévastatrice du cyclone, les toits d’ardoise avaient été emportés, les façades les plus chancelantes avaient cédé ; des arbres séculaires aux troncs massifs s’étaient brutalement rompus, forçant une partie des habitants à quitter leurs propriétés ravagées. Depuis plusieurs jours maintenant, les terres de Brisbane se trouvaient plongées dans un climat maussade et sépulcral, étaient devenues le théâtre d’un long cortège de destins brisés, marqués par la détresse et la désolation. Les rues asphaltées, autrefois tumultueuses, résonnaient désormais des échos d’histoires tragiques, portant les stigmates visibles — et invisibles — d’une Olga dévastatrice. Consciente des difficultés inhérentes à la mise en place d’un programme d’entraide et d’hébergement, l’israélienne regrettait de ne pouvoir contribuer pleinement à cette prodigieuse initiative. L’appartement qu’elle occupait dans le quartier nord de la ville, en plus d’être exigu, se trouvait dans un état vétuste et délabré. Les murs usés, les équipements défaillants et l’espace limité étaient loins de répondre aux normes de confort — comme à ses attentes — mais constituaient la seule option viable qu’elle ait trouvé pour renouer avec les fantômes du passé.

Vêtue d’un costume de Mère Noël, Dahlia découvrait avec admiration et émerveillement un lieu dont elle foulait le sol pour la toute première fois. En cette période délicate, le Sirromet Winery s’était drapé d’une atmosphère festive, métamorphosant son cadre habituel en une scène féerique dédiée au réveillon de Noël des plus jeunes. Les façades en pierre des édifices étaient ornées de guirlandes lumineuses qui diffusaient une douce lueur dans le crépuscule en déclin, aux subtiles nuances de rose, d’orange et de pourpre. Des décorations étincelantes, méticuleusement disposées le long des rangées de vignes, orchestraient une symphonie visuelle et scintillaient comme des éclats de constellations jonchant une immense toile céleste. Se mêlant à cet univers enchanteur, des bénévoles revêtus de costumes de lutins déambulaient, des paniers garnis de friandises aux mains pour la plus grande joie des enfants. Ce spectacle captivant fit naître un sourire authentique sur les lèvres de l’israélienne. Durant quelques secondes, elle s’imagina voir la frimousse d’Alma au milieu de ces petites silhouettes bondissantes. Elle la visualisait brune, de petite stature, avec de jolis yeux en amande ; la teinte exacte de ses iris lui échappait néanmoins, et les contours de son visage demeuraient relativement flous. Dahlia prit alors conscience qu’elle ignorait complètement à quoi ressemblait la chair de sa chair ; sa propre fille était une étrangère.

La réalité avait une fâcheuse tendance à éclater de manière brutale, à l’instar d’une grenade artisanale, et à laisser des cicatrices indélébiles pour le reste de la vie. Le regard mordoré de Dahlia se perdit en direction de l’édifice principal, vers lequel elle se dirigea instinctivement. S’occuper d’autres enfants devenait essentiel, non seulement pour chasser les pensées d’Alma, mais surtout pour apprendre à tenir ce rôle maternel qu’elle n’avait jamais endossé. En chemin, la sylphide rencontra la silhouette valétudinaire d’un garçon haut comme trois pommes à qui elle offrit un sucre d’orge. Ce simple geste fit apparaître un sourire édenté qui s’étira généreusement, jusqu’à ses petites oreilles apparentes. « J’ai cru comprendre que tu avais été sage. » — « Très sage ! » répliqua-t-il promptement, sans même reprendre son souffle. Un rire clair et mélodieux jaillit des lèvres de l’israélienne. « Dans ce cas je te conseille d’ouvrir grand les yeux. Le Père Noël est parmi nous ce soir et sa hotte est remplie de cadeaux. » Les yeux du garçonnet s’élargirent comme des soucoupes et, subitement, il se précipita à travers le vignoble en criant aux autres enfants qu’il était urgent de trouver le Père Noël et sa hotte pleine de présents. Une expression mutine se dessina sur le visage de la jeune femme tandis qu’elle croisait les prunelles d’une seconde Mère Noël. « Je ne m’attendais pas à ce qu’il ameute le vignoble tout entier. » confia-t-elle, son sourire s’élargissant encore — comme si cela était possible — en réaction à l’air radieux de la blonde. « Mais j’ai hâte de voir ça. » Le Père Noël pris d’assaut, ce n’était pas quelque chose qui se produisait tous les jours. « Tu dois être la seconde Mère Noël du réveillon. Je suis Dahlia, enchantée. »

(c) fuckyougifs & raquelsgifs

they didn't expect to hear the sound of those magic bells

@"DALHIA JAKANDE" & SHILOH

« Dis, dont elle est vraiment très jolie ta robe. » Sourire aux lèvres, je m’agenouillai pour me trouver au niveau de la petite fille qui était venue à ma rencontre de son propre chef. Ses petites joues rondes se tintèrent d’une légère couleur rosée alors qu’elle observait mon accoutrement de ses yeux emplis de merveille. « Est-ce que tu es venue voir le Père Noël ? » Elle hocha la tête, approchant tout doucement sa main de mon col à fourrure. Sans jamais me défaire de mon sourire, je lui laissais le temps dont elle avait besoin pour s’approcher un peu plus. Ses doigts vinrent caresser lentement la fourrure de ma capuche dans un geste répétitif. « C’est tout doux. » Je lui adressai un nouveau sourire éclatant alors qu’elle releva les yeux vers moi. Elle ne devait avoir que trois ou quatre ans, pas plus, et elle paraissait si timide par rapport à tous les enfants qui étaient venus me voir depuis mon arrivée. Sans jamais lâcher son étreinte sur mon costume, elle commença à s’ouvrir un peu, me racontant qu’elle avait demandé une peluche aussi douce au Père Noël et qu’elle espérait bien la recevoir. « Je suis sûre qu’il a trouvé la peluche parfaite pour toi. » Mes paroles eurent le don de lui arracher un léger sourire et je n’avais pas besoin de plus pour me sentir comme la personne la plus chanceuse du monde. « Mais si tu me dis ton prénom, peut-être que je pourrais lui rappeler pour être bien sûr qu’il a tout pris en note. » Elle hocha de nouveau la tête avant de murmurer tout doucement. « Je m’appelle Grace. » Sa réponse comme un trésor à chérir alors qu’elle son attention fut immédiatement attrapée par un petit garçon qui se mit à hurler entre les allées que le Père Noël se cachait quelque part et que les enfants devaient le trouver. « Tu devrais aller voir avec eux. » Elle hocha la tête et fut entraînée par le reste d’un petit groupe qui était vite venu la chercher. Me redressant, je l'observai s'éloigner sans jamais me défaire du sourire qui s'était imprimé sur mon visage depuis mon arrivée.

J'étais tombé sur l’annonce un peu au hasard, mais je n’avais pas hésité une seule seconde pour envoyer ma candidature, proposant même de confectionner quelques costumes pour l’occasion. C’était toujours un plaisir de pouvoir donner de son temps, et encore plus lorsqu’il s’agissait de le faire pour les enfants. Ils avaient tous été effrayés par la tempête qui était venue ravager la ville et il était important de leur donner l’occasion de se plonger pleinement dans l’ambiance des fêtes. Je ne pouvais qu’être heureuse de les voir s’agiter de la sorte, alors qu’une jeune femme vint se poster à mes côtés pour mieux observer le joyeux bordel créé par le petit garçon. « Je ne m’attendais pas à ce qu’il ameute le vignoble tout entier. » Je ne pu m’empêcher d'éclater de rire. « C’est donc toi la responsable. » Et une nouvelle fois, le petit garçon hurla que le Père Noël allait arriver. « Mais j’ai hâte de voir ça. » Me tournant vers elle, je ne pus m’empêcher de sourire. « Au moins, on est certain qu’il y en a au moins un qui est réellement heureux de voir le Père Noël. » L’homme qui avait été sélectionné pour le rôle n'était pas encore arrivé, c’est bien pour cela que l’on nous avait demandé d’occuper un peu les enfants en attendant. « Tu dois être la seconde Mère Noël du réveillon. Je suis Dahlia, enchantée. » - « Shiloh, ravie de te rencontrer. » Une horde d’enfants passèrent entre nos jambes avant qu’un petit bonhomme s’arrête net devant nous. « Vous êtes jolies. » Et avant que je n’aie le temps de dire quoi que ce soit, il avait décampé à son tour. « On a du succès. » que je ne pus m’empêcher de souligner en riant quelque peu. « Tu penses qu’on devrait un peu calmer les turbulents ? » Je n’avais jamais participé à ce genre de réveillon, mais il ne serait pas bien difficile d’attirer l’attention des enfants. « On leur raconte une histoire pour les faire patienter encore un peu ? » Ou peut-être avait-elle en réserve une idée plus originale que la mienne.

:

They didn’t expect to hear
the sound of those magic bells
Dahlia Jakande & @Shiloh Atkins

Les iris aux reflets mordorés de l'israélienne observaient la petite silhouette bruyante et bondissante qui s'élançait à travers les vignes. Bien qu'elle eût connaissance de l'embauche de quelqu'un pour endosser le rôle du Père Noël et réchauffer les cœurs des enfants, elle était aussi persuadée de ne pas encore l'avoir croisé. Avait-elle divulgué la nouvelle un peu trop tôt ? « C’est donc toi la responsable. » Un sourire s'épanouit sur ses lèvres pleines, spécialement parées d'un voile vermillon pour l’occasion. « Je crois que je vais avoir du mal à dire non. » Le parfum de l’australienne, aux effluves fraîches et toniques, emplirent les narines de Dahlia lorsqu’elle s’approcha. « Il y a beaucoup trop de témoins pour que j’ai une chance de plaider l’innocence. » Pendant deux ou trois secondes, ce fut comme si elle regardait au travers des formes déambulant sur le domaine ; visages marqués par les années, épaules voûtées, ventres ronds, et bambins. Toute la population de Brisbane semblait avoir répondu à l'appel, du moins celle partageant la félicité de Noël à l’européenne. Cela lui procurait l'impression de contempler un tableau particulièrement joyeux ; une œuvre remarquablement réaliste, peinte par un artiste coi. Un appel à quelques mètres d'elles la tira de sa rêverie. « Ruby, pas si vite ! Tu vas tout lâcher ! » Les pupilles de l’israélienne glissèrent vers la fillette qui se déplaçait au pas de course, les bras chargés d’un panier gorgé de sucreries. Sa mère la suivait en trottinant, chaussée d'escarpins visiblement peu pratiques. « Au moins, on est certain qu’il y en a au moins un qui est réellement heureux de voir le Père Noël. » — « Un seul, tu crois ? » La petite fille, aux cheveux d'un blond presque blanc, pressa le pas en se dirigeant tout droit vers les plantations. Elle ignorait les cris de sa mère, campée sur ses échasses, convaincue qu'elle n'avait aucune chance de la rattraper. « Ruby, reviens ici ! Je t’interdis de courir à travers les vignes ! » Prise dans cette boucle sans fin de jubilations et d'éclats de joie, Dahlia se surprit de nouveau à imaginer la présence d'Alma. La douceur, l'amour et la chaleur que lui procurait la vision de tous ces enfants étaient semblables à un baume sur une plaie à vif. Apaisant, mais pas suffisamment pour l’affranchir de la douleur.

« Shiloh, ravie de te rencontrer. » La sylphide afficha un sourire poli, aussitôt distraite par une nouvelle salve de cris. « T’es qu’un menteur ! Tu l’as même pas vu d’abord. » — « C’est maman Noël qui me l’a dit ! » Le regard complice de Dahlia pivota vers sa consœur. Il ne lui avait suffi que de quelques secondes pour reconnaître le petit garçon à qui elle avait généreusement offert un sucre d'orge. « J’ai l’impression qu’ils pourraient se transformer en gremlins d’une minute à l’autre. » Ce qui, d'une certaine manière, risquait de se produire pour ceux qui croyaient résolument en la magie de Noël. Un petit groupe d'enfants, pas plus grands que trois pommes, les heurta, l'un d'eux se raccrochant à la robe de Dahlia. Ses yeux, empreints d'admiration, examinaient les deux jeunes femmes l'une après l'autre. « Vous êtes jolies. » Puis il s’éclipsa, avant même qu’elles n’aient eu l’opportunité de répliquer. « On a du succès. » C’était peu dire. Chaque enfant qu'elle rencontrait depuis qu'elle était arrivée sur le vignoble la contemplait avec des yeux peuplés de milliers d'étoiles. « Tu penses qu’on devrait un peu calmer les turbulents ? » — « Je pense que ce serait pas une mauvaise idée. » Elle ajusta son costume qui, manifestement, était un peu trop étroit. La sensation d'oppression lui rappelait les corsets imposés aux femmes des siècles passés. L’israélienne se sentait reconnaissante de ne jamais avoir eu à en porter. « On leur raconte une histoire pour les faire patienter encore un peu ? » L'idée n'était pas mauvaise, mais Dahlia était persuadée d'avoir aperçu une calèche quelque part sur le domaine. « J’ai peut-être quelque chose de mieux. Tu m’attends là ? » La sylphide fit demi-tour en direction du bâtiment principal, entraînant avec elle trois bénévoles déguisés en lutins du Père Noël. Ensemble, ils se dirigèrent vers la calèche qui, équipée de ses chevaux, attendait à l'arrière, puis revinrent jusqu'à l'endroit où Shiloh les attendait. « Qui veut faire un tour dans la calèche des lutins du Père Noël ?! »

(c) fuckyougifs & raquelsgifs

they didn't expect to hear the sound of those magic bells

@"DALHIA JAKANDE" & SHILOH

« Je crois que je vais avoir du mal à dire non. » Les paroles de la brunette furent accompagnées par les rires du petit diablotin qui venait de partir en criant à tue-tête. « Il y a beaucoup trop de témoins pour que j’ai une chance de plaider l’innocence. » Un rire m'échappe alors que je tourne le regard vers l’ensemble du vignoble et surtout sur la petite tête brune qui continuait à courir de partout à la vitesse d’un mini Sonic. « Je crois surtout qu’il n’hésiterait pas à te vendre. » Si on venait à stopper la terreur dans son élan, il serait sans doute le premier à tendre le doigt dans la direction de mon acolyte du jour. Et il ne serait certainement pas le seul, bientôt suivi par plusieurs enfants, dont une petite blonde qui se faisait pourchasser par sa propre mère. « Un seul, tu crois ? » Je ne peux m’empêcher de rire face aux réactions surexcitées des enfants qui nous entourent. « Tu as réveillé les terreurs. » Bon, il se pourrait que la moitié soit dans cet état pour cause d’une trop grande consommation de sucre. « Il va falloir qu’on les gère un peu. » Après tout, c’est le rôle qui nous a été attribué pour le reste de l’après-midi, faire en sorte que tout ce petit monde passe un bon moment sans pour autant créer des catastrophes.

« J’ai l’impression qu’ils pourraient se transformer en gremlins d’une minute à l’autre. » Une fois encore, je ne peux m’empêcher de rire face aux réflexions de la jeune femme. « Pas d’eau et pas de nourriture après minuit, on devrait être large. » Je me souviens de ce film, Nate adorait le regarder à cette période de l’année. « Ou alors c’est plus tôt vu qu’ils sont jeunes ? » Est-ce que l’on démarre le compte à rebours aux alentours de seize heures avec des mini personnes ? Mais leurs excitations communes ne faisaient que donner un peu de lumière aux préparatifs de Noël. Ils étaient adorables malgré tout, à venir vers nous sans trop nous approcher, ou pour nous faire un petit compliment avant de fuir à nouveau. Et je m'émerveille sans cesse devant leur enthousiasme, mais il devient important de reprendre notre rôle des mères Noël. « Je pense que ce serait pas une mauvaise idée. » Et alors que je nous imagine les attraper avec une histoire de Noël, ma camarade semble avoir une tout autre illumination. « J’ai peut-être quelque chose de mieux. Tu m’attends là ? » - « Je vais essayer de les amener vers moi. » Et alors que l’on se sépare, je me dirige vers un petit groupe qui nous observait de loin. Je peux voir dans leurs yeux qu’ils sont un peu émerveillés, mais je leur promets une surprise et deux petites mains viennent attraper les miennes, alors que Dahlia revient vers nous avec la meilleure surprise qui soit. « Qui veut faire un tour dans la calèche des lutins du Père Noël ?! » Et tout autour de nous éclatent des petites voix qui veulent avoir le droit en premier à un tour de calèche. « Attendez, tout le monde aura son tour. » J’attrape le petit garçon à mes côtés pour venir l’installer sur le siège et le regarde en souriant. « Tu t’accroches bien d’accord ? » Il hoche de la tête, prenant tout cela très au sérieux. On fait monter quelques enfants et une demoiselle demande à venir dans mes bras pour marcher à côté du cheval. « T’as eu la meilleure des idées. » que j’avoue à ma collègue alors que dans mes bras, la petite blonde fugueuse semble émerveiller par les mouvements de l’animal.

On fera deux tours avec une calèche complète avant que l’agitation se calme un peu. « Tu veux que j’aille nous chercher quelque chose à boire ? » Il ne fait pas une chaleur excessive, mais les petites terreurs nous posent mille questions à la minute et je sens ma gorge devenir de plus en plus sèche. « Te retourne pas trop vite, mais t’as un petit fan qui arrête pas de te suivre. » que je murmure alors que derrière la brune j’aperçois le même petit garçon que tout à l’heure, qui la regarde comme si elle brillait de mille feux. « Ils sont adorables quand même ! » que je peux m’empêcher de relever.

: