Lexie a toujours été passionnée d’art, depuis aussi longtemps qu’elle s’en souvienne.
Et elle a beau avoir toujours voulu fuir au maximum les galas donnés par les différentes fortunes de la ville, y compris sa famille, elle s’est rendue de meilleure grâce à ceux dans lesquels étaient organisées des ventes aux enchères d’œuvres d’art.
Xénophobe, elle ne l’est pas pour un sou, et adore découvrir ce qui était étranger à sa connaissance, nouveau.
Invitée à découvrir des talents inédits pour les galas de ses proches, elle fouine dans de nombreux lieux pour y parvenir.
Entre petites galeries peu fréquentées ou réseaux sociaux, la brunette est à la recherche d’artistes dont elle pourrait aider à faire décoller la carrière, ceux qui valent le coup, lorsqu’elle clique sur le compte instagram d’un jeune qui fait le buzz.

« What the f*ck ?! »

Apparemment, ce n’est pas pour ses œuvres que son compte enregistre une affluence de visites, mais pour une photo de nude qu’il a postée.
La brunette s’attarde sur la photographie, contemple la marchandise, et se fait vaguement la réflexion qu’elle serait intéressée s’il n’avait pas l’air si jeune.
Kiffant ce qu’elle voit, Lexie poursuit l’exploration du compte de ce fameux Ces’Art.
En fouinant, elle découvre ce qu’elle était venue voir initialement : des œuvres issues de la création du jeune homme.
Regardant avec attention, elle apprécie le trait fin, précis, et le côté torturé et sombre qui semble ressortir des dessins.
Lexie n’attend pas plus longtemps avant d’écrire à l’artiste via le réseau social.
Elle se présente, explique le rôle qu’elle joue lors des galas de charité, sa volonté de faire découvrir à tous de nouveaux talents, sa nouvelle galerie qu’elle doit remplir.
Xanax, cocaïne, métamphétamine, elle cache évidemment cette partie-là des soirées, qui n’ont rien à faire dans cette conversation.
Intéressée par une rencontre, elle lui propose un lieu public, un café chic du centre-ville, pour qu’ils puissent faire connaissance.
Elle en profite pour lui demander de ramener plusieurs dessins et, s’il s’essaie à d’autres techniques que le crayon, d’en faire profiter le regard bleuté de la brunette.
Wow, il répond rapidement et accepte sans attendre la rencontre, fixée au lendemain après-midi.

Avec enthousiasme, la brunette rejoint le jeune homme dans le café, lui souriant en lui tendant la main.

« Lexie Walker, ravie de vous rencontrer ! »

Kidnappant la carte des boissons sur la table voisine, elle la parcourt rapidement.
En règle générale, elle prendrait un café, voire de l’alcool, vu l’heure avancée, mais se contente de découvrir toutes sortes de thés et de tisane depuis le début de sa grossesse surprise.
Ravie du choix proposé, elle repose prestement la carte, appelle le serveur pour commander, puis plonge son regard bleuté dans celui de Cesar.
La brunette a cinquante choses à lui dire, et cinquante questions à lui poser, mais elle a surtout très envie d’observer en vrai les dessins du jeune homme, voire de pouvoir en découvrir de nouveaux.

« En attendant notre commande, vous pourriez me montrer ce que vous avez apporté ? »

@Lexie Walker

2006

Aujourd’hui c’est le jour de noël, en d’autres termes c’est le jour préféré de Cesar. Comme tous les enfants cela fait déjà des semaines qu’il attend ce jour. Même si l’ambiance à la maison n’est pas toujours simple les aînés et Maritza font tout pour que la vie des plus petits soit paisible et pour qu’ils aient une enfance normale. Cesar, 5 ans a commandé un coffret à dessin, comprenant une ribambelle de feutres, de crayons et de palettes de peinture. Un coffret que la famille a décidé de lui offrir face à l’obsession que le petit semble éprouver pour l’art. Une passion qui avait été initiée par son frère aîné Rudy, lui même doué pour le dessin. Au réveil, Cesar se précipite au salon, il est encore tôt alors voyant que personne n’est levé il s’empresse d’aller réveiller sa mère. “Maman maman debout ! Le père noël est passé !” Maritza les yeux encore embués par le sommeil regarde le réveil : 7h. Il est encore tôt mais elle se lève avec le sourire parce qu’elle sait qu’elle a travaillé très dur pour pouvoir mettre des cadeaux au pied du sapin pour ses enfants. Pendant que sa mère se réveille Cesar s’empresse d’aller réveiller les autres, trop impatient de voir si ce qu’il a commandé se trouve sous le sapin. Une fois toute la famille réunie, le petit garçon cherche un cadeau où l’étiquette porterait son nom. Rudy lui tend un cadeau avec un petit sourire “C’est pour toi.” Cesar déchire l’emballage et quand il voit le coffret qu’il avait tend imaginé ses yeux s’illuminent. Il lève l’emballage du coffret et le montre fièrement aux autres. Le reste de la journée a été consacrée au test du coffret. Le petit garçon, un énorme sourire aux lèvres a passé une bonne partie de la journée avec Rudy à dessiner toutes sortes de choses : des paysages et des personnages imaginaires pour finir par un premier portrait de famille où chacun est représenté avec un grand sourire. C’est un des premiers souvenirs de Cesar mais c’est aussi un très beau souvenir, témoin d’une famille unie malgré les difficultés et du fait que les petites attentions peuvent créer de grandes joies.

***

28 février

C’est une journée classique aujourd’hui, une énième journée de boulot plus qu’ennuyante, le même repas du midi avec mes collègues qui racontent encore et toujours les mêmes histoires. Je mange mon sandwich en écoutant leurs blagues qui ne font rire qu’eux et j’en profite pour scroller discrètement sur insta pendant qu’ils ne font pas attention à moi, trop absorbés par leur discussion. Mon doigt fait défiler les publications, je m’arrête sur quelques publications pour les liker mais il n’y a rien de transcendant sur mon fil d’actualité aujourd’hui. Et puis il y a cette notification qui apparaît “nouveau message privé”. Curieux je l’ouvre et là je tombe des nues. C’est un message d’une certaine Mme Walker qui possède un galerie et qui est très intéressée par mon travail. Elle souhaite me rencontrer pour potentiellement m’intégrer à l’exposition qu’elle est en train de préparer. Joder de mierda. Je n’en reviens pas, c'est une excellente nouvelle. Mes collègues ont bien dû remarquer que je faisais une tête bizarre puisqu’ils me demandent “Il t’arrive quoi Gutiérrez ?” Un énorme sourire se forme sur mon visage et je réponds “Rien rien”. Je n’ai pas envie de leur parler de ça, de leur parler de mes créations, d’instagram, ils ne comprendraient pas et je n’ai pas envie de leur parler de ça. Je suis pas le genre de personne qui partage sa vie privée au travail. Enfin, c’est le genre de nouvelles que j’attendais depuis toujours. Je sais que ce n’est qu’une petite exposition, que ce n’est pas une proposition faite par une galerie de renommée internationale mais il faut un début à tout. C’est ma chance et je compte bien la saisir. Je réponds dans la foulée au message en remerciant Mme Walker et en acceptant avec grand plaisir une rencontre très prochainement.

Le grand jour est arrivé et bien que je ne sois pas de nature anxieuse je dois avouer que lorsque je marche en direction du café j’ai un peu le trac. C’est la première fois que je reçois une proposition comme ça et je n’ai pa envie de passer à côté. J’essaie de me dire que je peux le faire, que d’habitude je m’en sors bien. J’ai toujours eu le contact facile, de l’assurance et un petit sourire charmeur alors je respire un grand coup et je pousse la porte du café. Je suis un Gutiérrez, je n’ai peur de rien. Je repère une femme seule dans un coin du café et je reconnais son visage, c’est elle. « Lexie Walker, ravie de vous rencontrer ! » Je m’approche et je sors mon plus beau sourire quand j’arrive près d’elle. “Mme Walker, enchanté, Cesar Gutiérrez !” Elle emprunte la carte des boissons à la table d’à côté et je n’ai pas besoin de regarder très longtemps pour savoir de quoi j’ai envie : un café, bien corsé et surtout sans sucre. Une fois le serveur parti, elle me fixe et j’ai l’impression d’être scanné, observé dans les moindres détails. « En attendant notre commande, vous pourriez me montrer ce que vous avez apporté ? » Je hoche la tête, elle ne perd pas de temps et j’aime qu’elle veuille aller droit au but. J’attrape la chemise que j’ai emporté avec moi et je la pose sur la table. “Bien sûr, j’ai amené quelques dessins.” J’ouvre la chemise et j’en sélectionne quelques uns pendant que je la remercie. “Je vous remercie de m’offrir une opportunité comme celle-là, je suis très touché.” Bien sûr c’est un peu pour la flatter mais c’est très sincère, c’est la première fois -après Auden- que quelqu’un reconnait que ce que je fais est intéressant et c’est très précieux pour moi. “Pour présenter un peu ce que je fais, j’ai rassemblé dans cette chemise plusieurs styles, les plus anciens étant ceux-ci” Je lui montre des portraits plus réalistes, plus colorés. “Et voici ce que j’ai fait plus récemment.” J’exhibe des dessins plus sombres et plus abstraits mais qui sont plus originaux. “Qu’est-ce qui vous a séduit dans ce je fais ? Vous avez des préférences ?” Je suis sincèrement curieux de savoir pourquoi mon profil a attiré son regard et l’a poussé à me contacter. Je sais que depuis que mon nude a fuité mon nombre d’abonnés a augmenté et j’espère surtout qu’elle n’a pas entendu parler de moi comme ça.

La brunette se présente à l’artiste, qui lui rend la pareille.

« Mme Walker, enchanté, Cesar Gutiérrez ! »

Elle ne peut s’empêcher de grimacer, et précise rapidement.

« Lexie ! »

Mme Walker, c’est Mary, sa mère, une femme qu’elle n’aime pas et qui ne l’aime, une femme qui n’a jamais voulu d’enfants et qui, du coup, ne s’est jamais occupée des trois qu’elle a mis au monde pour faire plaisir à son mari. Nul besoin de préciser que la jeune femme n’a aucune envie d’être associée à sa mère.
Après qu’ils aient passé commande, Lexie ayant opté pour un thé à la menthe, sa nouvelle boisson favorite (faute de mieux), elle va droit au but et demande à Cesar ce qu’il a ramené, remarquant avec plaisir la chemise cartonnée qu’il a emmené avec lui.

« Bien sûr, j’ai amené quelques dessins. Je vous remercie de m’offrir une opportunité comme celle-là, je suis très touché. »

La jeune femme hausse les épaules, mais en profite pour sauter sur l’occasion et expliquer davantage son projet.

« En réalité, je m’intéresse à l’art depuis très longtemps et, lors des ventes de charité organisées par ma famille, c’est moi qui sélectionne les œuvres. J’essaie au maximum de faire découvrir de nouveaux artistes, de leur laisser leur chance. »

Elle sourit, et on sent que c’est un sujet sur lequel elle est à l’aise et qui la passionne. Lorsqu’elle parle d’art, ou de projets artistiques, elle n’a rien d’une peste, ni d’une femme en proie à de nombreuses fragilités. C’est juste une amatrice d’art, qui essaie de faire au mieux.

« Mon frère m’a offert une galerie à Noël. Elle est encore vide, mais j’aimerais en faire l’inauguration d’ici un mois environ. J’ai déjà pris contact avec des artistes que je connais, mais je suis toujours à la recherche de nouveautés. »

Elle observe les gestes du jeune homme, le voit sélectionner quelques dessins, et son regard bleuté ne peut rester fixer sur l’artiste, déviant déjà vers les œuvres qu’elle a hâte de découvrir.

« Pour présenter un peu ce que je fais, j’ai rassemblé dans une chemise plusieurs styles. Les plus anciens étant ceux-ci … Et voici ce que j’ai fait plus récemment. »

La brunette détaille les dessins qu’elle a sous les yeux, les prend délicatement en main pour les rapprocher d'elle, puis à nouveau les éloigner. Elle aime le réalisme, la fidélité, des dessins en couleur. Mais à titre personnel, elle a clairement un faible pour les œuvres plus sombres.

« Et vous faites uniquement des œuvres en noir et blanc un peu plus abstraites, maintenant, ou vous faites encore les deux ? »

Elle est curieuse de savoir ce qui a pu faire évoluer l’art du jeune homme, et s’il est capable de revenir en arrière, ou si son entrainement, ou peut-être son état d’esprit et sa vie, ont impacté irrémédiablement son coup de crayon.

« Qu’est-ce qui vous a séduite dans ce que je fais ? Vous avez des préférences ? »

Elle détache son regard des dessins et plonge des yeux bleus amusés dans ceux de Cesar. Un grand sourire qu’elle n’arrive pas à réprimer prend place sur son visage, alors qu’elle détaille le jeune artiste de haut en bas, sans gêne.

« Disons que sur votre compte instagram, on est d’abord séduit par autre chose. »

Elle rit, ne le draguera pas pourtant : il est trop jeune pour elle, et elle est bien trop enceinte, et pense bien trop à un boxeur, pour être intéressée.
Elle redevient sérieuse alors que son doigt montre les œuvres les plus récentes.

« J’ai un faible pour celles-ci, sans hésiter. J’aime le noir et blanc, en règle générale, également dans la peinture ou les photographies. J’aime votre côté sombre, j’aime que l’œuvre questionne, qu’en la regardant, on se demande ce que telle ou telle chose signifie, ou ce qu’il va se passer, ou encore qu’on invente une histoire. »

Chez elle, elle avait plusieurs tableaux dans son salon, et sur l’un d’eux, on voyait une barque flotter sur l’eau, au milieu d’un lac entouré de montagnes, une brume épaisse commençant à recouvrir l’endroit. Elle s’était déjà interrogée mille fois sur cette barque : comment était-elle arrivée là ? Y avait-il eu quelqu’un dedans ? Elle voulait être captivée.

« J’aime la finesse et la précision de votre trait. Vous avez pris des cours ? »

@Lexie Walker

J’arrive au café et je m’empresse de me présenter à la mystérieuse Madame Walker. « Lexie ! » A la tête qu’elle fait je sens bien que j’ai fait une boulette. Bon ce sera Lexie la prochaine fois, tant pis. Elle rentre tout de suite dans le vif du sujet, juste après le départ du serveur qui vient de prendre notre commande, en me demandant ce que j’ai apporté. Je me confonds en remerciements et je sors la chemise que je tenais sous le bras. Je l’ouvre et sélectionne quelques dessins pour illustrer ce que je lui explique. Je suis également curieux, je me demande ce qui lui a tapé dans l'œil dans mes œuvres. « En réalité, je m’intéresse à l’art depuis très longtemps et, lors des ventes de charité organisées par ma famille, c’est moi qui sélectionne les œuvres. J’essaie au maximum de faire découvrir de nouveaux artistes, de leur laisser leur chance. » Je la vois sourire  et je me dis que ça a l’air sincère, elle apprécie réellement l’art. J’aurais accepté son offre d’être exposé même si elle n’avait pas aimé l’art et si elle considérait ça comme des objets de décoration, parce que c’était toujours une occasion de gagner en visibilité. Mais de me dire que c’est une vraie passionnée c’est encore mieux. « Mon frère m’a offert une galerie à Noël. Elle est encore vide, mais j’aimerais en faire l’inauguration d’ici un mois environ. J’ai déjà pris contact avec des artistes que je connais, mais je suis toujours à la recherche de nouveautés. » Je dois retenir un petit sourire, on a vraiment pas le même genre de vie. Je m’en doutais mais d’entendre que son cadeau de noël est une galerie ça me fait me dire instantanément “dure vie d’être riche”, les noëls chez les Gutiérrez n’ont pas la même saveur. Quoique, cette année Sergio nous a bien offerts une maison, par pur altruisme bien évidemment. « Et vous faites uniquement des œuvres en noir et blanc un peu plus abstraites, maintenant, ou vous faites encore les deux ? » Je ne sais pas trop comment répondre à sa question. Oui je suis dans ce style là en très grande majorité, pour ne pas dire totalement. Dès que j’essaie de faire quelque chose d’autre, de plus coloré ou plus réaliste je trouve ça sans intérêt et je recommence tout. Il n’y qu’à la galerie avec Auden où j’essaie de faire un effort.  “En ce moment je suis plutôt sur des œuvres dans ce style là. Mais je ne suis pas fermé à d’autres genres, ça dépend un petit peu de mon inspiration. Et ça dépend de ce qui vous intéresse le plus dans mes productions.” Je fais une réponse un peu passe partout, je m’adapterais à ce qu’elle préfère, je ne vais pas me fermer des portes par fierté en refusant de diversifier mon style si c’est ce qu’elle veut. Je lui demande ce qui l’a séduite dans ce que je fais. « Disons que sur votre compte instagram, on est d’abord séduit par autre chose. » Je ne m’attendais pas à une réponse comme ça et je comprends très bien à quoi elle fait référence. J’essaie de garder une poker face et de ne pas rougir mais ce n’est pas évident, c’est extrêmement gênant qu’elle le sache. “Oh euh.” Quel cauchemar cette photo, je sens que cette histoire me suivra pendant un moment encore. Mais ça a l’air de la faire rire, et visiblement ça ne l’a pas repoussée donc c’est le principal. « J’ai un faible pour celles-ci, sans hésiter. J’aime le noir et blanc, en règle générale, également dans la peinture ou les photographies. J’aime votre côté sombre, j’aime que l’œuvre questionne, qu’en la regardant, on se demande ce que telle ou telle chose signifie, ou ce qu’il va se passer, ou encore qu’on invente une histoire. » Je hoche la tête pendant qu’elle m’explique ce qu’elle préfère, je suis tout à fait d’accord avec ce qu’elle m’explique.“Je suis ravi que vous appréciez. C’est assez sombre et je sais que ça ne plait pas à tout le monde. Mais je trouve que ça laisse l’interprétation de l’oeuvre plus libre qu’une peinture réaliste.” Je pense à Auden qui m’a très clairement fait comprendre que je ne devais pas me bloquer dans un style comme ça. Pour l’instant c’est une bonne surprise, elle est intéressée par l’art, plutôt sympa pour quelqu’un qui reçoit une galerie en cadeau de noël. « J’aime la finesse et la précision de votre trait. Vous avez pris des cours ? » J’aimerais pouvoir dire que je me suis construit entièrement seul mais l’aide d’Auden depuis quelques mois est précieuse. J’apprends beaucoup avec lui et je pense que ça se ressent dans mon travail. “Merci beaucoup. J’ai appris en autodidacte mais je suis depuis quelques mois des cours à la galerie d’Auden Williams, je ne sais pas si son nom vous dit quelque chose.”

Lexie interroge le jeune artiste face à elle sur son style et ses préférences, alors qu’il lui présente deux types d’œuvres différentes.

« En ce moment je suis plutôt sur des œuvres dans ce style là. Mais je ne suis pas fermé à d’autres genres, ça dépend un petit peu de mon inspiration. Et ça dépend de ce qui vous intéresse le plus dans mes productions. »

Elle penche la tête sur le côté en haussant un sourcil, surprise. Elle ne s’attendait pas à cette réponse qui, finalement, la fait sourire. Ce n’est sûrement pas à elle de décider ce qu’il doit dessiner. C’est son art, à lui, ses œuvres, et elle n’est là que pour lui donner une visibilité supplémentaire, en plus de son compte Instagram. Pourtant, elle a l’impression qu’il marche sur des œufs et cherche à lui plaire dans ses réponses, pour qu’elle accepte de l’exposer. La brunette a cependant déjà fait son choix, et sait qu’elle souhaite faire découvrir ses productions au grand public. Elle laisse échapper un petit rire.

« Ce n’est pas à moi de décider de ça. »

Elle secoue légèrement la tête, alors qu’un sourire amusé danse sur ses traits.

« Je ne suis pas là pour vous donner des ordres, et mon métier ne consiste pas à diriger une galerie. Je ne suis qu’une simple amatrice d’art, qui veut vous donner votre chance. Je n’ai aucun talent artistique, et pour être honnête, je ne connais pas le marché de l’art. Je n’ai aucune idée de ce qui peut se vendre le mieux. »

Elle hausse les épaules, légèrement désolée, si c’est ce qu’il attendait d’un tel rendez-vous.

« J’aime juste l’art, et j’ai mon avis, évidemment subjectif. Alors ça restera toujours votre choix. »

Elle reporte finalement son attention sur les dessins étalés sur la table, après avoir fait rougir le jeune artiste en mentionnant la photo qui a fait le buzz sur les réseaux sociaux.

« Je suis ravi que vous appréciez. C’est assez sombre et je sais que ça ne plait pas à tout le monde. Mais je trouve que ça laisse l’interprétation de l’œuvre plus libre qu’une peinture réaliste. »

Elle hoche la tête, rejoignant son point de vue. Elle n’a rien contre le réalisme, a d’ailleurs pas mal de photographies accrochées chez elle, mais elle aime aussi interpréter, imaginer. Une toile peut être comme une histoire, et raconter des choses.

« Merci beaucoup. J’ai appris en autodidacte mais je suis depuis quelques mois des cours à la galerie d’Auden Williams, je ne sais pas si son nom vous dit quelque chose. »

Un petit sourire se dessine sur le visage de la brunette alors qu’elle se retient de lever les yeux au ciel à l’évocation d’Auden. Elle aime ses œuvres, elle aime son côté franc et décalé. Et pourtant, elle a toujours cette impression qu’il est à deux doigts de franchir la ligne, lors des événements auxquels elle l’a croisé. Elle se sent aussi jugée, alors qu’il lui semble qu’il la considère comme une petite bourge bien élevée qu’elle n’est pas. Alors elle se contente d’une réponse neutre.

« Oui, très bien. Auden a déjà donné des œuvres lors d’un gala de charité. Un excellent artiste. Vous devez apprendre plein de choses. »

Elle lui sourit puis remercie le serveur qui ramène leur boisson, soufflant doucement sur son thé.

« Je commence à préparer l’inauguration de ma galerie. Est-ce que vous accepteriez d’y exposer des dessins et de les mettre en vente ? »

Parce que le but est là, faire découvrir des artistes et leur permettre de vivre de leur travail, alors que rares sont les professionnels dans les jeunes gens qu’elle expose.

@Lexie Walker

Assis en face de Lexie je l’écoute me parler un peu de son projet de galerie. Je hoche la tête au fur à mesure de ses explications et je dois avouer que je tique un petit peu quand elle m’explique que cette galerie est un cadeau de noël. C’est donc à ça que noël ressemble chez les riches, ça fait rêver. Je suis un peu déçue qu’elle soit une totale amatrice mais le point positif c’est qu’elle a l’air réellement passionnée par l’art. Alors je décide de lui laisser le bénéfice du doute, cette exposition sera peut-être une réussite en dépit de son manque d’expérience. Je ne peux pas non plus cracher sur une opportunité pareille alors je hoche la tête et je réponds à sa question sur le style d’œuvre que je crée en ce moment. Je lui réponds que je ne suis fermé à rien et que tout dépendra de ses préférences. Le client est roi et il en va de même pour l’organisatrice d’une exposition. « Ce n’est pas à moi de décider de ça. » Je suis assez surpris par sa réponse, parce que si c’est bien à elle de décider ce qu’elle souhaite exposer. Mais je la laisse continuer, je veux voir où elle veut en venir et elle a bien sûr voir sur mon visage que j’étais désemparé par sa réponse puisqu’elle ajoute. « Je ne suis pas là pour vous donner des ordres, et mon métier ne consiste pas à diriger une galerie. Je ne suis qu’une simple amatrice d’art, qui veut vous donner votre chance. Je n’ai aucun talent artistique, et pour être honnête, je ne connais pas le marché de l’art. Je n’ai aucune idée de ce qui peut se vendre le mieux. » “Je ne connais pas le marché de l’art”, aïe. Je grince un peu des dents d’entendre autant d’amateurisme mais je camoufle ma déception par une expression souriante et très intéressée par ce qu’elle me raconte. « J’aime juste l’art, et j’ai mon avis, évidemment subjectif. Alors ça restera toujours votre choix. » Bon si elle n’y connaît rien il vaut peut-être mieux qu’elle laisse les artistes gérer la partie artistique. Je préfère cette liberté bien qu’elle soit un peu décevante à un résultat catastrophique par quelqu’un qui n’y connait rien. “Je vois. En tout cas c’est très bien pour les artistes que vous souhaitez exposer d’avoir cette liberté.” Elle me complimente ensuite sur mes oeuvres et se questionne sur le fait que je sois un autodidacte ou non. Je lui explique que je suis l’élève d’Auden depuis quelques mois mais que je me suis débrouillé seul le reste du temps. « Oui, très bien. Auden a déjà donné des œuvres lors d’un gala de charité. Un excellent artiste. Vous devez apprendre plein de choses. » Auden généreux ? Alors ça c’est une surprise. “J’apprends beaucoup oui, je suis très content d’être son élève.” Finalement, me pointer à la galerie sur un coup de tête avec mon sac rempli de poireaux aura été la meilleure décision que j’ai prise l’année dernière. « Je commence à préparer l’inauguration de ma galerie. Est-ce que vous accepteriez d’y exposer des dessins et de les mettre en vente ? » Quand elle prononce le mot “vente” mes yeux doivent se mettre à briller. A la manière des personnages de dessins animés avec des dollars dans les yeux. Bien sûr si je peins ce n’est pas pour l’argent en premier. J’aime l’art, c’est ce qui me fait réellement vibrer mais les rêves et la passion n’ont jamais rempli un frigo. Alors l’argent rentre forcément dans l’équation puisque si je veux vivre de ma passion je vais avoir besoin de revenus plus élevés que ceux des commissions et de Patreon. “Ce serait avec grand plaisir. J’ai très envie de pouvoir montrer mon travail en dehors d’Instagram.” Je tiens à la remercier parce que même si c’est une totale amatrice totale, c’est bien la première à croire en moi et à me donner ma chance pour une exposition. “Etre exposé comme ça c’est un rêve qui se réalise donc c’est un grand oui de ma part.” Je suis curieux de savoir avec combien d’artistes je devrais partager l’exposition. Un jour mon nom sera le seul sur l’affiche et là ce sera un grand jour. “Combien d’artistes seront présents sur l’exposition ?”

Lexie explique à Cesar qu’il a carte blanche pour choisir l’orientation de son talent. Si la brunette choisira ensuite, parmi la palette proposée, ceux qu’elle préfère, c’est à lui de savoir où il veut aller en terme de créativité. Et le jeune homme a beau faire de son mieux pour cacher sa déception, elle la lit sur son visage, et l’entend au son de sa voix.

« Je vois. En tout cas c’est très bien pour les articles que vous souhaitez exposer d’avoir cette liberté. »

Elle rit, ne peut s’en empêcher, alors qu’il fait tout pour la brosser dans le sens du poil, même si elle le hérisse. Elle se sent tout de même obligée de s’expliquer davantage.

« Je ne suis pas une professionnelle, c’est vrai, et je ne cherche pas à ce que la galerie soit rentable. Elle ne sera pas non plus ouverture toute la semaine, avec du personnel pour présenter vos œuvres et se charger d’éventuelles ventes. Ce que je vous propose, c’est une visibilité autre que les réseaux sociaux. J’aimerais organiser ponctuellement des soirées pour présenter des jeunes artistes et leur mettre le pied à l’étrier. Lors de ces événements, vous, comme d’autres, pourront montrer leurs œuvres, faire si possible des ventes ce soir-là, ou au moins vous faire connaître d’amateurs d’art. »

Elle hausse les épaules, buvant une gorgée du thé qu’on lui a apporté.

« Si cela ne vous convient pas, vous pouvez passer votre chemin. Il y a des tas d’autres jeunes artistes qui seraient intéressés par une telle opportunité. Car je sais qu’il y aura du monde, grâce à mon carnet d’adresses bien fourni. »

Elle replonge son attention sur les dessins que Cesar a ramené, prenant délicatement les feuilles dans ses mains pour observer le trait de crayon du jeune homme.

« Je peux comprendre que ce ne soit pas forcément ce à quoi vous vous attendiez. Alors prenez le temps de réfléchir, si vous en avez besoin. »

Parce qu’elle a beau ne pas viser la rentabilité, Lexie veut que la soirée soit une réussite, et elle exige la perfection. Si Cesar s’engage à faire partie de cette aventure, il devra s’investir à 100 % et faire preuve de motivation. La brunette a donc besoin de savoir qu’il adhère au projet avant de pouvoir poursuivre avec lui. Et s’il semble avoir envie d’être exposé, il n’est peut-être pas prêt à vouloir le faire à n’importe quelles conditions.

« Combien d’artistes seront présents sur l’exposition ? »

Elle hausse les épaules.

« Trois ? Quatre ? Vous êtes le deuxième que je démarche, j’ai encore d’autres rendez-vous à honorer. Il y aura évidemment d’autres soirées, et je ne souhaite pas que les invités soient noyés sous des tonnes d’œuvres d’art aux styles fondamentalement différents. Je préfère limiter le nombre d’artistes, et exposer plusieurs de vos dessins ou peintures. »

Cette galerie, c’est un rêve qui devient réalité, une passion pour l’art qui devient plus concrète, au-delà de recruter les artistes pour le gala de charité annuel des Walker. Alors elle s’y investira corps et âmes, et fera tout pour que ça marche, et que les artistes ne soient pas déçus. Et elle ne laissera quiconque, même pas un jeune dessinateur ambitieux, rendre cette expérience désagréable. Lexie finit sa tasse et plonge un regard ferme dans celui de Cesar.

« La balle est dans votre camp. Vous avez mon numéro, je vous laisse me rappeler quand vous serez certain de vouloir participer à cette aventure. »

La brunette rassemble ses affaires, laisse un gros billet sur la table puis quitte le café avec un dernier sourire pour l’artiste, espérant que Cesar la recontacte. Elle pensait que son projet susciterait bien plus d’enthousiasme, et beaucoup moins de méfiance. Et même si Angus avait, de son côté, était emballé dès le début, il était son ami, et elle n’était pas certaine de son objectivité. Lexie ne se laisserait cependant pas démoraliser par une entrevue mitigée.